OMAN
Borné sur trois côtés par la mer et sur le quatrième par le désert, l’Oman est une sorte d’île située à l’extrémité sud-est de la péninsule arabique. De cette insularité géographique que renforça l’histoire, l’Oman tient cette caractéristique contradictoire: le repliement sur soi et l’expansion.
Si sa culture et sa religion le rattachent aux pays de l’intérieur de la péninsule, son histoire par contre souligne l’étendue de ses entreprises maritimes. Tiraillé entre ses allégeances religieuses et culturelles qui l’incitaient à un repliement intérieur et ses entreprises politiques et économiques qui le poussaient vers une expansion extérieure, l’Oman a vécu ces destins contradictoires jusqu’à nos jours.
L’amplitude et l’orientation de ses façades maritimes ont conditionné depuis la plus haute antiquité ses ouvertures et ses échanges. Adossé au désert, il se déploie face aux mers qui le bordent. La partie méridionale du pays est tournée vers l’océan Indien: les migrations et les échanges des populations omanaises vers la côte orientale d’Afrique s’étendent sur plusieurs siècles. L’extrême pointe orientale du pays s’allonge en direction de l’Inde, avec laquelle l’Oman commerce depuis des millénaires. Les côtes septentrionales s’ouvrent sur la mer d’Oman, débouché et passage obligatoire du Golfe, ce carrefour de routes maritimes et terrestres entre l’Extrême-Orient, l’Inde, le Moyen-Orient et l’Europe.
De par sa position stratégique, l’Oman partage avec l’Iran le redoutable privilège de commander l’entrée du Golfe. C’est en effet à travers le détroit d’Ormuz que s’écoule une grande partie du pétrole de l’Europe et du Japon.
Le pays et les hommes
Compris entre 510 50 et 590 40 de longitude, l’Oman, qui s’étend sur 300 000 kilomètres carrés, s’allonge en direction de la côte iranienne du Mekran. Cette configuration particulière lui vaut d’être souvent appelé la «corne de l’Arabie».
Le pays, dont la capitale Mascate est située un peu au nord du tropique du Cancer, étire ses 1 800 kilomètres de côtes entre 160 40 et 260 20 de latitude nord. À cette extrémité septentrionale, le cap Mussandam, promontoire rocheux séparé du reste du pays, faiblement peuplé, surveille le détroit d’Ormuz.
800 kilomètres d’étendues désertiques séparent l’Oman du Nord des massifs montagneux de faible altitude de la province méridionale du Dhofar: entre les deux, les sables des Wahiba, les hamadas pierreuses et les dunes orientales du Rub al-Khali – Empty Quarter –, le désert le plus inhospitalier du monde.
Les principales régions de l’Oman se succèdent, du nord au sud, comme suit. On trouve tout d’abord le cap Mussandam, puis, en demi-arc de cercle épousant les contours de la côte, la Batina, très ancien lieu de peuplement; cette longue plaine côtière, où ports de pêche et palmeraies se succèdent sur 300 kilomètres, abrita l’antique capitale de l’Oman, Sohar; elle bute à l’est sur les collines qui enserrent le port de Mutrah et la rade de Mascate, l’actuelle capitale. Ensuite, les deux massifs de l’Hajjar sont coupés par la vallée de Samaïl, ancien lieu de passage du désert et des provinces intérieures vers la mer. L’Hajjar occidental n’est accessible que par le nord ou par le sud. Du nord, la configuration des vallées est globalement identique: étroit défilé taillé par un wadi dans la barrière montagneuse qui s’ouvre en un bassin intérieur circulaire que domine la chaîne la plus élevée de l’Hajjar, qui culmine à 3 000 mètres. Des villages épars y sont établis. Du sud, on accède à quelques villages d’altitude dont les cultures en terrasses sont réputées. L’Hajjar oriental, moins élevé – 2 000 mètres –, est cependant d’accès difficile, et peu peuplé à l’exception de la brèche du wadi Bani Khalid.
Les provinces intérieures, situées dans les piémonts méridionaux de l’Hajjar, sont avec la Batina les régions les plus peuplées de l’Oman. Dans ces plaines et ces piémonts d’altitude moyenne, falaj , palmeraies et tours de guet se succèdent, abritant les villes les plus importantes. D’ouest en est, en suivant les piémonts – cette voie de terre qu’empruntaient les caravanes venant de Buraimi –, on traverse les provinces de la Dhahira puis la Dakhlyia et les deux villes de Bahla et de Nizwa, la Sharqiya et l’oasis d’Ibra’, le Ja’alan enfin qui débouche sur la dernière rade protégée du Golfe avant l’océan Indien, le port de Sour.
Au sud d’une ligne qui passe approximativement par Adam, Mudaybi et Bilad Bani bu Ali, on quitte les régions d’habitat permanent. Entre le 22e et le 17e parallèle, on ne trouve plus que sables et hamadas.
La province méridionale de Dhofar, à cheval sur le 17e parallèle, est le prolongement géographique de l’Hadramaout: une étroite bande côtière dominée par des massifs montagneux érodés qu’arrose la mousson, puis les sables infinis du Empty Quarter, à quelque 40 kilomètres de la côte. Salalah est la seule ville de cette région, antique productrice d’encens.
En l’absence de recensement, la population totale de l’Oman n’est pas connue. Selon les experts de la Banque mondiale, elle ne dépasserait pas 850 000 habitants. Selon des estimations gouvernementales, elle atteindrait 1 500 000. Elle se caractérise d’une part par sa dispersion, puisque 20 p. 100 de la population environ sont nomades, et d’autre part par l’absence de foyers de peuplement importants. En dehors de la région de la capitale, les principales villes de l’Oman, qui sont Sohar, Nizwa, Bahla Ibra’, Sour et Salalah, n’atteignent ou ne dépassent pas 20 000 habitants.
Sur une superficie de 300 000 kilomètres carrés, seulement 40 000 hectares sont des terres cultivées. C’est dire l’étendue des zones désertiques.
Quelque deux cents tribus constituent la population de l’Oman actuel. Selon les modes de vie, on distingue quatre grands groupes: les sédentaires des régions littorales, pêcheurs et commerçants; les sédentaires des oasis, agriculteurs et artisans; les semi-nomades, éleveurs des montagnes du Dhofar; les nomades du désert, les Bédouins.
Les grandes étapes de l’histoire
Les deux vagues de migration qui ont formé le peuplement originel de l’Oman venaient l’une du nord, les Nizari, l’autre du sud, les Yemeni. Cette double origine a donné naissance au cours de l’histoire à deux factions qui s’opposèrent en des guerres répétées: les Hinawi et les Ghafiri.
L’adhésion des tribus de l’Oman à l’islam se fit peu après la mort du Prophète. Dans leur majorité, les Omanais sont ibadites, du nom d’Abdullah ibn Ibadh, élève de l’iman Jaber converti à Médine par les contemporains de Mahomet. L’implantation de l’ibadisme en Oman ne se fit pas sans affrontements, mais les membres de cette secte étaient déjà suffisamment nombreux et organisés pour élire leur imam à Nizwa en 791.
Aux XIVe et XVe siècles, les boutres omanais, chargés des produits de l’Arabie apportés par caravanes, naviguaient vers les mers d’Asie. C’était un long et périlleux voyage, qui durait pas moins de deux ans. Sohar était la capitale cosmopolite du pays et le riche entrepôt du Golfe.
Au XVIe siècle, les Portugais s’emparèrent, lors de leur expansion orientale, de Mascate et d’Ormuz, relais sur la route des Indes et de Goa. Ils devaient y rester jusqu’en 1650, date à laquelle le sultan Ibn Saïf réussit à les chasser. Cette victoire marquait l’entrée de l’Oman dans une période de pouvoir fort, de relative sécurité et de prospérité économique. C’est sous le règne de la dynastie Ya’ariba que l’Oman se hérissa de tours, de forts et de forteresses. Le pays se construisait, mais le début du XVIIIe siècle fut marqué par une guerre civile qui ébranla pendant vingt ans la fin du règne des souverains Ya’ariba et pendant laquelle se constituèrent les factions Hinawi et Ghafiri, du nom des tribus auxquelles appartenaient leurs chefs.
En 1744, Ahmed ibn Saïd, vainqueur contre les Perses à la bataille de Sohar, fut élu imam. Il était le premier souverain de la dynastie Al Bu Saïd; l’Oman était prospère; ses ports abritaient des flottes importantes, ses marins naviguaient jusqu’en Extrême-Orient et vers la côte orientale d’Afrique. Mascate était le principal entrepôt du Golfe. Les marchandises précieuses s’y entassaient, le trafic des esclaves y était florissant. L’ampleur du négoce, des échanges et du trafic négrier entraîna les Omanais dans une migration vers les îles de la côte swahili, qui devait s’étaler sur deux siècles. Elle atteignit son apogée au milieu du XIXe siècle, sous le règne du sultan Saïd ibn Sultan. Zanzibar, riche entrepôt de la côte orientale d’Afrique, devint la capitale. Les Omanais y développèrent la culture du girofle et du coprah. De là, ils contrôlaient, avec des succès divers, les îles du nord de la côte swahili, fief des Mazrui, et les îles du Sud, en particulier Kilwa, grande pourvoyeuse de «marchandise humaine». L’essor économique de l’île, dont les principaux clients aux alentours de 1860 étaient les États-Unis, la France, l’Allemagne et l’Angleterre, fut tel que les revenus des îles étaient supérieurs, dans les finances du sultan, à ceux qu’il tirait de ses domaines d’Arabie. Ce fut l’apogée. Les années qui suivirent amorcèrent un déclin, dont les causes furent le passage sous contrôle britannique, à l’occasion d’une succession, des îles de la côte orientale et de leurs revenus, l’interdiction du trafic négrier, qui, cependant, se maintint clandestinement jusqu’au début du XXe siècle. L’apparition de la navigation à vapeur ruina la flotte omanaise, et l’ouverture du canal de Suez fit perdre son importance à la route terrestre des Indes.
L’ingérence de l’Angleterre dans les affaires du protectorat et la ruine des finances omanaises eurent pour conséquence d’endetter l’Oman financièrement et politiquement vis-à-vis de la Grande-Bretagne. Mascate devint le théâtre de rivalités franco-britanniques dans le Golfe, l’Europe s’étant lancée dans sa grande aventure coloniale. Dans le même temps, la paix intérieure avait disparu en Oman. Les principaux leaders de l’intérieur voulurent restaurer l’imamat contre le sultan. La situation devint dramatique. En 1920, cependant, les deux factions signèrent le traité de Sib. Mais la paix fut rompue lorsqu’on découvrit du pétrole dans la péninsule. L’Arabie revendiqua l’oasis de Buraimi (1949) aux frontières des deux pays, à la limite de leurs concessions. Le jeu des puissances occidentales renforça le sultan Saïd ibn Taimour, qui régnait alors, dans sa conviction qu’il fallait rejeter tous les apports occidentaux: enseignement, médecine, technologie modernes. L’Oman, interdit aux étrangers, fut coupé du reste du monde jusqu’en 1970, année de la destitution du sultan Saïd. Son fils Qabous lui succéda.
Les revenus pétroliers ont permis au sultan Qabous de doter le pays des équipements de base et des grandes infrastructures qu’il n’avait pas. La situation politique intérieure fut dominée jusqu’en décembre 1975 par la guerre du Dhofar. Annexée à l’Oman en 1879, cette province fut le lieu de révoltes successives au XIXe siècle. La création d’un mouvement national au Yémen du Sud (le Front populaire pour la libération de l’Oman et du golfe arabe [F.P.L.O.G.A.]) transforma les rébellions en une guérilla organisée. La lutte contre les djebelis rebelles fut intensifiée avec l’aide de l’armée iranienne. Les combats cessèrent en décembre 1975.
Une économie en voie de diversification
Jusqu’en 1969, l’Oman ne pouvait compter que sur quelques recettes douanières assorties de subsides du gouvernement britannique. En 1973 sonnait l’heure de la richesse. Grâce au pétrole, les recettes s’élevèrent à plus d’un milliard de dollars. Cependant, l’Oman, petit producteur par rapport à ses voisins du Golfe, a dû multiplier les prospections (in land et off shore). La découverte de nouveaux gisements dans le centre du pays permit de parvenir en 1986 au chiffre record de 600 000 barils par jour. Mais la production fut volontairement réduite dans les années suivantes, afin de soutenir le plan de stabilisation des prix de l’O.P.E.P. (déc. 1986) dont, cependant, l’Oman ne fait pas partie; elle n’était plus que de 25 millions de barils en 1992, soit 68 681 barils par jour. C’est l’oléoduc central de Fahud au port de Mina al-Fahal sur la côte septentrionale qui collecte toute la production omanaise quelle que soit son origine régionale. Pendant le conflit Irak-Iran, ce port a connu un regain d’activité car il offrait aux pétroliers des conditions de sécurité se traduisant par un moindre coût des assurances maritimes. La raffinerie d’une capacité de 80 000 barils par jour, située dans ce même port, pourvoit aux besoins du pays auxquels elle est censée répondre jusqu’en l’an 2000.
Le gaz naturel disponible sous deux formes (associé/non associé au brut) est acheminé vers la capitale par le gazoduc qui relie Yibal à la côte et qui approvisionne également la centrale de la zone industrielle de Rusayl et celle du wadi Jizzi (traitement du cuivre). Les réserves estimées à 6 trillions de mètres cubes sont suffisantes pour satisfaire aux besoins de l’industrialisation. Le gaz, propriété de l’État, est concédé au Petroleum Development Oman (P.D.O.) qui détient également 60 p. 100 de la production pétrolière.
Le minerai de cuivre de la région de Sohar est traité et raffiné depuis 1983 par l’Oman Mining Company (Omco). Les trois gisements qui approvisionnent cette usine, connus depuis la plus haute antiquité, produisent environ 11 millions de tonnes de minerai destiné à l’exportation vers la Grande-Bretagne, le Japon, la Corée et certains pays de la Péninsule arabique. Des enquêtes géologiques ont mis en évidence des gisements de chrome et de manganèse dans les régions du wadi Samad et de Ras al-Hadd. De même que pour le pétrole, l’Oman multiplie les prospections de minerais sur l’ensemble du pays où a été démontrée, à côté des minerais déjà cités, la présence de fer, de charbon, d’amiante et de phosphates.
Contrastant avec le développement des activités pétrolières, le déclin des activités traditionnelles – agriculture, pêche, élevage –, dont cependant une grande partie de la population omanaise tire encore le principal de son revenu, a été précipité par la flambée des prix de 1973. Le gouvernement n’ayant que tardivement perçu ce danger a créé en 1981 une Banque de l’agriculture et des pêcheries destinée à soutenir ces activités par une assistance technique et des prêts. Jusqu’à une date récente, la pêche maritime était la principale richesse de l’Oman; fournissant en premier lieu le marché intérieur, les 100 000 tonnes de prises annuelles permettent en 1987 des exportations. La construction d’entrepôts frigorifiques et l’équipement du pays en camions réfrigérés ont permis l’approvisionnement régulier des populations de l’intérieur dont l’alimentation de base est le poisson. Des accords ont été passés avec des sociétés japonaises puis coréennes autorisées à pêcher dans les eaux territoriales et qui fournissaient en retour de 30 à 40 p. 100 de leurs prises au sultanat. En 1986, le Centre des sciences maritimes et des pêcheries s’est ouvert, qui doit favoriser le développement des pêcheries, évaluer les richesses ichtyologiques du littoral et leur exploitation maximale sans risque de suppression des espèces. Dans le nord du pays, l’élevage caprin est associé à l’agriculture; au Dhofar, l’élevage bovin est extensif. Bien qu’il ait été amélioré par la création de services vétérinaires et par des campagnes de vaccination du bétail, l’élevage reste limité par les conditions climatiques et n’approvisionne que chichement le marché intérieur. Concernant l’eau, ce bien rare par excellence, des réglementations ont été mises en place afin d’en assurer une gestion rationnelle; elles visent en particulier la plaine de la Bâtina où une ponction désordonnée avait entraîné un début de salinisation des sols.
Si, au cours de la première décennie de règne du sultan, la priorité a été accordée aux infrastructures, dont le pays était totalement démuni, et le secteur des activités traditionnelles délaissé, il semble que dans la décennie actuelle une prise de conscience des dangers que représentait cet abandon ait eu lieu. La création de différents organismes destinés à favoriser et à soutenir les activités du secteur traditionnel atteste ce souci récent. Si le pétrole reste le «sang du pays» selon une expression omanaise, sa production limitée exige que les activités non pétrolières soient appelées à jouer un rôle croissant et que l’«après-pétrole» soit préparé.
Oman
(mer d') mer de l'océan Indien, entre l'Inde et l'Arabie. Le golfe d'Oman communique avec le golfe Persique par le détroit d'Ormuz.
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Oman
(sultanat d') (Saltanat 'Umân), état du S.-E. de l'Arabie, sur la mer et le golfe d'Oman; 212 457 km²; env. 1 380 000 hab.; cap. Mascate. Nature de l'état: monarchie absolue. Langue off.: arabe. Monnaie: rial d'Oman. Population: Arabes (en majorité). Relig.: islam sunnite (25 %) et ibadite, secte liée au kharidjisme (75 %).
— L'intérieur est montagneux (alt. max. 3 020 m), les côtes sont très découpées. Princ. ressources: pétrole, gaz.
— à cause de sa situation, le pays se livra tôt au commerce. Aux XVIIe et XVIIIe s., il domina les régions du golfe Persique et une partie de la côte E. de l'Afrique, Zanzibar notam. Lié à la G.-B. (1891), il s'est nommé jusqu' en 1970 sultanat de Mascate-et-Oman. En 1970, le sultan Qabus déposa son père. De 1970 à 1979, une rébellion, soutenue par le Yémen du Sud, occupa la région montagneuse du Sud. Elle fut écrasée par l'armée iranienne, à laquelle le sultan Qabus avait fait appel. Contrairement à son père, traditionaliste, Qabus a modernisé son pays (hôpitaux, enseignement, routes, etc.) et l'a doté d'une Constitution.
Encyclopédie Universelle. 2012.