SANHÉDRIN
SANHÉDRI
Terme venant du grec sunedrion (conseil, tribunal, école) et adopté par les Juifs à l’époque du second Temple pour désigner l’institution suprême, politique, religieuse et judiciaire du peuple d’Israël, à savoir une assemblée de soixante et onze membres. Les attributions du Sanhédrin furent d’abord politiques et judiciaires (selon Josèphe, les Évangiles et les sources grecques), religieuses ensuite (selon la Mishna).
La Mishna limite ses pouvoirs judiciaires aux questions suivantes: mise en jugement d’une tribu, d’un faux prophète, d’un grand prêtre; déclaration de guerre; condamnation d’une cité pour impiété; combustion de la «vache rousse»; jugement d’un ancien devenu rebelle; ordalie de la femme soupçonnée d’adultère; rupture de la nuque d’une génisse pour expier un meurtre dont l’auteur est inconnu. On ne sait comment étaient nommés les membres du Sanhédrin: le devenaient-ils par cooptation ou à la suite d’une désignation par l’autorité politique? On se demande de même si le Sanhédrin était composé de notables pharisiens sous la présidence du grand prêtre ou du nassi (prince) assisté de l’ab-bet-din (père du tribunal). Selon les Actes des Apôtres (XXIII, 6), des sadducéens aussi en faisaient partie. Pour certains historiens, il était une assemblée plénière de trois sanhédrins (sacerdotal, pharisien, aristocratique) comptant chacun vingt-trois membres, cette assemblée étant présidée par le nassi et son assesseur.
La première mention sûre du Sanhédrin comme cour suprême remonte au \SANHÉDRIN Ier siècle: Hérode est cité à comparaître devant le Sanhédrin pour crime politique (Josèphe, Antiquités judaïques , XV, 173). Les origines de cette institution sont mal connues: faut-il l’assimiler aux «grandes assemblées» convoquées à des moments cruciaux de l’histoire du second Temple, telle cette «grande assemblée des prêtres, du peuple, des chefs de la nation et des anciens du pays» qui élut en \SANHÉDRIN 140 Simon Maccabée comme ethnarque des Juifs (I Macc., XIV, 27-49)? Sous la domination romaine, les pouvoirs du Sanhédrin furent réduits au domaine religieux. Il s’assemblait alors au Temple dans la «salle de la pierre taillée». Les Évangiles placent pourtant le procès de Jésus au cours d’une nuit de Pâque, dans le palais du grand prêtre, alors que les sessions n’étaient possibles légalement qu’entre les deux sacrifices journaliers (c’est-à-dire environ entre 7 h 30 et 15 h 30) et jamais pour les fêtes et sabbats, ni durant leurs veilles. Après la destruction du Temple, le Sanhédrin, institution religieuse d’Israël, siège à Jabneh, puis en Galilée, à Ousha, à Shefaram, à Bet Shearim, à Sephoris et à Tibériade. Les Romains reconnaissent sa compétence pour les affaires intérieures juives jusqu’en 425. Il est alors présidé exclusivement par le nassi et l’ab-bet-din. La législation appliquée par le Sanhédrin est décrite — pour certains domaines — par le traité «Sanhédrin» de la Mishna, le quatrième de l’ordre des Dommages: y sont examinés les compétences des divers cours, les procédures civiles et criminelles, l’audition des témoins, les modes d’exécution des criminels, le problème de la résurrection de ces derniers.
Après la disparition du Sanhédrin, l’autorité judiciaire appartint aux tribunaux rabbiniques à circonscription limitée. Un «Grand Sanhédrin» fut convoqué par Napoléon Ier et siégea en février et mars 1807. Comprenant deux tiers de rabbins et un tiers de laïcs, présidé par un talmudiste renommé, le rabbin David Sintzheim, il devait assurer l’entrée des Juifs dans la société européenne. Ses décisions prohibent la polygamie, lient tout mariage ou divorce à un acte d’état civil, déclarent que les Juifs doivent regarder leurs concitoyens comme leurs frères et le pays où ils vivent comme leur patrie, pratiquer des professions «utiles», suivre les lois du pays quant à la pratique du crédit. Le principe majeur du Grand Sanhédrin fut la distinction entre les lois religieuses, valables à jamais, et les lois liées à la vie nationale juive en Palestine, réputées caduques (D. Tama, Collection des procès-verbaux et décisions du Grand Sanhédrin , Paris, 1807).
Le XXe siècle a vu se poser, à la suite des massacres hitlériens et de la renaissance d’un État juif, nombre de problèmes relevant de la juridiction religieuse et que seule une autorité unanimement reconnue dans le judaïsme pourrait résoudre: à ce titre, la reconstitution d’un sanhédrin serait, pour beaucoup, une nécessité.
sanhédrin [ sanedrɛ̃ ] n. m.
• 1605 sanedrin; mot araméen employé dans les Évangiles, du gr. sunedrion « assemblée, conseil » → synode
♦ Hist. Assemblée, conseil formé de membres de la noblesse sacerdotale juive (sadducéens) et de docteurs pharisiens, tribunal religieux et civil pour toute la Palestine antique. — GRAND SANHÉDRIN : le tribunal de Jérusalem.
● sanhédrin nom masculin (araméen sanhedrin, du grec sunedrion, assemblée) Autorité religieuse juive suprême, conseil suprême du judaïsme à l'époque gréco-romaine, siégeant à Jérusalem.
sanhédrin
n. m. HIST Tribunal civil et religieux des Juifs de la Palestine antique.
⇒SANHÉDRIN, subst. masc.
A. — HIST. JUIVE
1. [À l'époque du Second Temple]
a) (Petit) sanhédrin. Tribunal de vingt trois membres chargé des affaires criminelles et des violations de la Loi juive, qui siégeait dans les principales villes de Palestine (d'apr. E. FLEG, Anthologie juive, 1956, p. 633).
b) (Grand) sanhédrin. Conseil suprême doté de pouvoirs politiques, religieux et judiciaires, placé sous l'autorité du grand-prêtre, qui semble s'être séparé sous le règne d'Hérode en deux institutions: le sanhédrin politique essentiellement composé de sadducéens, présidé par le grand-prêtre, et qui perdit son autorité à l'époque romaine et le sanhédrin religieux composé de soixante et onze membres, pour la plupart docteurs de la Loi (d'apr. E. FLEG, Anthologie juive, 1956, p. 633 et I. EPSTEIN, Le Judaïsme, trad. par L. Jospin, 1962, p. 84 et 94). [Pilate chercha] à affaiblir le pouvoir et l'influence du Sanhédrin religieux (...). D'autre part, il imposa au Sanhédrin politique la responsabilité de maintenir l'ordre romain dans la province (I. EPSTEIN, Le Judaïsme, trad. par L. Jospin, 1962, p. 100).
2. [Après la destruction du Temple en 70 et jusqu'en 425] Académie religieuse de Yavné puis de Galilée organisée en Corps souverain chargé de l'éducation, de la législation, de la justice et du gouvernement. Dans la communauté juive, tout relève du Patriarche (...). Le Sanhédrin, reconstitué après 70 sous la forme d'une académie religieuse, lui est étroitement subordonné, et l'assiste comme son conseil (M. SIMON, Verus Israel, 1964, p. 84). V. patriarcat A 1 ex. de I. Epstein.
3. [À l'époque mod.] Assemblée convoquée par Napoléon dans le but de favoriser l'assimilation des Juifs de France, qui siégea à Paris en février 1807 mais fut dissoute après un mois d'existence. [Napoléon conçut] le projet audacieux de convoquer un grand Sanhédrin, formé comme autrefois à Jérusalem de soixante et onze membres, pour deux tiers des rabbins, « dont les actes seraient placés à côté du Talmud, pour être articles de foi et principes de législation religieuse » (B. BLUMENKRANZ, Hist. des Juifs en France, 1972, p. 294).
B. — P. métaph., vx. Je les ai réunis [les hommes de confiance] en comité, en tribunal, en sénat, en sanhédrin, en aréopage, et nous avons rendu la décision suivante (...). « La truffe n'est point un aphrodisiaque positif; mais elle peut, en certaines occasions, rendre les femmes plus tendres et les hommes plus aimables » (BRILLAT-SAV., Physiol. goût, 1825, p. 99).
REM. Sanhédriste, adj., hist. juive. Membre du Sanhédrin. Au dire de Josèphe (...), Hérode célèbre son avènement en faisant exécuter tous les sanhédristes (Ch. GUIGNEBERT, Le Monde juif vers le temps de Jésus, 1950, p. 69).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1762. Plur. des sanhédrins. Étymol. et Hist. 1. 1573 senedrin nom d'un des traités du Talmud (G. PARADIN, Mém. de l'hist. de Lyon, p. 247 ds GDF. Compl.: livre nommé senedrin); 2. a) 1605 sanedrin « tribunal des Juifs » (P. LE LOYER, Spectres, l. 2, chap. 3, p. 111: leur Sanedrin ou Consistoire); 1663 Sanhedrim (Th. HERBERT, Relation du voyage de Perse et des Indes orientales, trad. de l'angl. par A. de Wicquefort, p. 203 cité par R. ARVEILLER ds Mél. Dauzat (A.), pp. 29-30: quelques Mosquées, des Sinagogues et des Sanhedrims); 1669 sanhédrin (La Sainte Bible, éd. S. et H. des Marets, Amsterdam, Matth., 5, 22, Commentaire, t. II, f ° 3, v °, note 42: en Jerusalem la cour souveraine des septante et un hommes, qui s'appeloit Sanhedrin); b) 1669 grand Seinedrime (J. CHAPELAIN, Lettres, éd. Ph. Tamizey de Larroque, t. 2, p. 646, à M. Worstius: le grand Seinedrime des Hébreus); 1690 grand sanhédrin (BOSSUET, Cinquième avertissement aux Protestants, p. 48 ds LITTRÉ); 3. 1740-55 péj. « tribunal suspect, partial » (SAINT-SIMON, Mém., éd. A. de Boislisle, t. 19, p. 208: ce qui se peut appeler leur sanhédrin secret). Empr. à l'hébreu mishnaïque « tribunal rabbinique » et celui-ci au gr. « assemblée siégeant; conseil; collège judiciaire; le Sénat (à Rome, Carthage, etc.); le Sanhédrin (chez les Juifs, dans le NT) », dér. de « qui siège ensemble; membre d'une assemblée délibérante » (- « ensemble, avec » cf. syn-; - « qui siège », cf. « siège »). Fréq. abs. littér.:28.
sanhédrin [sanedʀɛ̃] n. m.
ÉTYM. 1663; senedrin « traité du Talmud », 1573; mot araméen employé dans les Évangiles, du grec synedrion « assemblée, conseil ». → Synode.
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1 Didact. (hist.). Assemblée, conseil formé de membres de la noblesse sacerdotale juive (sadducéens) et de docteurs (cit. 1) pharisiens, tribunal religieux et civil pour toute la Palestine antique (et peut-être toute la Galilée). || Le grand sanhédrin, le sanhédrin siégeait à Jérusalem. — Les sanhédrins des divisions administratives romaines (toparchies) étaient des sortes de conseils municipaux.
0 Le sanhédrin, sous qui la Judée est courbée,
Ébauché par Moïse, accru par Macchabée (…)
Hugo, la Légende des siècles, II, II, XII.
2 (V. 1720-1730, Saint-Simon). Fig. et vx. (Péj., à cause de la condamnation de Jésus). Tribunal suspect, partial.
Encyclopédie Universelle. 2012.