laisse [ lɛs ] n. f.
• 1178; de laisser
I ♦ Lien avec lequel on attache un chien ou un autre animal pour le mener, le maintenir à ses côtés. Laisse de cuir, de métal qui s'accroche au collier d'un chien. Tenir un chien en laisse. Chien qui tire sur sa laisse. Laisse enrouleuse, à boîtier.
II ♦ (XIIIe « dit, récité en se laissant aller, d'un trait ») Hist. littér. Tirade, couplet d'une chanson de geste. Les laisses de la « Chanson de Roland ».
III ♦ (1421) Géogr. Espace que la mer laisse à découvert à chaque marée. ⇒ lais (2o). Laisse de haute mer, de basse mer : lignes de marée haute et de marée basse, limites entre lesquelles la marée oscille.
IV ♦ Chasse Les laisses. ⇒ laissées.
● Laisse, laissez se dit lorsqu'on veut faire quelque chose ou, en particulier, payer quelque chose pour quelqu'un qui s'apprête à le faire : Laissez cela, c'est ma tournée.
laisse
n. f.
d1./d Lien servant à attacher, à conduire un chien, un petit animal. Chien qui tire sur sa laisse.
|| Fig. Mener, tenir qqn en laisse, l'empêcher d'agir à sa guise.
d2./d LITTER Suite de vers d'une chanson de geste, terminés par une même assonance. Les laisses de la "Chanson de Roland".
d3./d MAR Limite atteinte par les eaux à l'étale de haute mer et à l'étale de basse mer.
— Partie du rivage comprise entre ces limites.
|| (Plur.) Débris (coquillages, algues, épaves) marquant la limite atteinte par les eaux à l'étale de haute mer.
I.
⇒LAISSE1, subst. fém.
A. — 1. Lien solide servant à maintenir un animal, notamment un chien, pour l'attacher quelque part ou pour le promener à ses côtés. Laisse de cuir; accrocher une laisse au collier; tenir, mener un chien en laisse; tirer sur sa laisse; promener (un animal) au bout d'une laisse. Jacqueline est une petite fille et Miraut est un gros chien... Elle a vu... Miraut, attaché par une longue laisse à un arbre (FRANCE, P. Nozière, 1899, p. 66). Je tordis une solide laisse que je fixai au collier métallique du guépard (BENOIT, Atlant., 1919, p. 251) :
• 1. — Tiens ton chien, Firmin! Empêche-le!
— Couche, Dévorant!
D'instinct, le garde avait raidi la laisse, arrêtant l'élan du molosse.
GENEVOIX, Raboliot, 1925, p. 324.
— [Pour attacher plusieurs animaux ensemble] Laisse de deux chiens, de chevaux; meute en laisse; coupler deux chiens en laisse. Prenant ses chiens en laisse et son fusil sur l'épaule (LAMART., Confid., 1849, p. 342). Un groupe de chiens conduits en laisse et accompagnés par deux cavaliers (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 5, 1859, p. 441).
2. Loc. verb. fig. Mener, mettre, tenir (qqn ou un élément de son comportement) en laisse. Empêcher (quelqu'un) d'agir librement, imposer (à quelqu'un) sa volonté. Synon. brider. La mère de Gaston essayait vainement (...) d'imposer silence à l'homme qu'elle avait si longtemps gouverné, qu'elle avait tenu en laisse (SANDEAU, Sacs, 1851, p. 57). Menant en laisse sa volonté frémissante, il s'est présenté à l'autel (CLAUDEL, Part. midi, 1906, p. 983) :
• 2. ... il ne peut pas voir une prairie sans se lancer dessus au galop, transfiguré par une passion vorace. Puis il me cherche avec des yeux rayonnants, comme pour m'inviter à approuver son plaisir. Et, vrai, je n'ai pas le cœur de le mettre en laisse.
MONTHERL., Olymp., 1924, p. 237.
♦ Casser, briser sa laisse. Se libérer. Il devina que je briserais ma laisse s'il ne l'allongeait pas (BALZAC, Méd. camp., 1833, p. 197). Une pauvre petite heure durant, nous nous donnons l'illusion d'être libres, d'avoir cassé nos laisses et rompu nos colliers (FARRÈRE, Homme qui assass., 1907, p. 210).
B. — P. anal., HABILL. Cordon de chapeau. Laisse de soie. (Dict. XIXe et XXe s.).
Prononc. et Orth. : []. Att. ds Ac. dep. 1694. CHATEAUBR., Ét. hist., 1831, p. 447 et REYBAUD, J. Paturot, 1842, p. 344 : lesse. Étymol. et Hist. V. laisse3.
II.
⇒LAISSE2, subst. fém.
A. — HIST. LITTÉR. Tirade monorime, suite de vers assonantiques, de longueur variable, d'un poème du Moyen Âge et spécialement d'une chanson de geste. Synon. couplet. Laisse de la Chanson de Roland; récitation d'une laisse. Jonas (...) Amos, Osée avaient créé (...) la laisse oratoire destinée à la déclamation (RENAN, Hist. peuple Isr., t. 2, 1889, p. 478). Benoît De Sainte-More rime très soigneusement, dédaigneux de la simple assonance qui avait déroulé sa musique assourdie le long des laisses de la grande épopée des premiers cycles (GOURMONT, Esthét. lang. fr., 1899, p. 222) :
• 1. Ces laisses qui ne développent pas, mais qui insistent, répètent, recommencent un récit comme si l'attention de l'auditeur avait dit : Encore! au jongleur, c'est le contraire de la composition classique...
THIBAUDET, Réflex. litt., 1936, p. 215.
— ,,Tirades qui divisent les grands poèmes provençaux`` (MORIER 1961, 1975).
B. — VERSIF. ,,En vers libre, suite de vers compris entre deux blancs`` (MORIER 1961, 1975). Par Moréas, Gustave Kahn, Vielé-Griffin, Verhaeren, Henri de Régnier (...) un vers plus libre est possible en France et, avec ce vers, des laisses d'aspect nouveau, et avec ces laisses, des poèmes assez différents (GOURMONT, Esthét. lang. fr., 1899p. 247) :
• 2. Très neuf quand Claudel le créa [le verset] il y aura bientôt un demi-siècle, son fleuve réaliserait aujourd'hui un bon équilibre entre la très longue laisse rythmée de Saint-John Perse, un estuaire, et ce ruissellement poétique de filets où la génération de 1914 paraît avoir trouvé son instrument moyen.
THIBAUDET, Hist. litt. fr., 1936, p. 335.
Prononc. et Orth. : []. Att. ds Ac. 1935. Étymol. et Hist. V. laisse3.
III.
⇒LAISSE3, subst. fém.
A. — Limite atteinte par la mer sur un rivage. On eût dit que les eaux croupies qui baignaient les pilotis de la ville basse se retiraient à leur laisse extrême (GRACQ, Syrtes, 1951, p. 59).
— GÉOGR. Laisse de haute mer, de basse mer. Limites supérieure et inférieure entre lesquelles la mer oscille au cours des marées. Synon. lais de haute mer, de basse mer. Depuis la construction du port [Madras], la laisse de basse mer a sensiblement avancé au Sud de la jetée Sud (QUINETTE DE ROCHEMONT, Trav. mar., t. 1, 1900, p. 167). La mère et la fille sortirent ensemble (...) pour chercher du bois le long des grèves, sur la laisse de haute mer (QUEFFÉLEC, Recteur, 1944, p. 63).
B. — P. méton.
1. Partie du rivage que la mer laisse à découvert à marée basse. J'ai mesuré dans mes courses la laisse de certaines marées à quinze pieds au-dessus du niveau de la mer (Voy. La Pérouse, t. 2, 1797, p. 186). La muraille abrupte jaillie de l'éboulis comme une falaise de la laisse de galets d'une plage (PEYRÉ, Matterhorn, 1939, p. 213).
2. Débris, dépôts marins laissés par la marée; alluvions au bord des fleuves :
• À la marée basse, les rivages fleurissaient de goémon; les assises de couleurs, marquées comme dans un arc-en-ciel ou sur le flanc d'une barque, se détachaient, régulières encore, galets d'un gris sec, laisse de mer bai brun ou noir sombre, galets mouillés jaune pâle...
QUEFFÉLEC, Recteur, 1944, p. 95.
Prononc. et Orth. : []. Att. ds Ac. 1935. Étymol. et Hist. I. 1. 1178 « lien servant à conduire des chiens » (Renart, éd. M. Roques, 13387 : II. levriés tint en une laisse); début XIIIe s. fig. (Ste Julienne, 3988 ds T.-L.); 2. 1471 « cordon de chapeau » (Inv. du roi René d'Anjou, fol. 22 ds GAY). II. ca 1202 lesse de foire « émission d'excrément (d'un animal sauvage) » (Renart, éd. E. Martin, XVI, 970); 1387-91 « fiente des animaux sauvages » (GASTON PHÉBUS, Chasse, éd. G. Tilander, 8, 53 : leisses de ours et de sanglier et de loir). III. 1. a) 1220-30 « texte, tirade, couplet chanté ou dit sans interruption » (Tombeur de N.-D., 125 ds T.-L.); 1re moitié XIIIe s. (Doon de Nanteuil, Romania, XIII, 12 ds T.-L.), seulement en a. fr.; relevé par Trév. 1752 qui note ,,vieux mot. Chanson``; b) 1840 « partie d'un récit formant une stance » (Ac. Compl. 1842); 1867 « tirade monorime d'un poème » (LITTRÉ); 2. fin XIIIe s. désigne la sonnerie du glas pour un mort (Renart, éd. E. Martin, XIV, 443, var. des mss C, H), relevé en ce sens par Trév. 1752 comme mot champ., v. aussi FEW t. 5, p. 222 ab et p. 228 a, note 8. IV. 1. 1421, 31 juill., région de la Sèvre niortaise « atterrissement, alluvions abandonnés par la mer » topon. La Laisse du Roy devenu La Laisse d'Andilly, Charente-Maritime (Arch. nat. P. 586, fol. 91 v° ds E. CLOUZOT, Marais de Sèvre niortaise, 1904, p. 145); 2. 1765 « terrain découvert par la mer lors du reflux » laisses de basse mer (Encyclop. t. 9, p. 199 a). D'apr. l'hyp. la plus couramment reçue (FEW, loc. cit., p. 222; BL.-W.5), laisse est dans tous les sens relevés, un déverbal de laisser : I, parce que la laisse est un lien lâche donnant une certaine liberté à l'animal; III, parce qu'à l'origine, la laisse est un couplet, une tirade dite, chantée sans interruption, pour laquelle on donne libre cours à la voix, on la laisse aller d'un trait sans fléchissement, ce sens étant à rapprocher du syntagme d'une laisse « d'un trait » (1269-78 JEAN DE MEUN, Rose, éd. F. Lecoy, 7526); II et IV sont clairement « ce qu'on laisse »; à rapprocher de II, le m. fr. laie « id. » (1376 Modus et Ratio, éd. G. Tilander, 4, 29 et 32; var. du ms. N, XVe s. : lai, masc.), déverbal du verbe a. fr. laïier, v. laisser; à rapprocher de IV, lais Étymol. et Hist. 2. — À l'étymon lat. lectio pour laisse II (M. SAHLIN ds St. neophilol. t. 11, 1938-39, pp. 141-156; hyp. reprise par G. MERK ds Mél. Imbs, pp. 240-247; v. aussi R. BAUM ds Mél. Lommatzsch, 1975, pp. 41-47) s'opposent de sérieuses difficultés phonét.; il faudrait partir de lectia avec traitement demi-savant du groupe -Kty- > -ss- et infl. de lai pour le vocalisme radical.
STAT. — Laisse1, 2 et 3. Fréq. abs. littér. : 217. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 299, b) 254; XXe s. : a) 318, b) 344.
BBG. — MERK (G.). Les Subst. déverbaux du verbe laisser. Mél. Imbs (P.) 1973, pp. 225-251. - PICHON (E.) Fr. mod. 1940, t. 8, pp. 179-180. - RINGENSON (K.). Vox rom. 1946-47, t. 9, pp. 179-181. - SAHLIN (M.). L'Orig. et le sens du mot laisse. St. neophilol. 1938-39, pp. 141-156.
laisse [lɛs] n. f.
ÉTYM. 1178; déverbal de laisser « lien que l'on laisse aller, qu'on garde lâche »; selon Guiraud, représente l'adj. laxus, a « ample, étendu ».
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I Lien avec lequel on attache un chien (ou un autre animal) pour le mener, le maintenir à ses côtés. || Laisse de cuir qui s'accroche au collier d'un chien (cit. 21). Laisse à double extrémité pour attacher deux chiens (⇒ Couple). || Chien qui tire sur sa laisse. — ☑ Loc. En laisse. || Mener, tenir en laisse. || Chien en laisse. — Par ext. || Chat, ourson, cheval en laisse (→ Belluaire, cit. 2).
1 (…) son chien (…) est attaché avec une laisse d'or et de soie.
La Bruyère, les Caractères, X, 29.
2 (…) il avait horreur d'être promené au bout d'une laisse par un domestique (…)
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. IV, VIII, p. 84.
♦ ☑ (1690, Furetière). Fig. Mener, tenir quelqu'un en laisse, l'empêcher d'agir librement, lui imposer sa volonté. ⇒ Attache (à l'). — Briser sa laisse.
3 Le comte Paul est-il tenu en laisse comme un homme qui peut s'enfuir ? Croyez-vous que nous ayons besoin de le faire garder par la gendarmerie ?
Balzac, le Contrat de mariage, Pl., t. III, p. 147.
4 Je plains Pauline, dit-elle de sa voix nette, mais elle récolte ce qu'elle a semé. Elle a voulu tenir son mari en laisse; elle a suscité un besoin d'évasion. Avec un peu d'indulgence et d'humour, elle aurait sauvé l'essentiel.
A. Maurois, les Roses de septembre, I, IX.
♦ (1471). Par ext. Cordon de chapeau. || Une laisse de soie.
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II (V. 1220; repris au XIXe en hist. littér.; proprt « dit, récité en se laissant aller, d'un trait »). Hist. de la littér. Tirade, couplet d'une chanson de geste. || Les laisses de la Chanson de Roland.
5 Ouvrez la Chanson de Roland, par exemple, et sans vous embarrasser du mot à mot, lisez à haute voix une laisse ou deux du vieux texte.
Émile Henriot, Portraits de femmes, p. 16.
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III (1421, dans un toponyme). Géogr. ou régional. Espace que la mer laisse à découvert à chaque marée. ⇒ Lais (2.). || Laisse de haute mer, de basse mer : lignes de marée haute et de marée basse, limites entre lesquelles la marée oscille.
6 La mère et la fille sortirent ensemble (…) pour chercher du bois le long des grèves, sur la laisse de haute mer.
Henri Queffélec, le Recteur de l'île de Sein, p. 63, in T. L. F.
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IV (V. 1387, Gaston Phébus; lesse de foire, v. 1202). Chasse. Syn. de laissées. ⇒ Laissées (→ Étron, cit. 1).
Encyclopédie Universelle. 2012.