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tant

tant [ tɑ̃ ] adv. et nominal
Xe tan, adv. avec un adj.; lat. tantum
I Adv. de quantité (marquant l'intensité) ASert avec que, à marquer qu'une action ou une qualité portée à un très haut degré entraîne une conséquence.
1(1080) TANT QUE. tellement (cf. À tel point que). « Je souffre tant que je ne peux pas me relever » (Sand ) Il a tant plu que la rivière est en crue. Loc. prov. Tant va la cruche à l'eau qu'à la fin elle se casse.
2 ♦ TANT DE... QUE... : une si grande quantité, un si grand nombre de... que... Elle éprouvait « tant de rancœur qu'elle souhaita de mourir » (Martin du Gard). Absolt Tant de choses. « On a tant rendu à César qu'il n'y en a plus que pour lui » (A. Gide). « J'ai tant fait que nos gens sont enfin dans la plaine » (La Fontaine). Il en fit tant et tant qu'on le renvoya. Loc. TANT ET SI BIEN QUE [ tɑ̃tesibjɛ̃ ] :de telle manière que, tellement bien que. Il fit tant et si bien que la corde cassa. « Tant et si bien que les assaillants se retirèrent en déroute » (Barrès). Littér. À TANT FAIRE QUE DE... : si l'on fait tout ce qu'il faut pour, si l'on va jusqu'à. « À tant faire que de le rencontrer, j'aime mieux qu'il me voie autrement » (Colette). Plus cour. (négligé) Tant qu'à faire (cf. infra III, 5o).
B(Sans que) tellement.
1(Avec le v.) « Votre oncle Adolphe qui vous aimait tant » (Proust). Il vous a tant aimé. « Mais je voudrais tant avoir fini ce roman » (Flaubert). « Oh ! argent que j'ai tant méprisé » (Chateaubriand).
2 ♦ TANT DE : une si grande, une telle quantité de. Cet homme « qui était le centre de tant de choses » (Mme de Sévigné). « Seigneur, tant de prudence entraîne trop de soin » (Racine). Celui-là et tant d'autres. Je lui ai dit tant de fois ! Des gens comme il y en a tant. beaucoup. Ne faites pas tant d'histoires ! « À quoi bon tant de haine, Et faire tant de mal, et prendre tant de peine ? » (Hugo). autant. Loc. fam. Vous m'en direz tant ! je ne suis plus étonné après ce que vous m'avez dit.
♢ TANT SOIT PEU : si peu que ce soit (que la quantité que vous imaginez soit aussi petite que possible). S'il est (un) tant soit peu délicat, il comprendra. — TANT S'EN FAUT : il s'en faut de beaucoup (cf. Loin s'en faut).
3Littér. (en tête de la propos. introd. la cause) « Rien ne touche son goût, tant il est difficile » (Molière).
Loc. Tant il est vrai que..., introduit une vérité qui découle de ce qui vient d'être dit.
II Nominal (XIVe) Exprimant à titre d'exemple une quantité qu'on ne précise pas mais qui est supposée définie Être payé à tant par mois, à tant la page. Toucher tant, telle somme. Fam. Ça fait tant, tel prix. — Tant pour cent. — TANT DE. « tu mesures tant de centimètres, tu pèses tant de kilogrammes, tu as tant de litres de sang, etc. » (Aymé).
♢ LE TANT : tel jour du mois. ⇒ quantième.
♢ TANT ET PLUS [ tɑ̃teply(s) ] :la quantité dont on parle et plus encore. « J'eus aussi des visites de Genève tant et plus » (Rousseau).
Vx ENTRE TANT. entre-temps.
IIIExprimant une compar.
1 ♦ TANT... TANT..., marquant l'égalité (le plus souvent avec valoir). « tant valait l'instituteur primaire, tant vaudrait l'enseignement » (Zola).
2 ♦ TANT... QUE, marquant l'égalité, dans des propos. négatives ou interrog. autant. « Vous ne me plaisez pas tant qu'elle » (Bussy-Rabutin). « L'intimité n'est pas tant le bonheur parfait que le dernier pas pour y arriver » (Stendhal).
♢ TANT QUE..., en phrase affirmative. autant. « Tant qu'il vous plaira » (Molière). Il frappe tant qu'il peut. Par ext. fam. Tant que... (et le v. pouvoir) :beaucoup, énormément. « Myope tant qu'il pouvait » (Céline). Il pleut tant que ça peut. Tant que ça : tellement, à ce point. « Dis-moi pourquoi tu tiens à lui tant que ça » (Sartre).
♢ SI TANT EST QUE... [ sitɑ̃tɛkə ] (et subj.) :exprime une supposition très improbable; à supposer que, en admettant que. « Voilà de l'argent qui n'est guère propre, si tant est qu'il y en ait qui le soit » (Mirbeau). — TOUS TANT QUE (et v. être au plur.) :tous, autant qu'il y en a, sans exception. « quelle idée vous faites-vous de nos devoirs, à tous tant que nous sommes ? » (Vigny).
3(déb. XVIIe; du lat. in tantum quantum) EN TANT QUE... (avec un v.) :dans la mesure où... « La loi est la raison humaine, en tant qu'elle gouverne tous les peuples de la terre » (Montesquieu).
(Avec un nom) Considéré comme. Le cinéma « en tant qu'art » (Malraux). En tant que spécialiste, je suis d'un tout autre avis (cf. En ma qualité de).
4 ♦ TANT... QUE... : aussi bien... que. « La liberté, tant civile que politique » (Rousseau). « Tant secoureurs que secourus » (A. Gide). (1872) TANT BIEN QUE MAL : ni bien ni mal, médiocrement. ⇒ cahin-caha. « Les choses vont ainsi, tant bien que mal et plutôt bien que mal » (Duhamel). Il s'y efforce tant bien que mal.
5(déb. XXe) TANT QU'À... et l'inf. :puisqu'il faut... (cour. et négligé pour à tant faire que de...). « tant qu'à m'ennuyer, je préfère que ce ne soit pas avec M. » (A. Gide). Tant qu'à faire, faites-le bien.
6 ♦ TANT MIEUX; TANT PIS, locutions exprimant qu'un fait est heureux ou malheureux pour qqn. « J'ai retrouvé mon reçu. — Tant mieux ! » Il n'est pas là, tant pis, je reviendrai. Tant pis pour toi, pour lui, c'est dommage, mais c'est mérité, c'est bien fait. — Fam. Docteur Tant Mieux, docteur Tant Pis, optimiste, pessimiste pour ses patients.
IV(v. 1180) TANT QUE... : aussi longtemps que. « Il soutenait ses ministres, tant qu'ils avaient la majorité » (Chateaubriand). « Et nul ne se connaît tant qu'il n'a pas souffert » (Musset). Loc. fam. Tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir. Tant qu'on a la santé... « Jusqu'à tant qu'elle devienne sa veuve » (Henriot), jusqu'à ce que.
Pendant que. Sortons tant qu'il y a du soleil. Iron. Tant que tu y es, que vous y êtes (pour renchérir sur une demande qui déplaît). « Il faut qu'il prenne des leçons d'équitation... Mais oui, bien sûr ! et des leçons de danse, tant que tu y es ! » (F. Mauriac).
⊗ HOM. Tan, taon, temps.

tant adverbe (latin tantum) Avec un verbe ou un nom complément, indique une grande importance, intensité, quantité : Tant de naïveté me désarme ! En phrase négative ou interrogative, indique une égalité en quantité, intensité, importance avec quelque chose, quelqu'un qui sert de référence dans une comparaison : Cela ne m'inquiète pas tant que le reste. Exprime une quantité indéterminée à titre d'exemple : Supposons un ouvrier qui gagne tant par mois. En tant que, dans la mesure où, pour autant que : Je m'intéresse à cette question en tant qu'elle me concerne ; en qualité de, comme : En tant que chef de l'expédition… Si tant est que, à supposer que, dans la mesure où. Tant bien que mal, péniblement, avec difficulté ; avec un résultat médiocre. Tant et plus, énormément, abondamment. Tant mieux, exprime la satisfaction devant un événement heureux. Tant pis, exprime la résignation ou l'indifférence devant un événement contraire. Tant… que…, indique une répartition : Ils étaient cinquante, tant hommes que femmes.tant (citations) adverbe (latin tantum) André Gide Paris 1869-Paris 1951 Où tu ne peux pas dire tant mieux, dis : tant pis, Nathanaël. Il y a là de grandes promesses de bonheur. Les Nourritures terrestres Gallimard Laurence Sterne Clonmel, Irlande, 1713-Londres 1768 Tant pis et tant mieux étant les deux grands pivots de la conversation française, un étranger ferait bien de se mettre au fait de leur emploi avant d'arriver à Paris. Tant pis, and tant mieux, being two of the great hinges of French conversation, a stranger would do well to set himself right in the use of them, before he gets to Paris. Le Voyage sentimental tant (difficultés) adverbe (latin tantum) Emploi 1. Tant, adverbe de quantité, s'emploie avec un verbe, jamais avec un adjectif ou un adverbe : je l'aime tant ; nous avons tant marché !si, → tellement. En revanche, tant peut être employé devant une forme verbale : un mari tant chéri. Devant un adjectif, on emploie si : il était si pâle qu'il nous a effrayés (et non il était tant pâle). Remarque L'emploi de tant devant un adjectif est aujourd'hui un archaïsme de style : « Je trouvai la philosophie tant sotte, tant inepte »(A. France). 2. Tant entre dans de nombreux tours figés. On dit : tant s'en faut (que) ; tant et plus ; tant il y a que ou tant y a que (= quoi qu'il en soit, enfin, bref) ; tant et si bien que ; tant vaut..., tant vaut... (tant vaut le maître, tant vaut le chien) ; tant qu'on veut, on peut ; tant qu'il vous plaira ; tant bien que mal ; tous tant que nous sommes. 3. Tant qu'à faire (= puisqu'il faut le faire de toute façon), considéré naguère comme familier, est maintenant admis. Recommandation Attention, l'expression est bien tant qu'à faire (et non quant à faire). À tant faire. Le tour littéraire à tant faire, que l'on conseillait d'employer à la place de tant qu'à faire, paraîtrait aujourd'hui affecté dans l'usage courant, surtout à l'oral. Tant qu'à (+ infinitif) (= pour ce qui est de) est également admis : tant qu'à modifier cette partie, autant tout changer. Recommandation Éviter en revanche tant qu'à (+ nom ou pronom). Dire quant à :quant à moi, je suis pleinement satisfait. 4. Tant pis. Recommandation Ne pas dire tant pire. 5. Tant que (= aussi longtemps que) est correct dans tous les registres : il travailla tant qu'il en eut la force. Tant que (= pendant que) est familier : tant que j'y suis ; tant que vous y êtes. Recommandation Dans l'expression soignée, on dit plutôt : puisque j'y suis, pendant que vous y êtes. Construction 1. En tant que peut être suivi soit d'un nom (au sens de « en qualité de ») : il a agi en tant que représentant du personnel, soit d'un verbe (au sens de « dans la mesure où, pour autant que ») : nous ne réussirons qu'en tant que nous resterons unis. 2. Si tant est que (+ subjonctif) : si tant est qu'il puisse s'exprimer. 3. Tant... que... Dans ce tour comparatif, la symétrie de la construction doit être respectée : il traite la question tant du point de vue économique que du point de vue politique (et non tant du point de vue économique que politique). Accord Tant de. L'accord du verbe ou de l'adjectif se fait avec le nom qui suit tant de : tant de soldats y ont laissé la vie, tant de crimes restés impunis, mais tant de générosité confond. ● tant (homonymes) adverbe (latin tantum) tan nom masculin taon nom masculin temps nom masculin t'en pronom tend forme conjuguée du verbe tendre tends forme conjuguée du verbe tendretant (synonymes) adverbe (latin tantum) Avec un verbe ou un nom complément, indique une grande...
Synonymes :
Tant… que…
Synonymes :
- aussi bien

tant
adv.
rI./r adv. de quantité.
d1./d Tellement, en si grande quantité. C'est le jour où il a tant plu.
|| Tant de. Il a tant de peine. Un de ces hommes comme il y en a tant.
d2./d Tant... que: tellement... que, à un point tel que. Il a tant couru qu'il est essoufflé.
Loc. prov. Tant va la cruche à l'eau qu'à la fin elle se casse.
|| Tant de... que: tellement de... que, une si grande quantité de... que. Il a tant de richesses qu'on ne saurait les compter.
d3./d (Emploi nominal.) Quantité non précisée, supposée connue des interlocuteurs. Son bien se monte à tant.
Recevoir tant pour cent.
|| Le tant: tel jour du mois. Il est parti le tant.
|| Tant de. Ce costume coûte tant de francs.
|| Tant et plus: autant et plus qu'il n'en faut.
rII./r Tant que... (Marquant la durée.) Aussi longtemps que. Tant que tu seras là, je ne partirai pas.
rIII/r (Marquant la comparaison.)
d1./d Tant que: autant que. Il crie tant qu'il peut. "Rien ne pèse tant qu'un secret" (La Fontaine).
|| Par ext. Tant que (+ le v. pouvoir): énormément, autant qu'on peut l'imaginer. Mangeant tant qu'il pouvait.
|| Fam. Tant que ça: tellement, à un tel point. Tu travailles tant que ça?
d2./d Tant... tant... (généralement suivi du v. valoir). Tant vaut l'homme, tant vaut la terre.
d3./d Tant... que...: aussi bien... que... Les partis, tant de droite que de gauche, ont protesté.
rIV./r Loc.
d1./d Loc. adv. Tant mieux, tant pis (pour marquer la satisfaction; le regret, le dépit). Tant mieux pour vous. S'il échoue, tant pis!
|| Tant bien que mal: ni bien ni mal, médiocrement.
|| Tant soit peu: si peu que ce soit.
d2./d Loc. conj. Tant s'en faut que: il est très peu probable que (+ subj.). Tant s'en faut qu'elle y consente.
|| Si tant est que: même en supposant que.
|| En tant que: dans la mesure où; en qualité de, comme.

⇒TANT, adv. et nom.
I. — Adverbe
A. — [Adv. d'intensité ou de quantité]
1. [Corrél. de que, tant entraîne une conséquence. Marque ,,qu'une action ou qualité portée à un très haut degré devient la cause d'un certain effet`` (LE BIDOIS 1967,1453)] Synon. tellement.
a) [Tant modifie un verbe à un temps simple ou à un temps comp.] Je vous aime tant que je veux être oublié dans vos doux souvenirs, si en pensant à moi vous pouviez être malheureuse (CHATEAUBR., Mém., t. 1, 1848, p. 503).
Rem. 1. Avec un verbe à un temps comp., tant s'insère entre l'auxil. et le part. passé: C'est parce que ton baiser, je l'ai tant espéré, tant voulu, tant attendu, que je me suis repris à vivre, à être fort... (MIRBEAU, Journal femme ch., 1900, p. 141). Entre le verbe et le subst. dans une loc. verb.: Pendant assez longtemps, des républicains niaient, en France, les luttes de classes; ils avaient tant horreur des révoltes qu'ils ne voulaient pas voir les faits (SOREL, Réflex. violence, 1908, p. 77). 2. Tant est placé avant le verbe dans des proverbes et dans des expr. figées de la lang. écr.: Tant va la cruche à l'eau, qu'à la fin, elle se casse. 3. Tant peut être séparé de son corrél. que par une virgule: L'avenir m'effraye tant, que je ne veux pas de l'avenir, et le présent m'est insupportable (BALZAC, Illus. perdues, 1843, p. 698). 4. Pour en renforcer l'intensité, tant est répété devant chaque part. passé ou dans chaque synt. verbal (supra ex. de Mirbeau). 5. Le verbe de la prop. sub. peut être au subj. lorsque le verbe de la princ. est à la forme nég. ou à la forme interr.: A-t-il tant de besogne qu'il n'ait aucun loisir? (GREV. 1961,1029, p. 1026).
— [Le verbe de la prop. princ. peut être sous-entendu ou avoir été exprimé dans une phrase qui précède] Il avait contribué à désunir bien des couples. D'où d'interminables palabres. Tant et tant que le commandant, excédé de plaintes, l'avait menacé de la prison (MARAN, Batouala, 1921, p. 47).
Faire tant que. Agir de sorte que. Elles firent tant que nous tînmes cette disparition pour un superprix d'excellence décerné en cours d'année (SARTRE, Mots, 1964, p. 189).
Faire tant et tant que. Je ferai tant et tant en me vouant à elle que l'amour aura sa transparence dans l'impossibilité de nous séparer (J. BOUSQUET, Trad. du sil., 1936, p. 211).
Tant faire que de. Faire en sorte que. Puisque j'ai tant fait que de savoir ce qu'il écrivait à son ami, pourquoi ne saurais-je pas ce qu'il lui dit à elle? (BALZAC, A. Savarus, 1842, p. 83).
À tant faire que de. À supposer qu'on pousse les choses jusqu'à. À tant faire que de le rencontrer, j'aime mieux qu'il me voie autrement (COLETTE, Chéri, 1920, p. 198).
Faire tant et si bien que. Il fit tant et si bien que le pauvre homme, dans le fossé, se cassa trois doigts (CHÂTEAUBRIANT, Lourdines, 1911, p. 37).
b) [Constr. avec des subst. introd. par de] Tant de ... que. Georges aimait tant de choses qu'il n'avait pas le loisir d'aimer longtemps la même (ROLLAND, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p. 1503). Une image tenue en réserve pendant tant d'années que, même si j'avais pu deviner, en l'emmagasinant jadis, qu'elle avait un pouvoir nocif, j'eusse cru qu'à la longue elle l'avait entièrement perdu (PROUST, Sodome, 1922, p. 1114).
— [Avec en au lieu de de + subst.] Mais quoi? Ils en voyaient tant, ils en entendaient de si raides, qu'il aurait fallu les attacher, pour les tenir (ZOLA, Germinal, 1885, p. 1239).
c) Vx ou littér. [Devant un adj. ou un adv.] Sans être très intelligent, je trouvai la philosophie qu'on m'avait enseignée tant sotte, tant inepte, tant absurde, tant niaise, que je ne crus rien des vérités qu'elle établit et qu'il faut professer et pratiquer si l'on veut passer pour un honnête homme et un bon citoyen (A. FRANCE, Vie fleur, 1922, p. 427).
2. [Sans corrél. avec que conséc.; tant est empl. seulement avec une valeur intensive ou quantitative]
a) [Modifie un verbe à un temps simple ou comp.] Un homme qui avait tant vu et tant souffert (VIGNY, Serv. et grand. milit., 1835, p. 209). Je voulais voir Sylvie; est-elle encore au bal? Elle ne sort qu'au matin; elle aime tant à danser (NERVAL, Filles feu, Sylvie, 1854, p. 610).
Tant et tant. Pardon! Pardon! Je ne pouvais pas croire que tu en avais enduré tant et tant! (GENEVOIX, Raboliot, 1925, p. 341).
Tant et plus. C'était un merle qu'on ne pouvait pas voir, et qui sifflait tant et plus dans les taillis (CLADEL, Ompdrailles, 1879, p. 136).
(Un) tant soit peu. Si peu que ce soit. Si l'on est tant soit peu critique, on est obligé de se dire en même temps que cela est impossible (RENAN, Avenir sc., 1890, p. 329). Le seul moyen précis en effet de créer de la musique à partir d'objets sonores tant soit peu compliqués, c'est le montage(SCHAEFFER, Rech. mus. concr., 1952, p. 186).
(Être) tant et si peu (qqc.) (rare). Une céleste créature! une danseuse des rues! tant et si peu! (HUGO, N.-D. Paris, 1832, p. 114).
— [Devant un part. passé passif] Et cependant, n'a-t-il pas sa beauté et son charme indigène, cet habit tant victimé? (BAUDEL., Salon, 1846, p. 196). Je l'ai enfin, cette aquarelle tant cherchée par les gares de Rouen (FLAUB., Corresp., 1865, p. 193).
Non/pas/point tant (modifiant un verbe ou un verbe éventuellement non exprimé, et un compl. circ.). Oui, si la pernicieuse donzelle ne valait point tant seulement la corde pour la pendre, elle n'en était pas moins une magicienne fort entendue! (CLADEL, Ompdrailles, 1879, p. 363). Pour chacune de tes larmes, je répandais vingt larmes, non point tant parce que je t'aimais, que parce que je n'osais le dire (BOURGES, Crépusc. dieux, 1884, p. 109).
Merci tant! (vx). Et comme elle donnait difficilement à un sentiment, même le plus vrai, une expression qui ne fût pas affectée par le souci de ce qu'elle croyait élégant, elle répéta à plusieurs reprises: « Merci tant, merci tant » (PROUST, Temps retr., 1922, p. 950).
b) Tant de + subst. Un si grand nombre, une si grande quantité de. Ma santé exige tant de soins! (R. BAZIN, Blé, 1907, p. 167).
Tant et tant de. Après tant et tant de nuits passées dans des chambres d'hôtel, dans des chambres d'amis, c'était réconfortant de me sentir chez moi, dans ce lit étranger (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 318).
— [Dans une phrase nég. ou interr.] Pas tant de. Pas tant de paroles, lui dit l'un d'eux, vous êtes arrêté, suffit! (STENDHAL, Chartreuse, 1839, p. 79). Elle avait à vaincre l'insouciance des locataires, qui ne méritaient d'ailleurs pas tant de peines et d'efforts (DABIT, Hôtel Nord, 1929, p. 62).
— [À la fin d'une énumération] N'ont-ils pas éconduit de Paris Papin, Fulton, Lebon et tant d'autres? (FOURIER, Nouv. monde industr., 1830, p. 43).
— [Avec en (analysable ou non) au lieu de de + subst.] Elle emploie ce moment de liberté au classement de sa correspondance, loin du regard curieux de sa terrible favorite... deux heures. Il n'en faudrait pas tant pour... car elle ne perdrait pas une minute (BERNANOS, Mauv. rêve, 1948, p. 1004).
Fam., souvent iron. [Pour marquer son étonnement face aux propos tenus] Tu m'en diras tant ! Quand on est coloriste, mon cher, on n'est pas tenu à voir les choses comme nature. Ce chameau est le tambour-major du régiment des dromadaires créé en Égypte par le grand Bonaparte.Tu m'en diras tant (REYBAUD, J. Paturot, 1842, p. 248).
Rem. C'est le n. déterminé qui commande habituellement l'accord du verbe: Tant de sang-froid, tant de sagesse m'indiquent... On peut trouver néanmoins un accord au sing.: comme s'il n'eût pu comprendre que tant de prudence, de courage et de dévouement s'alliât avec un visage qui n'indiquait pas encore vingt ans (DUMAS ds GREV. 1986, § 436, p. 725).
c) Vx. Tant + adj. Synon. de si2. Il demanda, comme grâce, de pouvoir achever, avant qu'on le pendît, son Traité des usages et coutumes de Perse, qui devait être, disait-il, une tant belle œuvre (COURIER, Pamphlets pol., Réponses aux anon., 1, 1822, p. 147). C'est encore ce qu'il y a de plus positif dans notre tant joyeuse existence (SUE, Atar-Gull, 1831, p. 7).
En empl. concess. Tant + adj. (ou subst. en empl. adj.) + que + verbe au subj. Tant poëte que je sois, je ne suis pas aussi dupe que vous voudriez le croire (BAUDEL., Poèmes prose, 1867, p. 55).
3. [Tant introd. une prop. à valeur causale ou justificative]
a) [La sub. causale peut se trouver à différents endroits de la phrase]
— [En seconde place, après l'énoncé de l'effet] Elle n'osait pas pleurer, tant elle avait peur de la Thénardier (HUGO, Misér., t. 1, 1862, p. 470). J'eus de la peine à le reconnaître tant avait maigri son grand corps, déjà mince et frêle naguère (BILLY, Introïbo, 1939, p. 16).
— [En tête de phrase] Tant est efficace le secours de l'insulte à ce qui vous domine le mieux, et grand le plaisir de fronder un maître: « Je mourrai peut-être de toi, mais crois bien que j'y mettrai le plus de temps possible... » (COLETTE, Sido, 1929, p. 104).
— [Enchâssée dans la princ.] Les pots d'argile se cassaient sur les dalles, les serpents couraient, semblaient pulluler, et, tant ils étaient nombreux, sortir des murs naturellement (FLAUB., Salammbô, t. 2, 1863, p. 91). La robe doit sortir, tant elle a de cachet, d'un atelier de fée (PONCHON, Muse cabaret, 1920, p. 223).
b) [Introd. une vérité d'ordre général en justification de ce qui vient d'être dit] Tant il est vrai que. Ces quinze jours sont plus distincts dans ma mémoire que les trois années qui venaient de s'écouler, et même peut-être que les trois années qui suivirent et qu'elle passa encore avec moi. Tant il est vrai que la douleur seule marque dans l'enfance le sentiment de la vie (SAND, Hist. vie, t. 2, 1855, p. 282):
1. Dans une anthologie érotique où sont représentés plusieurs écrivains connus, il n'y a que Colette qui ait fourni une page lisible, tant il est vrai que ce sujet si riche et si grave, l'amour physique, n'inspire en général que des pauvretés
GREEN, Journal, 1949, p. 295.
B. — [Adv. de compar.] Synon. de autant.
1. Tant... tant
— [Empl. avec le verbe valoir, pour indiquer un rapp. proportionnel (ou inversement proportionnel)] Tant vaut l'âme, tant vaut la doctrine (BOURGET, Disciple, 1889, p. 219).
Tant plus... tant plus. Monsieur l'archiprêtre est servi dans la porcelaine fine (...). Mais tant plus la porcelaine est fine, tant plus elle craint le feu (A. FRANCE, Mannequin, 1897, p. 151). Elle croit que tant plus que ça se voit, tant plus que c'est beau (COLETTE, Cl. école, 1900, p. 299).
Tant plus... tant moins. Les gouttières gorgées vomissaient l'eau à pleine gueule, et, du haut des toits en pente douce, des torrents précipités pendaient en longues stalactites, mais enfin ce n'était pas de la pluie, pas le moins du monde; un nuage qui crevait, rien de plus! et, comme il le disait fort bien:Tant plus que ça tomberait beseff, tant moins que ça tomberait longtemps (COURTELINE, Train 8 h. 47, 1888, p. 91).
2. [Dans des phrases nég. ou interr., tant que peut se substituer à autant que] Banal, le vieux fonds de l'homme? Pas tant que vous! — Vous méprisez les bourgeois? Bourgeois vous-même! (LEMAITRE, Contemp., 1885, p. 229). Les artistes du Moyen Age, qui passent pour des ingénus et qui ne travaillent pas tant d'après nature qu'on ne le croit (GONCOURT, Journal, 1894, p. 680).
Rien tant... que. Il n'aimait rien tant qu'à persuader autrui (MARTIN DU G., Thib., Épil., 1940, p. 763).
Non tant par... que par... La rencontre de Napoléon et du pape Pie VII est un grand moment, non point tant par les événements qui en résultèrent que par la signification légendaire de ces fortes images, où l'on voit les deux puissances affrontées (ALAIN, Propos, 1921, p. 284).
Pas tant (...) que ça. Et proclamant qu'elle est une dinde: « Non pas tant dinde que ça! fait Lorrain... » (GONCOURT, Journal, 1894, p. 633). La violette, modeste? Pas tant que ça! Elle fleurit la première comme si elle craignait la comparaison (RENARD, Journal, 1902, p. 737).
3. [Dans qq. expr. affirm.]
Tous tant que nous sommes. Autant que nous sommes. Prolétaires, tous tant que nous sommes, la propriété nous excommunie (PROUDHON, Propriété, 1840, p. 194).
Tant qu'il vous plaira. Beau génie tant qu'il vous plaira, M. le chevalier (J. DE MAISTRE, Soirées St-Pétersb., t. 1, 1821, p. 271).
Tant qu'il peut, tant que ça peut. Lentement il se baisse, Applique son naseau sur le pauvre instrument, Et souffle tant qu'il peut (FLORIAN, Fables, 1792, p. 172). C'était là une heure unique, un des plus vifs et des plus beaux moments qu'il aurait jamais; et enragé contre lui-même, bandait son âme tant qu'il pouvait, pour se donner de l'émotion (BOURGES, Crépusc. dieux, 1884, p. 219).
Tant qu'il veut. En lui envoyant des bijoux tant qu'elle en veut (DUMAS fils, Dame Cam., 1848, p. 78).
4. En tant que. Dans la mesure où.
— [Suivi d'un verbe] Même l'amour de Dieu en tant qu'il est sensible (S. WEIL, Pesanteur, 1943, p. 95). Mon corps en tant qu'il est capable de synergie sait ce que signifie pour l'ensemble de mon expérience telle couleur en plus ou en moins (MERLEAU-PONTY, Phénoménol. perception, 1945, p. 377):
2. Au surplus, les peuples, en tant qu'ils ne sont que des collections d'individus, peuvent offrir des exemples plus vastes, mais identiques en chacune de leurs parties, de cette cécité profonde, obstinée et déconcertante.
PROUST, Sodome, 1922, p. 1049.
— [Suivi d'un subst. (ou d'un n.)] La vraie question pour le critique n'est donc pas de savoir si tel auteur a l'importance de Balzac ou de Tolstoï, mais s'il existe en tant que « planète », s'il constitue un monde clos (MAURIAC, Journal 2, 1937, p. 159).
— [Suivi d'un adj. ou d'un part. passé empl. comme adj.] Car Loisy a ce scrupule en tant qu'excommunié (DU BOS, Journal, 1927, p. 143).
En tant que tel.
5. [Coordonnant deux termes de même nature ou de même fonction] Tant bien que mal, tant mal que bien. Car nous sommes persuadés qu'une infinité de bâtimens s'y sont perdus pour s'en être rapportés là-dessus aveuglément à toutes les cartes tant françaises qu'anglaises et espagnoles (BAUDRY DES LOZ., Voy. Louisiane, 1802, p. 156). Il est démontré que ce n'est qu'à force de farines et de fécules que les congestions graisseuses se forment, tant chez l'homme que chez les animaux (BRILLAT-SAV., Physiol. goût, 1825, p. 231).
Tant bien que mal. Médiocrement, avec un résultat aléatoire. Je me suis aperçu à temps de mon tort, et je suis revenu tant bien que mal (CONSTANT, Journaux, 1804, p. 152).
6. [Suivi de à + inf., remplace dans l'usage cour.: à tant faire que de] Il a fait une risée et dit comme ça que tant qu'à marcher il marcherait tout le chemin (HÉMON, M. Chapdelaine, 1916, p. 140). Tant qu'à faire de les occire j'aimais mieux m'en charger moi-même! (CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 503).
7. Tant mieux.
8. Tant pis. V. pis1.
Pop. Tant pire. Tant pire! décrète Jadin compétente. C'est des fleurs d'homme bien (COLETTE, Vagab., 1910, p. 68).
C. — Tant que. [Introd. une prop. circ. de temps]
1. [Marque que deux actions sont simultanées et de durée égale] Aussi longtemps que. Tant que je serai là, tant que je vivrai. Tant qu'elle sera sur pied, elle travaillera à vous perdre (MARAT, Pamphlets, Aux Fr. patriotes, 1792, p. 299). Pour nous détacher de cette vie dont nous ne nous détachons guère tant que nous y sommes (MICHELET, Journal, 1831, p. 79). Tant qu'on voudra de lui, il restera (MIRBEAU, Journal femme ch., 1900, p. 172).
Tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir. Elle avait si froid qu'elle était sûre de ne plus jamais se réchauffer, il fallait se secouer, ne pas permettre au désespoir de la prendre à la gorge. Tant qu'il y avait de la vie... (TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p. 87).
2. [Pour indiquer le moment où s'achève la durée d'une action] Jusqu'à tant que. Jusqu'à ce que. J'engage donc ma correspondante à continuer de parler jusqu'à tant qu'on lui apporte la preuve qu'ils parlaient mal (GREV. 1986, § 1081, p. 1652).
3. Tant que j'y suis, tant que nous y sommes. Pendant que. Pourquoi, tant que j'y étais, ne pas jalouser ceux-ci les présents, puis les autres, les absents, qui viendront, un à un, remplir le cercle noir de ces niches encore vides... (BENOIT, Atlant., 1919, p. 233).
II. — Nominal
A. — [Désigne une quantité indéterminée de choses prises collectivement] Mais toute considération d'avenir n'aboutissait qu'à me faire dépenser davantage. Ah! Qu'aurais-je besoin de tant, une fois seul!... pensais-je et j'observais, plein d'angoisse et d'attente, diminuer, plus vite encore que ma fortune, la frêle vie de Marceline (GIDE, Immor., 1902, p. 459).
Rare. [Peut représenter un coll. de pers.] Pourquoi diable l'enfant a-t-il choisi, entre tant, cet imbécile? (BERNANOS, Soleil Satan, 1926, p. 157).
B. — [Désigne une quantité déterminée de choses qu'on ne veut pas ou qu'on ne peut pas préciser]
1. [Empl. seul, désigne une certaine mesure, en partic., une somme] Peser tant; coûter, dépenser, rapporter, valoir tant; être payé tant de l'heure. Mai ne dit pas aux prés: Les fleurs, c'est tant. Voyez mon tarif. Vous paierez Tant pour la violette et tant pour la lavande (HUGO, Légende, t. 2, 1859, p. 1040). Vous lui dites: Combien? Il répondra: Tant! Tope! Tope!... Et c'est fait! (SARDOU, Rabagas, 1872, III, 4, p. 125). Je vous vends mon secret: je réclame tant pour le livrer, et tant, si vous réussissez... (MAURIAC, Nœud vip., 1932, p. 206).
Être tant. En tel ou tel nombre. Qu'ils [les jeunes poètes] gardent Ibsen! Nous c'était Hugo. Qu'ils soient tant et plus, nous restons les mêmes, N'étant pas trop vieux, n'allons tout de go Pas encor songer aux plongeons suprêmes (VERLAINE, Épigr., 1894, p. 222).
Un tant pour cent. Synon. de tantième, pourcentage. J'ai un tant pour cent sur les commandes que j'apporte (BOURDET, Sexe faible, 1931, III, p. 442).
— [Dans un n. de nombre (une somme, une date...) lorsqu'on ne veut ou ne peut pas préciser le nombre des unités (parfois des dizaines)] Je n'ai jamais eu la patience de compter les livres qui composent ma bibliothèque. Je suppose que leur nombre s'élève à deux mille et tant (DELÉCLUZE, Journal, 1827, p. 360).
Empl. subst. Le tant. Tel jour, telle date. Le tant du mois. V. tantième ex. de Aymé.
2. [Déterminé par un compl. (désignant une unité) introd. par la prép. de] Un certain nombre, une certaine quantité de. Le valet de chambre (...) trompetta l'arrivée au Havre du grand poëte (...). Ce grand personnage voulait une maison composée d'au moins tant de pièces, car il amenait son secrétaire, un cuisinier, deux domestiques et un cocher (BALZAC, Modeste Mignon, 1844, p. 173):
3. Vous dites qu'une chose pèse tant, eh?
Tant de livres; et que vous avez tant de bushels de grain en stock, tant de gallons de pétrole;
Et combien tout cela vaut de dollars.
Car comme tout
A
Un poids et une mesure, tout vaut
Tant.
CLAUDEL, Échange, 1954, I, p. 748.
— [Avec ell. du compl. déterminatif] Entre tant. Je ne citerai plus, entre tant, qu'un passage de la lettre ouverte du 7 septembre 1843 à Théophile Gautier (DURRY, Nerval,. 1956, p. 27).
C. — [Dans des loc. où tant est suj. gramm. ou suj. log.]
Tant s'en faut (que). Il s'en faut de beaucoup. Vous n'êtes pas adroit, vous... ah! non... tant s'en faut! (CHÂTEAUBRIANT, Lourdines, 1911, p. 62). Tant s'en faut du reste que tout lui parût irréprochable dans ce qu'il avait fait ou écrit pendant cette période belliqueuse (BREMOND, Hist. sent. relig., t. 4, 1920, p. 456).
Tant il y a que. Il y a en tout cas ceci, à savoir que... Tant il y a, mon cher ami, que vous êtes privé de mon éloquence politique et qu'il faudra définitivement vous en passer, car je veux que mes lettres vous arrivent et je vois bien qu'elles courent grand risque de se perdre quand elles parlent d'autres choses que de la pluie et du beau temps (TOCQUEVILLE, Corresp. [avec H. Reeve], 1856, p. 206). Mais on s'apercevait bientôt que, pour inhumaine qu'elle fût, une telle langue convenait précisément à cela même que M. Benda s'efforçait d'exprimer, tant il y a que l'abstrait prend chez lui quelque chose de charnel (MASSIS, Jugements,1924, p. 210). Tant y a que. Tant y a qu'à sa mort, en 1788, elle m'a laissé 1 500 livres de dettes (JOUY, Hermite, t. 4, 1813, p. 76).
Si tant est que. En admettant que, s'il est vrai que. Voyons, cher beau-père, à quoi puis-je vous être bon? si tant est que je puisse être bon à quelque chose (AUGIER, Gendre M. Poirier, 1854, p. 282). Il était parti dès neuf heures, parlant entre ses dents de grosses affaires, d'affaires très importantes qui le retiendraient probablement jusqu'au soir, si tant est d'ailleurs qu'il lui fût possible de revenir (MIOMANDRE, Écrit sur eau, 1908, p. 10).
D. — Vx. Entre tant. Entre temps. Vous, pour avoir rendu les armes, Je vous trouve fondue en larmes Et qui m'insultez entre tant (TOULET, Contrerimes, 1920, p. 116).
REM. Tantet (un), loc. adv., fam., vieilli. Un peu, un petit peu. Synon. un tantinet. La bouche [d'un ange] (...) fendue en coup de sabre, s'entr'ouvre en un sourire qui finit (...) par devenir un tantet gouailleur (HUYSMANS, Cathédr., 1898, p. 388).
Prononc. et Orth.:[]. Homon. tan, taon, temps et formes de tendre. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. A. Adv. de degré 1. a) modifie un adv. 2e moit. Xe s. « très, beaucoup » (St Léger, éd. J. Linskill, 21: Il lo reciut [l'évêque de Poitiers; St Léger], tam ben en fist [v. note sur tam p. 21]); fin Xe s. (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 106: Tan dulcement pres a parler [Jesus]; 130); b) ca 1100 « tellement, si » fréq. dans les exclam. (Roland, éd. J. Bédier, 2946: Ceste dolor ne demenez tant fort!); c) ) fin Xe s. corrél. de que introd. une conséc. « tellement ... que » (Passion, 73: Los sos talant ta fort mostred [Jesus] Que grant pavors pres als Judeus); ) ca 1100 terme d'appel, suivi d'une conséq. en parataxe « id. » (Roland, 1601: Li quens le fiert tant vertuusement Tres qu'al nasel tut le elme li fent); d) ca 1170 loc. adv. tant seulement « seulement » (CHRÉTIEN DE TROYES, Erec, éd. M. Roques, 104); e) ) tant pis loc. adv. [XVIe s. BL.-W.1-5] 1663 (MOLIÈRE, Crit. Ecole des femmes, I, 1: Tant pis pour ceux [...] qui se tuent tout le jour à parler ce jargon obscur [...] Tant pis encore de prendre peine à dire des sottises); av. 1664 tant pis pour lui (Ablancourt d'apr. RICH. 1680); 1668 Médecin Tant pis [...] son confrère Tant mieux noms plaisants (LA FONTAINE, Fables, V, 12); ) tant mieux [id.] marque la satisfaction devant un résultat heureux 1690 (FUR.); 1694 tant mieux pour lui (Ac.); 1718 tant pis, tant mieux marque que l'on ne se soucie guère de la chose dont on parle (Ac.); 2. modifie un adj. a) 2e moit. Xe s. « très, beaucoup » (St Léger, 160: Ewruins, qui tan fud miels); b) ) id. terme d'appel annonçant une conséc. en parataxe « tellement [+ adj.] que » (ibid., 153: Li perfides [Ebroïn] tam fud cruels, Li ols del cap li fai crever); ) 1130-40 corrél. de que introd. une conséc. « id. » (WACE, Conception N.-D., éd. W. R. Ashford, 1561; 1564); c) ca 1100 tant par [+ adj.] cume [+ subst.] marque une compar. « autant que, comme » (Roland, 3162: le chef recercelet [de Baligant] Tant par ert blancs cum flur en estet); d) ca 1215 tant plus loc. adv. exprimant l'intensité « d'autant plus » (Aimeri de Narbonne, 2459 ds T.-L., 85, 26: tant sui ge plus marrie); 3. modifie un verbe a) ca 1050 « tellement, si bien » (St Alexis, 7; 334); b) id. spéc. « si longtemps » tant durer (ibid., 445); c) ) id. corrél. de que introd. une conséc. (ibid. 26; 34); ) id. la conséc. est en parataxe (ibid. 320: Tant l'as celet [la présence d'Alexis sous l'escalier], mult i as grant pechet); d) ca 1150 tant [...] plus que « bien plus que » (Charroi de Nîmes, éd. D. McMillan, 189: Passai avant, tant fis plus que estot); e) ca 1200 tant [...] plus [...] que « d'autant plus [...] que » (Poème moral, éd. A. Bayot, 3624: Tant hairat plus Deu que plus de mal arat). B. 1. Servant à exprimer une compar. a) expr. de l'égalité ) 2e moit. Xe s. tan [de ...] quant « autant de [...] que » (St Léger, 135: Por quant il pot, tan fai de miel); 1160-74 tant por [...] tant por « autant pour [...] que pour; soit pour ... soit pour » (WACE, Rou, éd. A. J. Holden, II, 1392: Tant por un, tant por el moult le cuilli en hé); ) ca 1100 tant cum « autant que » mode ind. (Roland, 76: tant cum vos en vuldrez; 2110); 1re moit. XIIIe tant que « id. » (Aucassin et Nicolette, éd. M. Roques, XIV, 18); b) expr. de la variation proportionnelle ) ca 1150 quant plus [...] tant plus (WACE, St Nicolas, éd. E. Ronsjö, 1449: Quant il plus l'estreisnt et covri, Tant corut plus et espandi); ) ca 1200 tant plus [...] tant plus « plus [...] plus » (Poème moral, 118-119); c) ) 1370-72 en tant comme [+ subst.] « en qualité de, comme » (NICOLE ORESME, Ethiques, éd. A. D. Menut, III, 10, p. 194, note 2: c'est impossible que mal en tant comme mal soit bien); 1690 en tant que (FUR.); ) en tant que loc. conj. « pour autant que, dans mesure où » + ind. (PALSGR., p. 865 b); 2. corrél. d'un terme introd. une conséc. supra I A 1 c, I A 2 b , I A 3 c ; 3. corrél. d'une conj. introd. une temp. a) coïncidence de 2 durées ) loc. conj. tant cum « aussi longtemps que » ca 1050 + ind. [la durée envisagée a des limites déterminées, probables; MOIGNET, p. 235] (St Alexis, 165: N'en volt turner [Alexis; de sa pauvreté] tant cum il ad a vivre); ca 1100 (Roland, 1802); id. + subj. [les limites de la durée semblent imprécises; MOIGNET, loc. cit.; fréq. lorsque le verbe de la princ. est de forme nég.] (ibid., 544); ) ca 1200 tant que « id. » + ind. (Poème moral, 2959: tant que la luxure suet l'omme emprisoneir, Vers l'amor Deu ne puet son coraige esleveir); b) situation par rapport à un procès postérieur ca 1100 tant [...] que « jusqu'à ce que » + ind. [le procès est prévu comme probable ou posé comme effectif] (Roland, 1829: Tant le guardent quel rendent a Charlun); ca 1135 (Couronnement de Louis, éd. Y. G. Lepage, réd. AB, 1981: Puis s'en alerent tant qu'il sont a Poitiers); 1225-30 + subj. [mode subj. procès pensé comme possible] (GUILLAUME DE LORRIS, Rose, éd. F. Lecoy, 2410: Ja fin ne prendra ceste guerre, Tant que j'en veille la pes querre); 4. sert à exprimer la cause a) ca 1100 tant introduit une causale [issu de l'empl. conséc.] + ind. (Roland, 2880: Sur lui se pasmet, tant par est anguisseus); 1230-35 (Mort le roi Artu, éd. J. Frappier, 53, 10); b) ca 1165 en tant que loc. conj. « étant donné que » (BENOÎT DE STE-MAURE, Troie, éd. L. Constans, 25041); 5. ca 1135 introd. une adversative (implique une notion de degré) + subj. (Couronnemment de Louis, réd. AB, 1647: Gardez n'en isse nus hom [...] tant saiche bien proier, Que il n'en ait toz les membres tranchiez); 6. ca 1165 se tant est que loc. conj. exprimant la condition restr. « à supposer que, en admettant que » + subj. (BENOÎT DE STE-MAURE, op. cit., 22083: se tant est que estre puisse; 29697: se tant est que faire le puisse). C. La loc. tant de (tant pron. indéf. relié à un subst. par la prép. de) [cf. ce tant de « autant de » 1er quart XIIIe s. Courtois d'Arras, éd. E. Faral, 72] 1. le subst. désigne un inanimé a) ca 1050 « autant de » tant de [...] dunt (St Alexis, 99: Tant an retint [de l'aumône] dunt ses cors puet guarir; 252); 1119 en tant De tens (PHILIPPE DE THAON, Comput, 1965 ds T.-L., 83, 6); b) ca 1100 « tellement, une si grande quantité de » id. (Roland, 132: Tant i avrat de besanz esmerez Dunt bien purrez vos soldeiers luer); 2. le subst. désigne une pers. ca 1100 tant de « un si grand nombre » + que introd. une conséc. (ibid., 1035: Tant en i a [des corps d'armée] que mesure n'en set). D. a) Ca 1240 en tant com de + subst. « en ce qui concerne, quant à  » (JEAN DE THUIN, Jules César, 76, 2 ds T.-L., 92, 6); 1288 tant que (JEAN DE JOURNI, Dîme de pénitence, 2414, ibid., 93, 43); ca 1349 tant qu'a (Dial fr. fl., F I b, ibid., 93, 40); b) 1395 tant qu'est a parler de (Voyage à Jérusalem du seigneur d'Anglure, 251, ibid., 93, 51); c) 1905 tant qu'à + inf. avec valeur concess. (GIDE, Journal, p. 155: tant qu'à m'ennuyer, je préfère...). II. A. 1. Adj. indéf. accordé avec le subst. qualifié a) plur. ) masc. « si nombreux » ca 1050 cas régime (St Alexis, 471: tanz jurs t'ai desirret); ca 1100 cas suj. (Roland, 1401: Tant bon Franceis i perdent lor juvente!); ) fém. ca 1050 (St Alexis, 397; 473); b) sing.; le subst. a valeur coll. de plur. ) ca 1100 masc. (Roland, 570 [conséc. en parataxe]: L'empereür tant li dunez aveir N'i ait Franceis ki tot ne s'en merveilt; 1623); ) id. fém. (ibid. 2922: tante gent adverse); 2. adj. invar. [cf. I C] id. (ibid., 3979 [conséc. en parataxe]: Tant a oït e sermuns e essamples Creire voelt Deu); 1160-74 (WACE, Rou, III, 120: Tant eurent terres); 1176-81 [la conséc. annoncée par tant est introd. par que] (CHRÉTIEN DE TROYES, Chevalier de la charrette, éd. M. Roques, 1016). B. 1. Ca 1100 tant « si nombreux » annonce une conséc., supra II A 1, 2; 2. id. tant corrél. de com introd. une compar. d'égalité « autant de...que » (Roland, 2378; 3631: Cascuns i fiert tanz granz colps cum il poet). III. Pron. indéf. 1. neutre a) ) ca 1100 « autant que ceci, cela; ceci, cela précisément; ceci, cela » (ibid. 2098: Ki tant ne set...); ca 1165 (BENOÎT DE STE-MAURE, op. cit., 29893: Tant me disent, ne plus ne meins); ) id. corrél. annonçant une complétive introd. par que (ID., op. cit., 13562; 19936); v. aussi pourtant et partant2 adv.; b) ca 1120-1150 précédé du dém. cel « ce [que, qui] » (Grant mal fist Adam, I, 35 ds T.-L., 82, 24; avrai dit Cel tant que jeo sai); ca 1160 (Eneas, 3038, ibid., 82, 85); 2. masc. plur. 1160-74 empl. abs. (WACE, Rou, III, 340: Se ele ne fust de tanz seüe [l'aventure]); ca 1165 tant de (BENOIT DE STE-MAURE, op. cit., 12268: en raduisit tanz [de combattants]); id. tant de + que conséc. (ID., op. cit., 15666: e des Menelau i ot tanz Que ...). IV. Subst. 1. plur. précédé d'un numéral qui le multiplie « fois [autant] » déb. XIIe s. cent milie tant (BENEDEIT, St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 1797); 2. 1370-72 désigne une quantité que l'on n'exprime pas (NICOLE ORESME, op. cit., V, 10, p. 292, note 4: la loi de souffrir tant pour tant n'est pas juste [cf. p. 291, note 1: Tele chose est appelee [...] pena talionis]); 1530 ung tant (PALSGR., p. 848 a: il est plus hault que vous d'ung tant); 1668 désigne une somme d'argent, un revenu déterminés (LA FONTAINE, Fables, VI, 4: rendre tant [de la concession d'une ferme]); 1882 un tant pour cent [sur les ventes] (ZOLA, Au bonheur des dames, II ds Gil Blas, 21 déc., col. 5 d'apr. QUEM. DDL t. 16). Tant indéf. fonctionnant comme adj., pron., subst., décliné sur le parad. de la 1re classe des adj. (sing. masc. tanz [tans], tant; fém. tante; neutre tant. Plur. masc. tant, tanz [tant]; fém. tantes) est issu de l'adj. lat. tantus « de cette quantité, de cette grandeur, aussi grand » (urbes tantas; tanta vitia; sescenta tanta reddere « six cents fois autant »); fréq. empl. en corrél., notamment tantus ... quantus, tantus ... quam. Dès l'époque imp. (Properce, Manilius, Lucain, Stace, Lat. Gramm. 2 Syntax und Stilistik, p. 206), l'évol. s'amplifiant à basse époque, tanti plur. est empl. comme synon. de tot « tant de; de si nombreux », le caractère bref de ce dernier adv. expliquant en partie son déclin (déb. IIIe s. Tertullien ds BLAISE Lat. chrét.; cf. fin IVe s. Peregr. Aether., V, 8: quae quidem omnia singulatim scribere satis fuit, quia nec retineri poterant tanta, v. LÖFSTEDT, p. 147). L'acc. neutre sing. tantum est relevé avec valeur nom. au sens de « cette grandeur, cette quantité, autant » (tantum debuit, Plaute; tantum dabis, Cicéron); il peut également être pris avec valeur adv.: empl. avec le génitif d'espèce sing. (tantum belli, Tite-Live; tantum licentiae, Cicéron) ou plur. (tantum civium, Cicéron), en corrél. avec quantum (tantum verborum est quantum necesse est, Cicéron) ou avec ut conséc. (tantum animi ut..., id.). Dès l'époque class., tantum adv. s'emploie comme synon. de l'adv. tam « si, tellement » pour modifier un adj. (Virgile, Horace). Fréq. abs. littér.:42 104. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 65 745, b) 52 489; XXe s.: a) 57 095, b) 60 500. Bbg. GARDNER (R.)., GREENE (M. A.). A Brief description of Middle Fr. syntax. Chapell Hill, 1958, pp. 85-86. — GÉRARD (J.). l'Exclam. en fr. Tübingen, 1980, pp. 74-83. — GOUGENHEIM (G.). L'Ind. après tant ... que. Mél. Gamillscheg (E.). Tübingen, 1957, pp. 183-190. — LEHMANN (G.). L'Empl. mod. de l'adv. fr. tellement, comp. à celui de si et du tant d'intensité. Lund, 1959, 30 p. — MARTIN (R.). Temps 1971, pp. 337-339. — MÉNARD Synt. 1973, p. 32, 216, 221, 313. — MOIGNET 1973, p. 238, 240, 249, 271. — MOREL (M.-A.). Ét. sur les moy. gramm. et lex. propres à exprimer une concession en fr. contemp. Thèse, Paris III, 1980, p. 267, 270, 554. — PINCHON (J.). Les Pron. adv. en et y. Genève, 1972, pp. 59-275. — QUEM. DDL t. 21, 38. — RICHARD (P.). Tanz and fois with cardinal numbers in Old and Middle Fr. In: [Mél. Ewert (A.)]. Oxford, 1961, pp. 194-213. — TOGEBY (K.). Gramm. fr. 4. Les Mots inv. Copenhague, 1984, p. 183, 193.

tant [tɑ̃] adv. et nominal.
ÉTYM. Xe, tan, adv. avec un adj. (→ ci-dessous, I., A., 4.); lat. tantum.
———
I (Adv. de quantité, marquant l'intensité). Si, tel, tellement.
A Tant… que (consécutif), « sert à marquer qu'une action ou une qualité portée à un très haut degré devient la cause d'un certain effet » (G. et R. Le Bidois).
1 (V. 1950). || Tant (modifie un verbe et précède une subordonnée de conséquence introduite par que). Tellement (→ 2. Outre-tombe, cit. 2). || Je souffre tant que… (→ Lâche, cit. 5).
Loc. prov. (avec l'inversion du sujet, normale en anc. franç.). Tant va la cruche (cit. 7 et 8) à l'eau qu'à la fin elle se casse. || « Tant va le pot à l'eau qu'il se brise » (Villon).
2 Tant de… que… : une si grande quantité, un si grand nombre de… que… || Elle éprouvait une si poignante mélancolie, tant de rancœur (cit. 1)… qu'elle souhaita de mourir. || Tant de fous (1. Fou, cit. 16) qu'on n'en sait pas le nombre (→ aussi Assurance, cit. 8 et 9; circonstance, cit. 2; joie, cit. 22.1; précision, cit. 5).
1 Gina, qui pouvait avoir alors treize ans (…) avait tant de peur d'éclater de rire en présence de mon costume, qu'elle n'osait pas manger (…)
Stendhal, la Chartreuse de Parme, I, I.
Absolt. Tant de choses. || On a tant rendu (cit. 6) à César qu'il n'y en a plus que pour lui. || Elle en dit tant que… (→ Monsieur, cit. 7). || Faire (cit. 74; et supra) tant que… (→ aussi Couvert, cit. 1; 1. maille, cit. 4; mouche, cit. 7).
REM. 1. La proposition consécutive se met au subjonctif quand la principale est interrogative ou négative.
2. Tant (ou tant de) que… peut se construire avec l'infinitif, quand il n'y a pas d'équivoque sur la personne. || « Qui donc est ce coquin qui prend tant de licence, Que de chanter et m'étourdir ainsi ? » (Molière, Amphitryon, I, 2). — N. B. Cette construction archaïque survit, dans la langue littéraire ou régionale (→ ci-dessous, cit. 6, M. Aymé), avec le verbe faire. || « Et… quand tu aurais tant fait que de le rendre malheureux » (Gide, Paludes, p. 34, in Damourette et Pichon). — ☑ Loc. littér. À tant faire que de… : si l'on fait tout ce qu'il faut pour…, si l'on va jusqu'à… (→ ci-dessous, III., 5., tant qu'à faire, cour.).
2 Je ne saurais avoir tant de honte en partage,
Que je n'en aie encor mérité davantage.
Molière, Tartuffe, III, 6.
3 Mais puisque vous avez tant fait que de venir, je ne veux pas vous quitter de toute la soirée.
Stendhal, Mina de Vanghel.
4 À tant faire que se raconter des histoires, il me semble qu'il serait plus naturel de se raconter sa propre histoire embellie (…)
R. Rolland, Jean-Christophe, Dans la maison, II.
5 À tant faire que de le rencontrer, j'aime mieux qu'il me voie autrement (…)
Colette, Chéri, p. 151.
6 — Puisque j'ai tant fait que de venir jusqu'ici, lui dit Voiturier, je pourrais aussi bien pousser à l'étang des Noues (…)
M. Aymé, la Vouivre, XVI.
3 Loc. Tant et si bien que… || Il fit tant et si bien qu'il arriva à ses fins, qu'il obtint de…
7 Une bataille acharnée s'engagea (…) Tant et si bien que les assaillants se retirèrent en déroute sous la conduite de l'Oblat (…)
M. Barrès, la Colline inspirée, VIII.
(V. 1534). Tant (il) y a que… : tant et si bien que…, et, par ext., quoi qu'il en soit.REM. Ces deux tours sont littéraires, mais tant y a est nettement archaïque (→ Pitié, cit. 1, Montaigne).
8 (…) le champ de leurs observations, si tant y a qu'ils aient besoin d'observer, est vite parcouru (…)
Jules Lemaitre, les Contemporains, Daudet, I.
4 Vx ou littér. (Suivi d'un adjectif). Si. || « Le peuple de Paris est tant sot, tant badaud (cit. 1)… que… » (Rabelais). || « La chair en est tant délicate… que c'est baume » (→ Mouton, cit. 1, Rabelais). || « Son esprit si subtil, tant amoureux du relatif » (Gide, Sur R. de Gourmont).Il n'est point tant enfant que… (→ Atteindre, cit. 3).
9 Sans être très intelligent, je trouvai la philosophie qu'on m'avait enseignée tant sotte, tant inepte, tant absurde, tant niaise, que je ne crus rien des vérités qu'elle établit (…)
France, la Vie en fleur, XIV.
Vx. || Tant (en emploi concessif, suivi d'un adjectif et de que…, avec le subjonctif ou l'indicatif). Aussi. || « Tant poète que je sois » (Baudelaire, Poèmes en prose, « La femme sauvage »).
B (Intensif, employé sans que…).
1 (Avec un verbe). || Votre oncle qui vous aimait tant (→ Paternel, cit. 4). || S'il est permis de tant dépenser (→ Prendre, cit. 70). || Cette diversité (cit. 2) dont on vous parle tant (→ aussi 3. Ras, cit. 3). || Mais je voudrais tant avoir fini ce roman ! (→ 1. Rocher, cit. 8). || « Oh ! argent (cit. 44) que j'ai tant méprisé… »Ne t'afflige point tant (→ Gamme, cit. 6). || Ne fais (cit. 155) pas tant ta mijaurée.
Rare (vieilli et mondain) :
9.1 (…) comme elle donnait difficilement à un sentiment, même le plus vrai, une expression qui ne fût pas affectée par le souci de ce qu'elle croyait élégant, elle répéta à plusieurs reprises : « Merci tant, merci tant ».
Proust, le Temps retrouvé, Pl., t. III, p. 950.
2 a Tant de… : un si grand nombre, une telle quantité de. || Un homme qui était le centre (cit. 21) de tant de choses. || Après tant d'années passées ensemble (→ Paix, cit. 4). || « Seigneur, tant de prudence (cit. 1) entraîne trop de soin ».Comme tant d'autres (→ 1. Politique, cit. 7), comme tant de gens. || Et tant d'autres (après une énumération; → Lieutenant, cit. 3). || Ce n'était pas une amourette comme il y en a tant. Banal, commun, courant (→ Pour, cit. 7)… || Tant de fois (→ Maie, cit. 2; renverser, cit. 20).
Spécialt (en phrase exclamative ou avec une valeur emphatique). || « Tant de flambeaux éteints ! Tant de fleurs (cit. 17) arrachées ». || Le pain (cit. 2) joue tant de rôles ! || « Après (cit. 8) tant de serments, Titus m'abandonner ! » (→ aussi Honte, cit. 7). || Il y avait tant, tant de choses ! (→ Quel, cit. 8). || Tant de noble orgueil, et dans la vie une admiration presque servile (cit. 2) des supérieurs.
(Après une négation ou une interrogation). || De la vie elle n'avait eu tant de peur (→ Protester, cit. 1). || Ne faites pas tant de façons (→ aussi Fla-fla, cit. 1; 1. foin, cit. 7). || « À quoi bon tant de haine, Et faire tant de mal, et prendre tant de peine… ? » (cit. 19).
REM. 1. Dans certains emplois, il est impossible de distinguer la valeur intensive (« tellement de… ») de la valeur comparative (« autant de… ») avec ellipse du second terme.
2. L'attribut suivant tant de qqch. peut s'accorder avec le complément (|| « Tant de richesse et bien belle », Proust, Jean Santeuil, t. I, p. 330, in Grevisse) ou se mettre au masc. sing. (|| « Tant d'indifférence et de coquetterie ne semblait pas aisé à comprendre », Musset, Croisilles, in Grevisse).
10 Tant d'esprit devait-il s'y employer ? L'objet valait-il tant de soins, et une attention si soutenue ?…
Valéry, Variété I, p. 173.
Il n'en faudrait pas tant pour faire causer (→ Recommencer, cit. 5). || On en dit tant ! — ☑ Loc. fam. Vous m'en direz tant ! : je ne suis plus étonné après ce que vous m'avez dit ! || « Votre Majesté m'en dira tant ! » (Fournier, in Guerlac).
11 On demanda à Roma pourquoi elle aimait coucher avec Dominguez (…) elle dessina dans les airs un corps gigantesque : « Parce qu'il y en a tant ! » dit-elle.
S. de Beauvoir, la Force de l'âge, p. 361.
Vx. || Tant et de si (cf. La Bruyère, Discours à l'Académie)… et de tels.On dit encore tant et tant de…
b Vx. (Suivi d'un adj. ou d'un adv.). 1. Si (→ Assez, cit. 49; religieux, cit. 5). || « … une de ces rencontres tant flatteuses à mon orgueil » (Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. VI, p. 189).REM. Avec un participe passé à valeur adjective, tant s'emploie en concurrence avec si. || Ces fleuves tant vantés (→ Rivière, cit. 1; et aussi solidité, cit. 1). || L'écriture tant désirée (→ Paquet, cit. 9).
(Suivi de à et l'infinitif). || « Fer jadis tant à craindre… » (→ Parade, cit. 1).
c Tant soit peu : si peu que ce soit, que la quantité que vous imaginez soit aussi petite que possible (cf. Le moindrement). Peu (cit. 52, 53 et 55).
(1538). Tant s'en faut : il s'en faut de beaucoup. Falloir (cit. 6 et supra).
C Littér. (Introduisant la cause). || « Rien ne touche son goût, tant il est difficile » (cit. 26) : il est si difficile que rien… Tellement. || Les armées furent dans l'inaction (cit. 1), tant le froid fut violent (→ aussi Attendrir, cit. 17; 1. las, cit. 5; 1. lever, cit. 5; précédent, cit. 4; séparer, cit. 14).
12 Nous nous vîmes trois mille en arrivant au port,
Tant, à nous voir marcher avec un tel visage,
Les plus épouvantés reprenaient de courage !
Corneille, le Cid, IV, 3.
13 Ce caractère profondément pacifique, bienveillant, de la Révolution, semble un paradoxe aujourd'hui. Tant on ignore ses origines, tant sa nature est méconnue, tant la tradition, au bout d'un temps si court, se trouve déjà obscurcie !
Michelet, Hist. de la Révolution franç., Préface de 1847.
Loc. Tant il est vrai que…, sert à introduire une remarque d'ordre général, une vérité qui découle de ce qui vient d'être dit.
REM. 1. La proposition introduite par tant… se trouve parfois avant la principale. « Tant était pressant mon appétit, j'allais de préférence au plus ardu » (cit. 1).
14 En pareille construction, la causale vient généralement en seconde place, soit parce que la proposition initiale semble plus importante et occupe d'abord la pensée, soit parce qu'elle nécessite une explication (…) On trouve parfois la causale placée en tête : « Et alors, tant les gens les plus sincères sont mêlés d'hypocrisie… mes parents déplorèrent… le mariage de Swann » (Proust, Swann, I, 216); ce rangement, qui laisse l'esprit en suspens (…) a une réelle valeur stylistique (…) Notons enfin que la causale peut être intercalée dans le corps de l'autre proposition : « Les serpents… semblaient pulluler, et tant ils étaient nombreux, sortir des murs naturellement » (Flaub., Salamm., XIII, p. 323)…
G. et R. Le Bidois, Syntaxe du franç. moderne, §1453.
15 Tant cette affaire fait de bruit, on retiendra bien plus l'infraction à la résistance que la résistance elle-même.
Gide, Journal, 15 mars 1931.
2. Dans le langage parlé populaire, on trouve ce tour employé avec que. || « On l'entend de chez nos voisins, tant qu'elle parle bien » (Colette, la Chatte, p. 170, in Damourette et Pichon). REM. N. B. C'est une personne du peuple qui parle.
———
II (Nominal, exprimant une quantité qu'on ne précise pas mais qui est supposé définie, déterminée).
1 (V. 1370; employé seul). || Donner, prendre, prêter, rendre… tant. || Être payé à tant par mois, à tant la page. || Demander tant d'une chose, tel prix, telle somme… || Ça fait tant, tel prix.Tant pour cent, pour mille (→ 1. Marc, cit.). Pourcentage.
N. m. (1882, Zola, Au Bonheur des dames). || Toucher un tant pour cent sur une vente ( Commission); consentir un tant pour cent. Rabais, remise; et aussi tantième.
16 Tant pour les coups de fouet qu'il reçut à la porte !
César ! tant pour l'amen ! tant pour l'alléluia !
Tant pour la pierre où vint heurter sa tête morte !
Tant pour le drap rougi que sa barbe essuya !
Hugo, les Châtiments, I, VIII, III.
17 (…) il répartissait les sommes que produisaient au Trésor les impôts dits indirects en un tant pour cent de chaque cote individuelle.
Balzac, les Employés, Pl., t. VI, p. 880.
17.1 Il prenait des photos des baigneurs, il les développait et la semaine suivante il les apportait et disait : « Ça fait tant ».
Jean Ferniot, Pierrot et Aline, p. 178.
Vx. || … et tant de… (suivant un nombre) : et quelques. || Vingt et tant de francs.
2 Tant de… || Tant de lieues, tant de degrés (→ 1. Point, cit. 5; et aussi impôt, cit. 8).
18 La vie, les êtres, les objets, ont toujours un support arithmétique, autrement dit, tu mesures tant de centimètres, tu pèses tant de kilogrammes, tu as tant de litres de sang, etc…
M. Aymé, Maison basse, XX.
N. m. || Le tant : tel jour du mois. Quantième (→ Tantième, cit., Aymé). || Supposons que vous me disiez : « J'ai rendez-vous avec Monsieur Untel, le tant, pour telle affaire… » — ☑ Loc. Tant et plus : la quantité dont on parle, qu'on connaît ou qu'on imagine, et plus encore. Beaucoup.
19 J'eus aussi des visites de Genève tant et plus.
Rousseau, les Confessions, XII.
Vx. || Entre tant (cf. anc. franç. entretant « cependant ») : entre temps (cf. Thérive, Henriot, in Grevisse, §854).
———
III (Servant à exprimer une comparaison, à confronter deux termes).
1 Tant… tant… (marquant l'égalité, employé le plus souvent avec le verbe valoir, répété ou non).Prov. Tant vaut l'homme, tant vaut la terre.
20 Salvan le disait avec justesse : tant valait l'instituteur primaire, tant vaudrait l'enseignement (…)
Zola, Vérité, I, IV.
21 Tant nous leur prêtons aux personnages authentiques, tant vaut l'œuvre.
Valéry, Variété I, p. 169.
2 (Déb. XIIIe). || Tant que…, tant que (marquant l'égalité, dans des propositions négatives ou interrogatives; ce dernier emploi est vieilli ou littéraire). Autant. || Vous ne me plaisez (cit. 3) pas tant qu'elle. || Plus (cit. 7) qu'on ne le croit, mais pas tant qu'on le dit. Moins. || Les mères ne souhaitent rien tant pour leur fils que le mariage (cit. 14; → aussi Aube, cit. 10).Pas tant d'intelligence (cit. 12) que d'énergie.L'intimité n'est pas tant le bonheur parfait que le dernier pas pour y arriver (cit. 32). || Non tant… que… (→ Malédiction, cit. 6). || Non point tant… que parce que (cit. 7; → aussi Remontrance, cit. 3; saccadé, cit. 4).
Vx, régional (avec un adj.). || « Ce ne sont pas de mauvaises gens, dit-elle, pas tant fourbes que patelins » (Sand, le Marquis de Villemer, VIII).
Tant que… (en phrase affirmative). Autant. || Tant qu'il vous plaira (→ Affaire, cit. 84). || Tant qu'il nous plut (→ Recoucher, cit. 1).Tant qu'il veut, qu'il peut, qu'il voudra… (→ Ravauder, cit. 4; 1. rayon, cit. 10).Fam. || Tant qu'il peut, pouvait… : beaucoup, énormément. || Il frappait tant qu'il pouvait (cf. fam. Tout ce qu'il pouvait). || « Myope tant qu'il pouvait » (→ Porteur, cit. 9).Fam. || « Il pleut tant qu'il peut » (Littré), ça pleut tant que ça peut.
Tant que ça : tellement. || Dis-moi pourquoi tu tiens à lui tant que ça (→ Petit, cit. 13).
22 — Oh ! je sais beaucoup de choses.
— Tant que ça ?
Valery Larbaud, Enfantines, « Rose Lourdin ».
Si tant est que… (suivi du subjonctif) : s'il est vrai que…, en admettant que… (« sert à exprimer une supposition qu'on fait avec l'arrière-pensée qu'elle n'est guère acceptable », Grevisse). → Force, cit. 59; inexpliqué, cit. 2.
23 Voilà de l'argent qui n'est guère propre, si tant est qu'il y en ait qui le soit.
O. Mirbeau, le Journal d'une femme de chambre, II.
24 Ils devraient (…) estimer que Rousseau n'a rien fait de plus sage; si tant est que son influence ait été pernicieuse (…) si tant est qu'il ait jamais eu des enfants.
Gide, Journal, 22 févr. 1942.
Tous tant que… (suivi du verbe être au pluriel) : tous, autant qu'il y en a, en n'oubliant personne. Tous. || Tous tant que nous sommes (→ Cagotisme, cit.; chance, cit. 4; minute, cit. 2). || Tous tant que vous êtes (→ Grand, cit. 33).
25 — Voyons un peu, quelle idée vous faites-vous de nos devoirs, à tous tant que nous sommes ?
A. de Vigny, Chatterton, III, 6.
3 Loc. (Déb. XVIIe; lat. in tantum quantum). En tant que… : dans la mesure où…; en considérant, dans leur ensemble, les éléments seuls qui sont définis par la proposition complément. || L'entendement… en tant qu'il invente il s'appelle esprit, en tant qu'il juge il s'appelle raison (cit. 5; → aussi Société, cit. 5). || La loi est la raison humaine, en tant qu'elle gouverne (cit. 34) tous les peuples de la terre.En tant que (suivi d'un participe présent). → Moment, cit. 32. — (Devant un n.). Considéré comme; en qualité de. || L'individu en tant que créature (→ Opposer, cit. 17); le cinéma en tant qu'art (→ 2. Plan, cit. 8). || Avoir telle chose en tant que principe, base… Pour (I., 3.).
26 En tant qu'hommes, animaux sociables, ils aspirent à s'enrôler.
M. Barrès, les Déracinés, V, p. 125.
4 (Déb. XIIIe; anc. franç. tant… comme, courant jusqu'au XVIe). || Tant… que… : aussi bien que. || La liberté, tant civile que politique (→ Gouvernement, cit. 32). || Tant secoureurs (cit. 2) que secourus.
Tant… que… (coordonnant deux termes de même fonction : modalités, circonstances, causes, etc.). || Tant dans… que dans… (→ Filiation, cit. 3). || Tant par… que par… (→ Jacquot, cit.).
27 (…) ce qui m'a peut-être le plus frappé (…) c'est la conscience avec laquelle chacun, tant juges qu'avocats et jurés, s'acquittait de ses fonctions.
Gide, Souvenirs de la cour d'assises, Rouen, mai 1912, in Souvenirs, Pl., p. 619.
27.1 (…) des ouvrages consacrés à cette science par différents techniciens tant de l'Antiquité que modernes.
R. Queneau, Loin de Rueil, p. 171.
(1872). Cour. Tant bien que mal : ni bien ni mal, médiocrement. Cahin-caha, couci-couça, difficilement (→ Journal, cit. 8; massacre, cit. 6; profond, cit. 16; recaler, cit.). || Il s'y efforce tant bien que mal.Rare. || Tant mal que bien.
28 Les choses vont ainsi, tant bien que mal et plutôt bien que mal (…)
G. Duhamel, Chronique des saisons amères, III, VI.
Vx. Tant plus que moins : à peu près, approximativement.
5 Tant qu'à… a (Suivi d'un nom, d'un pronom; tour fautif, confusion par métathèse avec quant à…). || « Oh ! tant qu'à toi, le cousin… » (Sand, les Maîtres sonneurs, XXIX, in Damourette et Pichon).
29 — Tant qu'à moi, tant petit et mal foutu que je suis, je porte encore un curon de cent kilos au grenier (…)
H. Barbusse, le Feu, XIV.
b Tant qu'à… (suivi de l'infinitif, remplace dans l'usage courant à tant faire que de…; → ci-dessus, I., A., 3.). || Tant qu'à faire : puisqu'il faut faire qqch. (→ ci-dessus, I., A., 2., REM. 2). || Tant qu'à faire, autant s'amuser.
30 (…) tant qu'à m'ennuyer (…) je préfère que ce ne soit pas avec M…
Gide, Journal, 16 mai 1905.
31 Tant qu'à être innocent, il vaut mieux l'être tout à fait.
M. Aymé, Travelingue, XIX.
REM. C'est un petit bourgeois qui parle.
31.1 Tant qu'à penser à l'amour, mieux vaut y penser sérieusement, pas vrai ? on n'est tout de même plus d'âge à être amoureuse d'un fantôme (…)
M. Aymé, Maison basse, XIX, p. 243.
32 Tous les défenseurs de la correction stricte proscrivent cette construction (…) il y a Faguet, pour qui cette façon de dire n'est ni française ni réductible à une syntaxe quelconque (…) il y a Martinon, qui l'appelle « une horreur »; il y a Abel Hermant, qui la qualifie d'« abominable » (…) La langue populaire a ses raisons, que le purisme ne connaît point. A-t-elle si grand tort quand elle contracte — en la déformant (…) — cette construction classique (à tant faire que [de] s'engager) et quand elle la réduit à « tant qu'à s'engager » ?
M. Grevisse, Problèmes de langage, t. II, p. 130-132.
Fam. (Altér. de à tant faire que de…). || Tant qu'à faire de…
32.1 (…) Jeannot-Lapin, tant qu'à faire d'être mangé, préférerait, tout bien pesé, cette sauce et ce piment rouge.
F. Mauriac, le Nouveau Bloc-notes 1958-1960, p. 84.
6 Loc. (XVIe). Tant mieux; tant pis. a (Sens originel). || Tant mieux, s'emploie pour se féliciter d'une nouvelle qui aurait pu être mauvaise (→ Culbuter, cit. 3.3), d'une bonne chose qui arrive comme par hasard (→ Franc-parler, cit. 1) ou qui, dans une autre circonstance, serait mauvaise (→ Ouvrir, cit. 9).Vieilli. || Tant pis : ce sera d'autant plus grave, plus dangereux. || « Si vous ne vous rendez, tant pis pour vous » (→ Après, cit. 9, Molière). || « Mais tu seras armé (cit. 19) de pied en cap. — Tant pis ! »
33 Pour le méchant complet, et cette perfection hideuse existe, Tant pis pour les autres signifie Tant mieux pour moi.
Hugo, l'Homme qui rit, II, I, IX.
(En emploi adjectif). || Le docteur, le médecin Tant-Pis (→ Confrère, cit. 1) : celui qui interprète tout en mal. || Le docteur Tant-Mieux, qui est trop optimiste.
34 On reprochait à M. de… d'être le médecin Tant-Pis. « Cela vient, répondit-il, de ce que j'ai vu enterrer tous les malades du médecin Tant-Mieux. Au moins, si les miens meurent, on n'a point à me reprocher d'être un sot ».
Chamfort, Caractères et anecdotes, « Tant pis, tant mieux ».
34.1 Comment ne serait-il pas un docteur tant pis et, en fin de compte, un pessimiste endurci ?
M. Aymé, Maison basse, XX, p. 264.
b Tant pis, exprime la résignation ou même l'indifférence envers une mauvaise nouvelle, un événement fâcheux (→ Ravaler, cit. 9). || Ma foi, tant pis ! (→ Marché, cit. 6).Tant pis pour vous : c'est ennuyeux, c'est dommage (mais vous l'aurez voulu). Cf. C'est bien fait pour vous (→ Idéalisme, cit. 6). || Tant pis si…
35 Où tu ne peux pas dire : tant mieux, dis : tant pis. Il y a là de grandes promesses de bonheur.
Gide, les Nourritures terrestres, II.
(V. 1200). Vx. Tant plus : d'autant plus (cf. Rousseau, in Littré).Vx ou régional. || Tant plus… tant plus; tant plus… tant moins : plus… plus (moins)…
36 Tant plus le chemin est long dans l'amour, tant plus un esprit délicat sent de plaisir.
Pascal, Disc. sur les passions de l'amour.
Pop. || Tant plus que…
37 (…) Joseph disait avec une joie sauvage : — Faut qu'il souffre (…) tant plus qu'il souffre, tant plus que le sang est bon au goût (…)
O. Mirbeau, le Journal d'une femme de chambre, IX.
37.1 Il lui recommande encore de dire des chapelets par dessus, tant plus qu'elle pourra.
G. Chevallier, Clochemerle, p. 41.
Rare. || Tant plus… que plus…
37.2 — Un livre est toujours une collaboration, et tant plus le livre vaut-il, que plus la part du scribe y est petite, que plus l'accueil de Dieu sera grand.
Gide, Paludes, Pl., p. 89.
(V. 1175, tant seument). Vx. Tant seulement (cf. Voiture, La Fontaine, in Hanse, p. 240).
38 — Il ne m'a tant seulement point vue, le mignon ! dit Nanou en revenant.
Balzac, Eugénie Grandet, Pl., t. III, p. 548.
39 Ah, la vérité ! Que dis-je, la vérité ! (…) non, mais tant seulement un millionième de vérité, comme c'est difficile à dire, et qu'on vous le fait payer.
Ed. et J. de Goncourt, Journal, 28 oct. 1887, t. VII, p. 164.
tableau Principales interjections.
———
IV (V. 1190). Tant que… : aussi longtemps que…, pour autant que telle condition subsiste, que telle durée ne soit pas achevée (→ Faire, cit. 46; lutter, cit. 7; misère, cit. 14; nom, cit. 22; prévenir, cit. 23; rétif, cit. 1). || « Il soutenait ses ministres, tant qu'ils avaient la majorité » (cit. 3). || Tant qu'on est seul on ne peut être soi (cit. 5). || Choses qui paraissent impossibles (cit. 5) tant qu'on ne les a pas tentées. || « Et nul ne se connaît tant qu'il n'a pas souffert » (→ Apprenti, cit. 9).Tant qu'un être vit (→ 1. Calcul, cit. 4), tant que tu vivras (→ 1. Gens, cit. 23). || Tant qu'il y aura des hommes sur la terre (→ Mien, cit. 27). — ☑ Fam. Tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir.Pop. || Jusqu'à tant que… (→ Jusque, cit. 56) : jusqu'à ce que (→ Languissant, cit. 5).Vx. || Tant que… (suivi du subjonctif) : jusqu'à ce que… || « Versez, versez toujours, tant qu'on vous dise assez » (Molière, le Bourgeois gentilhomme, IV, 1). — ☑ Fam., iron. Tant que tu y es, que vous y êtes : pendant que vous y êtes, n'hésitez pas.
40 — Il faut qu'il prenne des leçons d'équitation… — Mais oui, bien sûr ! et des leçons de danse, tant que tu y es !
F. Mauriac, le Sagouin, II.
DÉR. Tantet, tantième, tantinet, tantôt.
COMP. 2. Partant, pourtant.
HOM. Tan, taon, temps.

Encyclopédie Universelle. 2012.