dégoûté, ée [ degute ] adj.
• v. 1380; de dé- et goût
1 ♦ Qui éprouve facilement du dégoût (spécialt pour la nourriture). ⇒ délicat, difficile. Des convives dégoûtés. Subst. Faire le dégoûté : se montrer difficile (sans raison). Prendre l'air, un air dégoûté : manifester son dégoût.
♢ Il n'est pas dégoûté : il se contente de n'importe quoi; fig. il est sans scrupules, sans délicatesse. Ellipt Pas dégoûté !
2 ♦ Qui éprouve du dégoût, écœuré. « L'horrible spectacle que peut donner à un homme dégoûté la foule humaine qui s'amuse » (Maupassant).
3 ♦ DÉGOÛTÉ DE : qui n'a pas ou plus de goût pour. ⇒ blasé, déçu, 1. las. Dégoûté de tout. Dégoûté de la vie. « Un vivant dégoûté de vivre » (Musset).
⊗ HOM. Dégoutter.
● dégoûté, dégoûtée nom Faire le dégoûté, être trop exigeant, faire le difficile. ● dégoûté, dégoûtée (expressions) nom Faire le dégoûté, être trop exigeant, faire le difficile.
dégoûté, ée
adj. (et n.)
d1./d Qui éprouve du dégoût.
— Dégoûté de: qui a perdu le goût de. Un homme aigri, dégoûté de tout.
d2./d Qui éprouve facilement du dégoût.
|| Par ext. Délicat, difficile.
— Subst. Faire le dégoûté, le délicat.
⇒DÉGOÛTÉ, ÉE, part. passé et adj.
I.— Part. passé de dégoûter.
II.— Adjectif
A.— Qui marque du dégoût à l'égard d'un aliment, d'une boisson. Faire une grimace, une moue dégoûtée :
• 1. Comme sa pompe est détraquée, il tire l'essence d'un fût en amorçant un tuyau de caoutchouc avec la bouche, ce qui la remplit de benzine. Il n'a pas l'air dégoûté de cette rasade et rit de toutes ses dents lorsque je lui dis : « À ta santé, ma vieille noix! »
T'SERSTEVENS, L'Itinéraire espagnol, 1963, p. 250.
— Qui manque d'appétit :
• 2. — Par Dieu, je leur ferais une cuisine de grande route, et je ne sache pas que parmi vous il soit un homme assez dégoûté pour refuser de manger de mon rôti assaisonné avec du piment.
JANIN, L'Âne mort et la femme guillotinée, 1829, p. 110.
B.— P. ext. Qui marque de l'aversion, de la répugnance :
• 3. L'enthousiasme des femmes était tombé; et leur visage dégoûté disait : « Pouah! » Comme si l'amour n'eût dû frapper que des êtres fins et distingués, ...
MAUPASSANT, Contes et nouvelles, t. 1, La Rempailleuse, 1882, p. 650.
— [Souvent en mauvaise part] Qui marque une répugnance excessive ou mal placée. Tes principes étalés, tes allusions, tes airs dégoûtés, ta bouche pincée n'auraient pu me donner le sens du mal (MAURIAC, Nœud vip., 1932, p. 153) :
• 4. Lorsque Desgenais sut cette histoire, il me dit :
— Pourquoi n'avez-vous pas voulu d'elle? Vous êtes bien dégoûté; c'est une jolie femme.
MUSSET, La Confession d'un enfant du siècle, 1836, p. 37.
♦ Emploi subst. :
• 5. ... il [Mouret] raillait les désespérés, les dégoûtés, les pessimistes, tous ces malades de nos sciences commençantes, qui prenaient des airs pleureurs de poètes ou des mines pincées de sceptiques, au milieu de l'immense chantier contemporain.
ZOLA, Au Bonheur des dames, 1883, p. 452.
♦ Faire le dégoûté. Être trop exigeant, faire le difficile :
• 6. Après tout, puisqu'il s'arrangeait de la vérité, les autres n'avaient pas à faire les dégoûtés : ce qui était assez bon pour lui l'était aussi pour eux.
BEAUVOIR, Les Mandarins, 1954, p. 489.
♦ N'être pas dégoûté. Ne pas être difficile, délicat; prendre n'importe quoi. C'est uniquement à cause des beaux yeux de la madame que tu vas te faire casser les os. Peste! Elle n'est pas dégoûtée (STENDHAL, Chartreuse, 1839, p. 36) :
• 7. — Quand la fille n'y est pas, c'est la mère qui se fait tamponner, cria Chaval, va, montre-lui ta viande! Il n'est pas dégoûté, ton salaud de logeur!
ZOLA, Germinal, 1885, p. 1333.
♦ Par antiphrase. Avoir bon goût :
• 8. LIGNIÈRES, bas, à Louis Soubrian. — Je préférerais la mère à la future belle-fille.
LOUIS, de même. — Tu n'es pas dégoûté! (...) Mais ce n'est qu'une supposition; rien à faire. Maman Colibri, oui (...) mais la vertu même par un grand V.
H. BATAILLE, Maman Colibri, 1904, p. 6.
C.— Au fig. Qui manifeste de la lassitude :
• 9. Il arrive, traînant ses semelles, tête basse, bras tombants, s'affale sur une chaise, et trace, du bout de sa canne, des demi-cercles sur la poussière du plancher. Parfois il se lève, s'en va à la fenêtre, fixe longuement la rue vide et revient à mon bureau brouiller mes papiers d'un doigt dégoûté et las.
VERCEL, Capitaine Conan, 1934, p. 173.
— Spéc. Dégoûté de. Lassé, fatigué de quelqu'un, de (faire) quelque chose. Un mort vaut mieux qu'un vivant dégoûté de vivre (MUSSET, Confess. enf. s., 1836, p. 150) :
• 10. Je ne restai pas longtemps ce jour-là et je m'efforçai seulement de découvrir la couleur de sa misanthropie. Il me fit surtout l'effet d'un être fatigué des autres, las de tout, irrémédiablement désillusionné et dégoûté de lui-même comme du reste.
MAUPASSANT, Contes et nouvelles, t. 2, L'Ermite, 1886, p. 1054.
Encyclopédie Universelle. 2012.