fourvoyer [ furvwaje ] v. tr. <conjug. : 8>
1 ♦ Littér. Mettre hors de la voie, détourner du bon chemin. ⇒ égarer. Ce guide nous a fourvoyés. — Pronom. Se fourvoyer. ⇒ se perdre. — P. p. adj. « Ils étaient mal partis, fourvoyés en un véritable et inextricable labyrinthe, en un enchevêtrement de ruelles obscures » (Courteline).
2 ♦ Fig. et littér. ⇒ détourner, égarer, tromper. « Les demi-savants sont nombreux pour accepter une théorie de tradition, qui les guide ou qui les fourvoie » (A. Gide). — Pronom. (plus cour.) Se fourvoyer dans une entreprise dangereuse. Absolt Persuadé « de s'être fourvoyé dès le début et n'apercevant pas le moyen de se tirer d'affaire » (Robbe-Grillet). ⇒ se tromper (cf. Faire fausse route).
⊗ CONTR. Guider.
● fourvoyer verbe transitif (de fors, hors de, et voie) Égarer, tromper quelqu'un, le détourner du bon chemin : Son obstination l'a fourvoyé dans une impasse.
fourvoyer
v.
rI./r v. tr. égarer, dévoyer (qqn). Les mauvais exemples l'ont fourvoyé.
rII./r v. Pron.
d1./d Se perdre, s'égarer. Se fourvoyer dans des ruelles.
|| Fig. Se fourvoyer dans une affaire douteuse.
d2./d Se tromper grossièrement.
⇒FOURVOYER, verbe trans.
A.— Vieilli. Détourner de la voie. Un prêtre, que l'orage avait fourvoyé dans ces plaines désertes (SAND, Lélia, 1833, p. 198). Aujourd'hui l'écueil des Hanois éclaire la navigation qu'il fourvoyait; le guet-apens a un flambeau à la main (HUGO, Travaill. mer, 1866, p. 153).
— Emploi pronom. réfl. Se tromper de chemin, s'égarer. Nous [ma cousine et moi] errâmes longtemps sous la lumière des enseignes au néon : nous ne nous décidions pas à choisir. Nous nous fourvoyâmes dans deux bars, mornes comme des crèmeries et nous échouâmes rue Lepic, dans un atroce petit bouge où des garçons de mœurs légères attendaient le client (BEAUVOIR, Mém. j. fille, 1958, p. 268).
B.— Au fig. Mettre hors de la (bonne) voie; égarer; tromper :
• 1. ... ces petites intrigues de coteries de théâtres, de salons et de boudoirs, qui ont pour but, et presque toujours pour résultat, de fourvoyer l'opinion publique aux dépens ou au profit de quelqu'un ou de quelque chose.
JOUY, Hermite, t. 2, 1812, p. 192.
♦ Emploi abs. Les disputes fourvoient (SAINTE-BEUVE, Volupté, t. 1, 1834, p. 5).
♦ Être fourvoyé. On avait envoyé Yves dans ce collège de Madrid où il était fourvoyé parmi les fils d'aristocrates et de banquiers (DRIEU LA ROCH., Rêv. bourg., 1939, p. 269).
— Cour., emploi pronom. réfl.
♦ [Suivi ou non d'un compl. (introd. par la prép. dans)] S'engager dans une voie autre que celle normalement tracée ou décidée. Mon petit, le drame n'est pas ton affaire. Nous nous sommes fourvoyés. Essayons du vaudeville. Je crois que dans les comiques tu marcheras très bien (A. DAUDET, Pt Chose, 1868, p. 291) :
• 2. Restons dans notre chemin, ne renions pas notre passé. Continuons de vivre parmi les gens qui nous estiment, et n'allons pas nous fourvoyer dans un monde où l'on se moquerait de nous.
SANDEAU, Sacs, 1851, p. 2.
♦ Employé absol. Faire fausse route. L'architecte (...) a voulu perfectionner, et il s'est grossièrement fourvoyé (MÉRIMÉE, Lettres Panizzi, t. 2, 1870, p. 45). Ce pauvre Jammes s'était complètement fourvoyé (LÉAUTAUD, Journal littér., 4, 1924, p. 401).
Rem. Qq. dict. gén. enregistrent le sens de se fourvoyer en vén. ,,S'écarter de la voie et courir un autre cerf que celui de la meute`` (LITTRÉ).
REM. Fourvoyé, ée, part. passé et adj. a) [Correspond à fourvoyer A] Qui s'est égaré. Présumant que c'était quelque palefrenier fourvoyé, l'huissier l'arrêta (HUGO, N.-D. Paris, 1832, p. 47). b) [Correspond à fourvoyer B] Une âme fourvoyée. Des hommes fourvoyés, comme Benjamin Constant (CHATEAUBR., Mém., t. 2, 1848, p. 597). L'amiral Cunningham tomba d'accord avec moi qu'il fallait tout de suite arrêter l'escadre de Vichy (...). Nous pensions bien, d'ailleurs, que la menace suffirait à faire virer de bord ces bâtiments fourvoyés (DE GAULLE, Mém. guerre, 1954, p. 102).
Prononc. et Orth. :[], (il se) fourvoie []. Ds Ac. 1694-1932. Conjug. cf. aboyer. Étymol. et Hist. 1160-74 « écarter quelqu'un du bon chemin » (WACE, Rou, éd. A. J. Holden, IIe part., 2389); fin XIIe s. pronom. (Sermon St Gregoire sur Ezechiel, 123, 11 ds T.-L.). Composé de for-, four-, v. fors et de voie; dés. -er. Fréq. abs. littér. :138.
DÉR. Fourvoiement, subst. masc., rare. Action de (se) fourvoyer. Après quelques détours et fourvoiements (...) ils atteignirent le Mas d'Engane (L. DAUDET, Médée, 1935, p. 170). Rem. Les dict. enregistrent le sens fig. de fourvoiement, au fig. synon. de erreur. Il est tombé dans un étrange fourvoiement (Ac. 1835, 1878). — []. Ds Ac. 1694-1932; ds Ac. 1694 et 1718, s.v. fourvoyement; ds Ac. 1740-1932 sous la forme mod. Cf. aboiement. — 1res attest. [XIIIe s. favoiement « action de s'égarer » ici fig. (Alexis, éd. Ch. E. Stebbins, 230)], apr. 1465 [ms.] erreur et forvoiement (L'ANONYME D'ANGERS, Pelerin. de la vie hum., Ars. 2319, f° 152 r° ds GDF. Compl.); du rad. de fourvoyer, suff. -(e)ment1.
fourvoyer [fuʀvwaje] v. tr. [CONJUG. noyer.]
ÉTYM. XIIe; de fors, et voie.
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1 Littér. Mettre hors de la voie, détourner du bon chemin. ⇒ Égarer. || Ce guide nous a fourvoyés. — Pron. || Se fourvoyer. ⇒ Perdre (se), tromper (se); → Attaquer, cit. 13. || Nous nous sommes fourvoyés. — Au p. p. || Un voyageur, un promeneur fourvoyé.
1 En rentrant, nous nous étions fourvoyés tous deux dans une rue habitée par une multitude de dames comme il faut.
Loti, Mme Chrysanthème, XI.
2 Le fait est qu'ils étaient mal partis, fourvoyés en un véritable et inextricable labyrinthe, en un enchevêtrement de ruelles obscures (…) si bien qu'ils y tournaient en cercle sur eux-mêmes (…) Ils désespéraient d'en sortir jamais (…)
Courteline, le Train de 8 h 47, II, III.
2 Fig. et littér. Détourner, égarer, tromper. || Fourvoyer ses ennemis. || Fourvoyer l'intrigue (→ Éveiller, cit. 7). || Les mauvais exemples l'ont fourvoyé (Académie). ⇒ Erreur (mettre dans l'erreur, induire en erreur).
3 Le grand homme de science est tout aussi rare que tout autre homme de génie : les demi-savants sont nombreux pour accepter une théorie de tradition, qui les guide ou qui les fourvoie, et pour tout « observer » d'après elle.
Gide, Corydon, II, VI.
4 (…) il jugeait, maintenant, qu'on l'avait, bien inutilement, fourvoyé dans une aventure que rien n'avait jamais justifiée.
Louis Madelin, Hist. du Consulat et de l'Empire, Avènement de l'Empire, V.
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se fourvoyer v. pron.
ÉTYM. (1653).
♦ Plus cour. || Se fourvoyer dans une entreprise dangereuse. — Absolt. || Le commentateur, le traducteur s'est entièrement fourvoyé. ⇒ Tromper (se). — Passif et p. p. || Être fourvoyé, complètement fourvoyé. || Esprit fourvoyé.
5 Pour redresser à tous votre esprit fourvoyé (…)
Molière, Tartuffe, I, 1.
6 (…) ceux qui se trouvent être fourvoyés ou être tombés en hérésie ou schisme (…)
Pascal, Pensées, XIV, 951.
7 Tout au plus, certains d'entre eux avaient-ils exprimé discrètement le regret qu'un compositeur aussi bien doué se fourvoyât dans un métier, qui n'était pas le sien.
R. Rolland, Jean-Christophe, La révolte, I, p. 440.
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fourvoyé, ée p. p. adj.
♦ Voir ci-dessus à l'article.
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CONTR. Guider, montrer (le chemin); mettre, remettre (dans la voie); redresser (le jugement, une erreur).
DÉR. Fourvoiement.
Encyclopédie Universelle. 2012.