ravi, ie [ ravi ] adj. ♦ Qui est très content, heureux. ⇒ comblé, enchanté (cf. Bien aise). « Je suis ravie du bonheur que vous avez eu » (Mme de Sévigné). Vous m'en voyez ravi. Ravi de vous connaître. « Je suis ravi que ce soit à M. Puget que je doive ma disculpation » (Boileau). Un air ravi. ⇒ épanoui, radieux, rayonnant.
♢ N. m. Personnage de la crèche provençale, type du naïf un peu simple. « une mimique de ravi provençal » (Tournier).
⊗ CONTR. 1. Chagrin, navré.
● ravi Participe passé de ravir. ● ravi, ravie nom En Provence, personne naïve, crédule ; simple d'esprit.
ravi, ie
adj. Qui éprouve, qui manifeste un grand contentement.
⇒RAVI, -IE, part. passé, adj. et subst.
I. — Part. passé de ravir.
II. — Adjectif
A. — [Corresp. à ravir A]
1. Dérobé. Et nous voilà tous deux assis, un peu derrière, Moi, son bouquet ravi parant ma boutonnière (SAINTE-BEUVE, Poés., 1829, p. 108).
2. Enlevé à l'affection des siens, décédé. Cette existence [des morts] (...) consiste essentiellement en images, qui raniment à la fois les sentiments qu'inspire l'être ravi et les pensées qu'il suscita (COMTE, Catéch. posit., 1852, p. 186).
B. — [Corresp. à ravir B] Plongé dans le ravissement. C'est un souffrant, c'est un songeur, Sur qui la lueur éternelle Fait trembler sa vague rougeur. Il est là, l'âme aux cieux ravie (HUGO, Contempl., t. 2, 1856, p. 303).
— [P. méton.] Elle restait longtemps ainsi, dans un néant ravi, pénétrée d'un sentiment de soulèvement physique de toute sa personne, ayant l'illusion et l'impression d'une force qui l'enlevait du canapé où elle était assise, l'approchant de l'objet qu'elle semblait contempler au plafond (GONCOURT, Mme Gervaisais, 1869, p. 261). [En parlant du comportement de la pers.] Qui manifeste cet état. Elle avait joint les mains en une extase. — « Oh! je deviendrai sainte pour vous plaire », murmura-t-elle (...) dans l'attitude ravie d'une pieuse fille à qui l'archange Michel apparaîtrait (PÉLADAN, Vice supr., 1884, p. 322).
C. — [Corresp. à ravir C]
1. Élevé au-dessus de son état ordinaire, transporté hors de soi. Un nègre frisé, magnifique, regardait obstinément le bureau en riant de l'une à l'autre oreille (...). Il riait sans un mouvement du corps, comme un homme ravi, transporté (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Dimanches bourg. Paris, 1880, p. 333).
♦ Ravi de + subst. exprimant le sentiment qui provoque cet état. Il était ce jour-là couché sur le rivage Du fleuve dont les eaux reflétaient son image, Ravi d'étonnement, de peur et de plaisir (LAMART., Chute, 1838, p. 862). Elle me tenait la main pour grimper par les escaliers et les ruelles. J'entends son rire, au-dessus de moi, du côté du ciel. J'étais ravi de bonheur et je n'ai sûrement pas de tout ce jour-là touché la terre (GUÉHENNO, Journal « Révol. », 1937, p. 21).
— [P. méton.; en parlant du comportement de la pers.] Qui manifeste cet état. Pozzo continuait à gratter sa guitare en chantant très bas, l'air ravi, perdu dans une contemplation (ZOLA, E. Rougon, 1876, p. 304). Le sourire ravi, impersonnel, proche de la transe qu'ont les actrices sous les appels (ARNOUX, Roi, 1956, p. 249).
2. a) [En parlant d'une pers.] Qui éprouve un vif plaisir. Synon. charmé, content, enchanté.
— Ravi + compl. indiquant ce qui provoque ce plaisir
♦ Ravi de + subst. Marie-Jeanne est ravie de son costume et ne veut plus le quitter (T'SERSTEVENS, Itinér. esp., 1963, p. 181).
♦ Ravi de + inf. Mrs Norton ravie de quitter un insupportable mari aimait à se faire accompagner au théâtre, au bal, par Disraëli (MAUROIS, Disraëli, 1927, p. 72). V. ange ex. 25.
Ravi à l'idée de + inf. Père était ravi à l'idée de me voir épouser ce garçon d'avenir (TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p. 302).
♦ Ravi que + subj. Je suis ravi que tu me trouves injuste pour Baudelaire. Ce que j'en disais, c'était un peu pour te faire plaisir (RIVIÈRE, Corresp. [avec Alain-Fournier], 1906, p. 42).
♦ Ravi quand, ravi si. Il sera bien ravi si le Roi s'amuse fait fiasco (HUGO, Corresp., 1832, p. 514). Barthélemy reçut un ballot par le roulage. Et quand l'ayant ouvert il y trouva des livres (...) il fut le plus ravi des hommes (POURRAT, Gaspard, 1922, p. 163).
— Ravi de + subst. précisant le sentiment éprouvé. Ravi d'aise. Ce que je ne sais pas, c'est comment vous êtes parvenu, monsieur le comte, à frapper d'un si grand respect les bandits de Rome (...). Je vous avoue que Franz et moi nous en fûmes ravis d'admiration (DUMAS, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 591).
— Absol. Ma femme est ravie, gaie, émerveillée, heureuse, bien portante (HUGO, Corresp., 1831, p. 493):
• Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-là
Et tu marchais souriante
Épanouie ravie ruisselante
Sous la pluie
PRÉVERT, Paroles, 1946, p. 237.
— En partic. [Dans une formule de politesse] Ravi de vous connaître. Nana (...) s'avança vivement vers Rose Mignon (...). — Ah! chère madame, que vous êtes gentille!... Je tenais tant à vous avoir! — C'est moi qui suis ravie, je vous assure, dit Rose également pleine d'amabilité (ZOLA, Nana, 1880, p. 1167).
b) P. méton. Synon. comblé, épanoui, heureux, satisfait, rayonnant.
— [En parlant d'un attribut de la pers.] Car les femmes c'est toi désormais pour la vie, Pour moi, pour mon esprit et pour ma chair ravie (VERLAINE, Œuvres compl., t. 3, Élégies, 1893, p. 43). Son âme de juge (...) jubilait à la vue d'un mur, de la chose sourde, muette et sombre qui rappelait à sa pensée ravie les idées de prison, de cachot (A. FRANCE, Anneau améth., 1899, p. 79).
— [En parlant du comportement, d'une manifestation de la pers.] Qui exprime la joie, le plaisir. Sourire, rire, ton ravi; mine, voix ravie; exclamation, expression ravie. L'enfant apparaissait (...) derrière les tourbillons de buée blanche, l'air ravi, la bouche fendue par la joie d'avoir déchaîné cet ouragan (ZOLA, Germinal, 1885, p. 1414). Puis les feux d'artifice, les fougères de diamant épanouies dans le ciel (...). À chaque fois, le « ah! » ravi et enfantin de la foule (GREEN, Journal, 1946, p. 59).
— [En parlant d'un sentiment, d'une attitude] Qui s'accompagne, est mêlé d'un vif plaisir. Amusement, étonnement ravi; surprise, curiosité ravie. Sa conversation était plutôt reposante et n'allumait point en nous soit un vif désir de répondre et de contredire, soit une approbation ravie (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Portrait, 1888, p. 627). J'ai gardé souvenir ravi des quotidiennes salades de piments doux (GIDE, Feuillets d'automne, 1949, p. 1108).
— [En parlant d'un moment, d'une activité] Où l'on éprouve du plaisir, qui procure du plaisir. Tout allait donc au mieux pour nous et le matin de l'avant-veille de la date bénie put contempler mon réveil ravi (VERLAINE, Œuvres compl., t. 5, Confess., 1895, p. XIII). L'heure où l'on finit de déjeuner, lorsque l'arome du café brûlant caresse les digestions ravies (ZOLA, Paris, t. 1, 1897, p. 47).
III. — Subst. masc.
A. — Subst. masc. sing. à valeur de neutre. Je serais, savez-vous, la plus noble conquête Que femme, au plus ravi du rêve, eût jamais faite! (LAFORGUE, Complaintes, 1885, p. 133).
B. — Région. (Provence).
1. Simple d'esprit. Je sus écouter le fameux récit de la Chèvre de M. Seguin comme un ravi véritable (ARNOUX, Zulma, 1960, p. 233). Le numéro 2 de la Confédération générale des cadres, Paul Marchelli, n'avait pas contribué, lui non plus, à l'élévation du débat en laissant clairement entendre qu'il tenait le Premier ministre pour le « ravi » du village, c'est-à-dire un « illuminé » ou un « simplet » (L'Express, 1er oct. 1982, p. 84, col. 3).
2. ,,Naïf de la crèche provençale qui reste béat et extasié devant l'Enfant et que l'on représente avec une face épanouie aux joues rouges`` (C. MARTEL, Le Parler prov., Paris, éd. Rivages, 1988).
Prononc. et Orth. []. Att. ds Ac. 1694-1878. Fréq. abs. littér.:2 136. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 3 014, b) 3 699; XXe s.: a) 3 590, b) 2 369. Bbg. QUEM. DDL t. 15 (s.v. ravi-ravi), 20, 21.
ravi, ie [ʀavi] adj. et n. m.
ÉTYM. XIIIe, Rutebeuf; du p. p. de ravir.
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1 P. p. adj. ⇒ Ravir.
Encyclopédie Universelle. 2012.