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ALGUES
ALGUES

Les Algues comprennent un ensemble de végétaux très variés, souvent groupés avec des Champignons sous le nom de Thallophytes. Cette dénomination implique la présence d’un appareil végétatif ou thalle, tantôt très simple, réduit à une seule cellule ou à un amas de cellules toutes semblables, tantôt très complexe, souvent bien différencié, mais toujours morphologiquement différent de celui des plantes supérieures (Cormophytes); celles-ci possèdent en effet des tiges feuillées pourvues, en outre (sauf les Bryophytes), d’un système vasculaire.

Les Algues se distinguent cependant des Champignons par la présence de chlorophylle leur permettant la photosynthèse et l’autotrophie vis-à-vis du carbone, alors que les Champignons sont tous hétérotrophes, saphrophytes ou parasites.

Enfin, leurs organes reproducteurs, comme ceux des Champignons, sont plus simples que ceux des plantes supérieures. Leurs spores et leurs gamètes se forment dans des sporocystes et des gamétocystes résultant de la transformation en cellules reproductrices de tout le contenu de la cellule mère; tandis que dans les sporanges et les gamétanges des plantes supérieures (Archégoniates), une partie seulement du contenu de la cellule mère se transforme en cellules reproductrices, le reste formant autour d’elles une enveloppe pluricellulaire.

On peut donc définir les Algues comme l’ensemble des végétaux chlorophylliens dont les spores et les gamètes se forment dans des sporocystes et des gamétocystes .

Les Algues renferment les formes les plus simples des végétaux doués d’autotrophie par photosynthèse. La plupart sont susceptibles de se développer dans un milieu inorganique. Pour ces deux raisons, on les considère généralement comme les premiers organismes vivants apparus à la surface du globe et on leur a attribué les restes organiques souvent non identifiables découverts dans les roches les plus anciennes (Précambrien).

Leur extrême plasticité écologique leur permet de vivre dans des conditions a priori peu compatibles avec la vie. Certaines Algues (Algues cryophiles) vivent sur la neige ou la glace des régions polaires et des hautes montagnes. D’autres au contraire (Algues thermophiles) supportent dans les eaux des sources thermales des températures très élevées: certaines Cyanophycées peuvent vivre dans des eaux dépassant 80 0C.

En majorité aquatique dans les eaux douces et marines, les Algues peuvent être aériennes et vivre sur les rochers, les troncs d’arbres (Trentepohlia ) ou même sur les feuilles (Cephaleuros ). D’autres vivent dans le sol et constituent, avec des bactéries et des champignons, une microflore dont le rôle biologique est considérable. C’est ainsi par exemple que les Cyanophycées sont capables de fixer, comme certaines bactéries, l’azote atmosphérique et contribuent de ce fait à augmenter la fertilité des sols. Enfin d’assez nombreuses Algues vivent en symbiose, soit associées avec des champignons pour constituer des lichens, soit dans les organes de quelques plantes supérieures. Des Algues symbiotiques (Zoochlorelles, Zooxanthelles et Zoocyanelles) existent, souvent d’une manière constante, dans les cellules de certains protozoaires ou dans les tissus de divers métazoaires marins ou d’eau douce.

Les Algues constituent presque à elles seules le peuplement végétal des océans où elles vivent, soit fixées sur le fond (phytobenthos), soit en suspension dans l’eau (phytoplancton) soit encore flottant en surface (Sargassum de la mer des Sargasses). Dans les océans, elles forment le premier maillon de la chaîne alimentaire, le seul réalisant la synthèse des substances organiques à partir d’éléments minéraux.

D’une manière plus générale, leur rôle dans le cycle du carbone de la biosphère est considérable et l’on admet que la quantité de C2 qu’elles transforment chaque année en matière organique par photosynthèse est supérieure à celle que puise, dans l’atmosphère, l’ensemble des végétaux terrestres.

Si les Algues sont moins utilisées par l’homme comme aliment ou comme matière première que les plantes supérieures, elles ont permis de nombreuses recherches fondamentales en biologie: ainsi la découverte de la fécondation et de la fusion des gamètes chez les végétaux a été faite chez les Algues; de même, les progrès réalisés dans la connaissance de la photosynthèse chlorophyllienne sont dus en grande partie à l’utilisation d’Algues unicellulaires, les Chlorelles.

La diversité des Algues les fait actuellement considérer comme un ensemble de phylums nettement individualisés. Cette distinction ne repose pas seulement sur des différences morphologiques, car il existe souvent entre eux de nombreuses formes convergentes, mais surtout sur les particularités les plus intimes de leur matière vivante: structure des constituants cellulaires, nature des pigments photosynthétiques et capacité de synthèse biochimique. Par l’ensemble de ces caractères et malgré les différences morphologiques considérables, on a pu dire que les Algues vertes, même unicellulaires (Chlorella ) sont plus voisines des plantes supérieures (Spermatophytes) qu’elles ne le sont des Algues rouges ou des Algues brunes.

C’est donc par les caractères cytologiques et biochimiques que sont distingués les quatre grands phylums entre lesquels se répartit l’ensemble des Algues (Cyanophytes, Rhodophytes, Chromophytes et Chlorophytes), soit de 20 000 à 25 000 espèces. Les caractères tirés de la morphologie de l’appareil végétatif, le mode de reproduction sexuée et le cycle d’alternance de générations permettent, dans chaque phylum, la distinction des classes et des ordres.

1. Morphologie

Les Algues présentent, en ce domaine, une très grande diversité. Les plus petites, constituées par une seule cellule, ne sont visibles qu’au microscope.

Dans plusieurs embranchements (Pyrrophycophytes, Chrysophycophytes), presque toutes les espèces sont unicellulaires. Il en est de même chez beaucoup de Chlorophycées. Ces formes unicellulaires, mobiles ou immobiles, peuvent rester isolées, ou se grouper en ensemble de cellules toutes semblables, encore à peine visibles à l’œil nu.

Dans certains ordres de Chlorophycées et de Xanthophycées, le thalle est formé de fins filaments à l’intérieur desquels le protoplasme, renfermant de nombreux noyaux, n’est pas séparé en cellules par des cloisons; cette structure est dite cœnocytique ou siphonée.

Chez certaines Chlorophycées et surtout chez les Phéophycées et les Rhodophycées, l’appareil végétatif, formé de filaments associés, ou parfois de véritables tissus, montre une complication progressive aboutissant à des structures dont le degré de différenciation dans des sens divers est sensiblement égal à celui atteint par les Bryophytes [cf. THALLE]. On en trouvera des exemples aux articles consacrés aux différentes classes d’Algues.

2. Caractéristiques cytologiques

Algues procaryotes

Les Cyanophytes et les Prochlorophytes se séparent nettement, au point de vue cytologique, des autres phylums. Ce sont en effet, comme les Bactéries, des procaryotes alors que les autres groupes d’Algues sont, comme les autres végétaux et les animaux, des eucaryotes.

Cette distinction correspond à l’absence, chez les Cyanophytes, de noyau individualisé: pas de membrane nucléaire ni de nucléoles, pas de chromosomes différenciés; la partie centrale de la cellule renferme seulement des granulations de chromatine (formées d’A.D.N.) qui représentent, comme chez les Bactéries, un appareil nucléaire très simple. Le cytoplasme est lui aussi plus simple que celui des Eucaryotes: les mitochondries, les dictyosomes et le réticulum endoplasmique n’y sont pas représentés tandis que les thylacoïdes, qui supportent les pigments photosynthétiques, n’y sont pas rassemblés dans des plastes individualisés comme chez les autres végétaux chlorophylliens mais dispersés dans la partie périphérique (chromatoplasme) du cytoplasme de la cellule. Aucune espèce ne possède de flagelles.

Les Cyanophytes ou Algues bleues, que parfois l’on tend à séparer des Algues et à rapprocher des Bactéries (Cyanobactéries) à cause de leur structure de procaryotes, possèdent des pigments photosynthétiques très proches de ceux des Rhodophytes; les Prochlorophytes, dont l’existence a été découverte depuis peu, possèdent le même équipement pigmentaire que les Chlorophytes.

Algues eucaryotes

Chez toutes les autres Algues, au contraire, on rencontre les constituants habituels d’une cellule végétale.

Noyau

Les cellules des Algues sont tantôt uninucléées, tantôt plurinucléées (beaucoup de Rhodophycées et Chlorophycées à structure cœnocytique ou siphonée). Le noyau des Algues diffère peu de celui des plantes supérieures; cependant, chez les Pyrrophycophytes (Dinophycées en particulier) sa structure (dinocaryon) et le mode de division (dinomitose) sont caractéristiques. Partout ailleurs la division nucléaire s’effectue par mitose avec ou sans intervention de centrosomes selon les groupes.

Appareil cinétique

Chez les Algues unicellulaires mobiles et chez celles où les cellules reproductrices (zoospores ou zoogamètes) sont mobiles, la motilité est due à un appareil cinétique comportant des flagelles. La microscopie électronique a permis de constater que ces flagelles comme ceux des autres êtres vivants, renferment des fibrilles longitudinales en nombre constant (9 fibrilles périphériques souvent doubles et 2 fibrilles médianes). Dans certains cas, des fibrilles périphériques, généralement deux fibrilles opposées, peuvent porter de très minces prolongements latéraux filamenteux (mastigonèmes) qui donnent à l’ensemble du flagelle un aspect plumeux (flagelles pleuronématés). La disposition des flagelles et la présence ou non de mastigonèmes constituent des caractères systématiques très importants.

Chez les Chlorophytes (fig. 1), les flagelles, situés à la partie antérieure de la cellule mobile, sont en nombre de deux ou de quatre; ils sont semblables entre eux et de même longueur (disposition isocontée); ils sont généralement dépourvus de mastigonèmes sauf chez les Prasinophycées. Exceptionnellement (chez les Œdogoniales et les Derbesia ), il existe une couronne de nombreux flagelles tous semblables (disposition stéphanocontée).

Chez les Chromophytes (fig. 1), les flagelles, le plus souvent au nombre de deux, sont dissemblables (disposition hétérocontée). L’un d’eux est généralement pourvu de nombreux mastigonèmes, tandis que l’autre est lisse. Leur orientation est souvent différente: l’un, dirigé vers l’avant, à un rôle tracteur; l’autre, dirigé vers l’arrière, semble se comporter comme un gouvernail. Parfois égaux en longueur, ils sont généralement de taille inégale et l’un d’eux peut parfois faire défaut.

Enfin, chez les Rhodophytes, il n’existe pas de cellules flagellés.

Vacuoles

Le système vacuolaire est généralement bien développé chez les Algues dont le suc vacuolaire peut renfermer de nombreuses substances dissoutes présentes dans l’eau (iodures et sels de potassium chez les Laminaires) ou résultant du métabolisme (laminarine et mannitol) chez les Phéophycées.

On appelle physodes de petites vacuoles réfringentes caractéristiques des Phéophycées et renfermant des composés phénoliques (phloroglucol); on peut en rapprocher les corps physoïdes, les corps mucifères et sans doute aussi les trichocystes observés chez d’autres Chromophytes.

Les plastes et leurs pigments

Selon la nature des pigments surnuméraires associés à la chlorophylle, les plastes sont tantôt verts (chloroplastes des Chlorophytes) tantôt jaunes, dorés ou bruns (phéoplastes des Chromophytes), tantôt rouges (rhodoplastes des Rhodophytes).

Infrastructure

Dans tous les groupes, leur structure infra-microscopique est du même type que chez les plantes supérieures; les plastes sont toujours entourés d’une membrane plastidiale et renferment, au sein d’un stroma amorphe, des lamelles formées de vésicules aplaties ou thylacoïdes, tantôt séparées les unes des autres (Rhodophytes), tantôt accolées par deux ou trois (Chrysophytes, Chlorophytes). Sauf chez certaines Algues vertes, les granums formés par un empilement de lamelles discoïdes plus petites n’existent pas.

Les plastes renferment souvent un pyrénoïde qui apparaît au microscope électronique comme une région plus dense du stroma (pyrénosome) traversée par des lamelles ou des diverticules tubuleux de celles-ci. Chez les Algues vertes, le pyrénosome est entouré d’une enveloppe de grains d’amidon qui fait défaut chez les Chromophytes et les Rhodophytes.

Dans les cellules mobiles, une partie d’un plaste (ou un plaste entier) est souvent transformée en stigma par accumulation de gouttelettes lipidiques colorées en rouge orangé par un carotène et disposées côte à côte. Ce stigma, sensible aux radiations lumineuses, semble jouer un rôle dans les déplacements phototactiques de la cellule.

Morphologie

La morphologie des plastes et leur situation dans la cellule varie considérablement selon les groupes d’Algues.

Chez les Algues vertes (fig. 2), où l’on rencontre la plus grande diversité d’appareils plastidiaux, les formes considérées comme les moins évoluées ne renferment qu’un seul plaste par cellule (type archéoplastidié), d’autres des plastes réunis en réseau par des tractus incolores (type mésoplastidié). Enfin, les formes les plus évoluées renferment de nombreux plastes indépendants comme ceux des plantes supérieures (type néoplastidié). Cette fragmentation progressive des plastes a pour résultat d’augmenter leur surface active par rapport au volume de substance plastidiale renfermé dans la cellule. Certaines formes évoluées (type hétéroplastidié des Caulerpales) présentent en outre une division du travail entre deux catégories de plastes: des chloroplastes spécialisés dans la photosynthèse et des leucoplastes incolores élaborant et accumulant de l’amidon.

Pigments

Chez les Chlorophytes (Algues vertes et plantes supérieures) et chez les Prochlorophytes, les thylacoïdes renferment tous les mêmes pigments (chlorophylles a et b et caroténoïdes) dans des proportions respectives à peu près constantes, mais dans les autres phylums existent des différences notables, soit dans les proportions relatives des caroténoïdes par rapport à la chlorophylle (Chromophytes), soit par la présence de pigments surnuméraires spéciaux (bilichromoprotéides ) chez les Rhodophytes et les Cyanophytes.

Toutes les Algues photosynthétiques renferment de la chlorophylle a dont la présence est nécessaire au déroulement de la photosynthèse. Les Algues vertes et les Euglénophycées renferment en outre, comme les plantes supérieures, de la chlorophylle b qui fait défaut chez les autres Algues. Chez les Chromophytes, la Chlorophylle a est associée à de la chlorophylle c tandis que les Rhodophytes renferment de petites quantités de chlorophylle d . Les Cyanophytes ne semblent posséder que de la chlorophylle a .

Toutes les Algues renferment du 廓-carotène (C40H56) ainsi que des dérivés oxygénés de cet hydrocarbure, les xanthophylles (C40H562). Chez la plupart des Algues vertes, ces xanthophylles sont sensiblement les mêmes que celles des plantes supérieures (lutéine, zéaxanthine, etc.). Toutefois, chez certaines espèces il peut s’y ajouter des xanthophylles spéciales (siphonéine et siphonoxanthine). Ces caroténoïdes, en proportion relativement faible dans les plastes par rapport aux chlorophylles, ne masquent pas leur couleur verte. La couleur rouge orangée de certaines Algues vertes n’est pas due à la coloration de leurs chloroplastes, mais à la présence dans leurs cellules de nombreuses gouttelettes d’huile colorées par une xanthophylle particulière (astaxanthine). Chez les Chromophytes, la couleur jaune ou brune des plastes est due à la présence en quantité notable de xanthophylles spéciales, telle que la fucoxanthine (C40H546).

Alors que les pigments précédents sont liposolubles et insolubles dans l’eau, les Rhodophytes et les Cyanophytes renferment, associés aux chlorophylles et aux caroténoïdes, des pigments hydrosolubles: les bilichromoprotéides. Ces substances sont constituées par une globuline unie à un groupement prosthétique chromophore (phycobiline). En solution aqueuse, les unes (phycoérythrines) sont de couleur rouge et possèdent une fluorescence orangée, les autres (phycocyanines) de couleur bleue ont une fluorescence rouge sombre. Ces deux types de pigments peuvent coexister dans les mêmes espèces mais la phycoérythrine domine chez les Algues rouges (Rhodophytes), tandis que la phycocyanine est plus abondante et parfois seule représentée chez les Algues bleues (Cyanophytes). Du point de vue chimique, les deux types de bilichromoprotéides sont très voisins l’un de l’autre; leurs phycobilines (phycoérythrobiline et phycocyanobiline) sont des substances proches de certains dérivés de l’urobiline, elles comprennent quatre noyaux pyrroliques en chaîne ouverte, sans métal.

La chlorophylle a joue un rôle essentiel dans la photosynthèse, mais les autres pigments interviennent également, notamment en captant l’énergie lumineuse des régions du spectre non utilisées par la chlorophylle a et en transférant à celle-ci l’énergie captée. Ainsi, chez les Algues rouges marines – dont beaucoup vivent à des profondeurs où les radiations rouges font défaut – la photosynthèse est facilitée par la présence de phycoérythrine qui absorbe les radiations vertes que la chlorophylle, seule, n’utilise pas.

Produits du métabolisme

Chez les Algues vertes, le principal produit de la photosynthèse est l’amidon; il se forme toujours à l’intérieur des plastes (chloroplastes et leucoplastes) surtout autour du pyrénoïde. Cependant certaines d’entre elles (Dasycladales) n’élaborent pas d’amidon mais des fructosanes parfois identiques à l’inuline.

Dans d’autres phylums, les plastes n’élaborent jamais l’amidon, mais peuvent produire des polyholosides voisins constituant des grains de forme caractéristique situés à l’extérieur des plastes, au sein du cytoplasme (amidon floridéen des Rhodophytes, paramylon des Euglénophycées).

Chez les Chromophytes, toujours dépourvues d’amidon intraplastidial, le principal produit du métabolisme est un polyholoside dissous dans les vacuoles, la laminarine, particulièrement abondante chez les Phéophycées; celles-ci renferment également des quantités notables de mannitol.

Chez les Chrysophycées et les Bacillariophycées, un corps voisin de la laminarine, la chrysolaminarine (autrefois appelée leucosine), est abondante dans des vacuoles particulières.

La plupart des Chromophytes, certaines Algues vertes, quelques Rhodophytes, accumulent en outre des lipides sous forme de gouttelettes d’huile.

Les Rhodophytes, outre l’amidon floridéen, accumulent aussi, dans leurs vacuoles, des glucides dissous très particuliers: ce sont des hétérosides renfermant du glycérol associé au galactose (floridoside) ou plus rarement au mannose et acide glycérique.

Les produits du métabolisme des Cyanophytes sont encore mal connus. Ils comportent des polyholosides voisins du glycogène et du tréhalose.

3. Reproduction et cycles sexués

Les Procaryotes ne se reproduisent que par bipartition cellulaire, par spores ou par fragmentation du thalle (hormogonies). Les Algues eucaryotes présentent, au contraire, une reproduction sexuée; celle-ci peut toutefois, chez certaines formes unicellulaires, être rare ou exceptionnelle. Elle consiste essentiellement en l’union (gamie) de deux cellules reproductrices (gamètes) qui, en fusionnant leurs protoplasmes (plasmogamie) puis leurs noyaux (caryogamie), forment un œuf ou zygote qui se développera en un nouvel individu.

Modalités de la reproduction sexuée

Selon la taille, la structure et la mobilité des gamètes, on peut distinguer plusieurs types de gamie, tous représentés chez les Algues (fig. 3).

Dans le type le moins évolué, les deux gamètes, tous deux mobiles grâce à des flagelles, sont semblables et égaux entre eux (ex. Enteromorpha ): il y a isogamie . Dans d’autres cas (ex. Codium ), les deux gamètes qui copulent sont de taille inégale mais tous deux mobiles; les plus petits, que l’on qualifie de mâles, possèdent encore des chloroplastes mais peu de matières de réserve tandis que les plus gros (gamètes femelles) renferment de nombreux chloroplastes et d’abondantes matières de réserve (amidon) qui faciliteront le début du développement du zygote: il y a alors anisogamie et la distinction de deux sexes morphologiquement différents est possible.

Dans ces deux cas, les deux gamètes étant mobiles par des flagelles, on dit qu’il y a planogamie .

À un degré d’évolution plus avancé, la différence de taille entre les gamètes des deux sexes s’accentue. Le gamète femelle très volumineux et dépourvu de flagelles est immobile, c’est un oosphère , tandis que le gamète mâle, de taille très réduite et dépourvu de matières de réserve mais toujours mobile grâce à des flagelles, est un anthérozoïde ou spermatozoïde (ex. Fucus : il y a dans ce cas oogamie .

Il peut arriver que les gamètes ne soient ni individualisés, ni libérés hors de leurs cellules mères gamétocystes, le contenu entier d’un gamétocyste fusionnant avec celui d’un autre gamétocyste par l’intermédiaire d’un tube de conjugaison; c’est ce qui a lieu en particulier chez les Zygnémales: il y a alors cystogamie .

Un mode particulier de gamie caractérise les Rhodophytes. Le gamète femelle n’est pas individualisé dans le gamétocyste femelle ou carpogone. Celui-ci est surmonté d’un poil particulier, le trichogyne, sur lequel se fixe le gamète mâle; ce gamète mâle immobile ou spermatie, très petit, est transporté passivement par les mouvements de l’eau. Il déverse ensuite son contenu dans le carpogone par l’intermédiaire du trichogyne: il y a alors trichogamie .

Chez les Algues marines, le zygote une fois formé se développe, le plus souvent immédiatement, en un nouvel individu. Chez les Algues d’eau douce, on constate fréquemment, par contre, un enkystement du zygote qui s’entoure d’une enveloppe épaisse et souvent ornementée; celle-ci peut rester des mois à l’état de repos, en attendant, pour germer, le retour de conditions favorables; il s’agit alors d’oospores (Zygophycées, Œdogoniales, Vaucheriales, etc.).

Alternance morphologique de générations

On sait que chez les animaux, le zygote provenant de l’union des gamètes reproduit directement un individu semblable à ses parents et comme eux producteur de gamètes. Le cycle comprend donc une seule génération et celle-ci est sexuée. Un tel cycle est dit monogénétique , il est connu chez diverses Algues (Codiales, Charophycées, etc.) que ne sont représentées que par des individus sexués (gamétophytes). Le plus souvent, chez les végétaux, le zygote ne donne pas naissance à une plante sexuée mais à un individu dont les cellules reproductrices, incapables de copulation, constituent des spores. Celles-ci en germant reproduisent des individus sexués. Il y a donc alternance de deux générations, l’une sexuée (gamétophyte), l’autre asexuée (sporophyte), et le cycle est digénétique .

Chez beaucoup d’Algues, les deux générations successives du cycle sont morphologiquement identiques; gamétophytes et sporophytes ne se distinguent que lorsqu’ils sont fertiles, par la nature de leurs organes reproducteurs. L’alternance de générations est alors isomorphe ; c’est le cas des Ulva en particulier (fig. 4). Dans d’autres cas, l’alternance de générations est hétéromorphe ; gamétophytes et sporophytes peuvent alors être très différents par leur aspect extérieur, leur complexité structurale et la durée de leur vie. Le plus souvent c’est le gamétophyte qui demeure minuscule et de structure peu différenciée; il constitue alors un prothalle , c’est le cas classique des Fougères et, parmi les Algues, des Laminariales. Dans d’autres cas, c’est le sporophyte qui est réduit (Acrosiphoniales).

Enfin, chez les Rhodophycées, l’alternance de générations est trigénétique : le carpogone fécondé, devenu zygote, demeure fixé sur le gamétophyte où il se développe en parasite pour donner une deuxième génération (carposporophyte), morphologiquement réduite du fait de son parasitisme mais productrice de nombreuses spores (carpospores). Ces carpospores libérées donnent naissance à une troisième génération généralement identique par son aspect et sa structure aux gamétophytes mais productrice de tétraspores: c’est un tétrasporophyte dont les spores reproduisent le gamétophyte (ex. Antithamnion , fig. 5).

Alternance nucléaire de phases

Le noyau des gamètes est toujours haploïde (n chromosomes) et le noyau du zygote, résultant de leur copulation, est par conséquent diploïde (2 n chromosomes). Il est donc nécessaire qu’avant la production de nouveaux gamètes, une réduction chromatique ou méiose diminue de moitié le nombre des chromosomes (fig. 6).

Chez les métazoaires, la méiose a lieu au cours de la gamétogenèse; il en est de même chez quelques Algues (Codium ). Dans ce cas, tous les noyaux, de l’organisme, sauf ceux des gamètes, ont 2 n chromosomes et le cycle est diplophasique .

Chez d’autres Algues (Zygophycées, Charophycées), c’est le noyau du zygote qui subit la méiose: tout l’organisme est alors haploïde et le cycle est haplophasique .

Le plus souvent, chez les végétaux, et en particulier chez les Algues, la méiose a lieu lors de la formation des spores sur le sporophyte diploïde; le cycle comporte alors une alternance de deux phases nucléaires: une diplophase, du zygote à la formation des spores, et une haplophase, de la germination des spores aux gamètes. On considère souvent ce cycle diplo-haplophasique comme le moins évolué, les cycles haplophasique et diplophasique en dérivant par suppression de l’une ou l’autre des deux phases.

Chez un grand nombre de végétaux, l’alternance nucléaire de phase coïncide avec l’alternance morphologique de générations, le cycle comportant un sporophyte diploïde et un gamétophyte haploïde; mais ce n’est pas toujours le cas et il y a lieu de ne pas confondre ces deux notions. Chez les Algues à cycle morphologique monogénétique, le cycle nucléaire est tantôt haplophasique, tantôt diplophasique, selon que l’on a affaire à des gamétophytes haploïdes ou diploïdes.

De même, chez les Rhodophycées à cycle morphologique trigénétique, le cycle nucléaire est diplo-haplophasique: le gamétophyte est haploïde tandis que le carposporophyte et le tétrasporophyte sont tous deux diploïdes, la méiose ayant lieu lors de la formation des tétraspores.

Chez certaines espèces, le cycle normal peut être modifié, en particulier par parthénogenèse ou par apogamie. Un gamétophyte haploïde redonne alors, à partir de gamètes non fécondés, des gamétophytes haploïdes. Dans d’autres cas, il y a apoméiose et les spores, demeurant diploïdes, redonnent des sporophytes diploïdes.

Il peut aussi y avoir perte définitive de la sexualité et la même génération se reproduit, toujours semblable à elle-même, par des spores directes.

Dans d’autres cas, l’apparition de gamètes aptes à la copulation ou de spores ayant subi la méiose semble sous la dépendance de facteurs externes, température par exemple, et l’une des générations du cycle peut se répéter un certain nombre de fois avant que la gamie ou la méiose n’intervienne et entraîne l’apparition d’une autre génération et d’une autre phase nucléaire.

4. Classification et phylogénie

Les cinq grands phylums d’Algues se distinguent par des caractères d’ordre surtout cytologique et biochimique (cf. tableau).

Bien qu’il s’agisse d’organismes certainement très anciens (précambriens), les documents paléontologiques concernant les Algues sont relativement peu nombreux à l’exception des formes calcifiées (Corallinacées, Dasycladales, etc.) dont la structure est bien conservée par fossilisation. Il en résulte que les hypothèses phylogénétiques que l’on peut formuler ne reposent que sur la connaissance des formes actuelles.

Les phylums des Prochlorophytes et des Cyanophytes ne comprennent chacun qu’une seule classe, respectivement celle des Prochlorophycées et celles des Cyanophycées. Ce sont des procaryotes et, comme telles, elles ont des affinités avec les Bactéries. Toutefois par la nature de leurs pigments, les Prochlorophytes se rapprochent des Chlorophytes et les Cyanophycées des Rhodophytes.

Le phylum des Rhodophytes ne renferme lui aussi qu’une seule classe, celle des Rhodophycées.

Les Chromophytes forment un phylum plus complexe que l’on subdivise en trois embranchements correspondant à plusieurs classes, dont celles des Chrysophycées, Phéophycées, Diatomées...

Le grand phylum des Chlorophytes, caractérisé essentiellement par la nature des pigments des plastes et l’existence d’amidon intraplastidial, groupe à la fois les Algues vertes ou Chlorophycophytes, subdivisées en quatre classes, et l’ensemble des plantes supérieures (Cormophytes ou Archégoniates) avec les grands embranchements des Bryophytes, Ptéridophytes et Spermaphytes.

Bien qu’il existe un hiatus considérable entre les Algues vertes et les moins évoluées des plantes supérieures, on est généralement d’accord pour admettre que celles-ci n’ont pu dériver que des Algues vertes.

C’est également des Algues que l’ont peut faire dériver les Champignons par perte de la chlorophylle et disparition des plastes. On a rapproché les Champignons supérieurs (Mycomycophytes) des Rhodophytes en raison, notamment de certaines analogies dans le mode de reproduction sexuée (trichogamie des Ascomycètes) et dans le cycle. Les Phycomycophytes, par contre, présentent, par la structure de leur appareil flagellaire, des affinités avec les Chrysophycophytes.

Certains protozoaires ont en outre des affinités étroites avec les Algues chez lesquelles il existe, dans beaucoup de groupes unicellulaires flagellés, à côté de formes pourvues de chlorophylle et photosynthétiques – qui sont incontestablement végétales – des formes dépourvues de chlorophylle, capables d’ingérer des proies, que l’on rattache souvent aux protozoaires.

Comprenant les formes végétales les plus simples et ayant évolué dans des directions très variées, les Algues occupent donc, dans l’ensemble du règne végétal, une place prépondérante du point de vue phylogénétique puisque l’on peut considérer que ce sont d’elles que dérivent tous les autres groupes.

5. Utilisation

Les Algues ont sans doute d’abord été utilisées par l’homme pour son alimentation. Pratiquement abandonnées pour l’alimentation humaine dans les pays occidentaux, les Algues marines sont par contre abondamment consommées en Extrême-Orient. Au Japon, certaines Algues alimentaires (Porphyra ) font l’objet de véritables cultures, occupant plus d’un demi-million de travailleurs, cultures dont la valeur dépasse largement celle de la culture des huîtres perlières.

Les Algues marines (Fucales et Laminariales en particulier) sont en outre utilisées, soit pour l’alimentation du bétail et des animaux de basse-cour (farine d’algues), soit comme engrais.

Du point de vue industriel, ce sont les Laminaires (Laminaria digitata en Europe, Macrocystis en Californie) qui représentent la matière première la plus importante. Elles ont d’abord été utilisées jusqu’au début du XXe siècle pour l’extraction, à partir de leurs cendres, de sels de potasse et de l’iode. À la suite de la découverte de gisements abondants et plus économiques (potasse de Stassfurt et d’Alsace, iode des nitrates du Chili), cette exploitation a été abandonnée.

On extrait des Laminaires des produits organiques, en particulier l’algine (ou acide alginique), qui est le constituant majeur de leurs parois cellulaires. Les alginates alcalins forment dans l’eau des solutions colloïdales visqueuses tandis que l’alginate de calcium est insoluble comme l’acide alginique lui-même. Les alginates sont utilisés comme épaississants, gélifiants, émulsifiants et stabilisants de produits industriels les plus variés depuis les gelées alimentaires, les produits de beauté, jusqu’aux peintures et aux encres d’imprimerie.

D’autres phycocolloïdes de propriétés un peu différentes sont fournis par des Algues rouges. C’est le cas de la gélose ou agar-agar qui, insoluble dans l’eau froide mais soluble dans l’eau bouillante, donne par refroidissement des gels consistants: son emploi pour la solidification des milieux de culture bactériologiques est classique.

La gélose est surtout produite par des Algues du genre Gelidium , et, jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, était presque exclusivement préparée au Japon. D’autres Algues rouges des mers chaudes (Euchema , Gracilaria , Hypnea ) sont également récoltées pour la préparation de l’agar-agar.

Sur les côtes bretonnes, en Grande-Bretagne et en Amérique du Nord, on récolte abondamment les carragaheen (Chondrus crispus ) renfermant un autre phycocolloïde, la carragahénine, qui fournit des gels moins consistants que la gélose et qui ont, surtout dans les pays anglo-saxons, de nombreuses utilisations dans les industries alimentaires.

Bien d’autres Algues sont exploitées à un moindre degré et à des fins très variées. Une Algue rouge fortement calcifiée, le maërl (Lithothamnium calcareum ), est utilisée en Bretagne pour l’amendement des terres acides. Pulvérisé, il fournit un calcaire poreux recherché pour ses propriétés absorbantes.

Diverses Algues sont utilisées dans l’industrie pharmaceutique, soit pour leur richesse en oligo-éléments, soit pour les produits antihelminthiques et anticoagulants qu’elles renferment. Certaines pourraient être utilisées comme sources de vitamines (provitamine A et vitamine C) ou d’antibiotiques; on en a également extrait industriellement du mannitol et de l’acide glutamique. Les laminaires chirurgicales sont constituées par des stipes spécialement traités et stériles: elles servent à dilater les trajets fistuleux en chirurgie, ou le col de l’utérus en obstétrique.

Il n’y a pas d’Algues toxiques à l’exception de certaines Dinophycées planctoniques (Gonyaulax ) qui, ingérées par les moules, peuvent les rendre toxiques pour l’homme.

Certaines Algues unicellulaires d’eau douce (Chlorella , Scenedesmus , Spirulina ) sont susceptibles de se multiplier très rapidement à la lumière dans l’eau additionnée de faibles quantités de sels nutritifs (nitrates, phosphates). On a mis au point des techniques de culture à grande échelle de ces Algues qui sont capables, par photosynthèse, de produire rapidement des quantités considérables de glucides, lipides et protides utilisables pour l’alimentation animale et humaine. Le rendement, par unité de surface, de ces cultures d’Algues dépasse de beaucoup celui des cultures agricoles les plus productrices. Elles permettront peut-être de résoudre le problème de la faim dans le monde que pose l’expansion démographique actuelle.

On a également envisagé l’utilisation de telles cultures d’Algues unicellulaires dans les vaisseaux spatiaux où, lors de voyages interplanétaires de longue durée, la photosynthèse de ces Algues aurait le double avantage de fournir un aliment aux cosmonautes et de régénérer l’atmosphère de l’engin spatial par absorption du gaz carbonique et dégagement d’oxygène.

Encyclopédie Universelle. 2012.