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PIÉMONT
PIÉMONT

Le Piémont est la région de l’Italie septentrionale qui s’étend entre les Préalpes de la Ligurie, les Alpes occidentales dont l’un des versants est français, le val d’Aoste, la Suisse et la Lombardie. Ces zones frontières et leurs composantes culturelles ont exercé leur action, depuis les temps les plus reculés, sur l’art du Piémont, comme en témoignent les vestiges de la préhistoire ou des œuvres de l’époque romane; ces dernières résultent tout particulièrement de la situation du Piémont sur les voies de pèlerinage, et représentent en conséquence la culture des abbayes françaises et espagnoles liée à un substrat italien. Avec la période gothique se prolonge la vision réaliste, qu’alimentent par ailleurs les échanges avec les cours françaises (Bourgogne et Savoie). Le baroque avec Guarini et Juvarra est caractérisé par les importants apports de Rome et de Messine. Dans tous les cas, le Piémont a su imposer sa propre culture artistique, en relation avec la cour comme avec les exigences populaires. Toutefois, les œuvres d’art du Piémont se trouvent surtout, non pas dans les petits musées de province, mais dans les anciens palais institués galeries d’art par décision de la cour (par exemple, la galerie Sabauda de Turin), dans les châteaux (par exemple, Valentino et Venaria, fresques et stucs) et au palais royal (plafonds sculptés). Le musée municipal de Turin est un des plus riches d’Europe pour tout ce qui concerne les réalisations d’art appliqué (émaux, ivoires, sculptures), tandis que la Bibliothèque royale offre une exceptionnelle collection de dessins (Léonard de Vinci, XVIe siècle italien).

De la préhistoire au Moyen Âge

Les cultures préhistoriques ont laissé au Piémont des traces multiples, éparpillées près d’Alba et de Cuneo, dans la vallée de Suse et le val d’Aoste, et jusqu’à Novare. La présence d’une souche ligure pour les armes en silex du Moustérien est attestée dans la région de Biella, de Turin et de Lanzo. Des pierres polies du Néolithique ont été retrouvées à Chieri, Piobesi, Novalesa et Cesana. Des constructions lacustres sur pilotis existèrent à Ivrea, Rivoli, Avigliana et Trana, et on a découvert des témoignages de la période énéolithique (une pirogue, un palafitte, au musée archéologique de Turin).

L’ère protohistorique fut particulièrement importante dans les provinces de Novare et de Cuneo (nécropoles de Boves et de Chiusa Pesio). Les céramiques de la phase de Golasecca ne sont pas sans parenté avec les pièces aquitaines; la première période de l’âge du fer au Piémont correspond à la «civilisation de Hallstatt» de l’Europe centrale (le musée archéologique de Turin possède soixante-dix tombes, découvertes en 1885 à Castelletto Ticino, et de nombreux colliers). Aux VIe et Ve siècles, dans la seconde période du fer, dite de «La Tène», le Piémont accueille l’influence de la civilisation gauloise, ainsi qu’en témoignent une tombe découverte à Gravellona Toce, les nécropoles d’Ornavasso et les bracelets du val d’Aoste. La pénétration celtique a laissé des traces profondes, mais les habitations restent très proches des modèles ligures.

Dès la fin du IIe siècle avant J.-C., le Piémont reçoit des colonies romaines, mais cette implantation n’exclut pas la persistance de traits provinciaux et ligures, d’une culture liée à la France sud-orientale ainsi qu’à la culture gréco-ligure et étrusque. Le Piémont romain a produit des œuvres qui se distinguent par un authentique esprit populaire (musée archéologique de Turin, musées d’Aoste et de Suse). Les cités d’Augusta Praetoria (Aoste) et d’Augusta Taurinorum (Turin) conservèrent la configuration du camp militaire sur lequel elles furent édifiées; et c’est de même un plan régulier qui caractérisa Augusta Bagiennorum (Benevagienna, province de Cuneo) et Libarna (Serravalle Scrivia, avec son théâtre à trois couloirs). Après la victoire d’Anzio, Julia Taurinorum devint Julia Augusta Taurinorum et connut, surtout sous les Antonins, un regain de développement; puis elle subit l’invasion des hordes allemandes et souabes et des destructions aux IVe et Ve siècles, notamment celle de la ville d’Industria, près de Monteu (œuvres conservées au musée archéologique de Turin). Les plus importantes colonies romaines – qui se signalent encore par des ouvrages en maçonnerie – furent Augusta Praetoria (Aoste) et Segusium (Suse), puis Alba Pompeia et Eporedia (Ivrea).

Des portes qui donnaient accès à Augusta Taurinorum, la Porta Palatina demeure aujourd’hui; haute de trente-six mètres, elle a deux tours et une cour ajoutée (cavaedium ); de la Porta Decumana, à l’est, il subsistait deux tours qui furent incorporées dans les fondations du palais Madama.

La période chrétienne (Ve s. apr. J.-C.) est illustrée par des diptyques en ivoire (trésor de la cathédrale d’Aoste), représentant l’empereur Honorius; d’autres pièces, originaires de Desana dans la province de Vercelli, sont entrées en 1940 au musée municipal de Turin, en même temps que des spécimens d’orfèvrerie ostrogothe.

À la culture lombarde ressortissent les pièces trouvées près de Turin, dans les nécropoles de Lingotto, Testona, Vinovo, Carignano, ainsi qu’à Fontaneto Po, Borgomasino, Caluso et Ivrea. La période préromane est représentée par le baptistère de San Ponso Canavese, du Xe siècle, par le baptistère de Novare, qui remonte au milieu du Ve siècle, et, à Asti, par l’église San Secondo dotée d’une crypte datant du VIIe ou du VIIIe siècle.

Les arts roman et gothique

L’architecture romane a laissé de nombreux monuments, où s’affirme la préférence de l’époque pour la brique et la pietra serena ; elle est marquée par l’activité du moine Guglielmo da Volpiano, qui œuvra à San Benigno de Fruttuaria (à partir de 997) et à Saint-Bénigne de Dijon; il vécut à San Michele alle Chiuse, près de Turin, à Cluny et à Dijon, voyagea à travers la Basilicate et la Campanie, séjourna à Venise, mais il n’abandonna jamais son strict goût lombard. De cette époque datent de nombreux beffrois. Si l’église de Fruttuaria a été détruite, les églises qui subsistent se distinguent souvent par leur allure rustique, comme en témoignent l’église de Busano (1019), non loin de Fruttuaria, Santa Maria di Spinerano à San Maurizio Canavese (Cirié), San Giovanni ai Campi à Piobesi. San Secondo, à Cortazzone d’Asti (XIIe s.), est, en revanche, une élégante basilique à trois absides, et ses chapiteaux sont remarquables. San Nazzario, à Montechiaro d’Asti (1140 env.), offre une solution polychrome, avec du blanc et du gris. Mais la réalisation la plus étonnante est fournie, à l’entrée de la vallée de Suse, par la Sagra di San Michele, impressionnant bastion roman, avec ses portails sculptés; la construction en fut entreprise, après la destruction de l’église primitive, en 998, mais seuls la crypte et le vieux chœur existent encore: une troisième église, édifiée vers le milieu du XIIe siècle, subit jusqu’au XIVe siècle divers remaniements.

Consacrée en 1007, la cathédrale de Casale offre un atrium (XIe-XIIe s.) avec une voûte aux arcs entrelacés qui l’apparentent à certaines réalisations arabes et arméniennes. L’église de Santa Fede à Cavagnolo Po (seconde moitié du XIIe s.), avec ses très beaux chapiteaux intérieurs, ainsi que Santa Maria à Vezzolano et San Pietro à Cherasco annoncent déjà le style gothique.

Des constructions civiles de l’époque ont subsisté des fortifications et des tours (à Candia, Montalto Dora), des vestiges de murs d’enceinte (à San Benigno Canavese) et des vestiges de châteaux (dans la province de Cuneo). La sculpture préromane a laissé de bons témoignages, conservés au musée municipal de Turin; elle se signale aussi par le portail du Zodiaque, à la Sagra, signé vers 1120 par Nicholaus, artiste qui, sous le nom de Niccolo, œuvra aussi à Plaisance, à Ferrare et à Vérone; le cloître de Saint-Ours, à Aoste, abrite de remarquables chapiteaux (l’un d’eux est daté de 1133), comportant des représentations d’animaux et de monstres, ainsi que des scènes des deux Testaments à l’expressionnisme rude et hardi. Il faut évoquer enfin l’ambon de la basilique de San Giulio d’Orta.

La peinture romane, à défaut des fresques de la Novalesa endommagées par les restaurations du XIXe siècle, se signale par le cycle des histoires du Christ et des apôtres à la collégiale d’Aoste, par les fresques de San Michele à Oleggio, et, à la cathédrale de Novare, par le Christ en majesté avec les histoires de San Siro. Dans ces œuvres, la sensibilité romane s’exprime par des formes synthétiques et d’un effet puissant, tandis que, dans les fresques de San Maurizio à Roccaforte Mondovi, elle parvient à des effets à la fois intenses et subtils.

Les manuscrits enluminés – du IXe au XIe siècle – de Vercelli, Ivrea (Archivio capitolare ) et de Novare, ainsi que ceux qui sont conservés à la Bibliothèque nationale de Turin, témoignent de la vitalité des centres monastiques, tandis que les œuvres d’orfèvrerie, les argents, les ivoires et les bronzes révèlent les liens existant avec l’art ottonien et la culture de la vallée du Pô.

Les relations que le Piémont avait avec la Lombardie et avec la France méridionale, grâce à la pénétration angevine dans la province de Cuneo et le Monferrato, jouèrent un rôle déterminant dans le développement de l’art gothique. Parmi les églises gothiques du Piémont, on distinguera en particulier Sant’Andrea à Vercelli, Sant’Antonio de Ranverso (Avigliana), ainsi que la cathédrale d’Alba et l’abbaye de Staffarda; parmi les nombreux cloîtres de la région, il faut signaler pour sa beauté celui de Vezzolano. L’architecture civile et l’urbanisme s’organisent autour des châteaux, dans la vallée d’Aoste et au Canavese; des restaurations ont été effectuées à la période néo-gothique ; de cette époque datent les «refuges» et les magasins pour denrées (par exemple, à Candelo). Nombreuses sont les habitations gothiques comportant des frises et des fenêtres de type ogival; parmi les châteaux, il importe de signaler celui de Gaglianico, datant du XIVe siècle, qui fut complètement restauré au XVIe siècle par Charles d’Amboise: il se distingue par ses grosses tours et ses décorations en brique, ainsi que par un cortile à plusieurs rangs de loges; il sera doté au XVIIe siècle d’un parc dessiné par Le Nôtre.

La sculpture du gothique international est illustrée par un groupe remarquable conservé au musée municipal de Turin et provenant de la région d’Aoste; d’autres œuvres, et notamment des crucifix et des retables (musée municipal, Turin) et les groupes avec des «Vierge de pitié», révèlent une religiosité d’un pathétique intense. Des portails sculptés en terre cuite (par exemple, à Gattinara, à San Nazzaro Sesia et à Santa Maria della Guardia à Sale) relèvent d’un gothique tardif.

La peinture du XIVe siècle est représentée par d’importantes fresques à Vezzolano et à Montiglio dans le Monferrato (chapelle privée) par un cycle d’histoires de la Passion de culture giottesque, exécuté vers 1350.

Giacomo Jaquerio élabora son œuvre de 1401 à 1453 dans les domaines d’Amédée VIII; s’il connaît bien les miniaturistes et peintres véronais et lombards de la cour des Visconti, il sait faire de larges emprunts aux artistes bourguignons et savoyards, et parvient à imposer à Ranverso sa poétique personnelle, caractérisée par un esprit vigoureusement polémique et d’orientation populaire. Il crée tour à tour des réalisations relevant du gothique international et des œuvres empreintes d’un authentique réalisme (Montée au calvaire , à Ranverso). L’atelier de Jaquerio travaillera pour les châteaux de Fenis et de la Mante, et à Pianezza. Il importe de signaler des artistes tels que Beltrami, qui travailla à San Giovanni ai Campi, à Piobesi (1414), et Bapteur, miniaturiste suisse de la cour d’Amédée VIII.

L’époque gothique a légué d’importants reliquaires, des émaux et des ouvrages d’orfèvrerie (Aoste, Casale, musée municipal de Turin). Mais encore plus remarquable apparaît la sculpture sur bois: stalles d’Ivrea, actuellement au musée municipal; stalles à Saint-Ours d’Aoste; stalles de la cathédrale d’Asti (1477), de Baldino de Surso de Pavie; et le chœur monumental, jadis à Staffarda, actuellement au musée municipal de Turin, de style gothique flamboyant orné de branches entrelacées, œuvre où l’on décèle toutes sortes d’apports suisses allemands et bourguignons (que l’on compare l’arbre de Jessé avec celui du musée de Cluny à Paris), des passages classiques alternant avec des exécutions d’un réalisme extrême.

Renaissance et baroque

L’architecture de la Renaissance au Piémont révèle des influences toscano-romaines (cathédrale de Turin par Meo del Caprina, de 1491), la pression exercée par les réalisations lombardes, et des apports vénitiens (à Roccaverano, et à San Giorgio Canavese). Saluzzo se ressent de la présence de sculpteurs venus de la Chartreuse de Pavie et de l’œuvre de Matteo Sanmicheli (portails et monuments funéraires); Vercelli s’enorgueillit de maisons et de cours à portiques de style Renaissance (maison Alciati, cortile des Centaures).

Le Quattrocento est représenté au Piémont par le peintre Giovanni Martino Spanzotti, lié à la culture lombarde de Foppa et de Bergognone, aux maîtres ligures tels que Carlo Braccesco et Louis Brea, mais élaborant une œuvre personnelle, entre 1484 et 1524 à Vercelli, à Casale, à Chivasso et à Iurea. Cette dernière ville abrite un cycle de fresques représentant la Passion (après 1490), que l’on peut dater avec précision grâce au Triptyque de la pinacothèque Sabauda; le naturalisme exquis de Spanzotti intègre la perspective de la Renaissance dans une tendre lumière et il recrée la pureté de l’art des primitifs français.

L’œuvre de Macrino d’Alba est étroitement associée à la Renaissance de l’Italie centrale, tandis qu’avec Defendente Ferrari, qui exécuta notamment, entre 1501 et 1535, des polyptyques et des prédelles conservés à la pinacothèque Sabauda et au musée municipal, se mêlent les prolongements d’un gothique tardif et le maniérisme piquant de la Renaissance du Nord.

Tandis que Gerolamo Giovenone persiste dans cette voie, au XVIe siècle s’élabore au Piémont l’œuvre saisissante de Gaudenzio Ferrari. Né (probablement) en 1475, il travaille à Varallo à partir de 1507, et voyage à travers l’Italie centrale, entre Florence, Rome et l’Ombrie; il est ensuite à Arona, puis de nouveau à Varallo (au Sacro Monte, de 1517 à 1526-1528 env.); à côté de son œuvre d’architecte, ses réalisations comme sculpteur et peintre emportent l’adhésion par leur pathétique, leur humanité et l’efficacité de l’organisation narrative, ainsi qu’en témoignent les œuvres conservées à Vercelli, à Saronno et à Côme. La tradition qu’il inaugure sera prolongée jusqu’au XVIIe siècle par les Lanino et tout un atelier de peintres et de sculpteurs.

La fin de la Renaissance est illustrée par les réalisations à Turin, à Vercelli et à Novare de l’architecte Pellegrino Tibaldi (église des Santi Martiri), et par celles d’Ascanio Vittozzi; à côté de l’épisode populaire des Sacro Monte (Varese et surtout Varallo, où l’urbanisme et la peinture étaient unis dans l’œuvre de Gaudenzio Ferrari), ils représentent le moment actif de la Contre-Réforme, avec le peintre Guglielmo Caccia, dit Moncalco, Arbasia et Ricci de Novare.

Le baroque définit, au XVIIe siècle, une des architectures les plus typiques du Piémont, grâce à l’élan donné par la cour Sabauda de Charles-Emmanuel Ier. À Ascanio Vittozzi, qui travailla au sanctuaire de Vicoforte, à la plazza Castello et au Monte dei Capuccini à Turin, succèdent dans la capitale Carlo et Amedeo de Castellamonte, urbanistes de premier ordre, avec lesquels collaborèrent des stuccateurs de Lombardie et du Ticino pour les intérieurs des églises et des châteaux.

Amedeo travailla, entre 1630 et 1660, au château du Valentino, puis au château de la Venaria reale (1660), tandis qu’il faut attribuer à son père la piazza San Carlo et le Palazzo reale.

Le style des Castellamonte se reflète dans l’urbanisme de la ville (via Pô) et dans les constructions civiles (palais de la piazza San Carlo, hôpital San Giovanni), et influença maints architectes et sculpteurs (Morello, Costaguta, Baroncelli).

Personnalité indépendante, le père Guarino Guarini (1624-1683), de Modène, s’efforce courageusement d’accorder la rhétorique du baroque et des modes d’expression authentiques et personnels; il exalte la valeur d’un matériau simple, la brique, dans ses palais (pour le prince de Carignano, pour le Collège des Nobles), et applique les résultats de ses études de géométrie projective dans ses géniales coupoles (église de Saint-Laurent des Théatins et coupole de la chapelle du Saint-Suaire à la cathédrale de Turin, 1668); Guarini effectue divers voyages à Messine où il enseigna, à Paris et en Espagne.

La peinture du XVIIe siècle au Piémont est marquée par l’arrivée de nombreuses œuvres à la galerie de tableaux ducale (toiles caravagesques: Orazio Gentileschi; toiles baroques: Francesco Albani, Guerchin; portraits français et paysages flamands); mais elle se définit essentiellement par les réalisations de Musso, de Molineri da Savigliano, et surtout de Tanzio, réaliste caravagesque qui œuvra au Sacro Monte de Varallo; pleines d’intérêt sont aussi les œuvres des Lombards Francesco del Cairo et Pier Francesco Mazzuchelli, dit Morazzone.

La cour de Charles-Emmanuel II reçut le Flamand Jan Miel (scènes de chasse du château de la Venaria, actuellement au musée municipal), le Lorrain Charles Dauphin (église de Saint-François de Paule et Palazzo reale) et les Dufour. Dans les salles du palais royal se succédèrent peintres et sculpteurs, soutenus dans leur entreprise par l’écrivain Emmanuelle Tesauro, qui prit la suite de Giambattista Marino, le cavalier Marin.

Vers la fin du XVIIe siècle, le Viennois Seyter travaille (1690) pour Victor-Amédée II (fresques de la Grande Galerie). Les gravures de cette époque représentèrent des fêtes à la cour et des scènes réalistes, les architectures de la ville; parmi les artistes qui se distinguent le plus dans le genre, il faut citer Boetto di Fossano et Tasnière.

Du rococo au XXe siècle

Le passage au XVIIIe siècle est marqué en architecture par l’activité à Turin de Garove, de Bertola et de Plantery; mais le rôle déterminant fut joué par Filippo Juvara (1676-1736), originaire de Messine, qui s’installa à Turin en 1714, après avoir étudié à Rome (1704-1710); plusieurs de ses dessins sont conservés à la Bibliothèque nationale et au musée municipal de Turin.

La basilique de Superga, l’église Santa Cristina (1718), à Turin, la Venaria reale (pavillon de chasse), le château de Rivoli sont autant d’étapes dans l’élaboration d’une œuvre qui se distingue par son habileté et son interprétation toute personnelle du XVIIe siècle romain. En 1729, le projet de Stupinigi, château des environs de Turin, marque l’épanouissement d’un style qui animera avec une rare vitalité le rococo européen. Pour Juvarra travaillèrent des peintres français (Van Loo), vénitiens (Crosato et Ricci), napolitains (Solimena et Giaquinto), romains (Trevisani) et piémontais (Beaumont).

L’évolution qui se manifeste après Juvarra se révèle particulièrement fertile pour l’œuvre de Bernardo Antonio Vittone et de Benedetto Alfieri. Éditeur des œuvres théoriques de Guarini, Vittone se détache de Juvarra et s’impose avec ses idées de coupoles aérées et bizarres (sanctuaire de Vallinotto près de Carignano, 1738; à Corteranzo et à Foglizzo); Alfieri apparaît comme un urbaniste de grande classe (Carignano et Turin). Après Juvarra, la scénographie est surtout le fait des Galliari.

Les architectes Magnocavallo, Nicolis di Robilant, Gallo (cathédrale de Mondovi et divers édifices dans la province de Cuneo), Michela et Rana (région du Canavese) donnent au Piémont du XVIIIe siècle sa physionomie spécifique.

Durant le XVIIIe siècle, la cour est le lieu d’activités artistiques multiples: pour les meubles, les ébénistes Piffetti (1740) et Bonzanigo (1770), pour l’orfèvrerie Boucheron (1790); la sculpture se caractérise par un goût rhétorique et populaire, avec Plura et Bernero, et une manière plus classique, avec Collino; il faut signaler aussi l’activité de l’atelier de céramiques de Vinovo (œuvres conservées au musée municipal de Turin).

La peinture offre une orientation populaire avec les bambochades de Pietro Domenico Olivero et de G. M. Graneri, tandis que les paysagistes Cignaroli travaillent à Stupinigi et dans les villas. Le Palazzo reale accueille, sous le roi Charles-Albert, le sculpteur néo-classique Palagi, qui signera avec Melani les réalisations néo-gothiques du château de Racconigi (architectures des jardins et meubles).

L’art du XIXe siècle au Piémont est illustré surtout par les réalisations de l’urbaniste Promis et par l’œuvre d’Alessandro Antonelli, auteur de la Mole Antonelliana à Turin (1867), par les sculpteurs véristes C. Marocchetti et V. Vela; en peinture, après d’Azeglio, se distinguent le réaliste Pittara et, pour le paysage romantique, A. Fontanesi et Reycend (œuvres à la galerie d’Art moderne de Turin), artistes ouverts aux influences européennes.

La peinture contemporaine a été représentée par Casorati et le «groupe des six» avec Paulucci et Menzio; et la peinture qui suit les voies de l’avant-garde européenne, comme on peut le voir en particulier aux expositions de la biennale de Venise (Pistoletto, Paolini, Merz, Pénone Boetti).

piémont [ pjemɔ̃ ] n. m.
• 1908; angl. piedmont-glacier (1893); de pied et mont
Géogr.
1Glacier de piémont, formé par la réunion de plusieurs glaciers débouchant dans une plaine, où ils présentent une surface presque horizontale. REM. La forme anglaise PIEDMONT est employée par les géographes.
2Glacis alluvial incliné assez uniformément et situé au pied d'un ensemble montagneux.

piémont ou piedmont nom masculin (italien piemonte) Bande, plus ou moins large, de plaines ou de collines localisée au pied d'un volume montagneux. ● piémont ou piedmont (expressions) nom masculin (italien piemonte) Glacier de piémont, type de glacier étalé en lobe, au sortir d'un massif montagneux. Terrasse du piémont, terrasse fluvio-glaciaire mise en place par les eaux de fonte des glaciers alpins et se raccordant vers l'amont à des moraines.

Piémont
(en ital. Piemonte) région admin. d'Italie et de la C.E., frontalière de la France et de la Suisse, au N.-O. de la péninsule, formée des prov. d'Alexandrie, d'Asti, de Cuneo, de Novare, de Turin et de Verceil; 25 399 km²; 4 389 430 hab.; cap. Turin.
à l'O. et au N. s'étend l'arc alpin (mont Rose, 4 633 m; mont Cervin, 4 478 m), qui domine une région de plaines et de collines drainée par le Pô et ses affl.
Irrigées, les cultures ont un haut rendement: blé, riz, maïs, vigne (Asti). Les vallées alpestres vivent de l'élevage et du tourisme d'hiver. L'hydroélectricité a permis l'essor industriel. Le grand centre écon. est Turin (automobiles).
Le Piémont appartint à la maison de Savoie à partir du XIe s. et lui fut définitivement attribué en 1418. Comme le duc de Savoie devint roi de Sardaigne en 1718, on parla de royaume de Piémont-Sardaigne. C'est autour de ce royaume que l'unité italienne se fit au XIXe s. et le duc de Savoie fut proclamé roi d'Italie en 1861 à Turin.

⇒PIÉMONT, subst. masc.
GÉOGR. Zone de plaines et de collines située au pied d'un ensemble montagneux et résultant de l'accumulation de matériaux détritiques, alluvions en particulier. Ce type de transhumance suppose un piémont densément peuplé et systématiquement mis en valeur pour nourrir les hommes (WOLKOWITSCH, Élev., 1966, p.122).
Prononc. et Orth.:[]. ROB., Lar. Lang. fr.: piémont, piedmont. Étymol. et Hist. 1908 (VIDAL DE LA BL., Tabl. géogr. Fr., p.360: à Foix [...] la plaine entre en communication directe avec la montagne; elle devient un piémont [it. ds le texte] au sens propre du mot). Comp. de pied et de mont; cf. ital. piemonte «glacier au pied d'un mont» (dep. XIVes. d'apr. DEI) et piémontais.

piémont ou piedmont [pjemɔ̃] n. m.
ÉTYM. 1927, glacier du pied des monts; d'abord en angl. piedmont-glacier (1893); de pied, et mont.
Géographie.
1 Glacier de piémont ou de piedmont, formé par la réunion de plusieurs glaciers débouchant dans une plaine, où ils présentent une surface presque horizontale.La forme anglaise piedmont est employée par les géographes.
2 Glacis alluvial incliné assez uniformément et situé au pied d'un ensemble montagneux. || Piémont alluvial. || Glacis, plaine alluviale de piémont ou de piedmont, ou, ellipt., piémont.

Encyclopédie Universelle. 2012.