COUR DES COMPTES
COUR DES COMPTES
Créée par la loi du 16 septembre 1807, héritière de la Curia regis médiévale, des chambres des comptes de l’Ancien Régime, du Bureau puis de la Commission de la comptabilité mis en place par la Constituante et la Convention, consacrée enfin par les Constitutions de 1946 et de 1958, la Cour des comptes est un organe juridictionnel relevant de l’ordre administratif. Bien que, selon une formule traditionnelle, «la Cour des comptes juge les comptes des comptables publics», cette institution a vu sa compétence s’étendre, sous une forme non juridictionnelle, aux administrateurs. Aujourd’hui, elle exerce son contrôle sur l’ensemble des services publics et surveille le bon emploi des deniers publics.
La Cour des comptes est organisée comme une juridiction. Présidée par un premier président, elle comprend, depuis la réforme de 1978, sept chambres composées de conseillers maîtres, de conseillers référendaires et d’auditeurs, ayant tous la qualité de magistrats inamovibles. Comme toute juridiction, la Cour des comptes a un parquet représenté par un procureur général assisté d’avocats généraux. Chacune des chambres est organisée par secteur de compétences, depuis le 1er janvier 1995.
Le contrôle juridictionnel constitue la fonction originelle et traditionnelle de la Cour des comptes. Selon les dispositions de la loi du 22 juin 1967, la Cour a une compétence générale à l’égard des comptables publics, qui doivent lui rendre au moins une fois par an leurs comptes. Mais la compétence de la Cour en premier et dernier ressort est limitée dans la mesure où elle n’est saisie que des comptes des comptables principaux. Créées par la loi du 2 mars 1982, les chambres régionales et territoriales des comptes, au nombre de vingt-cinq, jugent les comptes des comptables publics des collectivités territoriales et de leurs établissements publics; la Cour des comptes ne statue qu’en appel sur ces comptes. La Cour procède à un contrôle objectif du compte, sans prendre en considération les circonstances dans lesquelles a pu agir le comptable. La procédure suivie devant la Cour est de type inquisitoire — c’est la Cour qui dirige la procédure —, contradictoire — règle du double arrêt —, secrète et écrite. La Cour peut prononcer trois sortes d’arrêts: un arrêt de décharge lorsqu’elle a constaté que le compte n’était entaché d’aucune irrégularité — lorsque le comptable quitte ses fonctions et que son dernier compte est tout à fait régulier, la Cour rend un arrêt de quitus qui le rend «quitte» de sa gestion; un arrêt d’avance lorsque la Cour constate que le comptable a trop perçu, c’est-à-dire a encaissé des recettes irrégulières; un arrêt de débet lorsque la Cour constate une irrégularité se manifestant par un déficit dans la caisse (recette non recouvrée, dépense irrégulièrement payée). Les arrêts de la Cour des comptes sont revêtus de l’autorité de la chose jugée et sont, par-là même, exécutoires. Ils sont susceptibles de deux voies de recours: recours en révision (en cas d’erreur de fait ou de fait nouveau), recours en cassation devant le Conseil d’État.
D’origine plus récente, le contrôle administratif connaît un champ d’application relativement vaste, puisqu’il va des ordonnateurs et administrateurs aux entreprises publiques, en passant par les organismes (même privés) bénéficiaires de fonds publics. Le contrôle sur les ordonnateurs remonte au décret du 1er septembre 1936 faisant obligation aux trésoriers payeurs généraux de transmettre les ordonnances ou mandats de paiement, assortis de toutes les pièces justificatives, à la Direction de la comptabilité publique, qui doit les adresser chaque trimestre à la Cour. Très rapidement informée des actes des ordonnateurs, la Cour des comptes peut ainsi contrôler non seulement la régularité budgétaire de ces actes, mais aussi la qualité de la gestion administrative. Le contrôle des organismes non soumis aux règles de la comptabilité publique est apparu sous la IVe République et concerne, d’une part, les organismes bénéficiant, sous quelque forme que ce soit, du concours financier d’une personne publique et, d’autre part, tous les organismes de sécurité sociale. Le contrôle des entreprises publiques et de leurs filiales est aujourd’hui confié à la Cour. Avant la loi du 22 juin 1976, ce contrôle était exercé par une institution particulière très proche de la Cour, la Commission de vérification des comptes des entreprises publiques, créée en 1948. Désormais, la Cour publie un «rapport d’ensemble» sur l’activité, la gestion et les résultats des entreprises publiques. Pour effectuer ces divers contrôles, la Cour dispose d’une grande liberté de choix des moyens. Outre les pièces comptables assorties des pièces justificatives, elle peut procéder à des requêtes sur place, se faire communiquer les rapports des corps d’inspection, procéder à l’audition des intéressés, etc. Mais, dans ce domaine, la Cour se borne à porter à la connaissance du gouvernement, du Parlement ou de l’opinion publique les irrégularités graves ou les maladresses qui ont été constatées dans la gestion publique. L’information du gouvernement est faite soit par des référés adressés par le premier président à un ministre, soit par des notes du parquet ou de simples lettres d’un président de chambre. La Cour établit, à l’intention du Parlement, une déclaration de conformité qui constate la conformité du compte général de l’Administration des finances. L’information de l’opinion publique est réalisée, chaque année, par le rapport public au président de la République. Ce rapport, qui est déposé sur le bureau des assemblées et publié au Journal officiel , relève, à partir de l’examen des opérations budgétaires exécutées deux ans plus tôt, les irrégularités budgétaires ainsi que l’absence d’efficacité de certains modes de gestion administrative.
Pour que les observations de la Cour soient suivies d’effets, voire de réformes, une Commission des suites a été instituée en 1963; devenue permanente en 1973, elle établit un rapport annuel.
Trois institutions sont associées à la Cour des comptes: la Cour de discipline budgétaire et financière, le Conseil des impôts et le Comité central d’enquête sur le coût et le rendement des services publics.
Encyclopédie Universelle. 2012.