Akademik

heurté

heurté, ée [ 'ɶrte ] adj.
• 1752; de heurter
Qui manque de fondu, qui est fait de contrastes très (souvent trop) appuyés. Tons heurtés. Style heurté. haché, saccadé. « ce discours heurté, fougueux, ces contrastes » (Faguet). Exécution heurtée d'une œuvre musicale. ⊗ CONTR. Fondu, lié. Harmonieux.

heurté, ée
adj. PEINT Dont les teintes ne sont pas fondues. Tons heurtés.
|| Fig. Saccadé; peu harmonieux. Débit heurté. Style heurté.

⇒HEURTÉ, -ÉE, part. passé et adj.
I. Part. passé de heurter.
II. — Adjectif
A. — Qui comporte des contrastes, des oppositions. Synon. cahotique, saccadé. Des songes affreux et fous, avec des réveils heurtés et douloureux (BARB. D'AUREV., Memor 2, 1838, p. 362). Le président s'était senti en verve le matin et avait rempli plusieurs feuillets d'une écriture aiguë et heurtée (DURANTY, Malh. H. Gérard, 1860, p. 63). Et les vers, ou les phares, les mots magiques, s'épandaient, recréaient des êtres et des paysages, évoquaient des douceurs tremblantes et des visions brutales et heurtées (VAN DER MEERSCH, Empreinte dieu, 1936, p. 85) :
1. ... je dois reconnaître que je suis sujet à ces transformations soudaines. Ce qu'il y a, c'est que je pense très rarement; alors une foule de petites métamorphoses s'accumulent en moi sans que j'y prenne garde et puis, un beau jour, il se produit une véritable révolution. C'est ce qui a donné à ma vie cet aspect heurté, incohérent.
SARTRE, Nausée, 1938, p. 18.
En partic.
1. [En parlant des traits du visage] Synon. de tourmenté. Le visage de M. Janvier pouvait paraître disgracieux, tant les lignes en étaient sévères et heurtées (BALZAC, Méd. camp., 1833, p. 142). Vieille femme, aux traits heurtés et hommasses (GYP, Souv. pte fille, 1927, p. 207).
2. [En parlant de couleurs] Qui contrastent violemment (les unes avec les autres). Maisons bariolées de rouge, de vert, de couleurs dures et heurtées (MICHELET, Journal, 1830, p. 74). Riches tapis de laine aux couleurs heurtées et éclatantes (LAMART., Voy. Orient, t. 2, 1835, p. 72).
Rem. On relève un emploi analogue appliqué à la lumière. Une lumière plus douce, et des ombres moins heurtées (ALAIN, Propos, 1909, p. 56).
B. — En partic. [En parlant d'une œuvre littér., du style d'un écrivain] Qui manque d'harmonie, qui présente des ruptures, des oppositions de ton ou de genre. Moi, j'aime mieux encourir le reproche d'avoir un style heurté que celui d'être vide (STENDHAL, Racine et Shakspeare, t. 2, 1825, p. 69). Son meilleur livre, le plus neuf [de Chateaubriand], sera le dernier, Vie de Rancé, chaos pathétique, d'un style tendu ou heurté, avec des inflexions du langage parlé (CHARDONNE, Ciel, 1959, p. 129) :
2. Quel est celui de nous qui n'a pas, dans ses jours d'ambition, rêvé le miracle d'une prose poétique, musicale sans rythme et sans rime, assez souple et assez heurtée pour s'adapter aux mouvements lyriques de l'âme, aux ondulations de la rêverie, aux soubresauts de la conscience?
BAUDEL., Poèmes prose, 1867, p. 7.
P. anal. [En parlant de l'élocution] Dont le débit est saccadé. [Saturnin] lui parlait d'elle, répétait toujours les mêmes histoires, en phrases heurtées (ZOLA, Pot-Bouille, 1882, p. 237).
Prononc. : []. Fréq. abs. littér. : 427. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 363, b) 579; XXe s. : a) 629, b) 816.

Encyclopédie Universelle. 2012.