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bigornot

⇒BIGORNEAU, BIGORNOT, subst. masc.
Petit objet à deux pointes ou deux bouts.
A.— TECHNOL. Petite bigorne, petite enclume :
1. Chaque coup de marteau devenait efficace, sur le bout conique du bigornot où s'enroulait le rameau de fer rouge dans un juste dessin...
J. DE LA VARENDE, La Normandie en fleurs, 1950, p. 173.
B.— P. méton., MALACOLOGIE. [P. réf. aux deux cornes du limaçon] Petit coquillage comestible, très commun sur les côtes de l'Océan. Synon. vigneau. Cueillir, ramasser des bigorneaux sur la grève :
2. — À votre place, les Boches auraient pu arriver sans que j'en sois davantage prévenu. On nous cueillerait comme des bigorneaux au fond de nos trous avec une épingle...
ROMAINS, Les Hommes de bonne volonté, Verdun, 1938, p. 18.
P. anal. de forme (au plur.). Petite monnaie :
3. C'est une pauv' môme qui fait l'avenue du Maine (...) j'pourrais pas laisser une femme passer la nuit dehors (...) pour rapporter une poignée de bigorneaux.
A. SIMONIN, J. BAZIN, Voilà taxi! 1935, p. 122.
C.— Arg. [P. réf. à une coiffure à deux cornes]
1. Sergent de ville. Si l' bigornot barr' ton trimin / Sur le caillou mets-lui un pain! (HOGIER-GRISON, Le Monde où l'on flibuste, 1887, p. 327).
2. P. ext.
a) ,,Fantassin de marine (mar. 1861)`` (ESN. 1966).
b) ,,Fantassin de ligne (zouaves 1870; voy., 1926)`` (ESN. 1966) :
4. [Le capitaine de zouaves] : un spahi ou un chass' d'Af' qui se fait (...) tambouriner le cuir par les Arbis avant qu'un de mes bigorneaux ait même la colique.
G. D'ESPARBÈS, La Folie de l'épée, 1927, p. 133.
Péjoratif :
5. Il a expliqué ça aux copains de l'état-major qui sont restés pantois devant tant d'astuce! Conan haussa longuement les épaules : — Un raisonnement de bigorneau, mon vieux!
VERCEL, Capitaine Conan, 1934, p. 229.
PRONONC. ET ORTH. :[]. Var. bigornot (supra ex. 1).
ÉTYMOL. ET HIST.
I.— 1. 1423 « petite bigorne » (Exéc. test. de Angnies de Hortioir, A. Tournai dans GDF. Compl.), en partic. pour les serruriers (CHESN.); 1950 bigornot (LA VARENDE, La Normandie en fleurs, p. 162); 2. 1611 zool. « petit coquillage univalve ayant la forme d'un colimaçon » (COTGR.); 3. 1841 (A. LUCAS, Des Dangers de la prostitution, considérés sous le rapp. de la mor. et de l'admin., p. 33 : Les sergents de ville, les bigorneaux); 1887 bigornot (HOGIER-GRISON, supra, C1); 1861 dans ESN.; 1863 (LITTRÉ : Bigorneau ... Ancien sobriquet moqueur des soldats de marine); cf. 1927 (A.-L. DUSSORT, Des Preuves d'une existence, ms. dép. par G. Esnault en 1938, p. 159 : Bigorneau. Soldat d'infanterie); 4. 1919 « imbécile » (cité par G. Esnault, 1936 dans IGLF Techn.).
II.— [1925 dans ESN.]; 1935 « menue monnaie » (A. SIMONIN, J. BAZIN, supra ex. 3).
I dér. de bigorne1 étymol. I 1; 2 dér. avec méton. de bigorne « limaçon de mer » (Mém. de la Soc. des Antiquaires de France ds FEW t. 1, p. 253a); 3 prob. en raison du chapeau bicorne qu'ils portaient à l'orig.; 4 se rattache au sémantisme « de travers, contrefait » de mots tels que lyonn. bigornu « contrefait, boiteux » (DU PUITSP.), v. bigorne2 ou emploi péj. de 3 « fantassin ». II prob. p. anal. avec bigorneau « coquillage », par suite de sa forme ronde et de son peu de valeur.
STAT. — Fréq. abs. littér. :17.
BBG. — GEORGE (K. E. M.). Formules de négation et de refus en fr. pop. et arg. Fr. mod. 1970, t. 38, p. 309. — SAIN. Lang. par. 1920, p. 172, 541.

Encyclopédie Universelle. 2012.