étrenne [ etrɛn ] n. f.
• 1636; estreine, estraineXIIe; lat. strena « cadeau à titre d'heureux présage »
1 ♦ (Vieilli au sing.) Présent à l'occasion du premier jour de l'année. Je vous donne cela pour étrenne. « les keepsakes qu'elles avaient reçus en étrennes » (Flaubert). Il a eu de belles étrennes. « Ah ! quel beau matin, que ce matin des étrennes ! Chacun, pendant la nuit, avait rêvé des siennes » (Rimbaud).
2 ♦ Spécialt Gratification de fin d'année. Les éboueurs, le facteur sont venus chercher leurs étrennes.
3 ♦ (estrine v. 1200) Premier usage qu'on fait d'une chose (⇒ étrenner). Cet objet est neuf, vous en aurez l'étrenne. ⇒ primeur. Vous n'en avez pas l'étrenne ! on me l'a déjà dit (reproche, insulte).
● étrenne nom féminin (latin strena, présage) Avoir l'étrenne de quelque chose, être le premier à en user, en avoir la primeur. ● étrenne (expressions) nom féminin (latin strena, présage) Avoir l'étrenne de quelque chose, être le premier à en user, en avoir la primeur.
étrenne
n. f. (Surtout au Plur.) Présent fait à l'occasion du jour de l'an. Recevoir des étrennes.
|| Gratification d'usage, en fin d'année, pour certains services. étrennes du facteur.
⇒, subst. fém.
A.— Vieux
1. Première vente faite par un marchand dans sa journée, sa semaine. Je n'ai rien vendu aujourd'hui, voilà mon étrenne (Ac. 1798-1878).
Attesté ds les dict. gén., Ac. 1932, ROB. et Lar. encyclop. exceptés.
2. Première utilisation que l'on fait d'une chose. Le maître des cérémonies venait ensuite, devant le bureau du corps législatif, une douzaine de députés (...) ayant au milieu d'eux la grande taille du Nabab dans l'étrenne du costume officiel (A. DAUDET, Nabab, 1877, p. 106). Avoir l'étrenne de qqc. Être le premier à s'en servir, à en jouir. J'ai pris un bain domestique en sortant de mon lit neuf, dont j'ai voulu avoir l'étrenne (MAINE DE BIRAN, Journal, 1816, p. 209). Seigneur Caton (...) vous devriez essayer de lancer le disque de Rémus. Depuis six cent quatre vingt dix ans qu'il est là, sur sa borne, personne ne l'a lancé; vous en auriez l'étrenne (DUMAS père, Catilina, 1848, I, 2, p. 38) :
• 1. — Allez donc, fit le jeune homme en lui serrant la main. Vous avez mis votre nouvelle robe, ajouta-t-il, elle vous sied à merveille.
— Au fait, c'est vrai, dit Musette; c'est comme un pressentiment que j'ai eu ce matin. Marcel en aura l'étrenne.
MURGER, Scènes vie boh., 1851, p. 234.
— Fam. Avoir l'étrenne d'une femme. Lui faire perdre sa virginité. S'il ne l'a pas eue, il va l'avoir... et il n'en aura pas l'étrenne (ZOLA, Bonh. dames, 1883, p. 667).
— P. iron. Offrir à qqn l'étrenne de sa barbe (c'est-à-dire de ses joues débarrassées de la barbe). L'embrasser immédiatement après avoir été rasé. Revenez demain en sortant de chez le coiffeur. Je vous embrasserai; vous me donnerez l'étrenne de votre barbe (VALLÈS, J. Vingtras, Enf., 1879, p. 183).
B.— Usuel, gén. au plur.
1. Présent(s) offert(s) à l'occasion du jour de l'an. Donner, recevoir des étrennes; livre d'étrennes. Je me couchais ce soir-là avec toutes mes étrennes dans ma chambre auprès de moi, gardant même sur mon lit les préférées (LOTI, Rom. enf., 1890, p. 233). Je venais de commander des cadeaux d'étrennes pour les enfants, et Jean m'avait dit, au moment où je partais :« Prends-les beaux, pour fêter le nouveau siècle » (DANIEL-ROPS, Mort, 1934, p. 316) :
• 2. ... je ne manquerai pas (...) de citer Nonius Marcellus, (...) lequel fait remonter l'origine des étrennes à Tatius, roi des Sabins. Le premier jour de l'an (on ne sait pas très-positivement la date), on avait fait présent à ce prince, un peu crédule, de quelques branches d'arbres consacrées à Strenno, déesse de la force; ce qui lui parut de bon augure.
JOUY, Hermite, t. 1, 1811, p. 316.
— P. méton. Époque de l'année où l'on offre ces présents. Je commanderai ta montre pour que tu l'aies aux étrennes (BALZAC, Corresp., 1835, p. 741).
2. En partic. Gratification remise en fin d'année aux domestiques ou à certains employés. Ces serviteurs sans maîtres avaient neuf cents francs d'appointements; les étrennes et gratifications portaient ces émoluments à douze cents francs (BALZAC, Employés, 1827, p. 82). Ces calendriers que le facteur nous apporte pour avoir ses étrennes (PROUST, Temps retr., 1922, p. 989).
— P. ext. Pourboire, gratification occasionnelle (sans rapport avec le jour de l'an). Mais la servante nous disait en grognant : Je suis attendue. Un domestique était venu lui dire qu'on la demandait, pour tâcher de s'approprier l'étrenne (STENDHAL, Mém. touriste, t. 3, 1838, p. 97). Il y eut de bonnes étrennes après les naissances, les ventes, ou les mises au joug finement faites (PESQUIDOUX, Livre raison, 1932, p. 91).
— P. iron. Le froid, le bombardement, la famine : voilà les étrennes de 1871. Jamais Paris, depuis que Paris est, n'a eu un pareil jour de l'an (GONCOURT, Journal, 1871, p. 709).
♦ Arg. Synon. de coup (cf. CARABELLI, [Lang. pop.]).
Rem. On rencontre ds la docum. le subst. masc. étrenneur. Personne qui passe de maison en maison pour obtenir quelque étrenne. Dès le lendemain de Noël, c'est par bandes que les pauvres vont de village en village, précédés par un vieux cheval orné de rubans et de lauriers, pour chercher leurs étrennes. Ce sont les étrenneurs (Bretagne) (MENON, LECOTTÉ, Vill. de Fr., t. 2, 1954, p. 112).
Prononc. :[]. Enq. : //. Étymol. et Hist. 1. Ca 1165 estreine « cadeau » (BENOIT DE STE-MAURE, Troie, éd. L. Constans, 5089); 2. ca 1185 « premier usage qu'on fait d'une chose » (ALEXANDRE DE PARIS, Alexandre, I, 1017 ds Elliott Monographs, 37, p. 23); 3. 1er tiers du XIIIe s. estrenes au plur. « présents à l'occasion du premier jour de l'année » (Sermon Poitevin, 31 ds T.-L.). Du lat. class. strena « pronostic, présage, signe », spéc. « présents qu'on fait un jour de fête pour servir de bon présage ». Fréq. abs. littér. :243. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 338, b) 523; XXe s. : a) 480, b) 174.
étrenne [etʀɛn] n. f.
ÉTYM. 1636; estreine, estraine, v. 1165; du lat. strena « cadeau à titre d'heureux présage », d'abord « pronostic, présage ».
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1 Présent que l'on fait à l'occasion du premier jour de l'année. — Au sing. (vieilli). || Je vous donne cela pour étrenne.
1 Ce nouvel an (…)
Je donne au Roy ce monde plantureux;
Je donne au monde un tel prince d'élite,
Afin que l'un vive en paix bien heureux,
Et que l'autre ait l'étrenne qu'il mérite.
Clément Marot, Étrenne, LIV.
2 Monseigneur, il nous arrive dans le moment une écritoire que Madame du Châtelet et moi indigne comptions avoir l'honneur de présenter à votre altesse royale pour ses étrennes (…) Ce qui m'encourage à prendre cette liberté, c'est que ce petit hommage de votre sujet, ayant été fait à Paris, imite et surpasse la laque de la Chine (…)
Voltaire, Lettre au roi de Prusse, 73, déc. 1738.
3 — Ah ! quel beau matin, que ce matin des étrennes ! Chacun, pendant la nuit, avait rêvé des siennes Dans quelque songe étrange où l'on voyait joujoux, Bonbons habillés d'or, étincelants bijoux, Tourbillonner, danser une danse sonore (…)
Rimbaud, Poésies, « Les étrennes des orphelins », III.
4 (Elle) s'indignait qu'on fît présent de poupées aux petites filles, pour leurs étrennes; elle y voyait une ruse ignoble de l'homme pour asservir, dès le berceau, la femme à son foyer.
André Suarès, Trois hommes, « Ibsen », VI.
4.1 (…) il lui avait fait un don plus précieux, en ajoutant ainsi au mince trésor des idées et des sentiments de Jean, cette nouveauté rare et charmante d'un don tout spirituel, d'étrennes qui se disaient, sans modestie ni précautions oratoires, des étrennes, et qui n'avaient rien coûté, qui ne consistaient en rien de matériel ni de vulgaire.
Proust, Jean Santeuil, Pl., p. 269.
♦ (XIIIe). Par métonymie. Période où l'on fait ce présent. || Faire une visite à qqn pour les étrennes.
2 (Au plur. depuis le premier tiers du XIIIe). Gratification que l'on donne en fin d'année aux domestiques et à certains employés. || Le concierge reçoit pour ses étrennes un mois double. || Les facteurs, les boueux sont venus chercher leurs étrennes. || Les magistrats recevaient autrefois des étrennes de certains clients intéressés.
5 (…) vous avez toujours une querelle toute prête à faire à vos valets dans le temps des étrennes (…) pour vous donner une raison de ne leur donner rien.
Molière, l'Avare, III, 1.
6 (…) Compare prix pour prix
Les étrennes d'un juge à celles d'un marquis :
Attends que nous soyons à la fin de décembre.
Racine, les Plaideurs, I, 4.
7 (…) quoique j'aie reçu des étrennes ces jours derniers, je n'ai plus grand'chose par devers moi, ayant été obligé de payer mon bois et les étrennes des domestiques et la fête de Mme Landry.
Sainte-Beuve, Correspondance, t. I, p. 37.
3 (1835). Vx ou régional. Pourboire. || Attendre une étrenne.
8 Je redoutais le moment de donner l'étrenne à un portier de peur de ne pas lui donner assez et d'offenser sa délicatesse. Il m'est arrivé souvent de ne pas oser donner l'étrenne à un homme trop bien vêtu de peur de l'offenser, et j'ai dû passer pour avare.
Stendhal, Vie de Henry Brulard, 47.
4 Argot. Coup. || Prendre une étrenne.
5 (V. 1185). Premier usage qu'on fait d'une chose. || Cet objet est neuf, vous en aurez l'étrenne. ⇒ Primeur. || « Tu n'en auras pas l'étrenne », chanson populaire. || Avoir l'étrenne de la barbe d'un homme, être la première à l'embrasser après qu'il se soit rasé.
♦ Fam. et vieilli. || Avoir l'étrenne d'une femme, la déflorer.
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DÉR. Étrenner.
Encyclopédie Universelle. 2012.