accidentel, elle [ aksidɑ̃tɛl ] adj.
1 ♦ Qui arrive par hasard, qui est produit par une circonstance occasionnelle. ⇒ contingent, fortuit, imprévu, occasionnel. Des causes accidentelles. « Ils avaient fait connaissance dans des conditions si accidentelles » (Bourget). — Spécialt Mort accidentelle, du fait d'un accident (4o).
2 ♦ Philos. De l'accident (3o) [opposé à absolu, substantiel et nécessaire].⇒ accessoire, extrinsèque.
3 ♦ Mus. Signes accidentels : accidents (6o).
⊗ CONTR. Certain, constant, fatal, intentionnel, normal , régulier.
● accidentel, accidentelle adjectif (bas latin accidentalis) Qui est l'effet du hasard ; qui n'est pas prévu ; fortuit : Rencontre accidentelle. Qui arrive par accident : Mort accidentelle. Relatif à l'accident (par opposition à substantiel). ● accidentel, accidentelle (citations) adjectif (bas latin accidentalis) Roger Caillois Reims 1913-Paris 1978 Académie française, 1971 L'artiste qui abdique le privilège de la création délibérée pour favoriser et capter de divines surprises ne parvient qu'à produire de l'accidentel. Cases d'un échiquier Gallimard Jean Grenier Paris 1898-Dreux 1971 C'est l'accident qui fait l'artiste. Lexique Gallimard ● accidentel, accidentelle (synonymes) adjectif (bas latin accidentalis) Qui est l'effet du hasard ; qui n'est pas prévu ; fortuit
Synonymes :
- fortuit
- inopiné
- momentané
- passager
Contraires :
- fatal
- inéluctable
- inévitable
- nécessaire
- normal
Relatif à l'accident (par opposition à substantiel ).
Synonymes :
- extrinsèque
Contraires :
- inhérent
- intrinsèque
accidentel, elle
adj. Fortuit, qui arrive par accident. Mort accidentelle.
I.
⇒ACCIDENTEL1, ELLE, adj. et subst. masc.
I.— Qui est de l'ordre de l'accident (cf. accident1 I).
A.— PHILOSOPHIE
1. P. oppos. à substantiel. Qui n'appartient pas à la substance d'un être, d'une chose :
• 1. La volonté n'est donc pas autre chose que l'acte même de la personne considérée sous son aspect offensif plutôt que sous son aspect créateur. Mais on ne saurait substantifier l'un ou l'autre de ces aspects et l'offensivité, avec les qualités qu'elle entraîne : ténacité, esprit de suite, résistance, agressivité n'est que l'expression d'une force créatrice. « L'effort, écrit très bien James, — si toutefois il n'avait pas le tort de dire effort où il faudrait dire volonté, — l'effort nous apparaît comme la réalité substantielle que nous sommes par rapport à ces autres réalités accidentelles que nous ne faisons qu'avoir et porter partout avec nous. »
E. MOUNIER, Traité du caractère, 1946, p. 458.
• 2. Par contre coup, les troubles effacés nous semblent accidentels; ils appartiennent moins à l'être des choses et à l'être de l'homme qu'à une déformation artificielle et temporaire de l'ordre du monde. Les blessures guérissent et nous oublions le passé...
J. VUILLEMIN, Essai sur la signification de la mort, 1949, p. 143.
2. P. oppos. à essentiel ou nécessaire. Qui n'appartient pas à l'essence d'un être, d'une chose :
• 3. Les formes, les modifications peuvent être connues dans leurs rapports; les essences ne peuvent l'être, parce qu'elles ne peuvent être comparées. Les êtres sont absolument, éternellement; leurs agrégations se combineront dans tous les rapports possibles, et changeront sans aucun repos, sans aucune permanence. Le beau, le juste sont des rapports accidentels, de pires abstractions de l'ordre social.
E.-P. DE SENANCOUR, Rêveries, 1799, p. 238.
— En emploi subst. (cf. infra III) :
• 4. Nous venons de dire qu'à côté des guerres accidentelles il en est d'essentielles, pour lesquelles l'instinct guerrier semble avoir été fait. De ce nombre sont les guerres d'aujourd'hui. On cherche de moins en moins à conquérir pour conquérir. On ne se bat plus par amour-propre blessé, pour le prestige, pour la gloire.
H. BERGSON, Les Deux sources de la morale et de la religion, 1932, p. 305.
• 5. Ici, malgré tout mon désir de ne relater que l'essentiel, je ne puis passer sous silence la loupe d'Anthime Armand-Dubois. Car, tant que je n'aurai pas plus sûrement appris à démêler l'accidentel du nécessaire, qu'exigerais-je de ma plume sinon exactitude et rigueur?
A. GIDE, Les Caves du Vatican, 1914, p. 685.
B.— P. ext., dans divers domaines techn. Qui n'est pas lié à la nature d'un être ou d'une chose.
1. MÉD. [En parlant d'un moment de l'évolution d'une maladie] Qui survient par l'effet d'une cause sans connexion nécessaire avec telle maladie :
• 6. Dans la fièvre intermittente, le vomissement est accidentel.
LITTRÉ.
— Spéc. Mort accidentelle (Cette loc. est différente de celle, non spécifiquement méd., signalée sous accidentel2).
2. MUSIQUE
— Signe accidentel. ,,Dièse, bémol ou bécarre qui, n'étant pas indiqué à la clef, se rencontre dans le cours d'un morceau.`` (DG).
— Notes accidentelles. Qui ne sont pas indispensables à la mélodie elle-même, qui sont surajoutées :
• 7. Il nous reste à étudier les notes accidentelles et de nature essentiellement mélodique. Ce sont : l'anticipation, l'appogiature, la broderie, l'échappée et les notes de passage [en harmonie].
G. CAUSSADE, Technique de l'harmonie, 1931, p. 214.
— Lignes accidentelles. ,,Qui sont au-dessus ou au-dessous de la portée.`` (DG).
3. PEINT. Point accidentel. ,,Le point d'une ligne horizontale où se rencontrent les projections de deux lignes, qui sont parallèles l'une à l'autre, dans l'objet que l'on veut mettre en perspective, et qui ne sont pas perpendiculaires au tableau.`` (Ac. Compl. 1842).
4. ZOOL. Qui n'appartient pas par nature (à un organe, à un animal...) :
• 8. Tous les anneaux placés en arrière de cette tête accidentelle lui obéissent.
A. DE QUATREFAGES, Métamorphose de l'homme et des animaux, 1855-1856, p. 268 (E. Perrier, La Philosophie zoologique avant Darwin, 1884, p. 231).
Rem. À noter aussi en bot. le sens de ,,espèce qui se rencontre dans moins du quart des listes de plantes correspondant à une même association végétale.`` (Lar. encyclop.).
II.— Qui survient par accident (cf. accident1 II), par hasard, qui est produit par une circonstance occasionnelle.
A.— Cour. Un fait, un événement accidentel :
• 9. — Je vous l'avais bien dit, frère Agaric; je vous l'avais bien dit que votre entreprise retomberait sur nous. — Notre défaite n'est que momentanée, répliqua vivement Agaric. Elle tient à des causes uniquement accidentelles; elle résulte de pures contingences.
A. FRANCE, L'Île des Pingouins, 1908, p. 246.
• 10. ... l'art ne fait qu'imiter la nature; comme l'artiste, la nature manque parfois ses effets; la forme se heurte aux nécessités aveugles de la matière et ne produit qu'un être raté, un monstre. Les monstres sont des erreurs accidentelles de la nature, qu'un concours de circonstances imprévisible empêche d'atteindre sa fin. Ce qu'il y a de très remarquable, c'est que même cette part relative d'indétermination disparaisse de la nature médiévale. Absolument parlant, il n'y a pour un penseur chrétien ni hasard, ni monstres, ...
É. GILSON, L'Esprit de la philosophie médiévale, t. 2, 1932, p. 165.
• 11. ... nul poète plus que Mallarmé n'est mené, tyrannisé, par les mots, les images, les associations les plus accidentelles et les plus imprévues; ...
A. THIBAUDET, Réflexions sur la littérature, 1938, p. 10.
• 12. ... les mutations se prêtent évidemment moins bien que des variations corporelles à expliquer les démarches de l'évolution.
Ce sont, en effet, des variations fortuites, accidentelles, parfaitement indifférentes, car il n'y a aucune raison pour que la substance chromosomique se modifie de manière à déterminer, dans l'organisme développé, des changements propres à le mieux adapter aux circonstances externes.
J. ROSTAND, La Vie et ses problèmes, 1939, p. 173.
— [Avec l'idée d'une chose passagère] :
• 13. ... de là vient peut-être que la littérature française est plus riche en excellens ouvrages originaux qu'en bonnes traductions d'ouvrages anciens. Ainsi la langue française ne doit sa domination en Europe qu'au naturel de sa construction; elle parle comme on doit penser, elle exprime ce qui doit être. Des causes accidentelles peuvent donner à d'autres langues une vogue passagère : la langue française règnera éternellement, parce qu'elle est naturelle, et qu'elle ne peut périr, même quand le peuple qui la parle périroit lui-même; ...
L.-G.-A. DE BONALD, Législation primitive, t. 1, 1802, p. 345.
— [Avec une idée d'intermittence, d'irrégularité] :
• 14. S'il n'y a pas d'histoire proprement dite là où tous les événements dérivent nécessairement et régulièrement les uns des autres, en vertu des lois constantes par lesquelles le système est régi, et sans concours accidentel d'influences étrangères au système que la théorie embrasse, il n'y a pas non plus d'histoire, dans le vrai sens du mot, pour une suite d'événements qui seraient sans aucune liaison entre eux.
A. COURNOT, Essai sur les fondements de nos connaissances, 1851, p. 461.
B.— P. ext., rare. Non habituel, exceptionnel :
• 15. Je ne vous ai entretenu aujourd'hui que de vos plaisirs d'habitude; une autre fois je parlerai de vos plaisirs accidentels; ...
V. DE JOUY, L'Hermite de la Chaussée d'Antin, t. 1, 1811, p. 71.
• 16. ... il était rare, en tout cas accidentel, qu'un individu prît conscience de cette réserve de violences sensuelles accumulées dans sa maison.
M. AYMÉ, La Jument verte, 1933, p. 271.
C.— Dans divers domaines techn.
1. GÉOGR. [En parlant d'un écoulement d'eau] Qui n'est pas constant, permanent :
• 17. Le débit des sources peut être, ou permanent ou éphémère, épisodique, accidentel, occasionnel.
BAULIG 1956.
2. MAR. Utilisé occasionnellement et non régulièrement :
• 18. ... sur les tuyaux de décharge accidentelle [d'un navire] qui n'ont à débiter que de l'eau, on dispose près de la sortie une boîte à soupapes; ...
A. CRONEAU, Construction pratique des navires de guerre, t. 2, 1892, p. 193.
3. PHYS.-CHIM. [En parlant d'une cause] Qui agit sans être ou du moins sans paraître sujette à des lois, ni à des retours réglés; anton. constant :
• 19. La situation du soleil à l'égard de la terre est la cause constante et principale du chaud pendant l'été, du froid pendant l'hiver; les vents et les pluies sont des causes accidentelles qui altèrent et modifient souvent l'action de la cause principale.
Besch. 1845.
— Couleurs accidentelles. Effets dus à la rencontre des couleurs qui sont effectivement en présence :
• 20. La sensation des couleurs accidentelles attirera au même titre l'attention des physiologistes et même celle des physiciens, à cause de certaines lois très simples et purement physiques, suivant lesquelles les teintes accidentelles naissent à l'occasion du contraste des couleurs réelles.
A. COURNOT, Essai sur les fondements de nos connaissances, 1851, p. 13.
III.— Emploi subst. (cf. aussi ex. 5) :
• 21. Nous nous estimons trop pour convenir l'un vis-à-vis de l'autre d'une faiblesse. Également convaincus de l'insignifiance des choses passagères, épris du même goût de l'éternel, nous ne pourrions nous résigner à l'aveu d'une distraction consentie vers le fortuit et l'accidentel.
E. RENAN, Souvenirs d'enfance et de jeunesse, 1883, p. 339.
• 22. La vie réelle blesse sa belle âme [de l'idéaliste]; il craint de « se souiller à son contact », et les « misérables soucis du périssable » ne sont pour lui qu'« une distraction vers le fortuit et l'accidentel ».
H. MASSIS, Jugements, t. 1, 1923, p. 95.
• 23. Quand la mort arrive, nous avons le sentiment qu'elle aurait pu ne pas être : là est le paradoxe d'un inévitable qui prend l'apparence de l'accidentel
H. GOUHIER, Le Théâtre et l'existence, 1952, p. 77 (Foulq.-St-Jean 1962).
Rem. Dans la lang. cour., accidentel tend à se distinguer de contingent. Le contingent est ce qui a autant de chance d'arriver que de ne pas arriver; l'accidentel implique une idée de discontinuité. Accident et accidentellement sont d'autre part en concurrence avec fortuit et fortuitement. L'accidentel est ce à quoi on ne s'attend pas; le fortuit est le non prévisible dû à une cause inconnue. En outre fortuit et fortuitement s'emploient plus souvent que accidentel et accidentellement pour qualifier un événement heureux. 2. Pour les synon. et anton., consulter les ex., y compris ceux des domaines sc. et techn.
II.
⇒ACCIDENTEL2, ELLE, adj.
Lang. cour. [En parlant de la mort] Dû à un accident (correspond à accident1 II 4).
Rem. Signalé par Lar. encyclop. Cet emploi, dér. de accident1, est différent de celui que l'on trouve dans mort accidentelle, expr. de la lang. méd. (cf. accidentel1 I B 1).
III.
⇒ACCIDENTEL3, ELLE, adj.
• Un brouillard qui égalise les monts et les vallées, des plis indistincts cachaient la terre accidentelle.
J. GRACQ, Le Rivage des Syrtes, 1951, p. 216.
Rem. Il s'agit d'une création littér. due à un aut. qui fut surréaliste; elle correspond à accident2 et veut être un substitut expr. de accidenté. (Sur la répartition normale des dér. adj. de accident, cf. étymol., rem.).
Prononc. :[]. Enq. :/2l/.
Étymol. ET HIST.
I.— 2e moitié XIIIe s. philos. « ce qui appartient à l'accident, non à l'essence » (Sidrac le grant philosophe, 916e responce, éd. 1528 ds R. Hist. Litt., 1, 184 : La seconde chose est accidentelle); 1372 « id. », id. (CORBICHON, Propriété des choses, 4, 4, éd. 1522, ibid. : Moisteur, ainsi comme les aultres qualitez, si a aulcunes proprietez qui luy sont naturelles et aulcunes qui luy sont accidentelles) d'où av. 1430 « secondaire, accessoire » (PH. WIELAND, Rec. des antiq. de Flandre, 160 ds GDF. compl. :Et par consequent perdre les fidelitez, hommaiges et services d'iceuls hommes et aultres prouffictz accidentaulx...).
II.— Début XVIe s. accidental « qui arrive par hasard » (LEMAIRE DE BELGES, Cour. margart., éd. Stecher, IV, 151 ds HUG. : En ces tenebres parfondes et en maintes autres bruïnes accidentales le tresresplendissant Escarboucle de son experience... ha surmonté lespesseur des noires ombres de toutes ses adversitez).
Empr. au b. lat. accidentalis, attesté comme terme philos. au sens I dep. IVe s. (en rapport avec substantialis :VICTORINUS, Rhet. p. 211, 40 ds TLL 289, 76 : rem aut substantialem... aut accidentalem) fréq. en lat. médiév. cf. 1162, Gesta abb. Lobiensium 24, p. 327-40 ds Mittellat. W. 85, 6 : vulgaris linguae, id est Theutonice, que naturalis ei erat, et Romanae, quae accidentalis, cf. accident 3; II seulement attesté en lat. médiév. : XIIe-XIIIe s. Hist. monast. Walciodorensis, 58 : exceptis accidentalibus quaestibus ds Mittellat. W. 85, 34.
BBG. — BAR 1960. — BÉNAC 1956. — FOULQ.-ST-JEAN 1962. — KOLD. 1902. — LITTRÉ-ROBIN 1865. — ROUGNON 1935.
accidentel, elle [aksidɑ̃tɛl] adj.
ÉTYM. XIIIe, au sens 2.; du bas lat. accidentalis, de accidens. → Accident.
❖
1 (XVIe). Qui arrive hors du cours régulier des choses, par hasard; qui est produit par une circonstance occasionnelle. ⇒ Casuel, contingent, fortuit, imprévu, inattendu, occasionnel. || Un fait, un événement accidentel. || Des causes accidentelles. — N. m. || L'accidentel.
1 Également convaincus de l'insignifiance des choses passagères, épris du même goût de l'éternel, nous ne pourrions nous résigner à l'aveu d'une distraction consentie vers le fortuit et l'accidentel.
Renan, Souvenirs d'enfance…, Œ. compl., t. II, VI, II.
2 Ils avaient fait connaissance dans des conditions si accidentelles qu'elles excluaient, de sa part à lui, la préméditation.
Bourget, Un divorce, III.
3 Je doute si, dans quelques années, ce déboisement continu, systématique et volontaire, ou accidentel, n'amènera pas de profonds changements dans le régime des pluies.
Gide, Voyage au Congo, in Souvenirs, Pl., p. 732.
♦ Sc., phys., chim. Cause qui agit sans paraître sujette à des lois. Géogr. || Le débit accidentel d'une source, occasionnel.
♦ Mort accidentelle, du fait d'un accident (3.).
2 Philos. Qui appartient à l'accident (1.) non à l'essence. ⇒ Accessoire, contingent, extrinsèque (opposé à absolu, substantiel et nécessaire). || Définition accidentelle.
♦ N. m. || Distinguer l'accidentel du nécessaire.
3 (De accident, 5., b.). Mus. || Signe accidentel : dièse, bémol ou bécarre non indiqué à la clef. || Lignes accidentelles, qui sont au-dessus ou au-dessous de la portée.
❖
CONTR. Certain, constant, fatal, intentionnel, normal, régulier.
DÉR. Accidentellement.
Encyclopédie Universelle. 2012.