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altéré

altéré, ée
adj. Assoiffé.
Fig. être altéré de pouvoir: être avide de pouvoir.

I.
⇒ALTÉRÉ, ÉE, part. passé et adj.
I.— Part. passé de altérer1.
II.— Emploi adj.
A.— CHIM. [En parlant d'un corps, d'une substance] ,,Qui a subi une transformation, mais n'est pas encore complètement décomposé.`` (DUVAL 1959).
B.— Dénaturé, gâté (cf. Lar. encyclop., Lar. 3). Texte altéré (QUILLET 1965).
C.— [En parlant d'une pers. (ou d'une chose propre à l'homme)] Troublé, ému; qui a subi une modification à la suite d'une profonde émotion. Visage altéré, traits altérés (QUILLET 1965).
II.
⇒ALTÉRÉ, ÉE, part. passé, adj. et subst.
I.— Part. passé de altérer2.
II.— Emploi adj.
A.— [En parlant d'une pers., d'un animal, d'une chose concr.] Qui a soif. Homme altéré, bouche altérée (BESCH. 1845) :
1. Par certaines journées d'énergie, où le sentiment de son malheur accroissait son exaspération, il regardait Lisbeth, comme un voyageur altéré, qui, traversant une côte aride, doit regarder une eau saumâtre.
H. DE BALZAC, La Cousine Bette, 1846, p. 69.
2. Le vieux musicien surtout était altéré comme une citerne vide, il buvait sans cesse et demandait toujours à boire; tout à coup, il se leva, prit la bouteille à plein ventre, l'entra dans sa bouche jusqu'à moitié du goulot et la vida sans désemparer; ensuite il reprit sa place et se mit à rire.
M. DU CAMP, Le Nil, Égypte et Nubie, 1854, p. 118.
3. À d'énormes distances s'élevaient des palmiers épanouissant leur éventail poudreux près de quelque source souvent tarie, dont les chevaux altérés fouillaient la vase de leurs narines sanglantes.
T. GAUTIER, Le Roman de la momie, 1858, p. 339.
P. ext. [En parlant d'une plante] :
4. Donnez-leur donc l'essor. Que le jeune bouton
Espère le zéphire, et craigne l'aquilon;
À ce lys altéré versez l'eau qu'il implore :
...
J. DELILLE, L'Homme des champs, Quatrième chant, 1800, p. 129.
5. Des hommes travaillent autour des cotonniers altérés; de profondes crevasses entr'ouvrent la terre desséchée et soulevée par larges écailles qui craquent et se pulvérisent sous les pieds. Le Nil baisse chaque jour davantage; la chaleur est aiguë comme une brûlure.
M. DU CAMP, Le Nil, Égypte et Nubie, 1854, p. 260.
B.— Altéré de + subst. désignant un inanimé concr. ou abstr.
1. [En parlant d'un animal] Altéré de sang :
6. Souvent le chatpard, altéré de sang, qui était descendu des montagnes en amortissant sur les mousses discrètes son pas qui les foule à peine, en contenant son miaulement de tigre, en voilant ses yeux ardents qui brillent dans la nuit comme des lumières errantes...
Ch. NODIER, Trilby, 1822, pp. 132-133.
Par métaph. et souvent dans le lang. poét. [En parlant d'une pers.] :
7. Un Suisse vert-lézard caparaçonné d'or,
Qui, jaloux de servir les vertus de Madame,
Pour la première fois sut dégainer sa lame.
Comme tous les chasseurs, ce fat malencontreux
Des pieds de sa maîtresse était fort amoureux;
Ce fut donc comme un tigre altéré de carnage
Qu'il arrêta Prosper, et, contre tout usage,
Le jeta sans façon par la fenêtre, avant
De regarder au moins s'il faisait trop de vent.
T. DE BANVILLE, Les Cariatides, Les Baisers de pierre, 1842, pp. 57-58.
2. Au fig. Qui a un vif désir de, qui éprouve un grand besoin de :
8. Ainsi se passa pour moi cet été de solitude et de sécheresse d'âme. La compression de ma vie morale dans cette aridité et dans cet isolement, l'intensité de ma pensée creusant sans cesse en moi le vide de mon existence, les palpitations de mon cœur, brûlant sans aliment réel et se révoltant contre les dures privations d'air, de lumière et d'amour dont j'étais altéré, finirent par me mutiler, par me consumer jusque dans mon corps, et par me donner des langueurs, des spasmes, des abattements, des dégoûts de vivre, des envies de mourir que je pris pour des maladies du corps et qui n'étaient que la maladie de mon âme.
A. DE LAMARTINE, Les Confidences, Graziella, 1849, p. 373.
9. Mon souffle est altéré de ce trésor limpide...
Moi, seule en mon chemin et pleurante au milieu,
J'ai dit ce que jamais femme ne dit qu'à Dieu.
Comme un oiseau dont rien n'avait noué les ailes,
Prompte aux illusions, m'envolant après elles,
Facile à me créer des thèmes ravissants,
J'ai chanté comme vrais bien des bonheurs absents.
M. DESBORDES-VALMORE, Fragments, À madame A. Tastu, 1859, pp. 237-238.
III.— Emploi subst., rare
A.— Homme assoiffé :
10. Elle se dégagea enfin, troublée tout à coup :
— Non, Yann! ... Grand-mère Yvonne pourrait nous voir!
Mais lui, avec un sourire, chercha les lèvres de sa femme encore et les reprit bien vite entre les siennes, comme un altéré à qui on a enlevé sa coupe d'eau fraîche.
P. LOTI, Pêcheur d'Islande, 1886, p. 267.
B.— Vx. C'est un altéré, ,,en parlant d'un homme âpre au gain.`` (BESCH. 1845).
Rem. LITTRÉ précise que cette loc. a été usitée autrefois.
STAT. — Fréq. abs. litt. :984. Fréq. rel. litt. :XIXe s. : a) 2 521, b) 1 436; XXe s. : a) 819, b) 770.

Encyclopédie Universelle. 2012.