ASHANTI
Les Ashanti (ou Asante) étaient, d’après les sources démographiques de 1960, plus de 1 100 000, vivant dans les régions centrales de la république du Gh na. Ils y ont imposé leur suprématie politique aux XVIIIe et XIXe siècles, et les contrecoups de leurs opérations militaires se sont fait sentir, par de multiples migrations, dans un vaste espace qui s’étend de la Côte-d’Ivoire au centre du Bénin.
Cette période de deux siècles, qui s’achève avec la conquête britannique, en 1895, est relativement bien connue. Au-delà, qu’il s’agisse des origines du peuple ashanti ou de l’histoire des royaumes antérieurs dans cette partie de l’Afrique, les données sont plus fragmentaires. Les Ashanti semblent apparaître brusquement dans l’histoire à la fin du XVIIe siècle. À cette époque, le royaume de Denkyéra exerçait son autorité sur une grande partie du Gh na méridional. Une révolte secoue des groupes jusque-là soumis: Osaï Tutu, qui en prend la direction, l’organise plus solidement, fonde la ville de Kumasi, au nord-est du Denkyéra, et en fait le centre d’une nouvelle puissance vers 1695.
Le royaume Ashanti
La vocation guerrière du royaume Ashanti se manifeste immédiatement. Au cours des quelque trente années du règne d’Osaï Tutu, plusieurs expéditions victorieuses sont menées contre les royaumes de Doma, de Denkyéra et des Akim. À la mort du fondateur, vers 1731, un conflit de succession entre deux de ses neveux faillit mettre en cause l’œuvre accomplie. Finalement, les partisans du prétendant vaincu émigrèrent vers l’ouest où ils fondèrent le royaume Baoulé, et le jeune État ashanti survécut, poursuivant, sous le règne d’Apoku Waré, son action militaire, en particulier contre les Akim et les Akwapim. L’apogée de la puissance ashanti se situe dans la première moitié du XIXe siècle, en particulier sous le règne d’Osaï Kwamina (1800-1824). Celui-ci accentue l’expansion vers la côte, soumettant une grande partie du pays Fanti, et s’attaque aux peuples du Nord, conquérant le royaume de Gonja et imposant aux Dagomba vaincus un tribut en esclaves. À l’est, il entre en contact avec le royaume du Dahomey, avec lequel il entretiendra pendant un certain temps des relations diplomatiques.
Mais déjà a commencé l’affrontement avec les Britanniques. Ceux-ci ont pris le relais des Portugais et des Hollandais sur la côte, limitant, au cours de la période suivante, les possibilités d’initiative des Ashanti. Le royaume Ashanti constituait l’arrière-pays de la région que les Européens avaient, dès la fin du XVe siècle, nommée Côte-de-l’Or. Depuis cette époque, l’or étant échangé dans les forts de la côte, d’abord contre des esclaves (en particulier dans le royaume du Bénin), puis contre des armes, des étoffes, de l’alcool (quand la traite des esclaves fut plus systématiquement dirigée vers l’Amérique). Jusqu’au début du XIXe siècle, les Ashanti ne participaient à ces échanges que par l’intermédiaire des Fanti.
Les contacts directs avec les Européens datent seulement de cette époque. Le premier envoyé britannique reçu à la cour de Kumasi, T. E. Bowdich, le fut sous le règne d’Osaï Kwamina. De cette visite et de celles qui suivirent, l’image d’un pays de l’or et d’une fabuleuse richesse sortit renforcée. Cependant, la politique britannique ne fut pas d’abord de conquête: le contrôle de la région côtière paraissait suffisant, les relations avec l’intérieur devant être purement commerciales. Mais, après 1850, les conflits avec les Ashanti se multiplièrent, aboutissant aux deux guerres de 1873-1874 et de 1895: Kumasi est occupée, et le roi déporté en 1896.
Le particularisme ashanti demeure: en 1935, la «Confédération ashanti» sera solennellement restaurée, et dans les années qui suivront l’indépendance du Ghana, proclamée en 1956, les Ashanti lutteront contre une conception unitaire de l’État.
Société et civilisation
La puissance ashanti était fondée sur une organisation politique fort souple, fédérale en quelque sorte. Chaque province, chaque district reproduit l’image de l’État à plus petite échelle, et dispose d’une grande autonomie. Les tendances à la sécession ont dû à plusieurs reprises être contenues par la force.
L’unité de l’ensemble politique s’exprime avant tout dans l’ordre militaire: l’asantéhéné, le roi, peut faire appel aux forces de toutes les provinces. L’unité se base d’ailleurs sur des croyances religieuses communes. Le fondateur du royaume, Osaï Tutu, reçut du ciel, brutalement déchiré au cours d’un orage, le siège d’or, garant de sa puissance; celui-ci devint le reposoir des âmes des ancêtres royaux et de celles du peuple ashanti tout entier, le symbole de l’unité du pays et de la permanence de l’État, réaffirmées périodiquement au cours des rituels qui lui sont consacrés. Le siège d’or est au sommet d’une hiérarchie de sièges, descendant jusqu’à ceux qui symbolisent les ancêtres des plus petits groupes familiaux.
Les Ashanti ont élaboré une civilisation raffinée, dont témoigne un art très riche. L’or et le bronze dominent, fondus à cire perdue, martelés ou repoussés, ou modelés en minces feuilles sur des bois sculptés. Bijoux et masques d’or, récipients rituels et objets décoratifs en bronze en sont les pièces marquantes. Les plus célèbres objets de bronze sont les poids à peser la poudre d’or, plaques à décoration géométrique, rondes-bosses représentant des animaux, le décor de la vie quotidienne, des personnages.
Des influences fort diverses se sont sans doute très anciennement exercées sur l’art et la civilisation des Ashanti, bien avant la fondation du royaume. On a pensé à l’Égypte à propos de curieuses «poupées» de bois, charmes de fécondité, dont la forme rappelle celle de miroirs égyptiens. Le système pondéral très complexe qui commande les poids à peser l’or est proche de certains systèmes de l’Inde du Sud. La décoration des récipients rituels déposés dans les tombes évoque l’art hispano-musulman. On ne peut préciser le cheminement de ces influences, ni la date à laquelle elles ont agi. Sur le dernier point seulement – et sans que cela conduise à accepter une hypothèse d’E. Meyerowitz selon laquelle les Ashanti auraient fait partie de ces peuples que dispersa la chute de l’empire médiéval du Ghana – des apports venus de l’Afrique du Nord et relayés par les grandes puissances de l’or du Soudan occidental paraissent très probables.
Ashanti
rég. admin. du Ghana; 24 390 km²; 2 308 000 hab.; ch.-l. Kumasi.
Encyclopédie Universelle. 2012.