feinte [ fɛ̃t ] n. f.
• 1220; de feindre
1 ♦ Vx Fiction.
2 ♦ Vieilli Le fait de cacher ses véritables sentiments, ses intentions pour donner comme vrais des intentions et des sentiments simulés. ⇒ artifice, comédie, dissimulation, fam. frime, hypocrisie, mensonge, ruse, tromperie. Dites-nous sans feinte ce qu'il en est, réellement. « incapable d'une mauvaise pensée, mais aussi d'une feinte » (Sainte-Beuve).
3 ♦ Mod. (Art milit., sport) Coup, mouvement simulé par lequel on trompe l'adversaire en menaçant un côté alors qu'on se propose d'en attaquer un autre. « Les généraux qui jugent que, pour qu'une feinte réussisse à tromper l'ennemi, il faut la pousser à fond » (Proust). Les feintes d'un boxeur, d'un footballeur.
4 ♦ (déb. XXe) Fam. Ruse. ⇒ attrape, piège. Faire une feinte à qqn. ⇒ feinter. C'est une feinte, il veut nous rouler.
● feinte nom féminin Littéraire. Action de feindre, de dissimuler la réalité : Parler sans feinte. Manœuvre habile d'un chef militaire, d'un sportif (footballeur, escrimeur) destinée à tromper l'adversaire. Familier. Ruse, piège destinés à surprendre, à tromper quelqu'un : Faire une feinte à quelqu'un. Astuce destinée à détourner l'attention du spectateur pour permettre à l'illusionniste de réussir son tour. Place où la trame manque dans une étoffe. ● feinte (synonymes) nom féminin Littéraire. Action de feindre , de dissimuler la réalité
Synonymes :
- comédie
- manège
- ruse
- simagrées
feinte
n. f. Action destinée à tromper, à donner le change.
|| SPORT Mouvement simulé destiné à provoquer chez l'adversaire une réaction dont on espère tirer profit. Faire une feinte.
⇒FEINTE, subst. fém.
A.— Rare. Action de faire semblant (de faire, d'éprouver, d'avoir quelque chose). Toute sa dévotion n'est que feinte (Ac.). Synon. dissimulation, affectation. Jamais elle ne laissait sa physionomie tranquille, baissant la tête d'une façon languissante, la relevant au ciel avec des feintes subites de passion et de poésie (ZOLA, M. Férat, 1868, p. 116). J'avais feint de désirer la quitter, feinte qui ne m'était pas seulement dictée (...) par les enseignements que j'avais cru recueillir de mes amours précédentes (PROUST, Prisonn., 1922, p. 345) :
• 1. ... il tient à sa réputation d'amateur d'art, feint de se ruiner en collections (...). Il s'est d'ailleurs pris à sa feinte, car son mépris des hommes, de leurs vices, de leurs malheurs, s'envenime avec l'âge et les forfanteries de carabin qui l'ont aidé si longtemps ne suffisent plus à le rassurer.
BERNANOS, Mauv. rêve, 1948, p. 934.
B.— Action destinée à masquer (quelque chose). Ses feintes n'ont pas réussi; parlez sans feinte. Synon. artifice, dissimulation, ruse, tromperie. Cloche ne pouvait plus remuer, il essaya bien de se hisser sur ses pieux, il n'y parvint point. On crut à une feinte, à une ruse, à un mauvais vouloir de malfaiteur (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Gueux, 1884, p. 443). Vainement l'éditeur (...) lui demandait-il si, oui ou non, il était l'auteur du roman. Jean-Jacques s'en tirait une fois de plus par cette feinte :« C'est encore rendre hommage à la vérité que de déclarer qu'on veut la taire » (GUÉHENNO, Jean-Jacques, 1952, p. 67) :
• 2. ... je refusai la prudente réflexion, la fausse solitude et ses consolations sordides. Et j'ai compris que ce refus était encore une feinte : en vérité je ne disposais pas de mon cœur; j'étais impuissante contre cette angoisse qui s'emparait de moi chaque fois que je décachetais une lettre de Lewis...
BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 501.
C.— Spécialement
1. SP. Mouvement simulé dans le but de déjouer (quelque chose), de tromper l'adversaire. Faire une feinte de corps. Je m'instruisis beaucoup à observer leurs feintes et leurs passades propres à fatiguer et éberluer le taureau (GIDE, Thésée, 1946, p. 1432). Malgré ses bonds, ses feintes et la rapidité de sa course, toujours ils l'atteignaient (BOSCO, Mas Théot., 1945, p. 15). L'expression épanouie avec laquelle des hommes grossiers (...) s'écrient devant une passe de football, une feinte de boxe, ou un corps d'athlète :« Joli! » (MONTHERL., Olympiques, 1924, p. 228).
2. ART MILIT. Manœuvre destinée à tromper l'ennemi. Une habile feinte tactique chez Hannibal pendant la bataille de Cannes (PROUST, Guermantes 2, 1921, p. 417).
3. ESCR. Coup dirigé sur un côté pour que l'adversaire découvre l'autre. Il fit une feinte en tierce et porta sa botte en quarte (Ac. 1835, 1878). J'ai employé contre lui toutes les ressources de l'escrime : feintes, surprises, dégagements, retraites, coups inusités (GAUTIER, Fracasse, 1863, p. 350). Il combinait ses coups, il préparait ses ripostes, et ne dédaignait ni la feinte ni l'embûche (CLADEL, Ompdrailles, 1879, p. 195). En flèche, à l'épée et au sabre, le bras armé est lancé en avant jusqu'à rupture d'équilibre. Précédée d'une ou de plusieurs feintes, l'attaque est dite « composée » (Jeux et sp., 1967, p. 1434).
4. ÉQUIT. Légère claudication d'un cheval. (Dict. XIXe et XXe s.).
5. MUS., vx. Synon. de altération accidentelle (v. altération1 A 1).
— P. méton. Touche (actuellement noire) du clavier, correspondant à la note altérée. La note placée entre l'ut et le ré pouvait donner l'ut ♯ ou le ré ♭ distincts l'un de l'autre; et de cette disposition, on avait appelé feintes les touches qui étaient ainsi séparées (SCHMITT, SIMON, GUÉDON, Nouv. Manuel organiste, 1905, p. 71). Autrefois les f[eintes] étaient blanches et les touches correspondant aux notes naturelles noires (Mus. 1976).
6. TYPOGR. Défaut d'encrage dans une forme entraînant un blanc sur la page imprimée. (Dict. XIXe et XXe s.).
7. TISS. Endroit où la trame manque dans une pièce d'étoffe (Nouv. Lar. ill.-Lar. Lang. fr., QUILLET 1965).
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. Ca 1223 « fiction, invention poétique » fables et faintes (G. DE COINCY, Mir. Vierge, éd. F. König, II Pr. 1, 147), ,,rare`` ds DG; 2. [av. 1544 « fait de feindre, de donner une apparence contraire à la réalité » (MAROT, I, 359 ds LITTRÉ)]; en partic. 1680 escr. (RICH.); 3. 1865 art vétér. (LITTRÉ). Part. passé fém. subst. de feindre. Fréq. abs. littér. :469. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 443, b) 484; XXe s. : a) 515, b) 1 046. Bbg. PORTIER (E.). Essai de sém. : feindre, figurer, feinte, figure, fiction. R. Philol. fr. 1915/16, t. 29, pp. 183-201. — QUEM. DDL t. 6.
feinte [fɛ̃t] n. f.
ÉTYM. 1220; de feindre.
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1 Vx. Invention poétique. ⇒ Fiction.
1 Le conte fait passer le précepte avec lui.
En ces sortes de feinte il faut instruire et plaire (…)
La Fontaine, Fables, VI, 1.
2 (1530). Vieilli. Le fait de cacher ses véritables sentiments, ses intentions réelles pour donner comme vrais des intentions et des sentiments simulés. ⇒ Artifice, comédie, déguisement, dissimulation, feintise (vx), frime, hypocrisie, mensonge, ruse, tromperie. || Il est sincère et incapable d'une feinte. || Parler sans feinte. ⇒ Fard. || Dites-nous sans feinte ce qu'il en est, pour de bon, réellement.
2 C'est une étrange chose, à vous parler sans feinte (…)
Molière, l'École des maris, I, 2.
3 Incapable d'une mauvaise pensée, mais aussi d'une feinte, si elle ne vous aimait pas, il lui était impossible de vous dire ou de vous laisser croire le contraire.
Sainte-Beuve, Causeries du lundi, Mme la duchesse d'Angoulême, t. V, p. 91.
4 La danseuse ne montre d'abord qu'à regret son pâle visage entouré d'épaisses nattes de cheveux tressés de laine; elle le cache à demi dans son voile; elle se détourne, hésite, en se sentant sous les regards des hommes, tout cela avec de doux sourires et des feintes de pudeur exquises.
E. Fromentin, Un été dans le Sahara, p. 33.
3 (1680). Mod. Art milit., sports. Coup simulé par lequel on trompe l'adversaire en menaçant un côté alors qu'on se propose d'en attaquer un autre. || Faire une feinte. || Par sa feinte habile, le général déconcerta l'ennemi. (1686, in Petiot). || Après une feinte, l'escrimeur toucha facilement son adversaire. || Joueur de football qui abuse des feintes. || Les feintes d'un boxeur, d'un footballeur.
5 Elle s'étudia dans cette œuvre (sa toilette), comme un homme qui va se battre repasse ses feintes et ses rompus.
Balzac, la Cousine Bette, Pl., t. VI, p. 328.
6 Comme les généraux qui jugent que, pour qu'une feinte réussisse à tromper l'ennemi, il faut la pousser à fond (…)
Proust, À la recherche du temps perdu, t. XII, p. 191.
6.1 La feinte en escrime est presque tout pour un tireur moyen; mais, chez les bons tireurs, l'art d'accueillir les feintes est passé dans les habitudes et les qualités naturelles différenciant à nouveau les hommes d'égale science.
Jean Prévost, Plaisirs des sports, p. 100.
6.2 L'assaut se continua de la sorte par des bottes multiples; la quarte, la sixte, la tierce, voire la prime, la quinte et l'octave, se mêlant aux dégagez, aux doublez et aux coupez, formaient des coups sans nombre, inédits et complexes, aboutissant respectivement à une feinte imprévue, rapide comme l'éclair, qui toujours atteignait son but.
Raymond Roussel, Impressions d'Afrique, p. 46-47.
4 (Déb. XXe). Fam. et cour. Ruse. ⇒ Attrape, piège. || Faire une feinte à quelqu'un. ⇒ Feinter. || C'est une feinte, il veut nous attraper, nous manœuvrer.
7 Piège du démon. Se rabaisser en parlant humblement de soi, n'est-ce pas une feinte de l'Orgueil ?
Martin du Gard, les Thibault, t. IV, p. 242.
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DÉR. Feinter.
Encyclopédie Universelle. 2012.