professer [ prɔfese ] v. tr. <conjug. : 1>
• 1584; de profession (I)
1 ♦ Littér. Déclarer hautement avoir (un sentiment, une croyance). Professer une opinion, une théorie. « Le marquis professait une haine vigoureuse pour les lumières » (Stendhal). « Quoiqu'il professât pour la mémoire de son père une vénération toute filiale » (Gautier). — Professer que (et l'indic.). ⇒ proclamer. « elle professait que pour exprimer fortement une passion, il faut l'éprouver » (France).
2 ♦ (1738; d'apr. professeur) Vieilli Enseigner en qualité de professeur. « Le pensionnat où sa femme professait la musique » (Balzac). ⇒ enseigner. — Absolt, mod. Il professe à la Sorbonne. « Il venait de professer trois ans à l'École de guerre » (Romains).
● professer verbe transitif (de profession) Littéraire. Déclarer ouvertement une manière de penser, une opinion : Il professait un mépris souverain pour la vie familiale. Vieux. Enseigner une discipline dans un établissement scolaire ou universitaire : Il professait le grec à la Sorbonne. ● professer (homonymes) verbe transitif (de profession) ● professer verbe intransitif Vieux. Exercer la profession d'enseignant : Il a toujours professé à Orléans. ● professer (homonymes) verbe intransitif
professer
v. tr.
d1./d Déclarer, manifester ouvertement (une conviction, un sentiment). Professer une admiration exagérée pour... Professer la religion chrÉtienne.
d2./d (Cour. en Afr. subsah.) Vieilli Enseigner publiquement. Professer la chimie.
— Absol. Il professe à l'Université.
⇒PROFESSER, verbe trans.
A. —1. Déclarer, exprimer publiquement et hautement une opinion, une théorie. Les Grecs purent reconnaître combien le gouvernement républicain, lorsqu'il ne professe pas un grand respect pour les droits individuels, se change facilement en despotisme (FUSTEL DE COUL., Cité antique, 1864, p.449). C'est un lieu commun de comparer les théories philosophiques et la conduite de ceux qui les professent (CAMUS, Sisyphe, 1942, p.20). Beaucoup professaient tout haut l'admiration qu'ils éprouvaient à l'égard de Mussolini (DE GAULLE, Mém. guerre, 1954, p.26).
— En partic. Avouer, manifester publiquement des croyances religieuses, des opinions politiques. Les martyrs obéissaient-ils à la défense qui leur était faite par les empereurs de professer leur culte? (STAËL, Consid. Révol. fr., t.2, 1817, p.163). Le chef de l'État ne professe pas la religion de l'État; mais il faut, bon gré mal gré, qu'il lui rende cinq ou six fois par an un hommage public (ABOUT, Grèce, 1854, p.294). Si les membres du directoire secret insurrectionnel paraissent avoir adhéré aux idées de Babeuf et de Buonarroti, la plupart des conjurés ne professaient nullement le communisme (LEFEBVRE, Révol. fr., 1963, p.471).
♦Plais. Ce vieillard sec et maigre professait en matière d'habillement toute l'indifférence d'un propriétaire dont la valeur territoriale est cotée dans le département (BALZAC, Curé Tours, 1832, p.212). Une telle société ne doit s'occuper que de dîners et de festins! dit M. de Barvillier, et je ne verrais aucun mal à sa formation, si ceux qui en sont membres se bornaient à professer leur amour pour les truffes (KOCK, Compagn. Truffe, 1861, p.253).
— Empl. pronom. réfl. Exposer sa propre doctrine. Un cours de haute philosophie dans la bouche de Jésus se professant lui-même à un disciple fidèle (SAINTE-BEUVE, Port-royal, t.5, 1859, p.205).
♦[Le suj. désigne la qualité, la pensée, la discipline concernée] Être exprimé, exposé publiquement. La modestie, la grâce et l'humour, qui se contredisent sottement dès qu'ils se professent eux-mêmes et recommencent à exister quand ils ne pensent plus à soi, ne sont-ils pas à leur tour les très fragiles chefs-d'oeuvre du presque-rien (JANKÉL., Je-ne-sais-quoi, 1957, p.90).
— Empl. pronom. réciproque. Ils se firent l'un l'autre connaître que nonobstant la profonde admiration réciproque qu'ils se professent, ils maintiendraient tous deux leurs candidatures (ARAGON, Beaux quart., 1936, p.222).
2. Dire ouvertement, proclamer quelque chose.
— Professer que Horace, qui n'a guère que trois idées, serait bien surpris s'il entendait professer que la forme est inutile et n'est rien (VIGNY, Journal poète, 1828, p.887). V. proclamer B 2 ex. de Goncourt:
• ♦ ... l'école positiviste (...) rappelons-le, conteste catégoriquement la liberté du choix de l'auteur de l'acte criminel et professe qu'il a été victime d'une impulsion à laquelle il lui était impossible de se soustraire.
Traité sociol., 1968, p.218.
— Professer + inf. Vous qu'ils professent aimer, au moment d'éprouver peut-être la plus horrible scène, d'entendre dire à ma mère que mon attachement pour vous l'a conduite au tombeau —vous m'abandonnez (STAËL, Lettres L. de Narbonne, 1794, p.251). Je me sens et me sais en communion avec saint Paul sur tout ce qu'il considérait lui-même comme l'essentiel de sa pensée; je professe comprendre, et partager, sa foi dans le Christ (MARROU, Connaiss. hist., 1954, p.45).
B. —1. Vx. Exercer une profession, un art. (Dict. XIXe et XXes.).
2. Enseigner une matière, une discipline en qualité de professeur. Le cours d'arithmétique, professé par M. Guillard, dure depuis 8 heures et demie du matin jusqu'à 10 heures et demie (HUGO, Corresp., 1816, p.296). L'établissement connu sous le nom d'école de chant et de déclamation est supprimé...; les artistes y professant la musique font partie du conservatoire (Enseign. mus., 1, 1950, p.7).
— Au passif. [Le suj. désigne une discipline, une matière] Être enseigné. Aujourd'hui, tant de faits avérés, authentiques, sont issus des sciences occultes, qu'un jour ces sciences seront professées comme on professe la chimie et l'astronomie (BALZAC, Cous. Pons, 1847, p.121).
♦Empl. adj. du part. passé. Qui est enseigné. Il y a deux littératures: ... une littérature officielle, écrite, conventionnelle, professée, cicéronienne, admirative; l'autre orale, en causeries de coin du feu, anecdotique, moqueuse, irrévérente (SAINTE-BEUVE, Poisons, 1869, p.127).
— Absol. Enseigner. L'abbé Moreux, qui a professé toute sa vie, a noté que les punitions (donc l'indiscipline) augmentaient les jours de grande déviation magnétique consécutive à l'activité des taches solaires (MOUNIER, Traité caract., 1946, p.121). Alors seulement, professe le plus grand d'entre eux, Roger Bacon, «l'esprit est convaincu et il se repose dans l'évidence de la vérité» (HUYGHE, Dialog. avec visible, 1955, p.134). Paracelse professa à Bâle, s'y attirant une foule d'ennemis et de détracteurs (CARON, HUTIN, Alchimistes, 1959, p.38).
♦P. méton., péj., vieilli. Prendre une attitude, un ton solennel et pédant. Synon. pontifier. Le pédantisme des savants de Paris est tout en réticences (...). Placés par la maîtresse de la maison autour d'une table à thé (...) ils professent, mais c'est avec toutes les grâces du collège et toute la réserve de la politesse la plus prudente (STENDHAL, Mém. touriste, t.2, 1838, p.309). Elle professait, elle hochait la tête. Cependant, elle daigna s'expliquer plus clairement (ZOLA, Nana, 1880, p.1273).
♦[En incise] —(...) Et quelles sont les caractéristiques de cette nouvelle voiture? —Il y a encore peu de temps —professa Dussol —la retransmission se faisait aux roues par des chaînes (MAURIAC, Myst. Frontenac, 1933, p.129).
Empl. adj. du part. prés. L'esprit pédant, l'esprit professant et doctrinaire, les théories, les formules règnent là plus tyranniquement que partout ailleurs (GONCOURT, Ch. Demailly, 1860, p.140).
REM. 1. Professable, adj. Qui peut être professé, qui est professé. a) [Corresp. à professer A] À l'ordre légal ou écrit, le malentendu superpose un ordre non écrit ou implicite, lequel a pour effet (même s'il n'est pas ouvertement professable ni justifiable en droit) de rendre viable la coexistence des égoïsmes (JANKÉL., Je-ne-sais-quoi, 1957 p.164). b) [Corresp. à professer B] L'on crée à Paris des chaires de slave, de mantchou, de littératures aussi peu professables que les littératures du Nord (BALZAC, Cous. Pons, 1847 p.121). 2. Professant, subst. masc. a) Membre d'une Église ou d'une communauté protestante admis sur la profession de foi personnelle. (Dict. XXes.). b) Péj. Celui qui professe avec pédanterie. Il y a les professants qui pérorent, les noteurs qui écrivent au crayon sur les marges du livret (GONCOURT, Man. Salomon, 1867, p.156).
Prononc. et Orth.:[], [-fe-], (il) professe [-]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. 1. a) 1584 «avouer publiquement» (GUEVARRE, Epistres dorées, IV, trad. J. de Barraud, 128b d'apr. H. VAGANAY ds Rom. Forsch. t.32, p.136: ennemy juré et professé); b) 1681 «reconnaître hautement (une religion)» (BOSSUET, Hist., II, 5 ds LITTRÉ); 2. 1636 «exercer, pratiquer (un métier, un art)» (MONET). II. [1648 d'apr. BL.-W.3-5] 1731-38 «enseigner publiquement» (ROLLIN, Hist. anc., OEuv., t.XI, 2e part., p.781 ds LITTRÉ). I dér. de profession; dés. -er; cf. lat. profiteor, professus sum, profiteri «avouer hautement ou publiquement, déclarer, promettre» et se profiteri «se proposer; faire une déclaration (de candidature, de fortune...)». II dér. de professeur; dés. -er; cf. en lat. profiteri grammaticam, medicinam «enseigner la grammaire, la médecine» et, absol. profiteri «enseigner» d'apr. profiteri se medicum, grammaticum (v. ERN.-MEILLET). Fréq. abs. littér.:851. Fréq. rel. littér.:XIXes.: a) 1593, b) 959; XXes.: a) 1116, b) 1075.
professer [pʀɔfese] v. tr.
ÉTYM. 1584; de profession.
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I Littér. Déclarer hautement avoir (un sentiment, une croyance, une opinion habituelle). || Professer une religion (vieilli), une opinion, une théorie (→ Gourme, cit. 4). || Professer une doctrine et en pratiquer une autre est une indignité (cit. 3). || Ils ont professé l'unité de la patrie et sont morts pour elle (→ Indivisibilité, cit. 1). || Professer la bonté (→ Marotte, cit. 4). || Professer de l'admiration, la plus profonde admiration pour… (→ Endroit, cit. 18; idolâtre cit. 9).
1 Le marquis professait une haine vigoureuse pour les lumières : ce sont les idées, disait-il, qui ont perdu l'Italie (…)
Stendhal, la Chartreuse de Parme, I, II.
2 Quoiqu'il professât pour la mémoire de son père une vénération toute filiale (…)
Th. Gautier, le Capitaine Fracasse, I.
3 (Il) revendiquait pour le maître le droit de professer sur un même sujet deux opinions contradictoires (…)
France, l'Orme du mail, in Œ., t. XI, VII, p. 71.
♦ Professer que… (avec l'indic.). || Elle professait que pour exprimer fortement une passion il faut l'éprouver (cit. 23). || Professer qu'il n'y a d'aristocratie que par la culture (→ Inconvenance, cit. 3). ⇒ Proclamer.
4 Nous continuons à professer, en dépit des Allemands, que l'érudition n'a pas de patrie.
Fustel de Coulanges, Questions contemporaines, p. 26.
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II
1 (1636). Vx. Exercer (un métier, un art. [cit. 59], une science…).
2 (1738; d'après professeur). Vieilli. Enseigner en qualité de professeur. || Professer les mathématiques. ⇒ Enseigner (cit. 7).
5 (Phellion) dînait rue Notre-Dame-des-Champs dans le pensionnat où sa femme professait la musique (…)
Balzac, les Employés, Pl., t. VI, p. 934.
♦ Absolt. (Mod.). || Il professe à la Sorbonne. || Professer trois ans à l'École de guerre (→ Galon, cit. 5).
♦ Péj. Pontifier. || Ce personnage professe un peu trop.
Encyclopédie Universelle. 2012.