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TOXOPLASMOSE
TOXOPLASMOSE

Le nom de toxoplasme (toxon : arc) a été donné par Charles Nicolle, en 1908, à un protozoaire en forme de croissant qui infestait les Ctenodactylus gundi , rongeurs des zones désertiques tunisiennes, et provoquait leur mort lorsqu’ils étaient gardés en captivité à l’Institut Pasteur. Ce protozoaire fut ensuite retrouvé dans de très nombreuses espèces animales, et son pouvoir pathogène pour l’homme fut établi en 1940: le parasite provoque chez le nouveau-né une encéphalite nécrotique, alors que la mère qui l’a transmis à l’enfant est elle-même infectée, mais sans en souffrir.

Le cycle naturel et l’identité réelle de ce protozoaire sont restés mystérieux jusqu’en 1970, date à laquelle on démontra que le toxoplasme est, en fait, un stade évolutif d’une coccidie intestinale du chat: le mérozoïte de cette coccidie peut végéter par multiplication asexuée et survivre enkysté dans les tissus de nombreux hôtes non spécifiques. La toxoplasmose est l’ensemble des phénomènes pathologiques que ce parasite égaré provoque par sa multiplication dans les tissus.

Par ailleurs, cette connaissance de l’identité du toxoplasme a suggéré l’existence d’une évolution extra-intestinale pour d’autres espèces coccidiennes. Ainsi certains parasites, tels que les sarcosporidies, sont maintenant rattachés aux coccidies.

Cycle du toxoplasme et transmission

On connaît les grandes lignes du cycle naturel du parasite. L’oocyste, éliminé dans les matières fécales du chat, subit une maturation avec formation de sporocystes; à ce stade, il reste potentiellement virulent, au moins pendant plusieurs mois, dans le sol humide; il est capable d’infecter les Mammifères herbivores ou les Oiseaux qui l’ingèrent accidentellement en prenant leur nourriture sur le sol. Dans le tube digestif de ces animaux, le toxoplasme ne peut pas se multiplier sur le mode sexué, ni redevenir coccidie. Les éléments qui traversent la muqueuse intestinale sont ingérés par les macrophages et se multiplient sur le mode asexué (endogénie) dans leur cytoplasme. Ils se dispersent ainsi dans tout l’organisme par voie lymphatique et sanguine.

L’infection est, en général, bien supportée par l’hôte, car celui-ci s’immunise rapidement et freine la multiplication des parasites, qui vont s’enkyster dans certains tissus tels que le muscle et l’encéphale.

Ils y sont généralement bien tolérés, et restent vivants pendant des années sans grand dommage pour l’hôte immun; mais leur virulence potentielle demeure pour les carnivores qui ingéreront les tissus en question. S’il s’agit d’un chat, le toxoplasme subit une maturation sexuée dans son tube digestif, redevient coccidie, et donne des oocystes qui sont éliminés dans la nature. S’il s’agit d’un chien ou d’un autre animal, les toxoplasmes libérés de la viande parasitée ne subissent pas de maturation sexuée dans son intestin, mais ils passent dans la circulation, se multiplient, et s’enkystent de nouveau dans les tissus.

Le toxoplasme se comporte ainsi chez l’homme qui s’infecte surtout en mangeant de la viande dont la cuisson insuffisante n’a pas détruit les parasites, ou bien – dans de mauvaises conditions d’hygiène – en consommant des aliments souillés de terre. Le cycle sexué ne paraît pas possible dans l’intestin humain: l’homme n’a donc pas de rôle direct dans la contamination du sol, qui est liée seulement, dans l’état actuel des connaissances, au chat et à quelques autres félins. À ce propos, il faut remarquer que ce n’est pas tant le contact direct avec l’animal qui représente un danger de contagion, mais la souillure de la terre et des aliments par les matières fécales: danger direct si l’on consomme des fruits et des légumes mal lavés; ou danger indirect , mais sans doute plus important, dû à la viande des animaux de boucherie contaminés. Garder un chat au foyer est sans grand danger, à condition de veiller à le nourrir de viande bien cuite et de ne pas le laisser libre de chasser.

En résumé, il existe dans la nature deux réservoirs de virus: l’un tellurique, le sol contaminé par les oocystes; l’autre animal, la viande parasitée contenant des kystes. L’ingestion est le principal mode de transmission. L’infection qui en résulte est le plus souvent sans gravité, ou même tout à fait inapparente. Ces mécanismes de survie et de transmission, ainsi que l’extrême discrétion dans le pouvoir pathogène, se sont montrés remarquablement efficaces et ont permis au toxoplasme de parvenir à un succès biologique prodigieux: ce parasite est actuellement répandu dans le monde entier, et il existe en pratique chez toutes les espèces de Mammifères et d’Oiseaux.

Épidémiologie

Les techniques d’isolement du parasite, et surtout les méthodes immunologiques, ont permis de reconnaître cette quasi-omniprésence de la toxoplasmose. La prévalence de l’infection (ensemble des sujets qui sont, ou ont été, infectés) varie évidemment en fonction de l’espèce et du climat. Les animaux carnivores ou omnivores (chien, porc, oiseaux de basse-cour) sont particulièrement souvent infectés tandis que les herbivores – mouton excepté, ce qui s’explique encore mal – le sont moins.

Le climat intervient aussi, sans doute, par son influence sur la survie de l’oocyste qui supporte mal le gel et la dessication: la toxoplasmose est rare sous les climats très rigoureux et dans les régions désertiques.

Dans l’ensemble, les notions récentes sur le cycle du parasite rendent assez bien compte des différences observées dans la géographie de la toxoplasmose.

Chez l’homme, la prévalence de l’infection toxoplasmique est conditionnée par le climat, le mode de vie et les habitudes alimentaires. Elle est plus fréquente, d’une part, chez les populations des régions humides, chaudes ou tempérées, surtout si les conditions d’hygiène sont mauvaises (contamination par les oocystes), d’autre part, chez les peuples amateurs de viande, surtout s’ils la consomment peu cuite; la France est, de ce fait, le pays d’Europe occidentale où la prévalence de l’infection toxoplasmique humaine est de beaucoup la plus grande.

Voici ce que l’on observe dans la région parisienne: dès la fin de leur première année, quelques nourrissons ont déjà été contaminés, et ils en garderont les traces sérologiques très longtemps, toute la vie, semble-t-il. Au fur et à mesure qu’on étudie des couches d’âges, des individus en nombre de plus en plus grand se trouvent infectés et sont porteurs d’anticorps: à deux ans, 10 p. 100 des sujets; à sept ans, 50 p. 100; et, vers la trentaine, près de 90 p. 100. D’après cette progression, il est facile d’estimer le risque d’infection toxoplasmique entraîné par les mœurs alimentaires: les risques de contracter la toxoplasmose sont d’environ 7 p. 100 par an. Cela n’est évidemment qu’une moyenne, car le risque est beaucoup plus fort pour les amateurs de viande très saignante ou crue: chez des sujets consommant régulièrement chaque semaine deux côtelettes de mouton bien saignantes, les risques approchent 10 p. 100 par mois. En revanche, si la viande est toujours bien cuite, le risque d’infection est inférieur: environ 1 p. 100 par an en Grande-Bretagne, où seulement 20 à 40 p. 100 des adultes ont des réactions positives.

Les étapes de l’infection toxoplasmique et l’immunité contre le parasite

La plupart des toxoplasmoses restent inapparentes, ce qui représente un exemple d’équilibre parfait entre la virulence d’un micro-organisme et l’immunisation de l’hôte qui l’héberge. Tout d’abord, les toxoplasmes peuvent se multiplier dans les cellules de tous les organes; c’est ce qui se passe au stade initial de l’infection, le stade aigu de généralisation; puis les lymphocytes de l’hôte apprennent à reconnaître le toxoplasme comme un agent étranger à l’organisme, les réactions immunitaires (cellulaires et humorales) s’enchaînent, et des anticorps circulants sont produits (on peut les mettre en évidence par toutes les méthodes habituelles de la sérologie). Les anticorps se fixent sur la surface du parasite dès qu’il sort de la cellule où il s’est multiplié, et suscitent l’activité du complément, d’où destruction des toxoplasmes par lyse de leur membrane. En outre, de nouveaux lymphocytes spécialisés se forment; ceux-ci reconnaîtront désormais les antigènes toxoplasmiques chaque fois qu’ils en rencontreront, et réagiront en provoquant une réaction locale, du type hypersensibilité retardée, qui détruira les parasites et les cellules voisines. Cette immunité cellulaire constitue le facteur essentiel de la défense de l’organisme contre le parasite, car les anticorps circulants n’apportent, par eux-mêmes, qu’une protection partielle et insuffisante.

Chez l’hôte immunisé, le toxoplasme ne peut plus envahir de nouvelles cellules pour s’y multiplier. Il ne persiste plus que sous forme de kystes. Il y a donc deux étapes dans la toxoplasmose: un stade initial aigu de dissémination et de multiplication du parasite dans les cellules, qui dure tant que l’hôte n’est pas devenu résistant; un stade d’infection latente au cours duquel les parasites enkystés dans les tissus de l’hôte immun ne prolifèrent plus. Les kystes sont bien tolérés tant qu’ils ne sont pas reconnus comme des antigènes étrangers. Dans le cas contraire, il se produit à leur entour un foyer limité d’inflammation et de nécrose dans lequel les toxoplasmes sont détruits.

Normalement, ces différentes étapes de l’infection passent inaperçues, sauf en cas d’immunisation rendue défectueuse, par exemple par une autre maladie: chez le chien, la maladie de Carré peut être l’occasion d’observer une toxoplasmose grave associée; chez l’homme porteur de tumeur maligne, on voit des toxoplasmoses graves, mortelles, de même qu’au cours des traitements immunosuppresseurs, ou chez l’enfant agammaglobulinémique. Enfin, les conditions particulières de l’immunité au cours de la vie fœtale sont responsables de la gravité de la toxoplasmose transmise de la mère à l’enfant au cours de la grossesse. Ainsi, la toxoplasmose que l’on supporte normalement sans dommage peut, à l’occasion, provoquer des dégâts considérables chaque fois que le parasite est libre de proliférer dans les cellules du sujet qu’il parasite.

Toxoplasmose humaine

La toxoplasmose humaine est, en règle générale, une infection inapparente ou sans conséquence sérieuse. Les exceptions sont de deux ordres: des accidents sans gravité qui peuvent se manifester au cours des premiers stades de l’infestation, des accidents graves lorsque le toxoplasme touche le fœtus ou un sujet en déficit immunitaire.

– La toxoplasmose acquise bénigne. Le début de la maladie comporte parfois un syndrome infectieux avec de la fièvre, de la fatigue et des modifications de la formule leucocytaire qui rappellent, en moins marquées, celles de la mononucléose infectieuse. Ce type de toxoplasmose est assez rare.

La seule manifestation fréquente est l’augmentation de volume des ganglions lymphatiques (adénopathies) qui accompagne l’effort d’immunisation de l’organisme contre le parasite. Ces adénopathies sont souvent généralisées, mais elles prédominent dans le cou et dans la nuque. Leur persistance pourrait faire craindre une tumeur maligne: le diagnostic de toxoplasmose ganglionnaire est alors rassurant.

– La toxoplasmose acquise grave. Si le sujet s’immunise mal, la multiplication des parasites se poursuit longtemps, entraînant une infection sévère. Elle touche surtout les organes où le degré de l’immunité est physiologiquement faible, comme c’est notamment le cas du système nerveux central: l’encéphalite toxoplasmique est la plus fréquente des formes graves de la toxoplasmose observées au cours des déficits immunitaires acquis (sida).

– La toxoplasmose congénitale. Les conditions immunologiques particulières de la vie fœtale font que la toxoplasmose congénitale s’accompagne souvent de manifestations pathologiques sévères (hydrocéphalie, retards psychomoteurs, choriorétinite, etc.), conséquences surtout des lésions du système nerveux central et de ses dépendances; c’est d’ailleurs l’autopsie de nouveau-nés, morts d’encéphalite nécrotique, qui a révélé pour la première fois les toxoplasmes dans l’espèce humaine. Bien que ces cas soient dramatiques, il ne faut pas exagérer le danger de cette infection pour les femmes enceintes. En effet, d’une part, celles qui ont contracté la toxoplasmose avant la grossesse sont protégées: le parasite enkysté dans les tissus ne risque plus d’être transmis au fœtus. D’autre part, celles qui la contractent pendant la grossesse sont exposées, mais l’atteinte du fœtus est inconstante: dans plus de la moitié des cas, l’enfant échappe à l’infection. Enfin, même quand le fœtus est parasité, la toxoplasmose congénitale grave n’est pas l’éventualité la plus fréquente: au moins quatre fois sur cinq l’enfant naît normal, bien que porteur de toxoplasmes. Dans ce cas, on devrait cependant reconnaître l’infection latente afin de traiter le nouveau-né pendant les premiers mois critiques de son existence. Il est en effet souhaitable que le sujet garde le moins possible de kystes résiduels, ceux-ci étant en partie responsables de la toxoplasmose oculaire , conséquence tardive des infections congénitales méconnues.

toxoplasmose [ tɔksoplasmoz ] n. f.
• 1952; de toxoplasme et 2. -ose; cf. angl. toxoplasmosis (1934)
Méd. Maladie causée par les toxoplasmes, généralement bénigne, sauf chez la femme enceinte chez qui elle peut entraîner une embryopathie. Toxoplasmose congénitale.

toxoplasmose nom féminin Maladie parasitaire due à l'infestation par un protozoaire (parasite unicellulaire), le toxoplasme, ou Toxoplasma gondii, parasite de l'intestin du chat et de diverses autres espèces animales.

toxoplasmose
n. f. MED Maladie parasitaire, due à un protozoaire (Toxoplasma gondii), qui peut être responsable de malformations foetales lorsqu'elle est contractée au cours de la grossesse.

toxoplasmose [tɔksoplasmoz] n. f.
ÉTYM. XXe; de toxoplasme, et 2. -ose.
Méd. Parasitose des vertébrés, qui se manifeste chez l'homme par de la fièvre et des céphalées. || Toxoplasmose congénitale ou acquise.

Encyclopédie Universelle. 2012.