abandonné, ée [ abɑ̃dɔne ] adj.
• de abandonner
1 ♦ Qu'on a abandonné, délaissé. Enfants abandonnés. Séduite et abandonnée (par son amant).— Abandonné par tous les médecins : considéré comme incurable. ⇒ condamné. — Sans propriétaire. Chien abandonné. Biens abandonnés.
2 ♦ Que ses habitants ont abandonné. Maison abandonnée. Village abandonné. ⇒ dépeuplé, déserté, inhabité.
3 ♦ Qui n'est pas utilisé. « L'autre route est abandonnée » (A. Gide). Modèle abandonné.
4 ♦ Qui a de l'abandon (6o). Position abandonnée.
⊗ CONTR. Recherché. Tendu.
● abandonné, abandonnée nom Littéraire. Personne délaissée, abandonnée sans protection.
abandonné, ée
adj. et n. Qui a été l'objet d'un abandon. Un enfant abandonné.
|| Subst. Secourons les abandonnés. Un pauvre abandonné.
⇒ABANDONNÉ, ÉE, part. passé adj. et subst.
I.— [Correspond à abandonner]
Rem. A tous les sens et constr. du verbe; il peut avoir en outre des sens partic., dus à sa nature de forme nom. du verbe exprimant un état, résultat de l'action d'abandonner.
a) Il s'applique à un bien :
• 1. 1406. L'immeuble abandonné ou cédé par père, mère ou autre ascendant, à l'un des deux époux, soit pour le remplir de ce qu'il lui doit, soit à la charge de payer les dettes du donateur à des étrangers, n'entre point en communauté; sauf récompense ou indemnité.
Code civil, 1804, p. 256.
• 2. Pourtant, Sédille, toujours anxieux et méfiant, voulut poser une question : que deviendraient les actions abandonnées par ceux des actionnaires qui ne voudraient pas user de leur droit.
É. ZOLA, L'Argent, 1891, p. 178.
b) Il s'applique à un lieu :
• 3. Lorsqu'autrefois parmi nous on sépara les tombeaux des églises (...) le peuple s'opposa par-tout à l'abandon des antiques sépultures. (...) Au lieu de ces cimetières fréquentés on nous assigna dans quelque faubourg un enclos solitaire abandonné des vivans et des souvenirs, ...
F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Génie du Christianisme, t. 2, 1803, p. 341.
c) Il s'applique à des pers. :
• 4. Sophie et Maurice. SOPHIE. — Laissez-moi seule, vous dis-je; votre présence m'afflige, votre tendresse m'offense, et vos offres me font horreur. J'aimais votre frère, lorsqu'il était l'espoir de sa famille; je l'adore depuis qu'il en est banni. Hélas! Déshérité par son père, trahi par ses amis, persécuté par son frère, sans secours, sans asyle, seul, abandonné de la nature entière, il n'a pour supporter ses malheurs, que la force de son courage et les larmes de Sophie ...
J.-H.-F. LA MARTELIÈRE, Robert, chef des brigands, 1793, I, 1, p. 1.
• 5. Tous les Chrétiens se tenoient renfermés dans leurs maisons, évitant à la fois la fureur du peuple et le spectacle de l'idolâtrie. On ne voyoit errer au dehors que quelques prêtres attachés au service des hospices et des prisons, des diacres chargés de sauver les pauvres voués à la mort par Galérius, des femmes qui recueilloient les esclaves abandonnés par leurs maîtres, et les enfants exposés par leurs mères.
F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Les Martyrs, t. 3, 1810, p. 197.
• 6. Le banquier était arrivé à la limite de ses sacrifices, et il avait formellement déclaré qu'il ne les pousserait pas plus loin (...) la danseuse pleura, mais le banquier resta inflexible : on avait épuisé le crédit; il tenait ses engagements avec une rigueur mathématique. C'est dans de pareils moments que Saint-Ernest se montrait admirable. Il cherchait les cas désespérés, les malades abandonnés de tout le monde, et l'Aspic était dans ce cas.
L. REYBAUD, Jérome Paturot, 1842, p. 56.
• 7. « Le docteur Chikapouff, médecin-praticien des bords du Don, fait connaître généralement à tous les citoyens de cette capitale et de la France entière, comment il a prouvé, au moyen des soins qu'il a donnés, dans l'espace de trois mois, à environ cent cinquante incurables et par conséquent abandonnés par tous les médecins de la ville, et que les hôpitaux même ont expulsés ne pouvant arriver à la guérison desdits incurables; que lui, Chikapouff, avait pénétré dans le vrai de la médecine, ... »
L. REYBAUD, Jérome Paturot, 1842 p. 91.
— Être assez abandonné de Dieu pour + inf. :
• 8. Ma foi! dit Gringoire, c'est qu'elle est ma femme et que je suis son mari.
L'œil ténébreux du prêtre s'enflamma.
— Aurais-tu fait cela, misérable? cria-t-il en saisissant avec fureur le bras de Gringoire; aurais-tu été assez abandonné de Dieu pour porter la main sur cette fille?
V. HUGO, Notre-Dame de Paris, 1832, p. 295.
2. Abandonné n'est pas suivi d'une prép.; l'agent est implicite. :
a) S'applique à un bien, à une chose (noter les emplois dans diverses lang. techn.) :
• 9. [Dans une carrière de gypse], si le gîte ne peut être enlevé en une seule fois, on l'exploite par tranches horizontales, dans chacune desquelles on opère par piliers abandonnés.
J. CAHEN, E. BRUET, Carrières, plâtrières, ardoisières, 1926, p. 192.
Rem. Pilier abandonné : cf. pilier.
• 10. Aux paroles de sa belle-mère, Camille tomba des nues. Après en avoir voulu vingt-quatre heures à Le Loreur pour les potins qu'il avait dû faire à Agnès, ne l'ayant pas rencontré, il l'avait oublié. D'autant plus qu'Agnès, les jours suivants, était devenue douce comme un agneau. Il croyait que c'était parce qu'il lui avait donné un peu plus d'argent que d'habitude, Gravier ayant fait rentrer une créance presque abandonnée.
P. DRIEU LA ROCHELLE, Rêveuse bourgeoisie, 1939, p. 125.
b) S'applique à un lieu (lieu inhabité, désert, vide; lieu sauvage) :
• 11. ... elle se contenta de sourire, en disant :
« il y a donc long-temps que Durantal est inhabité ... »
— Il est abandonné depuis la Révolution : les propriétaires n'avoient plus assez de fortune pour y rester, ...
H. DE BALZAC, Annette et le criminel, t. 3, 1824, p. 33.
• 12. Cà et là, en allant dans les champs, vous rencontrez, derrière un mur de pierres grises, quelque ferme silencieuse, manoir abandonné, où les maîtres ne viennent pas.
G. FLAUBERT, Par les champs et par les grèves, 1848, p. 356.
• 13. Il y a à Castel-Gandolfo un endroit abandonné, un coin désert où personne ne passe, une place inanimée, muette, où des gamins jouent à la marelle italienne, ...
E. et J. DE GONCOURT, Madame Gervaisais, 1869, p. 145.
• 14. ... ces feuilles tombant toujours, semblaient des larmes, de grandes larmes versées par les grands arbres tristes (...). Ils pleuraient dans le silence du bois désert et vide, du bois abandonné et redouté, ...
G. DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, t. 2, La Petite Roque, 1885, p. 1033.
c) S'applique à un animal (notamment à un chien) :
• 15. Ses yeux se fixaient sur Jules avec une curiosité effrayante et parcouraient toute sa personne, tout en le flairant et en tournant autour de lui. Jules en eut d'abord horreur, puis pitié, tant le pauvre animal semblait misérable et abandonné. C'était un de ces chiens qui ont perdu leur maître, que l'on poursuit avec des huées, qui errent au hasard dans la campagne, que l'on trouve morts au bord des chemins sans savoir à qui ils appartenaient.
G. FLAUBERT, La Première éducation sentimentale, 1845, p. 227.
d) S'applique à des pers. (surtout à un enfant, notamment dans la lang. du dr.) :
• 16. A Aimé Martin.
Mars-Avril 1836.
Mon cher ami, Vous m'avez trouvé l'homme qu'il me fallait. (...) dites-lui de me faire les enfants trouvés et abandonnés. Amenez-le dîner avec vous un jour.
A. DE LAMARTINE, Correspondance, t. 2, 1836, p. 207.
• 17. Le marquis se laissa tomber sur un banc, au pied d'un arbre, cacha sa tête dans ses mains et fondit en larmes. Il pleura comme une femme, comme un enfant privé de sa mère et abandonné sur la voie publique. Cet homme riche à millions, heureux naguère et dont la colossale stature semblait résumer le type de la force, s'était senti tout à coup le plus infortuné et le plus délaissé des hommes.
P.-A. PONSON DU TERRAIL, Rocambole, t. 3, Le Club des valets de cœur, 1859, p. 39.
• 18. M'a-t-on jamais vu reculer devant le danger? ... Ai-je marchandé mon dévouement au plus pauvre, au plus abandonné? ... La diphtérie qui a failli m'emporter, je l'avais gagnée d'une mendiante, gibier d'hôpital et de bagne ...
F. DE CUREL, La Nouvelle idole, 1899, I, 6, p. 185.
• 19. Les enfants qui souffrent d'une naissance illégitime, de mauvais traitements ou de scènes de violence familiale, inclinent à imaginer qu'ils sont issus d'une famille inconnue, riche ou d'illustre lignée : ce mythe, plus ou moins formulé chez beaucoup d'enfants, explique le succès de la littérature de l'enfant perdu ou abandonné.
E. MOUNIER, Traité du caractère, 1946, p. 377.
— Substantivement. [En partic. en parlant d'un orphelin, des morts, des pauvres, du Christ] :
• 20. ... Visite au chateau, aux princes. Agitation, bavardage et mouvement sans objet, j'ai passé la journée en affaires de commission; était de malaise et de vide. Dîner seul chez moi. Visites du soir; fatigue et embarras de tête.
« Je suis un pauvre abandonné, banni dans une terre ennemie où les combats sont continuels et les disgrâces très grandes ».
J'éprouve dans chaque lieu ces combats, ces peines, cette tristesse de l'exil.
MAINE DE BIRAN, Journal, 1819, p. 208.
• 21. LA TRÉPASSÉE
C'en est fait! C'en est fait! Il est là! Sa morsure
M'ouvre au flanc une large et profonde blessure;
Il me ronge le cœur.
Quelle torture! O Dieu, quelle angoisse cruelle
Mais que faites-vous donc lorsque je vous appelle,
O ma mère, ô ma sœur?
LE VER
Dans leur âme déjà ta mémoire est fanée,
Et pourtant sur ta fosse, ô pauvre abandonnée,
L'oranger est tout frais.
La tenture funèbre à peine repliée,
Comme un songe d'hier elles t'ont oubliée,
Oubliée à jamais.
T. GAUTIER, La Comédie de la mort, La Vie dans la mort, 1838, p. 17.
• 22. Elle avait poussé dans un faubourg, sur le pavé parisien; et, grande, belle, de chair superbe ainsi qu'une plante de plein fumier, elle vengeait les gueux et les abandonnés dont elle était le produit.
É. ZOLA, Nana, 1880, p. 1269.
• 23. 29 avril. — Apparition extraordinaire d'un autre ingénieur, ami de Termier et passionné pour mes livres. J'aurai sans doute l'occasion de reparler de cet ami des pauvres et des abandonnés. Il se nomme Philippe Raoux...
L. BLOY, Journal, 1907, p. 347.
• 24. Les gardes ôtent la pierre. Le grand prêtre s'avance jusqu'à l'entrée de la caverne.
Le grand prêtre. — Vous, les oubliés, les abandonnés, les désenchantés, vous qui traînez au ras de terre, dans le noir, comme des fumerolles, et qui n'avez plus rien à vous que votre grand dépit, vous les morts, debout, c'est votre fête! Venez, montez du sol comme une énorme vapeur de soufre chassée par le vent; montez des entrailles du monde, ô morts cent fois morts, ...
J.-P. SARTRE, Les Mouches, 1943, II, tabl. 1, 2, p. 46.
II.— [Correspond à s'abandonner]
A.— [Correspond à II A 2 a de s'abandonner] Qui a renoncé à agir, à lutter :
• 25. Une malheureuse assez abandonnée pour se tuer elle-même!
P. MÉRIMÉE, Arsène Guillot, 1847, p. 92.
• 26. ... sitôt qu'il a foulé la liste couleur d'ambre, il oublie que son propre calcul en a tracé d'avance l'itinéraire inflexible. Au premier pas sur le sol magique arraché par son art à l'accablante, à la hideuse fertilité de la terre, nu et stérile, bombé comme une armure, le plus abandonné reprend patience et courage, rêve qu'il est peut-être une autre issue que la mort à son âme misérable ... Qui n'a pas vu la route à l'aube, entre ses deux rangées d'arbres, toute fraîche, toute vivante, ne sait pas ce que c'est que l'espérance.
G. BERNANOS, Monsieur Ouine, 1943, p. 1409.
B.— [Correspond à II A 2 b de s'abandonner] Qui a renoncé à la direction ou à la possession de soi-même :
• 27. On lui [M. de Talleyrand] a attribué un goût d'épigrammes et de saillies qu'il n'avait pas; son entretien n'avait ni la méchanceté ni l'essor que le vulgaire se plaisait à citer et à admirer dans les reparties d'emprunt mises sous son nom. Il était, au contraire, lent, abandonné, naturel, un peu paresseux d'expression, mais toujours infaillible de justesse. Il avait trop d'esprit pour avoir besoin de le tendre. Ses paroles n'étaient pas des éclairs, mais des réflexions condensées en peu de mots.
A. DE LAMARTINE, Nouvelles Confidences, 1851, p. 305.
• 28. Je ne sais pas si Delacroix a des imperfections de caractère. J'ai vécu près de lui dans l'intimité de la campagne et dans la fréquence des relations suivies, sans jamais apercevoir en lui une seule tache, si petite qu'elle fût. Et pourtant nul n'est plus liant, plus naïf et plus abandonné dans l'amitié. Son commerce a tant de charmes qu'auprès de lui on se trouve soi-même être sans défauts, tant il est facile d'être dévoué à qui le mérite si bien.
G. SAND, Histoire de ma vie, t. 4, 1855, p. 252.
• 29. ... Les matamores de la troupe étaient atterrés : ,,(...) S'il arrivait malheur à leur garant et fondé de pouvoir, adieu tout! Il leur incomberait alors d'en découdre avec messire la sourdine, et ce n'est pas lui qui serait décousu!`` Mais le protecteur, d'un seul coup d'œil, les rassura : ,,puisqu'on l'exigeait, il serait sage; on pouvait, comme toujours, s'en rapporter à sa parole.`` En effet, au lieu de se jeter en avant, à corps abandonné, comme il l'avait fait deux fois de suite sans autre résultat que de compromettre la partie, il se remit à tâter le fourbe d'en face, ...
L. CLADEL, Ompdrailles, 1879, p. 278.
• 30. ... la chaleur tombait dans l'air immobile. Par moments, une haleine fraîche montait des parquets, que des garçons de magasin arrosaient d'un mince filet d'eau. (...). Des vendeurs nonchalants se tenaient debout, quelques rares clientes suivaient les galeries, traversaient le hall, de ce pas abandonné des femmes que le soleil tourmente.
É. ZOLA, Au bonheur des dames, 1883, p. 540.
• 31. Ses cheveux sont défaits, abandonnés; d'un noir de jais; coupés court sur le front mais retombant comme mouillés sur les épaules.
A. GIDE, Journal, 1910, p. 291.
— En mauvaise part. Sans retenue :
• 32. Quelquefois un plumet échauffé de luxure et de boisson faisait asseoir sur son genou une de ces beautés peu farouches, et lui chuchotait à l'oreille, dans un gros baiser, des propositions anacréontiques reçues avec des rires affectés et un « non » qui voulait dire « oui »; puis, au long de l'escalier, on voyait des groupes qui montaient, l'homme le bras sur la taille de la femme, la femme se retenant à la rampe et faisant de petites façons enfantines, car même en la débauche la plus abandonnée il faut encore quelques semblants de pudeur.
T. GAUTIER, Le Capitaine Fracasse, 1863, p. 315.
— Substantivement. [En parlant d'une femme qui se prostitue, peut-être pour indiquer le motif de sa prostitution] :
• 33. La femme Cuche, cette misérable abandonnée qui se prostituait à tous les hommes, dans les trous de la côte, pour trois sous ou pour un reste de lard, s'était cassé une jambe en juillet; et elle en demeurait contrefaite, boitant affreusement, sans que sa laideur repoussante, aggravée par cette infirmité, lui fît rien perdre de sa clientèle ordinaire.
É. ZOLA, La Joie de vivre, 1884, p. 1004.
ÉTYMOL. — 1. Emploi absolu a) d'une pers., 1165 garce abandonee « prostituée » (CHRÉT. DE TROYES, Guill. d'Angleterre, éd. Champion, 1152 ds COHN, Bemerkungen zu T.-L., ds Arch. St. n. Spr., CXXXIX, 62); ca 1200 « qui agit rapidement » (Ami et Amile, éd. Dembowski, 2952 : Lors ist Amiles trestouz abandonnez Hors de la chambre, en la sale est entrez); 1220-1235 « qui se laisse aller à la dépense » (Lancelot, Richel, 754 ds GDF. : ... il est si larges et si abandonez...); b) d'une chose, 4e quart XIVe s. « inconsidéré » (FROISSART, Poés., Espinette amoureuse, éd. Scheler, 3734 ibid. :Par foi ce fu uns grans oultrages Et uns abandonnés ouvrages); 2e moitié XVe s. « sans mesure » (O. DE LA MARCHE, Mém., II, 1 ibid. : ... grande, large et habandonnee despense de mangiers); 2) a) abandoné de 1165 « prêt à (+ inf.) » (CHRÉT. DE TROYES, Guill. d'Angleterre, éd. Wilmotte, 672 : Moult estes ore abandonee De mentir, si n'en avés honte); fin XIIe s. « qui se livre impétueusement à (qqc.) » (Gar. le Loh., éd. Paris, I, 81 ds GDF. : Tex se fait ore de guerre abandonné; ca 1200 « disposé à, prêt à (qqc.) » (Jourdain de Blaye, éd. Hofmann, 2239 ds T.-L. : Dou bien servir fui toute abandonnee); b) abandonné a 1172-1175 « qui se livre entièrement à (qqc.) » (CHRÉT. DE TROYES, Charrette éd., Förster, 3938 ds T.-L. : a joie abandoné); ca 1190 « qui se dévoue à (qqn) » (Renart, XII, 215 ds TIL., Lex. Ren. s.v. :Pere nostre, Abandonné a totes genz).
Part. passé de abandonner pris adj.
HIST. — Part. passé empl. comme adj., abandonné suit l'évolution gén. de abandonner. Il a connu de nombreux emplois partic. au Moy. Âge (cf. étymol. et GDF.) qui pour la plupart ont disparu au XVIe s. au plus tard. Noter toutefois l'évolution du mot au sens de « prostituée » apparu au XIIe s. (cf. étymol. 1 a). Les dict. du XVIIIe et du XIXe s. connaissent un sens plus gén. « qui est sans frein, qui n'est retenu par aucune loi » : Il faut que vous passiez pour les plus abandonnés calomniateurs qui furent jamais. PASCAL, Provinciales, 16, (Littré). — Empl. comme subst. dès le XVIIe s., un abandonné désigne « un homme débauché », une abandonnée, « une prostituée » : J'aime fort la beauté qui n'est pas profanée Et ne veux pas brûler pour une abandonnée. MOLIÈRE, L'Étourdi, III, 3, (Littré). — Au XVIIIe s., le subst. est surtout en usage en parlant d'une femme. Ce sens subsiste jusqu'à la fin du XIXe s. mais semble actuell. tombé en désuétude. Dep. la fin du XIXe s., abandonné est empl. substantivement pour désigner « celui qui se trouve sans secours ». Noter enfin qq. emplois techn. de l'adj., apparus en 1751 ds l'Encyclop. :. Dr., en parlant des biens auxquels le propriétaire a renoncé; subsiste. . Terres abandonnées, terres dont la mer s'est retirée et qu'on peut faire valoir; n'est plus signalé apr. Lar. 19e. . Chasse : « épithète donnée à un chien courant qui prend les devants d'une meute et qui s'abandonne sur la bête quand il la rencontre »; subsiste jusqu'à QUILLET 1934.
STAT. — Fréq. abs. litt. :4 302. Fréq. rel. litt. :XIXe s. : a) 6 313, b) 6 255; XXe s. : a) 6 219, b) 5 815.
BBG. — BAUDR. Chasses 1834. — LAFON 1963. — LE CLÈRE 1960.
Encyclopédie Universelle. 2012.