gicler [ ʒikle ] v. intr. <conjug. : 1>
• 1810; h. 1542; franco-provenç. jicler, du provenç. gisclar
1 ♦ Jaillir, rejaillir avec une certaine force (liquides). La boue a giclé sur les passants. ⇒ éclabousser. Le sang giclait de sa blessure. Par ext. Littér. « La lumière a giclé sur l'acier » (Camus).
2 ♦ Trans. (Suisse) Asperger, éclabousser. Il a giclé son pantalon. — Intrans. Être projeté. Ses affaires ont giclé partout.
3 ♦ Fam. Être expulsé, vidé.
● gicler verbe intransitif (ancien français ciscler, fouetter, du latin populaire cisculare, faire jaillir) Jaillir avec force et éventuellement éclabousser, en parlant d'un liquide : Le sang giclait de la blessure. ● gicler (synonymes) verbe intransitif (ancien français ciscler, fouetter, du latin populaire cisculare, faire jaillir) Jaillir avec force et éventuellement éclabousser, en parlant d'un liquide
Synonymes :
- éclabousser
- fuser
gicler
v.
d1./d v. intr. Jaillir soudainement ou avec force. Eau qui gicle d'une canalisation crevée. Syn. (Québec) revoler.
d2./d v. tr. (Suisse) Arroser, éclabousser (qqn ou qqch). Gicler une pelouse au jet.
⇒GICLER, verbe
A. — Emploi intrans.
1. [Le suj. désigne un élément liquide] Jaillir en éclaboussant. Synon. éclabousser, fuser. Elle court. Elle remonte le sentier, piétinant dans les flaques qui giclent (FARRÈRE, Homme qui assass., 1907, p. 295). Il passait constamment sa main gauche sous son nez, comme pour arrêter le saignement. Mais le sang giclait toujours (SARTRE, Nausée, 1938, p. 211). Je mordais l'orange, un jus sucré giclait dans ma bouche (SAGAN, Bonjour tristesse, 1954, p. 36).
— P. métaph. :
• 1. Sa misère et sa honte lui serviront de passeport pour entrer au ciel. Là-haut, la boue de son existence giclera autour d'elle en étoiles glorieuses.
AYMÉ, Cléramb., 1950, II, 3, p. 95.
2. P. anal. Se répandre en jaillissant de tous côtés. Le plomb sort par les entailles et se répand dans les chairs en tournoyant et en giclant (DUHAMEL, Cécile, 1938, p. 121) :
• 2. Il giclait des quartiers de viande, des morceaux de fesses, des rognons loin, jusque dessus la Rue royale et puis dans les nuages.. C'était l'odeur impitoyable, la tripe dans l'urine et les bouffées des cadavres, le foie gras bien décomposé...
CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 380.
B. — Emploi trans.
1. Rare. Faire jaillir. Moi, y en a un, près de moi, qui m'a giclé son sang dessus (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p. 745).
2. Région. (Suisse). Asperger de liquide, éclabousser. Les hommes bien habillés qui font attention à ne pas salir leurs chaussures, à ne pas gicler leurs pantalons bien pliés (A.-L. GROBÉTY, Zéro positif, Vevey, Bertil Galland, 1975, p. 192).
— Emploi pronom. réciproque. Elle aperçut (...) les enfants autour de la fontaine. Elle entendait leurs cris; les garçons et la naine se giclaient (S. CORINNA BILLE, Juliette éternelle, Lausanne, La Guilde du Livre et Clairefontaine, 1971, p. 26).
REM. 1. Giclage, subst. masc. Action de gicler; résultat de cette action. Sur la poitrine, les jets se croisaient en filet, si droits qu'on y sentait encore le giclage du sang (MALRAUX, Espoir, 1937, p. 828). 2. Giclement, subst. masc. Action de gicler; résultat de cette action. Giclements de boue (MARTIN DU G., Thib., Sorell., 1928, p. 1220). Un giclement d'eau (CÉLINE, Voyage, 1932, p. 246). 3. Giclure, subst. fém. Trace, tache laissée par un élément liquide qui a giclé. Synon. éclaboussure. Brûlebois délibérait en lui-même sans souci des giclures de boue qui étoilaient ses larges culottes (AYMÉ, Brûlebois, 1926, p. 151).
Prononc. et Orth. : [], (il) gicle []. Ds Ac. 1932. Étymol. et Hist. 1542 « faire jaillir » (ARETIN, Gen., p. 194, éd. 1542 [traduction par le Lyonnais J. de Vauzelles] ds GDF.), attest. isolée; à nouv. en 1810 (MOLARD, Mauv. lang. corr., p. 136). Emprunté, à en juger d'apr. les attest. supra, au fr.-prov. jicler, gigler (cf. jiclia, jiclio ds DU PUITSP.); ce mot est apparenté à toute une famille attestée dans une grande partie du domaine gallo-roman avec des formes et des sens divers. La comparaison des formes cisclar a prov. (mil. XIIIe ds LEVY) « crier à haute voix; siffler; pleuvoir et venter »; cisler a. fr. « fouetter » (ca 1120 ds T.-L.) et gisclar (de même sens que cisclar, mil. XIIIe ds LEVY), justifie un étymon commun cisculare, d'orig. inc.; on a avancé l'hyp. d'une altération de fistulare « jouer de la flûte », soit sous l'infl. de sibilare « produire un sifflement, siffler » (mais les résultats du traitement phonét. de l'initiale ci-, si- donnant toujours ci- rendent impossible ce croisement, cf. FEW t. 2, 1, p. 714b), soit sous une infl. onomatopéique (cf. JUD. R. 44. 131). Fréq. abs. littér. : 131. Bbg. DAUZAT Ling. fr. 1946, p. 290.
gicler [ʒikle] v. intr.
ÉTYM. 1810; attestation isolée, 1542; franco-provençal jicler, gigler, du provençal gisclar, var. de cisclar « crier, siffler; pleuvoir et venter », apparenté à l'anc. franç. cisler « fouetter » (cf. dial. cicler, cigler), à l'orig. desquels P. Guiraud suppose un fréquentatif (ciculare) issu du lat. ciere « mettre en mouvement, exciter, provoquer, pousser dehors, pousser des cris » (→ Exciter, inciter).
❖
1 Jaillir, rejaillir avec une certaine force (le sujet désigne un liquide). ⇒ Jaillir. || La boue a giclé sur les passants. || Le sang giclait de sa blessure.
REM. 1. Gicler est enregistré par Littré qui le définit dans son Supplément (1877) : « Terme populaire. Rejaillir en éclaboussant ». L'Académie le donne encore comme populaire dans la 8e éd. (1932). Il est aujourd'hui entré dans l'usage courant, non marqué. 2. On rencontre aussi la forme gigler (fin XIXe); → ci-dessous, cit. 2.
1 (…) gicler (…) vient de la région franco-provençale, où le verbe gicla a le même sens (la forme provençale est giscla). Le mot gicler était couramment usité dans la Suisse romande, même dans la bonne société à la fin du siècle dernier. À Paris, il a d'abord été adopté, au début de ce siècle, par les écrivains en quête de mots rares; aujourd'hui, il est assez répandu, dans la langue courante.
A. Dauzat, Études de linguistique franç., p. 290.
2 Et lorsque le sang gigle (sic) et que la pâte du cerveau l'éclabousse, il grince des dents et rit.
Huysmans, Là-bas, XI.
3 Le raisin est quasi mûr. La petite aurore me le livre froid, perlé, élastique et giclant sucré sous la dent (…)
Colette, la Naissance du jour, p. 219.
4 Il touchait la blessure du taureau. Elle giclait et palpitait sous ses doigts comme un fruit pourri.
J. Giono, le Chant du monde, II, III.
5 D'autres (arbres) à tête spongieuse, et si on y enfonce la main par mégarde, un liquide brun gicle partout.
Henri Michaux, La nuit remue, p. 167.
6 Le blanc soleil giclait au creux d'un torrent vide (…)
Anna de Noailles, Poésies, Vivants et morts, « Dans l'azur antique ».
7 Des gens giclaient sur le trottoir par la vaste porte à tambour (…)
Céline, Voyage au bout de la nuit, p. 181.
8 La lumière a giclé sur l'acier et c'était comme une longue lame étincelante qui m'atteignait au front.
Camus, l'Étranger, I, VI.
9 Mais après s'être ébroué et nous avoir giclées, il se promenait paisiblement dans l'eau qui lui arrivait aux aisselles.
Corinna Bille, la Fraise noire, p. 128.
10 (…) les hommes bien habillés qui font attention à ne pas salir leurs chaussures, à ne pas gicler leurs pantalons bien pliés (…)
A.-L. Grobéty, Zéro positif, p. 192.
❖
DÉR. Giclée, giclement, gicleur, giclure.
Encyclopédie Universelle. 2012.