GIRART DE ROUSSILLON
GIRART DE ROUSSILLON (fin XIIe s.)
Chanson de geste de dix mille décasyllabes qui raconte les guerres de Girart contre le roi Charles Martel. Celui-ci a promis d’aider à la libération de Rome contre la promesse de mariage avec Berte, l’une des filles de l’empereur de Constantinople, l’autre, Élissent, devant épouser Girart. Mais, Élissent se révélant la plus belle, le roi oblige Girart à un échange assorti de quelques avantages territoriaux: Girart ne devra plus l’hommage à son suzerain. Mécontent des concessions qu’il a dû faire, le roi ne tarde pas à envahir le pays de Roussillon, et c’est une première guerre qui se termine avec la bataille de Vaubeton, où Dieu intervient pour séparer les combattants. La guerre va reprendre, cette fois par la faute de Girart et de son lignage. Poussé par la passion de la vengeance, abandonné de Dieu, le héros subit de cruelles défaites. Finalement, il perd toutes ses terres et doit vivre en exil avec sa femme Berte, dans la forêt d’Ardenne où il gagne sa vie comme charbonnier. Cette expiation de vingt années prépare la rédemption de Girart, sa pénitence étant éclairée et adoucie par la sollicitude de Berte. Tous deux rentrent en France et, retrouvant Élissent, Girart peut, grâce à son amitié active, récupérer terres et villes. La vie édifiante de Berte est couronnée par un miracle à Vézelay lors de la construction de l’église. Cet épilogue est comme la signature du poème, et l’on cherche en Bourgogne le souvenir d’un Girart historique. S’agit-il du comte Gerardus qui eut des démêlés avec Charles le Chauve? Est-ce bien le même qu’évoquent d’autres chansons de geste sous le nom de Girart de Vienne ou de Fraite? Quoi qu’il en soit, ce poème-ci, écrit dans un dialecte composite franco-provençal, est d’une belle composition: les deux personnages féminins trouvent dans l’épilogue un rôle préparé dès le prologue. Des discussions juridiques nous éclairent sur la signification de l’œuvre qui, se faisant l’écho des crises entre la féodalité et la monarchie, rappelle au respect de la souveraineté royale les vassaux révoltés par les apparences de l’injustice: il ne faut pas s’insurger, même contre un mauvais souverain.
Encyclopédie Universelle. 2012.