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chiquer

chiquer [ ʃike ] v. tr. <conjug. : 1>
• 1792; de chique
Mâcher (du tabac, une substance excitante). Chiquer de la cola. Absolt Tabac à chiquer. « il chiquait, recrachant sa chique, après usage, dans son béret » (J. Rouaud). ⊗ HOM. Chiqué.

chiquer verbe transitif (radical onomatopéique tchikk-, exprimant un bruit sec) Mâcher du tabac. ● chiquer (homonymes) verbe transitif (radical onomatopéique tchikk-, exprimant un bruit sec) chiqué nom masculinchiquer verbe transitif indirect Populaire. Il n'y a pas à chiquer, Il n'y a pas à se faire d'illusion ; il n'y a pas à hésiter. ● chiquer (expressions) verbe transitif indirect Populaire. Il n'y a pas à chiquer, Il n'y a pas à se faire d'illusion ; il n'y a pas à hésiter. ● chiquer (homonymes) verbe transitif indirect

chiquer
v. tr. intr. Mâcher (une chique de tabac). Tabac à chiquer.

I.
⇒CHIQUER1, verbe trans.
A.— Vx, arg. Manger ou boire avec gloutonnerie :
1. ... le couple invité par charité à manger par Daudet, le couple arrivant décharné, avec des trous dans les joues, et après avoir chiqué comme des Limousins, s'en allant remplumé avec de la chair comme soufflée sur la figure.
E. et J. DE GONCOURT, Journal, 1888, p. 739.
Chiquer les légumes, la légume. Faire un bon repas :
2. — (...) Allons, Finot, à table! Chiquons les légumes! Sablons le champagne au succès de notre jeune ami!
BALZAC, César Birotteau, 1837, p. 182.
3. — Tous ces poilus-là, ça n'emporte pas son couvert et son quart, pour manger sur le pouce. I'leur faut ses aises. I's préfèr't mieux aller s'installer chez une mouquère de l'endroit, à une table exprès pour eux, pour chiquer la légume, et la rombière leur carre dans son buffet leur vaisselle, leurs boîtes de conserves et tout leur bordel pour le bec, enfin, les avantages de la richesse et de la paix dans ce sacré nom de Dieu d'arrière!
BARBUSSE, Le Feu, 1916, p. 124.
Dans des expr. fig. :
4. ... pour lors, voilà qu'un jour, on fait monter les noirauds pour chiquer leur ration d'air et de soleil...
SUE, Atar Gull, 1831, p. 20.
Se chiquer. S'enivrer (ESN. 1966). Chiquer qqn. L'enivrer (PIERREH. Suppl. 1926).
Rem. Les dict. d'arg. signalent un dér. chiqueur. ,,Se dit de quelqu'un qui aime passionnément la table`` (HAUTEL, 1808).
B.— Usuel. Mâcher une feuille de tabac.
P. anal. :
5. Pour cela l'on fait bouillir la graine, puis on la pile dans un mortier, avec le manche du pilon qui offre si peu de surface que la coque dure fuit de côté tandis que son enveloppe froissée se détache. Elle forme bientôt une étoupe couleur safran qui, pressée entre les doigts, laisse échapper son huile. Les femmes qui se livrent à ce travail se récompensent en chiquant le tourteau.
GIDE, Voyage au Congo, 1927, p. 715.
Prononc. et Orth. :[], (je) chique []. Ds Ac. 1835-1932. Étymol. et Hist. 1. 1792 « mâcher des feuilles de tabac » (ROMME, Dict. de la marine, 161 ds Fr. mod., t. 25, 1957, p. 308b); 2. 1798 pop. « prendre un repas » (d'apr. ESN.); 1807 « manger » (MICHEL, Dict. des expressions vicieuses, p. 4). Dér. de la racine onomatopéique - exprimant le bruit que fait celui qui mâche (FEW t. 13, 2, p. 371). Fréq. abs. littér. : 26. Bbg. MAT. Louis-Philippe 1951, p. 92, 99; p. 251 (s.v. chiqueur). — SAIN. Lang. par. 1920, p. 177. — SAIN. Sources t. 3, 1972 [1930], p. 29.
II.
⇒CHIQUER2, verbe trans.
A.— Pop., arg. Discuter, chicaner :
1. — Passer son repos en taule quand on n'a rien fait, c'est tout de même ressautant, grogne Sulphart. Y a pas à chiquer contre, on est moins que rien.
DORGELÈS, Les Croix de bois, 1919, p. 116.
Il n'y a rien à chiquer. Il n'y a rien à dire, il n'y a pas à discuter :
2. Je commençais à bien me rendre compte, qu'elle me trouverait toujours ma mère, un enfant dépourvu d'entrailles, un monstre égoïste, capricieux, une petite brute écervelée... Ils auraient beau tenter... beau faire, c'était vraiment sans recours... Sur mes funestes dispositions, incarnées, incorrigibles, rien à chiquer...
CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 337.
Ne rien vouloir chiquer. Ne rien vouloir entendre :
3. C'est les épiciers de la rue Berce qu'ont les premiers fait du scandale... Ils voulaient plus rien chiquer pour nous avancer de la boustiffe... Ils venaient rapporter leurs factures...
CÉLINE, Mort à crédit, 1936 p. 219.
Chiquer la guenille. Marquer son mécontentement, ronchonner :
4. — (...) Avec ça, qu'ils grognent ces gars-là. Ils sont pas contents. « Qu'est-ce que vous avez à chiquer la guenille? que je leur ai demandé... »
G. ROY, Bonheur d'occasion, 1945, p. 221.
B.— Arg. Se chiquer la gueule. Se battre :
5. Au dix-septième siècle, se battre, c'était se donner du tabac; au dix-neuvième, c'est se chiquer la gueule.
HUGO, Les Misérables, t. 2, 1862, p. 200.
Prononc. et Orth. Cf. chiquer1. Étymol. et Hist. 1800 pronom. réciproque (P. LECLAIR, Hist. des brigands chauffeurs ds SAIN. Sources arg. t. 2, p. 90); 1862 se chiquer la gueule (HUGO, Les Misérables, t. 2, p. 200). Dér. de la racine onomatopéique - exprimant le bruit des coups (FEW t. 13, 2, p. 371a); l'hyp. selon laquelle chiquer « battre, donner des coups », empr. à l'all. schicken « envoyer » serait à l'origine d'un champ morpho-sémantique des mots ayant en commun les notions de « coup, trait » (GUIR. Étymol., pp. 126-141), regroupant les mots rangés par le FEW, s.v. schick 1 et 2, schicken, - 2 et 3, fait difficulté des points de vue chronol. et géographique. Fréq. abs. littér. :7.
DÉR. Chiquage, subst. masc. Dispute, bagarre. Au fond, la perspective d'un chiquage possible entre Letondu et de La Hourmerie déchaînait de sournoises jouissances (COURTELINE, Messieurs-les-Ronds-de-cuir, 1893, V, 1, p. 173). 1re attest. 1893 id.; de chiquer, suff. -age. Fréq. abs. littér. : 1.
BBG. — GUIRAUD (P.). Le Ch. morphosém. du verbe chiquer. B. Soc. Ling. 1960, t. 55, pp. 135-154. — SAIN. Arg. 1972 [1907], p. 122, 314.
III.
⇒CHIQUER3, verbe trans.
A.— PEINT. Peindre d'une manière artificielle, sans sincérité. Synon. peindre de chic.
Rem. ,,Faire habilement`` (BESCH. 1845, LITTRÉ), ,,exécuter avec chic`` (Lar. 19e), ,,faire de chic, sans études`` (GUÉRIN 1892); ROB. Suppl. 1970 cite un ex. de J. Romains.
B.— Pop. ,,Agir au chiqué, faire de l'esbroufe`` (ROB.); ,,faire du chiqué, du bluff`` (Lar. Lang. fr.).
Rem. Les dict. donnent le dér. chiqueur, subst. masc., avec le sens ,,T. d'atelier. Artiste dessinant de chic, sans étudier la nature`` (Lar. 19e, Lar. Lang. fr.). ROB. donne aussi le sens ,,celui qui fait du chiqué`` avec un ex. de F. Carco. En arg. chiqueur signifie « simulateur, compère » (cf. ESN. 1966).
Prononc. et Orth. Cf. chiquer1. Étymol. et Hist. 1. 1823 peint. (BOISTE); 1845 chiquer bien un tableau (BESCH.); 1846 danse, pop. (d'apr. ESN.); 2. 1873 arg. des voyous « feindre, mentir » (ibid.); 1889 (LARCH. Suppl., p. 57). Dér. de chic; 2 semble plutôt dér. de 1 « peindre, croquer habilement », par une évolution sém. parallèle à celle de chiqué (« peint avec art » > « attitude affectée; bluff ») qu'à rattacher à chiquer « battre » (dont il serait issu par substitution synon. à partir de l'arg. battre « simuler », SAIN. Lang. par., pp. 250-251) ou à chiquer « mâcher du tabac », le fait de gonfler la joue avec la pointe de la langue (simulant une chique) signifiant que ce que l'on vient de dire n'est pas sérieux (FEW t. 13, 2, p. 372a, note 4). Bbg. SAIN. Lang. par. 1920, p. 251, 386.

1. chiquer [ʃike] v. tr. et intr.
ÉTYM. 1792; de 1. chique.
1 Mâcher (du tabac, une substance thérapeutique, excitante…). → 1. Chique, cit. 2. || Tabac à chiquer. || Chiquer du bétel, de la kola.
1 Les femmes tapent avec un bâton sur les fruits du palmier doum afin d'amollir la pulpe ligneuse que l'on chique comme du bétel.
Gide, Voyage au Congo, in Souvenirs, Pl., p. 827.
2 (1798). Pop. et vx. || Chiquer le légume, les légumes (ou : la légume, pop.), et, absolt, chiquer : manger. || Il n'y a rien à chiquer, ici !
2 Allons, Finot, à table ! Chiquons les légumes !
Balzac, César Birotteau, Pl., t. V, p. 442.
3 Tous ces poilus-là (…) i'leur faut ses aises. I's préfèr't mieux aller s'installer chez une mouquère de l'endroit, à une table exprès pour eux, pour chiquer la légume, et la rombière leur carre dans son buffet leur vaisselle, leurs boîtes de conserve et tout leur bordel pour le bec (…)
H. Barbusse, le Feu, t. II, p. 49.
DÉR. Chiqueur (1.).
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2. chiquer [ʃike] v. tr. et intr.
ÉTYM. 1823; de chiqué.
1 Argot vieilli. Faire, dessiner, exécuter (une œuvre, un travail) avec adresse.Placer habilement, de manière à produire un bel effet.
1 Et à la place de la Diane, nous chiquerons un Maillol. Dame ! les cuisses seront plus larges et les tétons moins jolis.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. XXII, p. 227.
2 (1873). Fam. et vx. Faire du chiqué, du bluff.
3 Loc. mod. Il n'y a pas (y a pas) à chiquer : il n'y a pas à se faire d'illusion; il n'y a pas à hésiter.
2 Chalumot la lut attentivement, l'examina recto verso, et dit à Comparois, dans un sourire glorieux :
— Y a pas à chiquer, ce sont de vrais soldats ! La permission est tout c'qu'il y a d'réglementaire.
Yves Gibeau, Allons z'enfants, p. 161.
DÉR. Chiqueur (2.).

Encyclopédie Universelle. 2012.