TRUMEAU
TRUMEAU
Partie d’un mur entre deux baies; on désigne aussi par «trumeau» ce qui sépare en deux lancettes les fenêtres hautes de la cathédrale de Chartres. Par extension, il s’applique presque exclusivement au support qui divise en deux la baie d’un portail. Conçu comme un étai vertical, le trumeau a surtout pour rôle de soutenir le linteau en son centre et d’éviter ainsi sa déformation, ou même sa rupture. Cet élément, dont le rôle architectonique est essentiel, est le plus souvent masqué soit par un relief sculpté comme au portail méridional de Moissac (XIIe s.), soit par une statue du Christ, de la Vierge à l’Enfant ou d’un saint martyr comme dans la plupart des portails gothiques.
À l’époque baroque ou rococo notamment, le terme trouve une application laïque dans le style décoratif pour désigner soit l’espace ornemental compris entre deux fenêtres d’un salon, soit le dessus des cheminées basses occupé par une grande glace comprise dans des boiseries chantournées ou peintes.
trumeau [ trymo ] n. m.
1 ♦ Vx Gras de la jambe. — (trumel 1423) Mod. Bouch. Jarret de bœuf. ⇒ gîte.
2 ♦ (1503; cf. l'évolution de sens de jambage) Partie d'un mur, d'une cloison comprise entre deux baies; panneau, revêtement (de menuiserie, de glace) qui l'occupe. Trumeau orné de moulures, de sujets décoratifs. — Par ext. Panneau de glace ou peinture ornant le dessus d'une cheminée.
♢ Archéol. Pilier qui supporte en son milieu le linteau d'un portail. Trumeau gothique sculpté.
● trumeau nom masculin (peut-être francique thrum, tronçon) Pan de mur entre deux baies rapprochées. Panneau de lambris, de peinture décorative ou de glace, plus haut que large, occupant l'espace entre deux fenêtres, le dessus d'une cheminée, etc. Pilier central séparant les baies d'un portail et soulageant le linteau. ● trumeau (synonymes) nom masculin (peut-être francique thrum, tronçon) Pan de mur entre deux baies rapprochées.
Synonymes :
- entrefenêtre
trumeau
n. m.
d1./d ARCHI Portion d'un mur comprise entre deux fenêtres.
|| Glace, panneau décoré qui occupe cet espace ou le dessus d'une porte.
d2./d Jarret de boeuf.
⇒TRUMEAU, subst. masc.
I. — Vx. Gras de la jambe. (Dict. XIXe et XXe s.).
— BOUCH. Jarret de bœuf. (Ds Gdes heures cuis. fr., Éluard-Valette, 1964, p. 252).
II. — BEAUX-ARTS
A. — 1. Espace compris entre deux portes, entre deux fenêtres; panneau, revêtement (de menuiserie, de glace, peinture ornementale, etc.) qui occupe cet espace. Les trumeaux des fenêtres, horriblement surchargés, se lézardaient en tous sens (MÉRIMÉE, Ét. arts Moy. Âge, 1870, p. 132).
2. Glace décorant le dessus d'une cheminée; panneau de bois sculpté, peinture ornementale au-dessus d'une telle glace. Trumeau orné de marqueterie; trumeau rococo. Au-dessus de la cheminée (...) s'élevait jusqu'au plafond un trumeau encadré par un fouillis de branchages, de nids de tourterelles et de canaris dorés (NERVAL, Fayolle, 1855, p. 44).
B. — Pilier, souvent sculpté ou masqué par une statue, qui soulage en son milieu le linteau d'un portail. Trumeau gothique sculpté. L'étude des façades (...) conduira à son tour, pour les plans, à certaines modifications des avant-corps, des entr'axes, des piliers, des trumeaux (ARNAUD, Archit. et constr., t. 1, 1931 p. 73).
III. — Pop., vieilli. (Vieux) trumeau. Personne âgée; en partic., vieille femme outrageusement fardée. « Avais-je raison, hier? Quels trumeaux!... » La pimpante Cécile prononçait à mi-voix cette parole irrespectueuse (...). Elle montrait du coin de l'œil un groupe de vieilles personnes (BOURGET, Drame, 1921, p. 110). La vue de tout ce petit monde laborieux [les étudiants] est fort plaisante pour un vieux trumeau comme moi (PROUST, Prisonn., 1922, p. 291).
Prononc. et Orth.:[]. Ac. 1740: trumeau ,,Quelques-uns disent trémeau`` (v. LITTRÉ ,,On a dit trémeau``); dep. 1762: trumeau. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1200 « mollet » (Garin le Loheren, éd. J. E. Vallerie, 6153); b) ca 1393 « jarret du bœuf » (Ménagier de Paris, éd. G. E. Brereton et J. M. Ferrier, p. 185, 7); 2. a) 2e moit. du XIIIe s. « pilier (d'un château) » (Gaufrey, 272 ds T.-L.); b) 1691 « partie du parapet terminé par les deux embrasures d'une batterie » (OZANAM d'apr. FEW t. 17, p. 402b: tremeau); c) 1875 « colonne, pilier qui supporte en son milieu le linteau d'une porte d'église » (VIOLLET); 3. a) 1676 « partie d'un mur située entre deux baies, entre deux ouvertures verticales » (FÉLIBIEN, p. 764); b) 1718 « panneau de glace recouvrant cet espace » (doc. ds HAVARD); c) 1743 « panneau de glace décorant une cheminée » (doc., ibid.); 1875 « peinture ornementale surplombant ce panneau » (GONCOURT, Journal, p. 1086); d) ) 1861 « demoiselle de comptoir, dans un caboulot » (Bouis-bouis, bastringues et caboulots de Paris, p. 159 ds KLEIN Vie paris., p. 88, note 1); 1868 « prostituée, vieille dévergondée » (VERLAINE, COPPÉE, Qui veut des merveilles? ds VERLAINE, Œuvres poét. complètes, éd. Y.-G. Le Dantec et J. Borel, p. 28); ) 1864 vieux trumeau « personne âgée » (Almanach des toqués ds LARCH. 1872, p. 232). Prob. dér., à l'aide du suff. -eau, d'une forme non att. trum, issue de l'a. b. frq. thrum « moignon ». Cf. l'a. h. all., m. h. all. drum « extrémité, bout », all. Trumm « gros morceau (de quelque chose) ». La présence du [y] dans le rad. permet de supposer que le mot est entré en gallo-rom. à une époque assez tardive, peut-être au VIIIe s., v. FEW t. 17, p. 404 a-b. Fréq. abs. littér.: 59. Bbg. Archit. 1972, p. 83. — MEIER (H.). Neue lat.-rom. Etymologien. Bonn, 1980, pp. 108-122. — QUEM. DDL t. 7, 21.
trumeau [tʀymo] n. m.
ÉTYM. XIVe; trumel, XIIe; probablt du francique thrum « morceau »; cf. all. Trumm « tronçon », angl. thrum « bout de fil ».
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1 Vx (jusqu'au XVIe). Gras de la jambe. — Mod. (bouch.). Jarret de bœuf.
2 (1503, in D. D. L.; cf. l'évol. du sens de jambage; var. trémeau, in Saint-Simon). Partie d'un mur, d'une cloison comprise entre deux ouvertures verticales (portes, croisées); panneau, revêtement (de menuiserie, de glace, etc) qui l'occupe. || Panneaux, trumeaux et dessus de porte (→ Peintre, cit. 1). || Trumeau orné de moulures, de marqueterie, de sujets décoratifs. || Trumeau baroque, rococo. || Trumeau en acajou.
1 Ainsi qu'un vieux trumeau dépeint et décloué
L'idylle aujourd'hui pend au grand plafond céleste.
Hugo, la Légende des siècles, XXXVI, XIX.
♦ (1676, Félibien). Panneau de glace décorant un dessus de cheminée; panneau décoratif servant de couronnement à une telle glace (→ Grisaille, cit. 1).
2 Au-dessus de cette glace était un trumeau, et les petits amours qui y étaient sculptés lui parurent autant de bons génies qui l'invitaient à se mirer.
A. de Musset, Nouvelles, « Margot », III.
3 (…) au-dessus de la cheminée en marbre blanc veiné, dessinée en arc d'amour, s'élevait jusqu'au plafond un trumeau encadré par un fouillis de branchages de nids de tourterelles et de canaris dorés, dans lequel se miraient deux grands bras en cuivre doré, chargés de bougies.
Nerval, le Marquis de Fayolle, I, V.
♦ Archéol. Pilier qui soulage en son milieu le linteau d'un portail. || Trumeau gothique sculpté. || La « Vierge dorée » du trumeau (de la cathédrale d'Amiens). → Hancher, cit. 5.
3 ☑ (1846, Baudelaire; par allus. au caractère vieillot, démodé, attribué aux trumeaux du XVIIIe; → ci-dessus, cit. Hugo). Fam. Vieux trumeau : vieille personne; spécialt, vieille femme fardée.
Encyclopédie Universelle. 2012.