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ALCALINO-TERREUX
ALCALINO-TERREUX

Les métaux alcalino-terreux constituent la deuxième colonne du tableau de classification périodique des éléments. On peut distinguer les alcalino-terreux vrais – calcium, strontium, baryum, radium – et deux éléments plus légers – béryllium et magnésium –, qui présentent des particularités propres.

Ce double nom d’alcalino-terreux trouve son origine dans les propriétés des oxydes, qui furent les premiers connus: infusibles et sans éclat métallique, ce sont des «terres» comme l’alumine, mais leur caractère fortement basique les rapproche aussi des bases alcalines. L’utilisation de la chaux comme mortier dans les constructions remonte à la plus haute antiquité, et, dès le XVIIe siècle, les sels de magnésium recevaient des applications médicales. Le béryllium fut découvert en 1798 dans le béryl, par le chimiste français Nicolas Louis Vauquelin, qui lui donna le nom de glucinium, abandonné depuis. Le radium fut extrait d’un minerai d’uranium, la pechblende, par Pierre et Marie Curie, en 1898. Le béryllium et le radium sont des éléments rares; en revanche, le calcium et le magnésium font partie des dix éléments les plus répandus dans la croûte terrestre, avec des teneurs évaluées respectivement à 3,3 et 1,9 p. 100 en poids. Comme les métaux alcalins, à cause de leur trop grande réactivité chimique, ils n’existent, à l’état naturel, que sous forme de composés, jamais à l’état métallique. Les carbonates de calcium et de magnésium, sous forme de calcaire, de marbre, de dolomite, constituent des montagnes entières, comme les Alpes dolomitiques. Les sulfates sont aussi très courants, le gypse CaS4, 2H2O surtout, qui est à la base de l’industrie du plâtre. Les métaux alcalino-terreux lourds sont plus rares.

Les alcalino-terreux les plus répandus, le calcium et le magnésium, sont présents chez tous les êtres vivants, à des concentrations très variables, mais constantes pour une espèce donnée. Dans la plupart des cas, le titre en calcium est plus élevé que le titre en magnésium, le rapport étant constant, comme le rapport métaux alcalins sur métaux alcalino-terreux. Le calcium active diverses enzymes et les systèmes osseux sont essentiellement constitués de sels de calcium, ainsi que les coquilles et carapaces de nombreux animaux aquatiques. Dans le domaine végétal, la structure de la chlorophylle révèle l’existence d’un ion magnésium.

1. Structure, propriétés physiques et préparations

La famille des métaux alcalino-terreux est homogène et les propriétés évoluent assez régulièrement d’un élément à l’autre. Le béryllium, premier élément du groupe, possède des propriétés qui le rapprochent plus de l’aluminium que du magnésium, comme le lithium est plus proche du magnésium que du sodium. Ce sont des exemples particulièrement évidents de la règle plus générale des ressemblances diagonales dans le tableau de classification périodique. Le cortège électronique des métaux alcalino-terreux se déduit aisément de celui des métaux alcalins, en ajoutant un second électron de valence, apparié au premier, pour former un doublet qui gravite sur une orbitale de type s , à l’extérieur des couches électroniques inertes, possédant une structure de gaz rare. L’état d’ionisation normal consiste à arracher ces deux électrons de valence, pour obtenir un ion M2+. Un certain nombre de composés monovalents ont été préparés par arrachement d’un seul électron; ces composés, qui possèdent des formules du type CaCl, SrCl, BaCl, sont tous très peu stables. Le volume exceptionnellement petit de l’atome de béryllium neutre ou ionisé, rend l’arrachement des électrons difficile, puisque l’énergie d’attraction exercée par le noyau sur un électron varie en fonction inverse du carré de la distance moyenne qui sépare l’électron du noyau; ce métal possède donc de nombreux composés à structure essentiellement covalente. Le magnésium donne encore des composés covalents, comme les organo-magnésiens, mais ce caractère diminue lorsque le numéro atomique croît; il disparaît chez les alcalino-terreux vrais, dont les composés ont des structures essentiellement ioniques.

Les propriétés physiques sont délicates à comparer car les métaux ont des structures cristallines différentes qui imposent de les diviser en plusieurs groupes. Les points de fusion constituent deux séries décroissantes, l’une pour les métaux qui cristallisent dans le système hexagonal, béryllium et magnésium, l’autre pour ceux dont le cristal est cubique. Les caractéristiques mécaniques de ces métaux sont très modestes; ils sont moins mous que les alcalins, le baryum a la consistance du plomb et le béryllium présente un caractère exceptionnel: il raye le verre et le quartz.

Pour préparer les métaux, on utilise comme intermédiaire, soit l’oxyde, soit le chlorure anhydre. Le chlorure est électrolysé à l’état fondu, lorsque son point de fusion est assez bas et pas trop voisin de celui du métal lui-même, c’est-à-dire dans le cas du béryllium, du magnésium et du calcium. L’intérêt industriel du magnésium en a fait multiplier les techniques de préparation: la magnésie peut être électrolysée dans un bain de fluorures alcalins et alcalino-terreux, ou réduite directement par le carbone, l’aluminium, le carbure de calcium ou le ferro-silicium. Les métaux lourds, à partir du calcium, sont produits par aluminothermie. La volatilité de ces métaux croît et rend leur distillation assez facile sous un vide poussé. Le raffinage a lieu par sublimation sous vide ou sous argon.

2. Propriétés chimiques des alcalino-terreux et de leurs composés

Les métaux alcalino-terreux possèdent une grande réactivité chimique; essentiellement réducteurs, ils s’unissent facilement avec la plupart des corps simples. Il est nécessaire de les conserver sous une couche d’huile minérale ou de pétrole, car à l’air, surtout humide, leur surface se ternit très rapidement, par suite de l’apparition d’une croûte d’oxyde, d’hydroxyde, et de carbonate. Dès la température ambiante, mais surtout vers 450 0C, ces métaux absorbent l’azote avec formation d’un nitrure, thermiquement très stable, sauf dans le cas du béryllium. Ces composés s’hydrolysent facilement avec dégagement d’ammoniac et dépôt d’hydroxyde:

Les métaux alcalino-terreux absorbent donc à la fois l’azote et l’oxygène à température assez basse. Ces deux gaz étant les constituants les plus importants de l’atmosphère, il ne subsiste que les gaz nobles dans une ampoule de verre pleine d’air, contenant du magnésium ou du calcium en copeaux, chauffée au rouge. Cette expérience simple permet à la fois la mise en évidence et la préparation des constituants inertes de l’air.

Les métaux alcalino-terreux se dissolvent dans l’ammoniac liquide, avec formation d’une solution bleue. Après évaporation du solvant en excès, il subsiste un résidu de couleur cuivrée, dont la formule répond à celle d’un ammoniacate défini M(NH3)6; par chauffage progressif, ces produits se transforment successivement en amidure M(NH2)2, puis en imidure MNH. L’action du gaz ammoniac sur les métaux chauffés conduit à un mélange de nitrure et d’hydrure.

Les métaux alcalino-terreux donnent une famille de composés intéressante avec le carbone et l’azote. Le traitement de la chaux par le charbon au four électrique, donne le carbure de calcium, qui reste une source d’acétylène:

Cette préparation de l’acétylène, composé de la chimie purement organique, par des méthodes et à partir de matières premières de la chimie purement minérale, montre le caractère artificiel et fragile de la barrière établie entre les deux chimies. Par chauffage de ce carbure dans un courant d’azote, on produit industriellement la cyanamide, utilisée comme engrais de bonne qualité, car son hydrolyse dans le sol est lente et s’accompagne d’une libération d’ammoniac:

Dans les mêmes conditions, les alcalino-terreux lourds ne donnent pas une cyanamide, mais un cyanure comme le cyanure de baryum Ba(CN)2.

Lorsqu’on traite un halogénure de métal léger par l’hydrure de lithium, ou directement le métal par l’hydrogène, on obtient un hydrure. L’absorption du gaz hydrogène par le métal présente des caractères exceptionnels et, dans le cas du calcium, la réaction se fait encore à la température de la carboglace (anhydride carbonique à l’état solide): face=F0019 漣 80 0C. L’hydrure de calcium est le plus stable de tous, mais sa stabilité est quand même inférieure à celle de l’hydrure de lithium. Assez difficiles à décomposer par la chaleur, ces hydrures s’hydrolysent facilement, avec dégagement d’hydrogène. L’hydrure de calcium a été employé à cette fin pendant la Première Guerre mondiale, sous le nom d’hydrolithe.

Les chaleurs de formation des oxydes, rapportées à une mole de métal, sont particulièrement importantes; cela traduit une grande stabilité thermique, confirmée par des points de fusion très élevés. Ces oxydes sont utilisés comme réfractaires; leur réduction est souvent industriellement impossible. Ils s’unissent à l’eau, de façon réversible, pour donner un hydroxyde peu soluble:

Ces caractères les différencient des hydroxydes alcalins (soude, potasse) très solubles et fusibles sans déshydratation. Les propriétés acido-basiques de ces hydroxydes évoluent très régulièrement. L’hydroxyde de béryllium est amphotère, il se dissout à la fois dans les acides et les bases fortes. Le caractère basique croît ensuite avec le numéro atomique et subsiste seul. Les alcalino-terreux vrais possèdent des hydroxydes dont la force est comparable à celle des alcalins.

Les oxydes de métaux lourds réagissent sur l’oxygène pour former des peroxydes décomposables par la chaleur:

Le peroxyde de baryum est à l’origine de la découverte du peroxyde d’hydrogène, ou eau oxygénée, par le baron Thenard:

Cette réaction démontre que les composés alcalino-terreux de cette famille sont bien des peroxydes et non des oxydes de métaux de valence IV, comme on l’admettait auparavant, par comparaison avec Mn2.

Les carbonates sont insolubles, leur stabilité croît avec le numéro atomique du métal. Le carbonate de calcium possède une importance pratique exceptionnelle comme pierre à chaux. Les carbonates cristallisent suivant deux types de réseaux, selon la taille du cation; les métaux légers (Be, Mg) donnent des carbonates à structure rhomboédrique, type calcite; les métaux lourds (Sr, Ba, Ra) des carbonates à structure quadratique, type aragonite. Le calcium, qui se trouve à la limite des deux séries, donne deux carbonates correspondant à chacune de ces deux structures.

3. Spectres d’alcalino-terreux

Lorsqu’on introduit dans la flamme d’un bec Bunsen ou dans le charbon d’un arc électrique un composé alcalino-terreux assez volatil, comme un halogénure, la flamme ou l’arc prend une coloration intense, dont la couleur caractérise le métal: rouge brique pour le calcium et le strontium, jaune-vert livide pour le baryum, rouge carmin pour le radium. Le spectre, comme celui des métaux alcalins, est constitué de raies ou de groupes de raies. Contrairement aux spectres d’alcalins, les spectres de flamme ne sont pas dus aux atomes libres, mais à des molécules. Un spectrographe très dispersif montre que chaque raie est, en fait, une bande complexe, et chaque composé, halogénure, oxyde, ainsi que le métal lui-même, donne un spectre légèrement différent; cependant, les raies essentielles se conservent et leur intérêt analytique est important. Les dosages d’ions alcalino-terreux en solution se font usuellement par spectrophotométrie d’émission de flamme ou par spectroscopie d’absorption atomique.

Le spectre d’arc est un spectre d’atomes, car à haute température, les molécules sont détruites. Ces spectres peuvent comporter plusieurs dizaines de raies, singulets, doublets et également triplets. Le spectre de doublets, semblable à celui des métaux alcalins, peut être attribué à l’ion M+, qui possède la même structure électronique que le métal alcalin qui le précède. Les spectres de raies simples et de triplets sont dus au métal non ionisé. L’étude théorique de ces spectres est très complexe.

Le principe du calcul consiste à attribuer à chaque niveau énergétique de l’atome un terme spectral qui le caractérise numériquement. Les radiations émises ou absorbées correspondent aux sauts des électrons d’un niveau à l’autre, et la valeur des énergies mises en jeu est égale à la différence entre le niveau d’arrivée et le niveau de départ de l’électron. Dans le cas des spectres d’arc des alcalino-terreux, les nombres d’onde peuvent être déterminés à partir de deux séries de termes spectraux, la première composée de termes simples, notés 1S, 1P, 1D, la seconde composée de termes triples à l’exception du premier, notés 3S, 3P, 3D. Les raies obtenues par combinaison de deux termes simples sont simples; les raies obtenues par combinaison des termes triples sont multiples.

Dans le cas de la série principale 3S 漣 m 3P, le terme 3P est triple, et les raies obtenues sont cette fois des triplets, dont les calculs montrent facilement que l’intervalle sera constant. La première série secondaire 3P 漣 m 3D devrait être constituée de raies à 9 composantes, puisque les deux termes sont triples; en fait, on ne constate que la présence de 6 raies élémentaires, dont 3 fortes.

Lorsque, sous l’effet d’une excitation, un des électrons s passe sur une orbitale d de la même couche électronique, le spin résultant peut être 0 ou 1, selon que les spins élémentaires se retranchent ou s’ajoutent; dans le premier cas, le nombre quantique secondaire et le nombre quantique interne sont égaux, les termes obtenus sont simples, ce sont eux que l’on note 1S, 1P, 1D; dans le second cas, les spins s’ajoutent, on obtient trois valeurs possibles pour le quantum interne : J = L + 1, L, L 漣 1, d’où la série de termes spectraux de multiplicité 3 notés 3S, 3P, 3D. Les termes spectraux étant triples, ils déterminent deux intervalles dont le premier est, en général, égal à la moitié du second; ces intervalles varient sensiblement, comme dans le cas des alcalins, avec le carré de la masse atomique de l’élément.

Les éléments zinc, cadmium, mercure, qui sont très différents du point de vue chimique, ont des structures électroniques semblables, et par suite des spectres d’arc identiques.

alcalino-terreux, alcalino-terreuse adjectif Métaux alcalinoterreux, métaux comprenant le calcium, le strontium, le baryum et le radium. (Éléments bivalents très électropositifs de la deuxième colonne de la classification périodique, les métaux alcalino-terreux sont réducteurs et décomposent l'eau en donnant des bases fortes.) ● alcalino-terreux, alcalino-terreuse (expressions) adjectif Métaux alcalinoterreux, métaux comprenant le calcium, le strontium, le baryum et le radium. (Éléments bivalents très électropositifs de la deuxième colonne de la classification périodique, les métaux alcalino-terreux sont réducteurs et décomposent l'eau en donnant des bases fortes.)

alcalino-terreux, euse notero, oz
adj. CHIM Métaux alcalino-terreux: famille de quatre métaux groupés dans la deuxième colonne de la classification périodique des éléments (calcium, strontium, baryum et radium), auxquels on ajoute quelquefois les deux premiers éléments de la colonne (béryllium et magnésium).

alcalino-terreux, euse [alkalinotɛʀø, øz] adj.
ÉTYM. 1845; de terres alcalines.
Chim. || Métaux alcalino-terreux : métaux fortement basiques qui comprennent le calcium, le baryum, le strontium et le radium.

Encyclopédie Universelle. 2012.