trope [ trɔp ] n. m.
• 1554; lat. tropus, gr. tropos « tour, manière »
♦ Rhét. Figure par laquelle un mot ou une expression sont détournés de leur sens propre (ex. antonomase, catachrèse, métaphore, métonymie, synecdoque). « Et sur l'académie, aïeule et douairière, Cachant sous ses jupons les tropes effarés, [...] Je fis souffler un vent révolutionnaire » (Hugo).
● trope nom masculin (latin tropus, du grec tropos, manière) Dans la musique médiévale, composition obtenue par l'intercalation de paroles et de notes supplémentaires sur un fragment d'œuvre liturgique existante, sur une vocalise par exemple. Emploi d'un mot ou d'une expression dans un sens figuré. (Exemple : voiles pour bateaux.)
trope
n. m. RHET Figure qui implique un changement du sens premier, propre, des mots. Métaphore et métonymie sont des tropes.
⇒TROPE, subst. masc.
A. — RHÉTORIQUE
1. [Dans l'anc. rhét.] Figure par laquelle un mot prend une signification autre que son sens propre. Les Tropes sont certains sens plus ou moins différens du sens primitif, qu'offrent, dans l'expression de la pensée, les mots appliqués à de nouvelles idées (P. FONTANIER, Les Figures du disc., Paris, Flammarion, 1968, [1821], p. 39).
2. P. ext. Figure entraînant, pour un mot ou une expression, un changement ou un détournement de sens. C'est là [dans la vente du bétail] que le paysan, le maquignon, le fermier, déploient les ressources d'une éloquence pleine de tropes et de métaphores inouïes (SAND, Nouv. lettres voy., Mél., 1876, p. 265). La rhétorique, née de la nuance et du sens psychologique de l'impalpable, se prend à classer des tropes et des figures; « tropes de sens » ou « tropes de diction », ils ne sont jamais que des clichés et des formules stéréotypées (JANKÉL., Je-ne-sais-quoi, 1957, p. 10).
B. — PHILOS. Argument que les sceptiques grecs utilisaient pour démontrer l'impossibilité d'atteindre une vérité certaine et pour conclure en conséquence à la suspension du jugement. Plusieurs historiens pensent que les dix tropes, connus depuis longtemps, étaient le bien commun de l'école sceptique. Mais (...) c'est Aenesidème qui le premier les mit en ordre, les énuméra avec une certaine méthode, leur donna, en un mot, la forme qu'ils ont gardée (BROCHARD, Les Sceptiques grecs, p. 253 ds LAL. 1968).
C. — MUS. Ornement du plain-chant grégorien au moyen d'additions, de substitutions ou d'interpolations de textes musicaux ou poétiques. Le tr[ope], comme d'ailleurs la (...) séquence, constitue un genre nouveau au sein de la catégorie des formes liturgico-musicales qui a favorisé une évolution plus rapide, dans des directions nouvelles, de la composition monodique (Mus. 1976).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1740. Étymol. et Hist. 1. Ca 1375 rhét. tropus (RAOUL DE PRESLES, trad. Cité de Dieu, l. XVI, chap. 21, ms. Paris BN fr. 171 [ca 1380], f° 156 v°: autres figures qu'il appellent tropus); 1554 trope (J. DE MAUMONT, Les Œuvres de Saint Justin, f° 73 r° ds GDF. Compl.: exposant ce manger par trope et par figure); 2. 1842 philos. tropes des pyrrhoniens (Ac. Compl.); 3. 1852 mus. médiév. (COUSSEMAKER, Hist. harm. Moy. Âge, p. 225: la première [pièce que nous citons] est un fragment de « Kyrie » paraphrasé, appelé trope par quelques auteurs). Empr. au lat. tropus « trope (en rhét.); chant, mélodie », et celui-ci au gr. « tour, tournure; manière, façon »; en parlant du chant « mode, mélodie, ton, chant »; en rhét. « manière de s'exprimer, style », en partic. « figure de mots, trope ». Fréq. abs. littér.:34. Bbg. DU MARSAIS (C.). Traité des tropes: 1730. Paris, 1977. — KERBRAT-ORECCHIONI (C.). L'Énonciation de la subjectivité ds le lang. Paris, 1980, passim. — MOREL (M.-A.). DRALV. 1982, n° 26, p. 27. — PERRIN-NAFFAKH (A.-M.). Le Cliché de style en fr. mod. Lille; Bordeaux, 1985, p. 28. — REBOUL (O.). La Rhét. Paris, 1984, p. 42. — SENDEROVICH (S.). Rythm, trope, myth: the early poetics of Roman Jakobson. Semiotica. 1982, t. 40, pp. 347-370. — SOUBLIN (Fr.). Langages. 1979, n° 54, pp. 41-64. — TODOROV (T.). Tropes et figures. Mél. Jakobson (R.). The Hague, 1967, t. 3, pp. 2 006-2 023.
trope [tʀɔp] n. m.
ÉTYM. 1554; lat. tropus, grec tropos « tour, manière ».
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1 Rhét. Figure par laquelle un mot ou une expression sont détournés de leur sens propre. ⇒ Figure (de rhétorique); métaphore, métonymie, synecdoque (→ Enrichir, cit. 10). || Relatif aux tropes ⇒ 2. Tropique. || Étude des tropes ⇒ Tropologie.
1 Les tropes sont des figures par lesquelles on fait prendre à un mot une signification, qui n'est pas précisément la signification propre de ce mot (…) Ces figures sont appelées tropes du grec tropos (…) dont la racine est trepo, verto, je tourne.
C. du Marsais, Des tropes…, I, IV.
2 Et sur l'académie, aïeule et douairière,
Cachant sous ses jupons les tropes effarés,
Et sur les bataillons d'alexandrins carrés,
Je fis souffler un vent révolutionnaire.
Hugo, les Contemplations, I, VII.
2 (1842, Académie). Philos. Argument des sceptiques grecs en faveur de la suspension du jugement (tropes de suspension).
3 Mus. Ornement du chant liturgique au moyen d'additions et d'interpolations, dans la musique médiévale.
3 La musique naît avec le chant grégorien — premier langage musical européen — au VIe siècle en Italie, s'enrichit au couvent de Saint-Gall avec les séquences et les tropes de Notker et de Tutilo, se constitue d'une manière autonome avec les troubadours du Languedoc (…)
Denis de Rougemont, Lettre ouverte aux Européens, in Littérature de langue franç. hors de France, p. 596.
Encyclopédie Universelle. 2012.