hargneux, euse [ 'arɲø, øz ] adj.
• 1160; de hargne
1 ♦ Qui est plein de hargne. ⇒ acariâtre, coléreux, grincheux, teigneux. Il était « sournoisement mauvais, hargneux, taquin » (Goncourt). Une femme hargneuse. ⇒ mégère, teigne. Caractère hargneux. — Chien hargneux. ⇒ agressif, méchant.
2 ♦ Par ext. Qui exprime ou dénote de la hargne. Mine hargneuse. ⇒ rechigné, revêche. Ton hargneux. — Critiques hargneuses. ⇒ acerbe. « L'aîné avait le réveil hargneux » (Aragon).
⊗ CONTR. Aimable, doux.
hargneux, euse
adj. (et n.)
d1./d Qui manifeste de la hargne, qui est d'humeur querelleuse, acariâtre.
— Subst. Une insupportable hargneuse.
|| (Animaux) Chien hargneux.
d2./d Qui dénote de la hargne. Propos hargneux.
⇒HARGNEUX, -EUSE, adj.
Qui manifeste ou dénote de la hargne. Ironie hargneuse, visage hargneux :
• 1. Il y a des gens qui déjeunent mal, il y en a qui ne déjeunent pas du tout; tant pis pour eux et pour les autres; évitez-les, ils sont querelleurs et hargneux; ils vous regardent comme si votre déjeuner avait été pris aux dépens du leur.
KARR, Sous tilleuls, 1832, p. 77.
— En partic. [En parlant d'animaux] Cheval hargneux (vieilli). Cheval ombrageux. Chien hargneux. Chien agressif :
• 2. Ce fut bien pis lorsque le fils de cette dame jeta sur les genoux de sa mère un chien-loup très-hargneux, et que son domestique lui remit une cage en sabot, renfermant un gros perroquet gris, qui salua la compagnie d'un Bonjour Jaco! très-distinct.
JOUY, Hermite, t. 2, 1812, p. 280.
♦ P. métaph. Ces irisations, ces reflets, ces vapeurs, ces poudroiements, se changeaient, sur leurs toiles, en une boue de craie, hachée de bleu rude, de lilas criard, d'orange hargneux, de cruel rouge (HUYSMANS, Art mod., 1883, p. 105).
Prononc. et Orth. : [], fém. [-ø:z] init. asp. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1165 hergnos « qui est d'humeur agressive » (B. DE STE-MAURE, Troie, éd. L. Constans, 8004); b) ca 1393 hargneux subst. masc. (Ménagier, éd. Sté Bibliophiles fr., II, 56); 2. 1572 paroles hargneuses (J. AMYOT, Comment on pourra recevoir utilité de ses ennemis ds Œuvres morales, p. 111 v°). Dér. de hargne; suff. -eux, euse. Fréq. abs. littér. : 265. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 169, b) 396; XXe s. : a) 268, b) 608.
DÉR. Hargneusement, adv. De façon hargneuse. Les chauffeurs méfiants, hostiles d'abord, tournèrent hargneusement vers lui leurs faces aux yeux brûlés (PEISSON, Parti Liverpool, 1932, p. 136). Pour que les clauses de paix soient discutées, non plus hargneusement entre adversaires, mais sereinement, au sein d'une société universelle des nations, qui arbitrerait de haut, qui répartirait les responsabilités, qui rendrait un verdict impartial (MARTIN DU G., Thib., Épil., 1940, p. 925). — [] init. asp. — 1re attest. 1876 (A. DAUDET, Jack, t. 2, p. 257); de hargneux, suff. -(e)ment2.
BBG. — SAIN. Sources t. 1 1972 [1925], p. 112.
hargneux, euse ['aʀɲø, øz] adj.
ÉTYM. V. 1393, n. m.; hergnos, adj., v. 1160; de hargne. REM. À la différence de hargne, hargneux n'a subi aucune éclipse depuis le XIVe s.
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1 Qui a de la hargne, qui est plein de hargne. ⇒ Acariâtre, colérique, désagréable, grincheux, hérissé, insociable, maussade, morose, querelleur, rageur. || Une femme hargneuse (→ Bréhaigne, cit. 1). ⇒ Harpie, mégère, teigne. || Un individu hargneux. ⇒ Coucheur (mauvais), pète-sec, roquet. || Humeur, caractère hargneux. ⇒ 1. Chagrin, mauvais, revêche.
1 Il était rechigné, hergneux (hargneux) et solitaire (…)
Ronsard, Hymnes, II, L'hiver.
2 Si votre esprit est si hargneux
Que le monde qui ne demeure
Qu'un moment avec vous, et ne revient qu'au soir,
Est déjà lassé de vous voir (…)
La Fontaine, Fables, VII, 2.
3 Qu'une femme hargneuse est un mauvais voisin !
Corneille, la Galerie du Palais, IV, 12.
4 Et le vilain être était sournoisement mauvais, hargneux, taquin, voleur de tout ce qui traînait (…)
Ed. de Goncourt, les Frères Zemganno, II.
5 (…) une petite veuve de trente-trois ans, rageuse, hargneuse, spirituelle, féroce pour peu qu'on l'attaquât, et excellant dans le bel art de vous brûler, comme d'un fer rouge, d'une malice appliquée au plus cuisant d'une plaie.
Courteline, Boubouroche, Nouvelle, I.
♦ N. || Un hargneux. || Une hargneuse. || Ce sont des hargneux.
♦ (En parlant des animaux portés à mordre, à ruer). || Chien (cit. 4) hargneux. ⇒ Méchant. — ☑ Prov. Chien hargneux a toujours l'oreille déchirée (La Fontaine, X, 8). — Cheval hargneux (vieilli). ⇒ Ombrageux; → Harceler, cit. 3, Buffon.
6 (…) un cheval naturellement hargneux, ombrageux, rétif, etc. produit des poulains qui ont le même naturel (…)
Buffon, Hist. nat. des animaux, Le cheval.
7 Fi du chien bellâtre, de ce fat quadrupède, danois, King-Charles, carlin ou gredin (…) quelquefois hargneux et insolent comme un domestique !
Baudelaire, le Spleen de Paris, « Les bons chiens ».
♦ Fig. et littér. (Choses). Qui évoque la colère, la méchanceté. || Les pointes hargneuses des branches (→ Justifier, cit. 2). || De hargneuses giboulées (cit. 3).
8 À Chartres, au sortir de cette petite place que balaye, par tous les temps, le vent hargneux des plaines (…)
Huysmans, la Cathédrale, I.
2 (1572, Amyot). Qui exprime ou dénote de la hargne. || Mine hargneuse (→ Battant, cit. 3). || Quelque chose de hargneux dans l'expression de la bouche (cit. 6). ⇒ Rechigné, revêche. || Ton hargneux.
9 (…) avec l'air hargneux d'une bête qu'on dérange à l'heure de sa pâtée.
Martin du Gard, les Thibault, t. VI, p. 268.
♦ Aboiements hargneux (→ Aversion, cit. 9). || Paroles, critiques hargneuses. ⇒ Acerbe. || Une sévérité hargneuse (→ Éplucher, cit. 7). || Refus hargneux. ⇒ Rebuffade.
10 (…) il grommelait en crachotant sur ses bottes, symptôme connu de hargneuse préoccupation que les camarades respectaient.
Léon Bloy, la Femme pauvre, I, II.
11 Charmant accueil. L'aîné avait le réveil hargneux. Ça se passerait sans doute avec un café.
Aragon, les Beaux Quartiers, II, XXXII.
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CONTR. Aimable, amène, avenant, charmant, doux.
DÉR. Hargneusement.
Encyclopédie Universelle. 2012.