DIORAMA
DIORAMA
Procédé de peinture en trompe l’œil mis au point en 1822 par Daguerre et Bouton, dont le principe repose sur l’idée de l’illusion: le diorama doit faire oublier au spectateur que ce qu’il voit n’est pas la réalité mais une représentation à deux dimensions. Le diorama n’est qu’un des avatars du panorama inventé par le peintre écossais Robert Batter qui réalise en 1792 à Londres une Vue de la flotte anglaise à Portsmouth . Le panorama est composé d’une vaste peinture circulaire qui enveloppe le spectateur. Celui-ci, placé au centre d’une plate-forme, rencontre partout l’horizon du paysage figuré en proportion et avec des tons exacts. Si l’illusion est réussie, le spectateur doit se croire en présence de la nature. L’édifice abritant le panorama est de forme circulaire, recouvert par un toit conique vitré sur les bords, juste au-dessus de la toile peinte. C’est une peinture vivement éclairée qui se présente au spectateur qui arrive de l’extérieur par un long couloir sombre. Pour réaliser de pareils tableaux, le peintre exécute d’abord des dessins de vues prises à une hauteur égale à celle de la plate-forme d’où le public découvrira le panorama. Au premier plan, des «morceaux pittoresques» rendent plus saisissant l’effet de réalisme. Introduit en France par l’Américain Fulton, le panorama conquiert un public nombreux. Le passage des Panoramas ouvert sur le boulevard Montmartre par James Thayer constitue, en effet, une véritable attraction pour le Parisien des années 1800, par la nouveauté de la technique et par l’actualité des sujets (L’Évacuation de Toulon par les Anglais en 1793 , panorama peint par Pierre Prévost et Constant Bourgeois). Une autre rotonde édifiée sur le boulevard des Capucines représente L’Entrevue de Tilsit en 1807 , et Napoléon, séduit, songe un instant à créer une série de panoramas reportages de ses victoires. Chateaubriand sera sensible à la vérité d’une Vue d’Athènes et, en 1827, Alaux ouvre, rue Saint-Fiacre, une nouvelle rotonde baptisée Néorama (Balzac se moque de ces mots en «rama» qui envahissent le vocabulaire à la mode) où l’on offre des vues d’intérieurs (Abbaye de Westminster , musée du Louvre, Paris). Comme pour le panorama, Daguerre et Bouton cherchent à supprimer du diorama tout repère de la mémoire du spectateur en lui faisant parcourir des corridors obscurs qui débouchent dans une salle ronde et sombre dont la paroi est percée de vastes fenêtres qui sont autant d’ouvertures sur une autre réalité. Pour obtenir l’effet recherché, le tableau est isolé de tout ce qui l’environne, l’œil n’a ainsi plus aucun moyen critique de juger la taille réduite et le coloris plat de la peinture. Le monde du théâtre n’est pas loin: perspectives et éclairage artificiel créent une impression de profondeur de l’espace et font appel aux lois de la scénographie. Pour que l’illusion soit plus parfaite, le plancher sur lequel se trouve le spectateur pivote en son centre, donnant l’impression d’un mouvement. Les vues représentées sont peintes suivant la technique du trompe-l’œil architectural avec toutefois la volonté d’atteindre la sensibilité des contemporains, tels les tableaux reproduisant Le Déluge ou Le Tombeau de Napoléon à Sainte-Hélène . Avec la Messe de Minuit à Saint-Étienne-du-Mont (1831), le diorama acquiert ses lettres de noblesse: la troisième dimension devient plus tangible, on quitte le domaine de la peinture. La toile fine peinte sur ces deux faces permet d’obtenir un effet lumineux par transparence. L’église, vide lorsque le spectateur entre, se trouve plongée dans le crépuscule, puis dans la nuit; bientôt les lumières s’allument et la foule des fidèles emplit la scène. Afin de permettre la double lecture du tableau, la face antérieure doit être peinte de tons clairs et transparents; les couleurs opaques et les modelés peints sur le revers n’apparaissent que si l’on éclaire la toile par derrière. Une telle technique, dont nous n’avons pas gardé de vestige, se prêtait à la valorisation des grands thèmes de la période: vues de ruines avec des effets nocturnes, grandes batailles navales, paysages exotiques, entre autres. Le succès du diorama a été immédiat aussi bien en France qu’en Angleterre (avec John Arrowsmith) ou en Allemagne où Carl Ferdinand Langhans réalise un pleorama (1831), unissant les effets de lumières bizarres à des bruitages évocateurs. L’imbrication du réel et du figuré se fait plus étroite avec l’utilisation d’objets véritables placés au premier plan, de découpages comme dans les décors de théâtre. À peu près abandonné vers les années 1850, le diorama retrouve un public à partir de 1880; il sert alors à évoquer les vastes fresques militaires du peintre Detaille. Presque contemporain des débuts de la photographie (où s’illustre Daguerre), le diorama a été une sorte de théâtre pictural populaire.
diorama [ djɔrama ] n. m. ♦ Tableau vertical où sont peints des figures, des paysages diversement éclairés (à la mode au XIXe s.). « Les fenêtres de son salon donnaient sur des dioramas exécutés d'une façon merveilleuse et de l'illusion la plus complète » (Gautier).
● diorama nom masculin (du grec orama, vue) Peinture panoramique sur toile présentée dans une salle obscure afin de donner l'illusion, grâce à des jeux de lumière, de la réalité et du mouvement. (Le premier diorama fut créé à Paris, en 1822, par Daguerre et le peintre Charles Marie Bouton.)
⇒DIORAMA, subst. masc.
Tableau ou suite de tableaux de grandes dimensions, en usage surtout au XIXe siècle, qui, diversement éclairé(e), changeait d'aspect, de couleur et de forme, était agrémenté(e) ou non de premiers plans en relief et donnait aux spectateurs l'illusion du mouvement. Mon passé vu par un trou comme dans les dioramas des foires (LARBAUD, Barnabooth, 1913, p. 40) :
• La récente invention du diorama, qui portait l'illusion de l'optique à un plus haut degré que dans les panoramas, avait amené dans quelques ateliers de peinture la plaisanterie de parler en rama,...
BALZAC, Le Père Goriot, 1835, p. 62.
— P. compar. Nous défilons [sur l'autostrade] devant une chienlit d'énormes panneaux réclames installés en diorama de chaque côté (GIONO, Voyage en Italie, 1953, p. 28).
— P. métaph. Lindau est une fort jolie petite ville; et, de là à Kempten, c'est une suite de dioramas admirables (MÉRIMÉE, Lettres à une inconnue, t 2, 1870, p. 265).
Prononc. et Orth. :[]. Au plur. des dioramas. Ds Ac. 1878 et 1932. Étymol. et Hist. 1822 date de l'installation du premier diorama rue Samson à Paris (Lar. 19e). Formé d'apr. panorama avec substitution de préf. di(a)-1; spectacle en tableaux mis au point par le peintre et physicien français L.-J. Mandé Daguerre [1789-1851] assisté par Ch. M. Bouton. Fréq. abs. littér. :18.
diorama [djɔʀama] n. m.
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♦ Tableau sur toile tendue verticalement où sont peints en couleurs transparentes des figures, des paysages, etc., de telle manière que des spectateurs placés dans l'obscurité voient ces représentations de différentes façons suivant que le système d'éclairage frappe la toile sur sa face antérieure ou sur sa face postérieure. → Panorama, cit. 1. || Les dioramas étaient à la mode au XIXe siècle.
1 (…) les fenêtres de son salon donnaient sur des dioramas exécutés d'une façon merveilleuse et de l'illusion la plus complète.
Th. Gautier, Fortunio, XXIV.
2 Aspects incessamment variés par les obliques rayons de soleil, ou perdus dans les brumes grises au milieu des ouragans de neige. Puis, de toutes parts des détonations, des éboulements, de grandes culbutes d'icebergs, qui changeaient le décor comme le paysage d'un diorama.
J. Verne, Vingt mille lieues sous les mers, p. 475.
Encyclopédie Universelle. 2012.