obligé, ée [ ɔbliʒe ] adj. A ♦ (Personnes)
1 ♦ Tenu, lié par une obligation, assujetti par une nécessité. — Dr. Une personne obligée envers un créancier. N. Le principal obligé : le débiteur principal (opposé à caution). — Être, se sentir obligé à qqch. « Obligés au secret comme les confesseurs » (Gautier). Être obligé à (vx) , de (mod.) faire qqch. Vous n'êtes pas obligé de me croire, de répondre. Il s'est cru obligé d'intervenir. « Je serai bien obligé de la refuser » (Montherlant).
2 ♦ (1559) Attaché, lié (par un service reçu). ⇒ reconnaissant, redevable. Je vous serais très obligée de bien vouloir... « Je vous suis obligé de l'attention que vous avez eue » (Bossuet ). ⇒ gré (savoir gré). — N. L'obligé(e) : celui, celle qu'on a obligé(e). « Le bienfaiteur crée des droits à l'obligé » (Balzac). « se passer de tous les hommes et n'être l'obligé de personne » (Joubert). Je suis votre obligé.
B ♦ (Choses)
1 ♦ (1703; it. obligato) Mus. Récitatif obligé.
2 ♦ (fin XVIIIe) Cour. Qui résulte de quelque obligation ou nécessité; qui est commandé par l'usage, par les faits. ⇒ indispensable, nécessaire, obligatoire. Un passage obligé. « Bien que supplément obligé aux lois, le duel est affreux » (Chateaubriand). « La vie commune n'était plus que le contact obligé de deux êtres » (Zola).
♢ Fam. C'est obligé ! c'est forcé. C'était obligé, c'était fatal, ça devait arriver. ⇒ obligatoire; immanquable, inévitable.
♢ Euphém. Admin. ⇒ obligatoire. Vous devez composter votre billet, c'est obligé.
⊗ CONTR. Dispensé, exempt; quitte. Facultatif.
● obligé, obligée nom Personne à qui on a rendu service, qui est liée par la reconnaissance à quelqu'un : Il est mon obligé en cette affaire.
obligé, ée
adj., n. et adv.
rI./r adj.
d1./d Contraint, forcé. Vous serez obligé d'accepter.
d2./d Reconnaissant. Je vous suis obligé de votre attention.
d3./d Dont on ne peut se dispenser. Corvée obligée.
rII./r n.
d1./d Personne à qui l'on a rendu un service. Je suis votre obligé.
d2./d DR Le principal obligé: le principal débiteur.
rIII/r adv. (Maghreb) De façon forcée, sous la contrainte. Il a signé obligé.
⇒OBLIGÉ, -ÉE, part. passé, adj. et subst.
I. —Part. passé de obliger et adj.
A. —Qui est imposé par les circonstances, les faits, dont la fonction semble nécessaire, d'usage.
1. [En parlant d'une chose]
— Qu'il paraît nécessaire de faire, à quoi l'on ne peut échapper, dont on ne peut se dispenser. Synon. obligatoire, inévitable, de rigueur. Point de passage obligé. J'ai fait, outre mes livres obligés et mes articles, deux pièces en cinq actes, dont une avec prologue, qui entre demain en répétition à l'Odéon (BALZAC, Lettres Étr., 1842, p.572). Malheureusement, Parme n'est guère sur la ligne des touristes. Le troupeau admiratif suit l'itinéraire obligé, Florence, Rome et Naples (GAUTIER, Guide Louvre, 1872, p.250). En février 1941, deux des nôtres, Hulot et Magnin, se laissèrent enfermer à dessein dans la cave où nous défilions chaque soir un à un, selon le cérémonial obligé, pour y déposer nos chaussures, que nous accrochions à des clous (AMBRIÈRE, Gdes vac., 1946, p.233).
— Qui est prévisible et semble inévitable. Le salariat, enfin, postérieur à la division du travail et à l'échange, est le corrélatif obligé de la théorie de réduction des frais, de quelque manière que s'obtienne cette réduction (PROUDHON, Syst. contrad. écon., t.2, 1846, p.160). Tous se promettaient notre prochaine défaite, suivie d'une chute obligée, ou d'une inévitable révolution (CHATEAUBR., Mém., t.3, 1848, p.180). C'était le frère de Sylvie qui nous rejoignait avec cette bonne gaieté rustique, suite obligée d'une nuit de fête, que des rafraîchissements nombreux avaient développée outre mesure (NERVAL, Filles feu, Sylvie, 1854, p.611).
♦BIOL. Les virus sont des parasites intracellulaires obligés (BARIÉTY, COURY, Hist. méd., 1963, p.726).
— Fam. C'est/c'était obligé. C'est/c'était une chose inévitable. Synon. c'est forcé, fatal. F...: Les bateaux anglais viendront prendre le blé dans le port moscovite le plus proche de nous. L'impératrice Catherine nous en louera un. Le Maréchal: Prodigieux! Totalement prodigieux! F...: Elle nous en louera un. C'est obligé (AUDIBERTI, Mal court, 1947, III, p.196). Voyez-vous, monsieur Mégrin, je vais vous dire une chose: en prison, c'est presque obligé, l'homme médite (AYMÉ, Uranus, 1948, p.231).
2. [En parlant d'une pers.] Qui ne peut se dispenser de remplir sa fonction. Celle-ci en effet possède ainsi dans sa filiale une cliente obligée, qui fait fructifier les capitaux qu'on lui confie, ou qui apporte ceux dont momentanément elle n'a pas l'emploi (BAUDHUIN, Crédit et banque, 1945, p.191).
— [En parlant d'éléments d'une composition picturale] Qui est d'usage. Synon. attendu, inévitable. En haut, un centurion à cheval en manteau, l'air triste, semble montrer la scène: c'est le démonstrateur obligé dans les tableaux de Rubens (MICHELET, Journal, 1832, p.106). C'est toujours le personnel obligé de ces peintures mystiques: la Vierge, l'Enfant Jésus, saint Sébastien (...) sainte Catherine, et (...) le donateur (GAUTIER, Guide Louvre, 1872, p.82).
3. MUS. Qui ne peut être supprimé sans que soit changée la structure du passage, de la composition du morceau. Accompagnement, instrument obligé. Partie obligée (Ac. 1835, 1878). Ce morceau étant avec piano obligé je priai Seymour-Schiff (...) de l'accompagner (BERLIOZ, Souv. voy., 1869, p.161). Plusieurs variations [des Partite] sont faites avec pédale obligée (PIRRO, J.-S. Bach, 1919, p.206). Pratique scolaire de la fugue avec ses rentrées obligées (KOECHLIN, Écrit. fugue, 1933, p.30).
— Mouvement obligé. Mouvement ,,d'une partie harmonique qui se résout, en vertu de la présence de notes attractives, sur une note invariable de l'accord suivant`` (BRENET, Dict. prat. et hist. mus., 1926, p.276). [L'accord septième de dominante] contient deux notes à mouvement obligé, la septième, dissonance, qui doit forcément descendre, et la tierce, qui, en qualité de note sensible, doit monter (LAVIGNAC, Mus. et musiciens, 1895, p.277).
♦Récitatif obligé. ,,Récitatif accompagné et coupé par les instruments`` (Ac. 1798-1878). Le récitatif obligé (...) est aujourd'hui la seule ressource qui reste aux belles voix pour toucher les coeurs (STENDHAL, Rome, Naples et Flor., t.2, 1817, p.239).
B. —[En parlant d'une pers.] Qui est redevable (à quelqu'un) d'un bienfait, d'une amabilité, et qui (lui) en témoigne de la reconnaissance. Être infiniment obligé à qqn de qqc. Je vous suis fort obligé de votre attention (Ac.):
• 1. Il aime les ministres, et moi aussi je les aime; je leur suis trop obligé pour ne pas les aimer. Jamais je n'ai eu recours à eux, qu'ils ne m'aient rendu bonne et prompte justice. Ils m'ont tiré trois fois des mains de leurs agents.
COURIER, Pamphlets pol., Lettres partic., 1, 1820, p.66.
— [En tant que formule de politesse, de remerciement] Rouquérolle: (...) M. le baron ne fume pas? Fourchevif: Non... Je vous serais même obligé... le tabac incommode la baronne et moi-même (LABICHE, Fourchevif, 1859, XII, tabl. 3, p.416).
♦P. ell. Machavoine: (...) Et v'là ton billet de garde!... c'est pour demain!... Chiffonnet, prenant le billet: Merci!... bien obligé! (LABICHE, Misanthr. et Auv., 1852, X, 1, p.162).
— ADMIN. Je vous serais obligé de... Formule traditionnelle qui précède une demande, une instruction, un ordre et combine les deux acceptions de «inciter à» et «rendre service» (d'apr. Admin. 1972):
• 2. Jusque-là, je vous serais obligé de m'adresser tous renseignements et toutes suggestions qui vous paraîtraient utiles, en tenant compte naturellement du secret dont vous mesurez parfaitement bien toute l'importance.
DE GAULLE, Mém. guerre, 1954, p.340.
II. —Substantif
A. —Personne à qui on a rendu service, qui est liée par la reconnaissance à quelqu'un. L'espion: (...) Vous m'aviez laissé la vie, je sauvai la vôtre; nous étions quittes. De ce jour où je cessai d'être votre obligé, je devins votre enthousiaste (DUMAS père, Napoléon, 1831, VI, tabl. 22, 4, p.150). Il ne peut donc pas y avoir de liens de bienfaiteurs à obligés entre ceux qui portent le message évangélique et ceux qui le reçoivent (Philos., Relig., 1957, p.44-16):
• 3. L'idée ne me vint pas qu'on pût écrire pour être lu. On écrit pour ses voisins ou pour Dieu. Je pris le parti d'écrire pour Dieu en vue de sauver mes voisins. Je voulais des obligés et non pas des lecteurs.
SARTRE, Mots, 1964, p.150.
B. —DROIT
1. Vx. ,,Acte passé entre un apprenti et un maître, sous des conditions réciproques`` (Ac. 1798-1878).
2. Le principal obligé. ,,Le principal débiteur, pour le distinguer de la caution`` (Ac. 1835, 1878).
Encyclopédie Universelle. 2012.