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MANDRAGORE
MANDRAGORE

MANDRAGORE

Les constituants de la mandragore (Mandragora officinarum L.; solanacées) la rapprochent beaucoup des solanacées dites vireuses (belladone, jusquiame, stramoine). Comme ces dernières, la mandragore renferme le trio d’alcaloïdes, atropine, hyoscyamine, hyoscine, auxquels s’adjoignent diverses autres substances, surtout dans la racine. Celle-ci, pivotante, allongée (jusqu’à 50 ou 60 cm), présente un aspect charnu, blanchâtre, mais elle est assez souvent bifurquée et rappelle alors vaguement un corps humain réduit au tronc et aux jambes. On employait déjà la mandragore dans l’Égypte ancienne. Les hippocratiques connaissaient ses effets sédatifs. Au XVIIIe siècle, elle était encore usitée, surtout à l’extérieur, comme résolutive et analgésique (tumeurs, douleurs rhumatismales, entre autres). On la croyait aussi aphrodisiaque. Rarement employée de nos jours, mais pouvant être substituée à la jusquiame, la mandragore garde un renom maléfique, écho des pratiques macabres qu’elle a inspirées au long des siècles.

Les Paléolithiques voyaient dans certaines formes rocheuses des ébauches d’animaux à naître de la Terre-Mère et les complétaient dans un but magique (ainsi à Pech-Merle, Lot). De même, les sorciers des temps historiques ont considéré la racine anthropomorphe (et délétère, narcotique, donc douée de «pouvoirs») de la mandragore comme une sorte d’embryon d’homme qui pouvait être amené à la vie par des pratiques appropriées. Le rituel de magie noire mis en œuvre, où le sexe et la mort tiennent une grande place, procède des mêmes pulsions profondes qui, de nos jours, ont fait naître Frankenstein. La «bonne» mandragore, souvent appelée au Moyen Âge «mandegloire» ou «main-de-gloire», pousse sous un gibet. C’est le fruit de la fécondation de la terre par la semence d’un pendu vierge (analogie avec les anciens rites printaniers d’accouplement avec la Terre). On l’arrache avec d’infinies précautions, car le cri qu’elle pousse alors est mortel. On l’élève dans un morceau de drap mortuaire. Quand elle a pris vie symbolique, on la porte sur soi et elle assure puissance et richesse, réalise les souhaits, fait découvrir les trésors. Comme le monstre du cinéma fantastique, c’est l’esclave absolu qui n’a d’autre vie que celle qu’on lui a insufflée. Sorcier ou «savant», celui qui fabrique la mandragore altère sérieusement les prérogatives du Créateur. La mandragore est un archétype toujours vivace...

mandragore [ mɑ̃dragɔr ] n. f.
• 1268; madeglore fin XIIe; lat. mandragoras, mot gr.
1Plante (solanacées) aux propriétés mydriatiques, dont la racine fourchue comparée à une forme humaine passait pour avoir des vertus magiques.
2Racine de mandragore. La mandragore servait autrefois de talisman.

mandragore nom féminin (latin mandragora, du grec mandragoras) Plante (solanacée) des régions chaudes, à la tige rudimentaire, à la racine charnue et bifurquée, rappelant un corps humain, ce qui l'a rendue célèbre comme objet de légende. (Elle possède de grandes feuilles pétiolées, des fleurs très colorées réunies sur des hampes. Plante médicinale aux propriétés mydriatiques, elle contient les mêmes alcaloïdes que la belladone : hyoscyamine et scopolamine.)

mandragore
n. f. Plante (genre Mandragora, Fam. solanacées) dont la racine, qui évoque une silhouette humaine, possède des propriétés narcotiques et purgatives.

⇒MANDRAGORE, subst. fém.
BOT. Plante de la famille des Solanacées qui pousse dans les pays méditerranéens, caractérisée par de larges feuilles (se détachant du collet de la racine), par une fleur qui produit une baie, par une racine charnue, simple ou fourchue, ressemblant au corps humain, ce qui lui conférait autrefois une valeur magique, et qui est douée de propriétés sédatives, narcotiques, stupéfiantes et aphrodisiaques. Non loin de la source et de l'arbre, cachée sous un coudrier, une mandragore chantait. Toutes les magies rustiques étaient réunies dans ce petit coin de terre (A. FRANCE, Vie littér., 1891, p. 246). Sire Tristan, croyez-vous que nous sommes ici une suffisante collection de mandragores, de basilics et de turquoises, pour composer un philtre d'amour efficace? (BARRÈS, Jardin Oronte, 1922, p. 51). V. campanuliforme ex. de Nodier (rem. s.v. campanule):
♦ On croyait, avant les progrès immenses qu'a faits de nos jours la médecine philosophique et rationnelle, que la mandragore formait des cris plaintifs quand on l'arrachait de la terre, et c'est pour cela qu'il était recommandé à ceux qui tentaient cette périlleuse opération de se boucher exactement les oreilles pour n'être pas attendris...
NODIER, Fée Miettes, 1831, p. 183.
[P. allus. à la légende d'après laquelle la mandragore naît du sperme d'un pendu et pousse sous les gibets] Une mandragore, racine à figure humaine née d'un pendu (COCTEAU, Crit. indir., 1932, p. 114).
P. métaph. Villemain, mandragore difforme s'ébréchant les dents sur un tombeau (BAUDEL., Art romant., L'Esprit et le style de M. Villemain, 1867, p. 588).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1121-34 mandragora (Ph. DE THAON, Bestiaire, 1569 ds T.-L.); ca 1270 mandragore (BRUNET LATIN, Trésor, éd. F. J. Carmody, I, 199, 5, p. 170); 2. a) fin XIIe s. mandegloire (Flore et Blancheflor, éd. J. L. Leclanche, 244); ca 1436 maindegloire (Gloss. de Salins ds GDF.); b) 1752 main de gloire «main desséchée d'un pendu dont se servaient les voleurs pour paralyser leurs victimes» (Trév.). 1 empr. au lat. mandragoras tiré du gr. ; 2 issu du lat. avec maintien de l'accentuation gr. et altération par étymol. populaire. Fréq. abs. littér.:103. Bbg. JORET (Ch.). Gloss. des n. de plantes. Romania. 1889, t. 18, p. 580. — SAIN. Sources t. 1 1972 [1925], p. 256.

mandragore [mɑ̃dʀagɔʀ] n. f.
ÉTYM. V. 1265; mandegloire, v. 1170 (altér. d'après main de gloire); lat. mandragoras, mot grec.
Plante (Solanacées) dont la racine fourchue ressemble vaguement à une petite poupée, et dont le fruit jaunâtre a une odeur et une saveur désagréables. || Mandragore officinale, aux propriétés narcotiques et purgatives. || Racine sculptée de mandragore servant autrefois de talisman et douée de vertus magiques. Main-de-gloire. || Propriétés aphrodisiaques et fécondatrices jadis attribuées à la mandragore (d'où, littér., la comédie de Machiavel, la Mandragore, dont La Fontaine a tiré un conte du même titre).
1 Je l'allai voir : il m'apprit cent secrets,
Entre autres un pour avoir géniture (…)
Cette recette est une médecine
Faite du jus de certaine racine
Ayant pour nom mandragore (…)
La Fontaine, Contes, III, II.
2 (…) la mandragore, plante chaude et aqueuse, qui se peut assimiler à l'être humain dont elle singe la ressemblance (…)
Huysmans, la Cathédrale, X.
tableau Noms de remèdes.

Encyclopédie Universelle. 2012.