avérer [ avere ] v. tr. <conjug. : 6>
1 ♦ Vx ou didact. Donner comme certain. Avérer un fait.
2 ♦ V. pron. S'AVÉRER. Vx ou littér. Être avéré, confirmé. « Un subterfuge où s'avéra sa fertile ingéniosité » (A. Gide).
♢ Cour. S'avérer, suivi d'un adj. attribut. ⇒ apparaître, se montrer, paraître, se révéler. « Ce dépuratif s'avère trop inefficace » (Morand). Ce raisonnement s'est avéré juste. — (Abusif et critiqué) S'avérer faux, inexact.
♢ Impers. Il s'est avéré que vous aviez raison, que ce tableau était une copie.
⊗ CONTR. Démentir, infirmer.
avérer (s')
v. Pron. Se révéler. Il s'avère que: il apparaît que.
|| (Suivi d'un adj.) Se manifester comme. Cette manoeuvre s'est avérée utile.
⇒AVÉRER, verbe trans.
I.— Emploi trans., rare
A.— [Le suj. désigne une pers.] Reconnaître la vérité d'une chose; savoir, comprendre quelque chose avec exactitude :
• 1. Il [Leroux] s'est mis à endoctriner des femmes et des ouvriers, à avoir des dévotes et des séides. Tous moyens lui sont devenus bons... Dès que j'ai eu bien avéré ce point, il n'a plus été pour moi qu'un charlatan...
SAINTE-BEUVE, Les Cahiers, 1869, p. 46.
B.— [Le suj. désigne une pers. ou un inanimé] Faire reconnaître la vérité d'une chose par des paroles, un comportement, une action, un écrit. Avérer un fait :
• 2. D'après cette note sur les paioti que j'ai tirée de l'histoire de l'abbaye de saint Denys de Mme Félicie d'Aysac, ils n'avaient pas, en effet, de costume; mais voici d'autres documents qui avèrent qu'il n'en a pas toujours été ainsi.
HUYSMANS, L'Oblat, t. 1, 1903, p. 192.
II.— Emploi pronom. [Le suj. désigne un animé ou un inanimé] Se montrer dans sa réalité, après vérification.
A.— Emploi abs., rare :
• 3. L'échec de la manœuvre, faute d'ampleur, s'avérait, ...
JOFFRE, Mémoires, t. 1, 1931, p. 434.
— Littéraire :
• 4. Oui! Mais l'eau ne veut pas que quelqu'un la révèle,
(...)
Et la voilà, pour que rien d'elle ne s'avère,
Qui s'est enfuie au fond de sa maison de verre.
RODENBACH, Le Règne du silence, 1891, p. 43.
B.— Autres constr.
1. [Avec un attribut du suj. (adj., subst., ou expr. à valeur adj.)] :
• 5. ... on commençait à faire parler les écrans et comme Jacques s'avérait phonogénique on lui donnait des tas d'espoirs.
QUENEAU, Loin de Rueil, 1944, p. 172.
• 6. Chose surprenante, la nouvelle courante faite, comme on voit, de pièces et de morceaux, s'avéra une réussite, et marqua nettement une tendance dodécaphoniste.
P. SCHAEFFER, À la recherche d'une mus. concr., 1952, p. 42.
• 7. Par contre, l'étude des solutions étendues s'est avérée de la plus haute importance.
Hist. gén. des sc., t. 3, vol. 1, 1961, p. 287.
2. [Avec un inf. se rapportant au suj.] :
• 8. ... en 1912, on découvrit aux États-Unis de petits cristaux de ce minéral qui s'avérèrent appartenir au système triclinique, si rare dans la nature; ...
A. et N. METTA, Les Pierres précieuses, 1960, p. 94.
3. Il s'avère que :
• 9. Au contrôle, il s'avère que la défaite d'Adoua est de 1896, l'assassinat du roi Umberto 1er de 1900 et la naissance du prince de Turin de 1904.
CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 239.
Rem. 1. Étant donné que le verbe avérer comprend le rad. « vrai » (lat. verus), la plupart des grammairiens déclarent incorrect l'emploi d'expr. comme s'avérer vrai, faux, exact, inexact. HANSE 1949 observe : ,,Je n'hésiterais pas à dire : il s'avère intelligent, ce produit s'avère excellent. [Dans les syntagmes ci-après] il y a en fait catachrèse, c'est-à-dire oubli du sens premier. (...). J'hésiterais à dire : cette nouvelle s'avère vraie, inexacte ou peu probable``. L'usage cour. les impose cependant de plus en plus, du moins dans une lang. peu châtiée. 2. Certains dict. (Lar. 19e, DG, Ac. 1932, THOMAS 1956, ROB.) signalent l'emploi trans. avérer comme vieilli ou ne se rencontrant qu'au part. passé. Selon THOMAS 1956, la forme s'avérer a été relancée ,,par les snobs du siècle dernier...``. 3. Synon. avérer, constater, vérifier. ,,Vérifier, c'est employer les moyens de se convaincre ou de convaincre quelqu'un qu'une chose est véritable (...), Avérer, c'est prouver d'une manière convaincante qu'une chose est vraie ou réelle : avérer un crime. (...) Constater, c'est vérifier ou avérer d'une manière authentique et solide`` (Lar. 19e). 4. On rencontre dans la docum. le néol. avérément, adv. (GROUSSET, L'Épopée des croisades, 1939, p. 112; suff. -ment2). Véritablement, manifestement, réellement. Un patriarche avérément simoniaque (ID., ibid.).
PRONONC. ET ORTH. :[]. Pour la conjug., cf. abréger.
ÉTYMOL. ET HIST. — 1. 1125 « réaliser, accomplir » (PH. DE THAON, Bestiaire, éd. Walberg, 557 : Tut at Deus averé Par la sue bunté Quant que sainte escripture Nus diseit par figure) — 1584 (RONSARD, Bocage Royal [III, 214] ds HUG.); 2. a) ca 1260 « reconnaître, faire reconnaître pour vrai » (De Jost. et de plet, XIX, 6, § 1 ds GDF. Compl. : Et l'offre a prover et a averer); 1549 adj. avéré « reconnu pour vrai » (EST.); b) 1836 pronom. « apparaître comme vrai » (LAND. : S'avérer).
Empr. au lat. médiév. a(d) verare attesté dep. 815 (DE MONSABERT, Ch. de Nouaillé, no. 10, p. 18 ds NIERM .s.v.), dér. du lat. « vrai » (PLAUTE, Amph., 1, 1. 45 ds FORC. Lexikon s.v. 961c); lat. ad- (cf. préf. a-1); dés. -are (v. -er); plutôt que dér. de l'a. fr. voir « vrai » (DAUZAT 1968; BL.-W.5), issu lui-même de , et dont la graphie ver (p. ex. La Passion du Christ ds BARTSCH, Chrestomathie de l'a. fr., p. 8 : zo fu granz signa tot per ver) représente une forme occitane non diphtonguée qui correspond aux formes d'oïl veir/voir (p. ex. Alexis, éd. G. Paris, strophe 112, vers 561 : veirs miracles).
STAT. — Fréq. abs. littér. : Avérer. 80. Avérément. 1.
BBG. — DUPIN-LAB. 1846. — NOTER-LÉC. 1912. — PIERREH. Suppl. 1926. — SPR. 1967. Vie Lang. 1960, p. 501.
avérer [aveʀe] v. tr. et pron. [CONJUG. céder.]
ÉTYM. V. 1260; « réaliser », 1125; lat. médiéval a(d)verare, de verus « vrai », et préfixe ad. → 1. A-.
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1 V. tr. Vx ou didact. Donner comme certain. || Avérer un fait.
1 (…) Scipion l'Africain ayant été après souper trouvé mort en sa maison, on ne sut jamais avérer ni savoir comment il était mort.
J. Amyot, Romulus, 27.
2 (De pareils forfaits) Sans les bien avérer ne s'imputent jamais.
Molière, Sganarelle, 12.
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avéré, ée p. p. adj.
ÉTYM. (1549).
♦ Cour. Reconnu vrai. ⇒ Certain, sûr. || C'est un fait avéré. || Il est avéré que… — Être avéré par… : rendu certain, prouvé, attesté par…
3 La chose est avérée, et je tiens dans mes mains
Un bon certificat du mal dont je me plains (…)
Molière, Sganarelle, 6.
4 Le crime est avéré : lui-même il le confesse (…)
Racine, les Plaideurs, III, 3.
5 C'est un fait avéré par l'histoire de M. de Thou, et par celle de la Popelinière, auteurs non supects (…)
Bossuet, Défense de l'Hist. des variations.
6 Les faits (…) seront (…) déniés ou reconnus dans les trois jours; sinon ils pourront être tenus pour confessés ou avérés.
Code de procédure civile, art. 252.
7 Si l'assigné ne comparaît pas ou refuse de répondre après avoir comparu, il en sera dressé procès-verbal sommaire, et les faits pourront être tenus pour avérés.
Code de procédure civile, art. 330.
8 (…) il est évident, sûr, certain, avéré, manifeste, clair, acquis, établi, reconnu (…) qu'elle a toujours fait son devoir (…)
F. Brunot, la Pensée et la Langue, p. 500-501 (→ Affirmation, cit. 2).
2 V. pron. (1836). Mod. || S'avérer. a Vx ou littér. Être reconnu vrai, être confirmé. || La nouvelle s'avérera bientôt (Larousse xixe siècle).
9 C'est assez que la chose, au gré de mon désir,
S'est naguère entre nous pleinement avérée.
10 C'est alors que Pirithoüs sut inventer (…) un subterfuge où s'avéra sa fertile ingéniosité.
Gide, Thésée, p. 79.
10.1 (…) si le diagnostic d'une sclérose en plaque que j'avais moi-même porté s'était avéré.
Jacques Laurent, les Bêtises, p. 559.
b Mod. (Impersonnel). || Il s'avère, il s'est avéré que vous aviez raison, que c'était une contrefaçon.
♦ Plus cour. (et critiqué). Suivi d'un adj., d'un nom ou d'un inf. || La médecine s'est avérée impuissante. || Ce raisonnement s'est avéré juste. || L'entreprise s'avère difficile. ⇒ Apparaître, montrer (se), paraître, révéler (se), trouver (se), vérifier (se). || L'opération s'est avérée une totale réussite. || Il s'est avéré faire partie des services secrets. — (Abusif). || S'avérer faux, inexact. — (Pléonasme). || S'avérer vrai.
11 Un critique sévère reprochait une fois à un romancier académicien l'usage d'une expression qui remonte au style « artiste » de 1880 et qui semble à la fois incorrecte et démodée. Peut-on dire d'une conjecture qu'elle s'avère improbable ou d'une assertion qu'elle s'avère fausse ? Au premier abord la catachrèse est fort choquante, puisque avérer veut dire tenir ou reconnaître pour vrai (…) Il y a en tout état de cause une faute de style et de rhétorique à juxtaposer avérer et faux qui sont contradictoires d'origine, même si on admet qu'avérer a pris un sens très différent de son origine.
A. Thérive, Querelles de langage, t. II, p. 24.
12 Les médecins (…) envisageaient tour à tour maints procédés de traitement, qui s'avérèrent, à l'usage, aussi inopérants les uns que les autres.
Daniel-Rops, le Cœur complice, p. 68 (in Grevisse, qui donne de nombreuses illustrations de l'usage moderne, p. 534, no 701, 5).
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CONTR. Démentir, infirmer. — (Du p. p.) Contestable, douteux, faux.
Encyclopédie Universelle. 2012.