préjuger [ preʒyʒe ] v. tr. <conjug. : 3>
• XV e « juger qqn par conjecture »; lat. præjudicare
I ♦
1 ♦ Vx ou littér. Porter un jugement prématuré sur (qqch.). Je ne veux point préjuger la question. — Prévoir au moyen des indices dont on dispose. Autant qu'on peut le préjuger.
2 ♦ Dr. Prendre une décision provisoire sur (qqch.), en laissant prévoir le jugement définitif.
II ♦ V. tr. ind. (plus cour.) PRÉJUGER DE : porter un jugement prématuré sur (qqch.); considérer comme résolue une question qui ne l'est pas. « Sans préjuger de votre réponse » (R. Rolland). À ce qu'on en peut préjuger.
● préjuger verbe transitif (latin praejudicare, juger préalablement) Littéraire. Prévoir d'avance, par conjecture, porter un jugement prématuré : Je ne veux pas préjuger la question. En droit, prendre une décision ou émettre une opinion qui implique ou qui semble impliquer le jugement final. ● préjuger (difficultés) verbe transitif (latin praejudicare, juger préalablement) Conjugaison Comme juger. Le g devient -ge- devant a et o : je préjuge, nous préjugeons ; il préjugea. Construction Préjuger quelque chose / préjuger de quelque chose. Les deux constructions sont désormais admises. Préjuger qqch est plus soutenu, préjuger de qqch plus courant. Remarque Préjuger est à l'origine un verbe transitif (sans rien préjuger). Dès le XIXe s., sous l'influence de juger de et de présumer de, il s'est construit de plus en plus fréquemment avec la préposition de (il ne faut préjuger de rien). Cette construction a fini par s'imposer. ● préjuger (synonymes) verbe transitif (latin praejudicare, juger préalablement) Littéraire. Prévoir d'avance, par conjecture, porter un jugement prématuré
Synonymes :
- augurer
- présager
- présumer
● préjuger
verbe transitif indirect
Se faire à l'avance une idée de ce que sera quelque chose : Vous préjugez de sa réponse.
préjuger
v. tr. indir. Préjuger de.
d1./d Donner prématurément une opinion sur qqch. Préjuger d'une question.
d2./d Conjecturer.
⇒PRÉJUGER, verbe trans.
A. —Empl. trans. dir. Préjuger qqc.
1. DR. Prendre, avant le jugement définitif, une décision provisoire ou émettre une opinion qui laisse prévoir l'arrêt final. La cour a préjugé cela, quand elle a ordonné (Ac.). La Convention eut beau voter une réserve et dire qu'elle ne préjugeait pas si elle jugeait Louis XVI ou si elle prononçait une mesure de sûreté. Elle se dérobait alors devant ses propres principes et tentait de camoufler, par une hypocrisie choquante, sa véritable entreprise qui était de fonder le nouvel absolutisme (CAMUS, Homme rév., 1951, p.152).
— P. ext., vieilli, littér. Juger, décider d'avance; porter un jugement prématuré sur une question sans avoir tous les éléments nécessaires. Je ne veux point préjuger la question, j'attendais pour la résoudre les renseignements qui m'ont été promis (Ac. 1835-1935). Je ne pourrais reparaître dans l'Assemblée que pour demander l'amnistie pleine et entière [1872] (...). Un vote hostile préjugerait la question (HUGO, Actes et par., 3, 1876, p.289):
• 1. Le fond de tout, dans le conflit algérien, c'est que la pensée du général de Gaulle ne recoupe pas celle des hommes du G.P.R.A. Il ne sait pas ce que sera l'Algérie dans vingt ans. Il ne préjuge rien.
MAURIAC, Nouv. Bloc-Notes, 1961, p.314.
♦Absol. Je connais encore des personnes chagrines qui supposent qu'on leur donne un secret pour les induire en erreur (...). Or, des mains de ces personnes-là, mes livres tombent comme feuilles mortes. Je ne reherche qu'un public qui ne préjuge pas, qui ne se hérisse pas, qui ne se mette pas en garde (COCTEAU, Poés. crit.II, 1960, p.17).
2. Prévoir par conjecture en fonction des indices dont on dispose. Cela arrivera ainsi autant qu'on le peut préjuger (Ac.). Il connoît tous ses champs, sait ce qu'ils ont rapporté, et préjuge ce qu'on doit y semer (CRÈVECOEUR, Voyage, t.1, 1801, p.284). À l'heure présente (je me garde de préjuger l'avenir) (RENAN, Drames philos., Prêtre Némi, 1885, III, 1, p.568). Nous ne pouvons préjuger les desseins de Dieu (HUYSMANS, En route, t.1, 1895, p.125).
B. —Empl. trans. indir. Préjuger de qqc.
1. Porter un jugement prématuré sur quelque chose. On ne peut pas décrire l'aspect de l'objet sans préjuger de sa nature intime et de son organisation. La forme n'est plus tout à fait isolable de la matière (BERGSON, Évol. créatr., 1907, p.196):
• 2. Je me souviens toujours que la première fois
Où j'entendis sonner un mot de votre voix,
Je préjugeai fort bien de votre caractère...
M. DE GUÉRIN, Poés., 1839, p.65.
2. Prévoir quelque chose par conjecture. Autant qu'on puisse en préjuger. Il combat et sert la patrie et l'espèce humaine dans les temps présents sans vouloir préjuger de l'éternité (VIGNY, Journal poète, 1834, p.1013). Par le passé récent, nous pouvons préjuger de l'avenir. Les masses soulevées ne s'arrêtent point toujours à la voix de ceux qui les ont mises en mouvement (CLEMENCEAU, Iniquité, 1899, p.218).
REM. Préjugement, subst. masc., vieilli, rare. ,,Action de préjuger`` (LITTRÉ).
Prononc. et Orth.:[], (il) préjuge [-]. Ac. 1694, 1718: pre-; dep. 1740: pré-. Étymol. et Hist.1. 3e quart XVes. «juger (quelqu'un) par conjecture, sans examen» (GEORGES CHASTELLAIN, Chron., éd. Kervyn de Lettenhove, t.5, p.162); 2. 1570 [éd. 1578] «conjecturer, présumer (quelque chose)» (G. HERVET, trad. La Cité de Dieu, I, 259a, B, d'apr. H. VAGANAY ds Rom. Forsch. t.32, p.132); 1694 préjuger de (Ac.); 3. 1606 dr. intrans. «rendre un jugement interlocutoire avant l'arrêt final» (NICOT); 4. av. 1778 «juger, décider (quelque chose) avant d'avoir pris connaissance de la chose dont il s'agit» (VOLTAIRE, Fragm. sur l'hist., XXIV ds LITTRÉ). Francisation, d'apr. juger, du lat. praejudicare, v. préjudicier. Fréq. abs. littér.:108.
préjuger [pʀeʒyʒe] v. tr. [CONJUG. bouger.]
ÉTYM. XVe, « juger quelqu'un par conjecture »; lat. præjudicare, « juger (judicare) préalablement ».
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I V. tr. dir.
1 (1580). Vieilli ou littér. Porter un jugement prématuré sur (qqch.). || « Je ne veux point préjuger la question, j'attendrai pour la résoudre les renseignements qui m'ont été promis » (Académie). — Prévoir au moyen des indices dont on dispose. || « Cela arrivera, autant qu'on peut le préjuger, à ce qu'on peut préjuger » (Académie).
0.1 Mais, venons-en au grand reproche qu'on me fait d'avoir, en parlant de collaboration et de fidélité, préjugé l'avenir.
Camus, Actuelles II, Textes complémentaires, in Essais, Pl., p. 1754.
2 (1606). Dr. Prendre, avant le jugement définitif, une décision provisoire sur (qqch.), qui laisse prévoir la décision finale.
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II V. tr. ind. (plus cour.). || Préjuger de : porter un jugement prématuré sur (qqch.); considérer comme résolue, dans tel ou tel sens, une question qui ne l'est pas encore. || Autant qu'on peut (puisse) en préjuger. || Il ne préjugeait de rien.
1 Je suis allée au plus pressé en faisant transporter ici Mme de Saint-Selve. Je n'ai nullement entendu préjuger de votre décision. Je suis toute disposée à m'y ranger.
Pierre Benoit, Mlle de la Ferté, p. 208.
1.1 C'est moi qui, sans préjuger de votre réponse, lui ai conseillé de s'adresser à vous.
R. Rolland, Deux hommes se rencontrent, p. 124.
2 Tout ceci, en tout cas, doit nous apprendre à ne rien préjuger de ce qui concerne l'Algérie et à nous garder des formules toutes faites.
Camus, Actuelles III, p. 96.
REM. Cet emploi a longtemps été critiqué par les puristes.
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DÉR. Préjugé.
Encyclopédie Universelle. 2012.