⇒DÉCOMBRE, subst. masc.
A.— Au sing., rare, littér. Ce qui reste après la destruction d'un édifice. À l'angle de la cour, ainsi qu'un témoin sombre, Un squelette de tour, formidable décombre (HUGO, Légende, t. 2, 1859, p. 534) :
• 1. ... la guerre était venue, et la vie s'en était retirée; Maremma aujourd'hui était une ville morte, (...). Je regardais passer sous mes yeux dans une rêverie ce décombre de mer, pareil aux délivres d'une grande ville charriées à la côte par une inondation.
GRACQ, Le Rivage des Syrtes, 1951, p. 90.
B.— Au plur. Décombres.
1. Débris qui restent sur le terrain après l'écroulement d'une élévation rocheuse ou la démolition d'un édifice. Un amas, un tas, un monceau de décombres. Tout est anéanti ou du moins enseveli sous les décombres de la montagne (DUSAULX, Voy. Barège, t. 1, 1796, p. 107). Toutes les vieilles villes ont vu leur terrain s'élever sous les décombres successifs (T'SERSTEVENS, Itinér. esp., 1963, p. 279) :
• 2. Jean Tournier était occupé, (...) à extraire les cadavres et les blessés de dessous les décombres d'un pâté de maisons de la ville arabe, anéanties, au début de la semaine, par trois bombes.
GIDE, Journal, 1943, p. 160.
2. Au fig. et souvent péj. Restes de ce qui a existé dans sa plénitude avant d'être partiellement ou complètement détruit. Ne songeant qu'à lui, à lui seul, perdu dans les décombres de ses rêves (FLAUB., Éduc. sentim., t. 2, 1869, p. 274). Les décombres du christianisme (BLOCH, Destin, 1931, p. 258).
Rem. Se rencontre parfois au fém. Il faut (...) qu'un cyclone, (...) ait tout détruit, jusqu'aux dernières décombres! (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p. 72). Poussiéreuses décombres (MALÈGUE, Augustin, t. 1, 1933, p. 156).
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. dep. 1718, d'abord au sing. (Ac. 1718, 1740). Étymol. et Hist. 1404 « action d'enlever les décombres » (Marché, Arch. Seine-et-Marne, II, 98 ds GDF.); 1572 « débris d'un édifice écroulé » (MELIN DE SAINT GELAIS, Genème, II, 338 ds HUG.). Déverbal de décombrer « débarrasser de ce qui encombre, décharger » (1re moitié XIIe s., Charroi de Nîmes, éd. D. Mac Millan, 1180), anton. de encombrer (préf. dé-1). Fréq. abs. littér. :499. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 578, b) 1 047; XXe s. : a) 819, b) 574. Bbg. DELAMAIRE (J.). Du Gaulois ds les décombres. Vie Lang. 1973, p. 515.
décombre [dekɔ̃bʀ] n. m. (rare au sing.).
ÉTYM. 1572; « action de décombrer », 1404; de décombrer.
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I Au plur. || Décombres.
1 Amas de matériaux provenant d'un édifice détruit. ⇒ Déblai, débris, gravats, ruine. || Décharger les décombres. ⇒ Décharge. || Enterrer qqn, qqch. sous les décombres. || Plante qui croît dans les décombres. ⇒ Rudéral. || Un amas, un monceau de décombres (→ Cloaque, cit. 2).
1 (…) en se glissant à travers les décombres (…)
Voltaire, Candide, 5.
2 Voilà un homme dont la maison tombe en ruine; il l'a démolie pour en bâtir une autre. Les décombres gisent sur son champ, et il attend des pierres nouvelles pour son édifice nouveau.
A. de Musset, la Confession d'un enfant du siècle, I, II.
3 Jean Tournier était occupé, avec une équipe de jeunes gens, ces derniers matins, à extraire les cadavres et les blessés de dessous les décombres d'un pâté de maisons (…)
Gide, Journal, 1er janv. 1943.
2 Fig. et littér. Résidus, ruines. || Les décombres d'un mouvement littéraire, d'une civilisation.
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II Au sing. (avec une valeur stylistique). Rare. Démolition; fait de s'effondrer. ⇒ Décombrement (2.).
4 Braoum ! Vraoum !… C'est le grand décombre !… Toute la rue qui s'effondre au bord de l'eau !… C'est Orléans qui s'écroule et le tonnerre au Grand Café !… Un guéridon vogue et fend l'air ! (…) Tout un mobilier qui bascule, jaillit des croisées, s'éparpille en pluie de feu !…
Céline, Guignol's band, p. 7.
Encyclopédie Universelle. 2012.