CATHÉDRALE
CATHÉDRALE
Édifice religieux chrétien, la cathédrale est, ou a été, l’église de l’évêque d’un diocèse. L’évêque y a son siège réservé, cathedra en latin, origine du mot cathédrale. Depuis le concile de Nicée en 325, le principe de l’établissement de l’évêque dans une ville, chef-lieu de la cité romaine, a eu pour conséquence de localiser la cathédrale dans un site urbain. Les modifications des circonscriptions administratives, l’essor et la décadence des villes ont suscité des déplacements de cathédrales, par exemple de Thérouanne à Boulogne-sur-Mer au XVIe siècle, ou leur regroupement: Dol et Saint-Malo, par exemple, réunies sous l’autorité de l’évêque de Rennes. Les anciennes cathédrales, c’est-à-dire celles qui ne sont plus le siège d’un évêque, conservent leur dénomination. D’autres naissent à chaque époque, soit en raison de l’évangélisation de nouvelles régions, soit lors de la création de capitales comme Brasília, soit parce que la densité démographique entraîne des divisions administratives (nouveaux départements et diocèses de la région parisienne par exemple).
La cathédrale peut être un édifice de dimensions modestes, et de nombreuses grandes églises urbaines, souvent anciennes collégiales de communautés de chanoines réguliers (Saint-Quentin), sont improprement appelées cathédrales dans le langage populaire. Le mot même n’a pas été employé avant l’époque carolingienne. Aux premiers siècles, l’évêque célébrait les offices dans la domus ecclesiae , une maison privée mise à sa disposition. Après l’édit de Milan, proclamé en 313 par l’empereur Constantin et reconnaissant officiellement la religion chrétienne dans l’empire romain, la fonction de l’évêque s’est solennisée et des constructions ont été entreprises pour lui, son clergé et ses fidèles. L’ensemble formait le groupe épiscopal et comprenait la demeure du pasteur (palais épiscopal), son église (église mère du diocèse, future cathédrale), un édifice réservé aux catéchumènes et un baptistère. Certains ensembles ont été reconstitués à partir de fouilles et de documents, comme ceux de Saint-Jean de Latran à Rome et d’Aquilée datant du IVe siècle. D’autres, plus tardifs, subsistent en partie, par exemple à Terrassa en Espagne et à Ravenne.
Il n’y a pas de type architectural défini de la cathédrale, elle a évolué en fonction d’une part de la liturgie et d’autre part des traditions locales dans l’art de bâtir. La liturgie chrétienne implique la célébration communautaire à l’intérieur de l’église. En conséquence les premières cathédrales se sont inspirées des salles publiques romaines, telles que les basiliques, et non des temples, où les fidèles ne pénétraient pas. Le trône de l’évêque a pris la place des sièges des officiers impériaux dans l’abside et a constitué l’élément particulier de la cathédrale. Jusqu’au VIe siècle, il n’y eut de baptistères que dans les groupes épiscopaux, puis ils se sont multipliés. Ils ont disparu peu à peu à partir de l’époque carolingienne avec la fin de la pratique du baptême par immersion et ont été remplacés par les cuves baptismales placées à l’intérieur des églises. De même, la christianisation des populations au cours du haut Moyen Âge a entraîné la suppression des édifices des catéchumènes, supplantés parfois dans les groupes épiscopaux par des églises funéraires ou martyria .
Le concile d’Aix-la-Chapelle en 817 a défini l’organisation de l’administration épiscopale. Le clergé qui aidait l’évêque dans ses tâches diocésaines a dès lors constitué le chapitre cathédral, formé de chanoines groupés en communauté ou habitant des maisons sises autour d’une cour voisine de l’église mère. L’ensemble de l’enclos des chanoines a pris le nom de cloître du chapitre ou de la cathédrale. Les chapitres sont devenus puissants à partir du XIIe siècle, après la réforme grégorienne et la querelle des Investitures, quand le pouvoir de l’évêque est devenu indépendant du pouvoir laïc. Administrateurs des biens de l’évêché, les chanoines ont alors financé la construction des grandes cathédrales de l’époque, dont l’essor a coïncidé avec l’épanouissement de l’art gothique.
Toutefois, de grandes cathédrales ont été élevées auparavant: dès le IVe siècle sous le patronage impérial (Latran), plus tard sous l’influence de princes ecclésiastiques (cathédrales carolingiennes de Cologne et de Reims), ou de souverains temporels (cathédrales germaniques de Mayence et de Spire, cathédrales normandes de Grande-Bretagne). Ainsi, l’édifice a pu apparaître très tôt comme un symbole de prestige et de puissance en même temps qu’un lieu liturgique et administratif. À l’époque gothique, avec le développement des villes, il est aussi devenu un lieu populaire où se déroulaient toutes les grandes fêtes urbaines et officielles. À l’époque moderne le transfert d’une partie du pouvoir épiscopal aux pouvoirs civils a réduit les fonctions du chapitre et de la cathédrale à un rôle liturgique et cultuel, mais a laissé à l’église mère une place majeure dans la célébration des cérémonies de prestige.
cathédrale [ katedral ] n. f.
• 1666; de église cathédrale
1 ♦ Église épiscopale d'un diocèse. — (En tant que monument) Cathédrale romane, gothique, classique, baroque. La cathédrale de Chartres, de Reims. Nef, bas-côtés d'une cathédrale. « Le XIII e siècle a été la plus grande ère des cathédrales » (Huysmans).
♢ Reliure à la cathédrale : reliure romantique de style néogothique.
2 ♦ Appos. Verre cathédrale, translucide, à la surface inégale.
● cathédrale nom féminin (de église cathédrale) Église mère d'un diocèse, où se trouve la cathedra, qui est le siège de l'évêque. Église qui a été le siège d'un évêché aujourd'hui supprimé. ● cathédrale (citations) nom féminin (de église cathédrale) Édouard Herriot Troyes 1872-Saint-Genis-Laval, Rhône, 1957 Académie française, 1946 La cathédrale gothique est une église laïque. Dans la forêt normande Hachette ● cathédrale (expressions) nom féminin (de église cathédrale) À la cathédrale, se dit d'un style de décor linéaire inspiré de l'art gothique, en vogue sous la Restauration et Louis-Philippe et participant du goût troubadour (mobilier, pendules, reliures, etc.). Verre cathédrale, type de verre translucide destiné à laisser passer la lumière sans que l'on puisse distinguer les objets au travers. ● cathédral, cathédrale, cathédraux adjectif (latin ecclésiastique cathedralis, de cathedra, chaire) Qui appartient à une église qui est le siège de l'évêque. ● cathédral, cathédrale, cathédraux (expressions) adjectif (latin ecclésiastique cathedralis, de cathedra, chaire) École cathédrale, au Moyen Âge, école rattachée à une cathédrale et destinée à la formation des clercs. (Dépendante d'un évêque, elle était dirigée par un écolâtre.)
cathédrale
n. f.
d1./d église du siège de l'autorité épiscopale.
— Par ext. Grande église. Cathédrales romanes d'Autun, d'Avignon. Cathédrales gothiques de Paris, de Strasbourg.
|| (Proche-Orient) église (sens 2).
d2./d (En appos.) Verre cathédrale: verre translucide, à surface granulée.
⇒CATHÉDRALE, subst. fém.
A.— Église principale d'un diocèse, où se trouve le siège de l'évêque. Une vieille cathédrale; flèche(s), tour(s) d'une cathédrale :
• 1. ... beaucoup de résistants s'indignent à l'idée que le prélat pourrait, dès à présent, introduire dans la cathédrale [Notre-Dame de Paris] le général de Gaulle.
DE GAULLE, Mémoires de guerre, 1956, p. 314.
SYNT. 1. Les cloches, le clocher, les gargouilles d'une cathédrale; visiter une cathédrale; une cathédrale désaffectée. 2. (Archit.). Cathédrale baroque, gothique ou ogivale, romane.
— P. métaph. Ce qui évoque une cathédrale par ses dimensions, sa magnificence, etc. :
• 2. ... nous quittâmes enfin ce sale canot sauvage pour entrer dans la forêt par un sentier caché qui s'insinuait dans la pénombre (...), illuminé seulement de place en place par un rais de soleil plongeant du plus haut de cette infinie cathédrale de feuilles.
CÉLINE, Voyage au bout de la nuit, 1932, p. 204.
B.— Emplois techn. [En constr. de circ. ou d'appos.]
1. B.-A. (arts décoratifs)
a) Reliure (à la) cathédrale. Reliure romantique dont les plats sont abondamment décorés de motifs gothiques. Entre 1830 et 1840, l'engouement pour le gothique inspire la reliure à la cathédrale, à laquelle succède la reliure à simple encadrement de filets (Ch. KUNSTLER, L'Art au XIXe s. en France, 1954, p. 129).
b) Style (à la) cathédrale. Style imitant le décor des cathédrales gothiques. Tout « ensemble » gothique, au XIXe siècle, devait comporter une vitrine à la cathédrale avec quelques objets évocateurs : miroirs d'ivoire, sceau, ... (L'Hist. et ses méthodes, 1961, p. 401); des verres en opaline bleue à la cathédrale (Ch. KUNSTLER, L'Art au XIXe s. en France, 1954 p. 36).
2. TECHNOL. Verre cathédrale. Verre translucide, à l'aspect martelé :
• 3. Il [le laboratoire de recherches et de contrôle] sera convenablement éclairé, tout en évitant soigneusement la lumière solaire directe (au besoin en utilisant des vitrages en verre cathédrale qui diffuse la lumière); ...
BRUNERIE, Les Industr. alim., 1949, p. 158.
Rem. On rencontre ds la docum. les 2 créations d'aut. suiv. concernant cathédraleux, euse, péj. a) Adj. [En parlant du mobilier] Qui donne une allure de cathédrale. Un mobilier qui a un peu l'air d'un héritage par Zola d'un cardinal vénitien, mais où tout ce décrochez-moi-ça cathédraleux fait un drôle d'entour à l'auteur de L'Assommoir et de Nana (E. et J. DE GONCOURT, Journal, 1891, p. 70). b) Subst. masc. ,,Personne qui fréquente une cathédrale`` (RHEIMS 1969). On annonce à nouveau la gamme à faire crouler les cathédrales. Minute! Trop souvent déjà il a fallu déchanter. Inventeurs insuffisants, trop tôt repartis à la reconstruction. Cependant, le monument alerté à son tour bourdonnait, les cathédraleux, les mains dans les manches, se répandaient au-dehors pour une nouvelle inondation, et tout était à recommencer... en plus difficile (H. MICHAUX, Face aux verrous, 1954 [d'apr. Lar. encyclop.], p. 46 ds RHEIMS 1969).
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. 1694-1878. Étymol. et Hist. 1666, 28 juin (Journal des savants, C.R. ds Fr. mod., t. 23, p. 216 : des Hospitaux et des Seminaires qui dépendent des cathédrales); 1680 (RICH. : L'Église notre Dame est la cathédrale de Paris). Issu p. ell. de église cathédrale, v. cathédral. Fréq. abs. littér. :2 091. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 3 169, b) 2 087; XXe s. : a) 3 590, b) 2 909. Bbg. GOTTSCH. Redens. 1930, p. 347. — MAT. Louis-Philippe 1951, p. 73.
cathédrale [katedʀal] n. f.
ÉTYM. 1666; de église cathédrale.
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1 Église épiscopale d'un diocèse. ⇒ Église. || L'évêque a dit la grand'messe à la cathédrale. || L'écolâtre, professeur de théologie d'une cathédrale. — Cathédrale romane, gothique, renaissance, baroque, moderne. || La cathédrale est l'endroit le plus (cit. 76) orné… || Les grandes cathédrales gothiques. || Les cathédrales de Chartres, de Reims, d'Amiens, de Paris; d'York, de Westminster; de Mayence, de Cologne; de Milan, de Florence; de Tolède, de Burgos. || Flèches, tours d'une cathédrale. || Vaisseau, nef, bas-côtés, chœur, transept, abside; tribune, triforium d'une cathédrale. || Façade, chevet d'une cathédrale. || Sculptures, vitraux d'une cathédrale. || L'orgue, les cloches de la cathédrale. — La Cathédrale, roman de Huysmans.
1 J'allai voir la cathédrale, vaisseau gothique à flèche élevée.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, IV, 3.
2 (…) la cathédrale semblait une créature docile et obéissante sous sa main; elle attendait sa volonté pour élever sa grosse voix; elle était possédée et remplie de Quasimodo comme d'un génie familier. On eût dit qu'il faisait respirer l'immense édifice.
Hugo, Notre-Dame de Paris, IV, 3.
3 (…) lorsque le soleil se couche, elle (la cathédrale) se carmine et elle surgit, telle qu'une monstrueuse et délicate châsse, rose et verte, et, au crépuscule, elle se bleute, puis paraît s'évaporer à mesure qu'elle violit.
Huysmans, la Cathédrale, p. 356.
4 Le XIIIe siècle a été la plus grande ère des cathédrales. C'est lui qui les a presque toutes enfantées (…)
Huysmans, la Cathédrale, p. 151.
♦ Par métaphore. Ce qui, par ses dimensions, son élévation, évoque une cathédrale.
5 Enfin (…) entre deux noires armées de pins qui soufflaient sur lui une haleine d'étuve et dont les milliers de pots emplis de gemme parfumaient comme des encensoirs la cathédrale sylvestre (…)
F. Mauriac, le Baiser au lépreux, p. 41.
2 Techn. || Reliure à la cathédrale : reliure romantique de style néo-gothique.
3 Appos. || Verre cathédrale : verre translucide, de surface inégale.
6 Une bourrasque de novembre siffle aux joints de l'œil-de-bœuf de la salle de bains, dont les vitres en quart-de-rond, embuées à gros grains, sont aussi opaques que du verre cathédrale.
Hervé Bazin, Cri de la chouette, p. 7.
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HOM. Cathédrale (adj.).
Encyclopédie Universelle. 2012.