CADASTRE
CADASTRE
On désigne du nom de cadastre à la fois l’ensemble des documents cadastraux établis en vue de l’assiette de l’impôt foncier, ou cadastre proprement dit, et le service administratif du cadastre, chargé des différents travaux cadastraux.
L’histoire de l’institution se confond avec l’histoire économique des peuples et son origine remonte à la plus haute antiquité, dès que les collectivités naissantes, pour faire face à leurs dépenses publiques, éprouvèrent le besoin de recenser la propriété foncière et d’en évaluer le revenu en vue d’opérer un prélèvement sur les produits de cette richesse. Les plus anciennes opérations de ce type se trouvent consignées sur une tablette chaldéenne qui permet de lire le plan coté, la superficie et la description d’une ville vers l’an 4000 avant J.-C. On trouve également trace de cadastre chez les Égyptiens, les Chinois, les Grecs et les Romains, qui l’introduisirent en Gaule. Pendant tout le Moyen Âge, de nombreux «livres terriers» sont établis sur le plan local, à partir des déclarations des propriétaires et non selon la technique rigoureuse de l’arpentage, qui reste exceptionnelle. L’Ancien Régime devait échouer à dresser le cadastre général du royaume, réclamé par les états généraux comme seul remède capable de lutter contre l’arbitraire fiscal. La suppression des anciens impôts, remplacés en 1790 par une contribution foncière unique répartie par égalité proportionnelle sur toutes les propriétés foncières, à raison de leur revenu net, fait apparaître la nécessité de connaître, sur toute l’étendue du territoire français, la contenance et le revenu de chaque propriété. C’est la loi du 15 septembre 1807 relative au budget de l’État, qui est à l’origine du cadastre parcellaire français, dont les travaux s’achèvent dès 1850 pour la France continentale, et plus tardivement pour les territoires d’annexion récente ou nouvelle.
L’institution napoléonienne est complétée par la loi du 7 août 1850 qui organise la révision ou le renouvellement du cadastre, à charge pour les communes qui le demandent de pourvoir aux frais des nouvelles opérations. Ce lourd régime financier est abandonné par la loi du 17 mars 1898 qui prévoit la répartition des frais entre l’État, le département et la commune, sans imposer par une réglementation impérative le principe d’une rénovation générale, qui s’inscrira plus tard dans la loi du 16 avril 1930, en même temps que celui de la conservation annuelle des plans rénovés. Le principe financier d’une rénovation et d’une conservation exécutées d’office aux frais de l’État n’intervient qu’en 1955. Entre-temps, un grand nombre de dispositions légales et réglementaires ont permis d’incorporer les résultats du remembrement rural et urbain dans les documents cadastraux, tandis que la loi du 17 décembre 1941 unifiait le Service du cadastre institué au ministère des Finances. Désormais, le Cadastre comprend un service central, un service régional et un service départemental, et ses attributions, qui concourent à l’exécution de sa mission essentiellement fiscale, présentent un triple aspect: technique (géométrique et graphique), juridique (identification et délimitation des parcelles) et administratif (classement et évaluation des propriétés).
Les documents cadastraux sont établis par commune et comprennent d’une part le plan, et d’autre part les registres cadastraux, c’est-à-dire le registre des états de section, ainsi que la matrice cadastrale. Le plan cadastral est la représentation graphique et planimétrique du territoire dans tous les détails de son morcellement en propriétés et en cultures. Il se compose d’un certain nombre de feuilles reliées en un atlas et comprend le tableau d’assemblage qui donne l’image schématique du territoire de la commune, et les feuilles parcellaires. Le plan est divisé en sections, chacune étant désignée par une lettre majuscule, en lieux-dits, et, exception faite du domaine public et de certains terrains improductifs de revenus, en unités cadastrales, îlots de propriété et parcelles, également numérotés. Le registre des états de section est constitué par des liasses de fiches classées par section, sur lesquelles chaque parcelle occupe une case où figurent le numéro du plan, le lieu-dit, la nature de culture ou l’affectation, la classe, le revenu cadastral et le numéro de compte sous lequel le propriétaire figure à la matrice cadastrale. Celle-ci comprend les comptes fonciers et fiscaux des différents propriétaires.
Les trois documents cadastraux principaux, plan, registre des états de section et matrice cadastrale, font de plus l’objet d’une conservation annuelle qui permet une mise à jour régulière. Les changements, mutations, créations ou suppressions de parcelles, sont constatés par le conservateur du cadastre, puis appliqués successivement sur les états de section et sur la matrice cadastrale, avant l’établissement du rôle foncier. En pratique, les documents cadastraux sont constitués en deux collections, dont l’une est déposée à la mairie et l’autre dans les bureaux du service départemental. Ils peuvent être consultés gratuitement par le public, qui peut obtenir en outre délivrance de reproductions. La documentation cadastrale est ainsi au service des usagers.
Actuellement, il n’existe plus en France de communes placées sous le régime de l’ancien cadastre de 1807. Toutefois, il faut savoir que, si toutes les communes ont un cadastre rénové, la rénovation cadastrale n’a pas été conçue comme une refonte systématique de tous les anciens plans. Elle a donné lieu tantôt à une révision, c’est-à-dire à une simple mise à jour qui fait apparaître sur l’ancien plan les changements survenus dans la configuration cadastrale depuis son établissement; tantôt à une réfection, c’est-à-dire à un renouvellement complet, décidé lorsque le parcellaire est apparu comme ayant subi des modifications trop nombreuses et trop importantes.
Ainsi, le cadastre actuel constitue le véritable état civil de la propriété foncière. Sur le plan juridique, il a valeur probante quant à la détermination de la propriété, quand le propriétaire apparent inscrit sur la matrice cadastrale se confond avec le propriétaire réel. On peut donc conclure que le cadastre n’est pas seulement un document fiscal, mais beaucoup plus largement un document d’utilité générale.
cadastre [ kadastr ] n. m.
• 1527; mot provenç. , it. catastico, bas gr. katastikhon « liste », de kata « de haut en bas » et stikhos « rang, ligne »
1 ♦ (XVIIIe) Registre public définissant dans chaque commune l'emplacement, la surface et la valeur des propriétés foncières et servant de base à l'assiette de l'impôt foncier. Un plan parcellaire, un tableau indicatif et une matrice cadastrale constituent le cadastre d'une commune. Consulter le cadastre. Révision du cadastre. — Cadastre rénové, révisé.
2 ♦ Administration fiscale chargée d'établir, de mettre à jour et de conserver les documents du cadastre (1o). Les agents du cadastre.
● cadastre nom masculin (provençal cathastre, de l'italien catastro, du grec katastikhon, registre) Ensemble des documents établis à la suite de relevés topographiques et d'opérations administratives, et destinés à permettre la détermination des propriétés foncières d'un territoire, la constatation de la nature de leurs produits et l'évaluation de leur revenu. Administration qui a la charge de ces documents. ● cadastre (expressions) nom masculin (provençal cathastre, de l'italien catastro, du grec katastikhon, registre) Cadastre numérique, ensemble des informations cadastrales relatives aux parcelles, aux propriétaires et aux bâtiments, mises sous forme numérique.
cadastre
n. m.
d1./d Ensemble des documents qui répertorient les caractéristiques des parcelles foncières, et qui servent notam. à déterminer l'impôt foncier.
d2./d Administration qui gère le cadastre. Employé du cadastre.
⇒CADASTRE, subst. masc.
A.— Ensemble de documents qui contient une matrice des états de section, un plan topographique des propriétés d'une commune, et servant notamment à fixer l'impôt foncier (d'apr. Jur. 1971). Révision du cadastre; dresser, établir le cadastre :
• 1. J'ai pris moi-même des peines infinies pour reconstruire en quelque sorte le cadastre de l'Ancien Régime, et j'y suis quelquefois parvenu. D'après la loi de 1790 qui a établi l'impôt foncier, chaque paroisse a dû dresser un état des propriétés alors existantes sur son territoire.
TOCQUEVILLE, L'Ancien Régime et la Révolution, 1856, p. 87.
— P. plaisant. Enfin il [Besson] connaît le pays à fond : c'est un cadastre ambulant (H. BAZIN, L'Huile sur le feu, 1954, p. 122).
— P. métaph. :
• 2. Tout ce qui pouvait enrichir cette carte idéale et l'aider à compléter son cadastre spirituel, Barrès le recherchait avec la diligence qu'il apportait à tout ce qui touchait de près ou de loin, son travail.
J. THARAUD, Mes années chez Barrès, 1928, p. 212.
B.— P. méton. Administration fiscale chargée d'établir, de mettre à jour et de conserver les documents du cadastre (d'apr. Jur. 1971). Un géomètre employé au cadastre (TOEPFFER, Nouvelles genevoises, 1839, p. 208).
PRONONC. :[].
ÉTYMOL. ET HIST. — XVIe s. « registre qui servait à l'assiette des tailles réelles » (J. BODIN, Disc. sur les monnoyes ds LITTRÉ); 1758 « arpentage et évaluation des propriétés imposables » (J.-J. ROUSS., Pol., 11, ibid.).
Empr. au prov., attesté sous la forme cathastre (libre del) en 1525 (Cadastre d'Albi dans MISTRAL), cadastre 1527 (PANSIER) empr. lui-même à l'ital. catasto, catastro (v. D. S. Blondheim dans Studies in honor of Marshall Elliott, vol. 1, p. 240 et 243) issu du vénitien catastico dès 1185 « liste de citoyens possédant une propriété imposable » (ibid.), lui-même empr. au gr. byzantin (VIIIe-XIe s., Blondheim, op. cit., p. 242) « compte [ : ligne par ligne] des taxes tenu par un collecteur ».
STAT. — Fréq. abs. littér. :46.
DÉR. Cadastral, ale, aux, adj. Qui est relatif au cadastre. Relevé, revenu cadastral; matrice cadastrale; titres cadastraux. La consultation des plans cadastraux ou parcellaires (...) permet l'analyse précise de la structure de la propriété foncière et de son évolution (Traité de sociol., 1967, p. 258). — [], [-o]. — 1res attest. XVIIIe s. (Necker dans Fr. mod. t. 16, p. 63); 1790, 21 avr. registre cadastral (Proc.-Verb. Comité agr. Comm. t. 1, p. 230 dans BRUNOT t. 9, p. 1087); dér. de cadastre, suff. -al. — Fréq. abs. littér. : 54.
BBG. — BERNITT (P.F.). Lat. caput und capum nebst ihren Wortsippen im Französischen. Kiel, 1905, 229 p. [Cr. MEYER-LÜBKE (W.). Literaturblatt für germanische und romanische Philologie. 1906, t. 11, p. 371]. — BLONDHEIM (D.S.). Etymological notes. Int : [Mél. Elliott (A.M.)]. Baltimore, 1911, t. 1, pp. 237-250.
cadastre [kadastʀ] n. m.
ÉTYM. 1527; cathastre, 1525, mot provençal; ital. catastico, bas grec katastikhon « liste », et proprt « ligne par ligne », de kata « de haut en bas », et stikhos « rang, ligne ».
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1 (XVIIIe). Registre public définissant dans chaque commune la surface et la valeur des biens-fonds et servant de base à l'assiette de l'impôt foncier. || Un plan parcellaire et une matrice cadastrale constituent le cadastre d'une commune. — Révision du cadastre. || Cadastre rénové. || Cadastre numérique : ensemble des éléments cadastraux (informations concernant parcelles, propriétaires et bâtiments), mis sous forme numérique.
2 Administration fiscale chargée d'établir, de mettre à jour et de conserver les documents précédents. || Les employés, les agents du cadastre. ⇒ Cadastreur.
1 (…) Bonaparte a prescrit que le Cadastre (…) soit enfin établi, et il a tenu à ce que l'on poussât activement à ce travail énorme (…)
Louis Madelin, Vers l'Empire d'Occident, VII, p. 96.
2 Les concessions cultivables n'étaient accordées, en général, que moyennant le double de leur valeur. La moitié de la somme allait clandestinement aux fonctionnaires du cadastre chargés de répartir les lotissements entre les demandeurs.
M. Duras, Un barrage contre le Pacifique, p. 25.
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DÉR. Cadastral, cadastrer.
Encyclopédie Universelle. 2012.