INFANTERIE
De tout temps, on a distingué deux grandes catégories de combattants: d’un côté, les fantassins qui se déplacent et combattent à pied, de l’autre, les cavaliers qui se déplacent et combattent à cheval ou en véhicule. Malgré ces différences, les uns et les autres composent ce qu’on appelle les troupes de mêlée , c’est-à-dire celles où l’on combat à courte distance, en voyant son propre adversaire et où l’on en arrive finalement au corps à corps, ces caractéristiques les opposant aux autres troupes dites d’appui qui, sans doute, participent à la lutte mais de plus loin et de façon moins permanente.
Quoi qu’il en soit, à notre époque où les combats durent toute une campagne parce que les armées sont constamment face à face, c’est essentiellement à l’infanterie qu’il incombe de garder le contact de tous les jours, par patrouilles et embuscades, de protéger les chars à plus ou moins grande distance et de mener le combat dans toutes les régions impropres aux unités blindées: les localités, les bois et les bocages. Aussi, même si le rôle de décision aux très hauts échelons revient très souvent aux chars, même si numériquement l’infanterie n’a plus l’importance qu’elle avait autrefois, elle continue à tenir un rôle éminent dans tous les combats, où elle subit toujours les mêmes fatigues, les mêmes tensions morales, les mêmes pertes, souvent sévères; les modifications qui ont pu survenir proviennent surtout des progrès réalisés dans l’armement.
La «reine des batailles»
Dès les plus anciennes périodes de l’Égypte et de la Mésopotamie, les fantassins ont constitué l’élément principal du combat.
Dans la plupart des cas, ils s’aggloméraient en puissants carrés de plusieurs centaines d’hommes, formant ainsi l’infanterie lourde. Armés de piques ou de pointes, protégés par leurs boucliers, pressés les uns contre les autres, ils agissaient par leur masse.
Il existait, cependant, d’autres types de fantassins, ceux de l’infanterie légère. Dotés d’arcs, de frondes ou de javelots, ils ne pouvaient être employés en raison de leur armement que sur un ou deux rangs largement espacés. Aussi n’étaient-ils chargés que des escarmouches préliminaires, ou de la poursuite.
Un des plus parfaits exemples de l’infanterie lourde a été la phalange macédonienne, constituée par un carré de 64 hommes de côté (soit 4 096 hommes). Munis de la longue pique (la sarisse) et protégés par des casques et des cuirasses, formant des blocs compacts, ils jouaient le rôle de véritables rouleaux compresseurs, tandis que l’infanterie légère et les cavaliers agissaient ou devant ou sur les côtés.
La légion romaine
Le système de la phalange a été adopté par la plupart des armées et même au début par Rome; cependant il manquait de souplesse. Aussi, dès le IVe siècle avant J.-C., les Romains firent-ils éclater cette formation, en disposant les unités élémentaires (les manipules, forts de 80 à 160 hommes), en un gigantesque damier de trois lignes de dix manipules, où les vides occupaient autant de place que les pleins. Ce fut la légion qui pouvait très facilement, du fait de sa structure, ou bien se mettre en dix colonnes, ou faire passer la deuxième ligne devant la première, ou se mettre sur deux lignes seulement suivant les nécessités du combat. De plus, innovation psychologique, la troisième ligne – l’arrière par où arrive toute panique au combat– était constituée par des anciens et ne prenait part à la lutte qu’en cas de crise. La supériorité de cette formation se manifesta à Cynocéphales (196 av. J.-C.), où les légions de Flamininus, enfoncées par les phalanges de Philippe V, furent assez manœuvrières pour distraire dix manipules qui, lancés sur leurs arrières, provoquèrent leur déroute. Dès lors et pendant près de cinq siècles, il n’y eut pas de meilleur outil de guerre que ces unités, fortes de 4 000 à 6 000 fantassins, mais qui ne disposaient que de 300 cavaliers environ, destinés surtout à éclairer ou à exploiter la situation.
Par ailleurs, pendant toute cette haute période, le combat était surtout frontal et, tant que la ligne tenait, les pertes étaient faibles. Mais dès que la ligne cédait, la débandade commençait, et les fuyards étaient tués sans merci; d’où des pertes, le plus souvent, de 1 à 5 p. 100 chez le vainqueur, parfois de plus de 90 p. 100 chez le vaincu. Il s’en faut cependant qu’il n’y ait eu que des batailles rangées, la guerre de siège était fréquente et les fantassins devaient se transformer en sapeurs, terrassiers et combattants d’assaut. Ce règne absolu de l’infanterie eut une fin. On la situe en 278 après J.-C. lorsque, près d’Andrinople, des dizaines de milliers de cavaliers Goths écrasèrent les légions romaines.
Désormais et pendant plus de mille ans ce sera la cavalerie qui jouera le rôle principal. Les gens à pied, formant des haies vives avec leurs piques ou leurs pieux, ont alors pour seul rôle de garder des sortes de bases, d’où les chevaliers partent pour l’attaque et où ils reviennent se reposer.
Il fallut les grandes défaites de la chevalerie française au cours de la guerre de Cent Ans, puis celle de l’Empereur devant les Suisses pour détrôner à son tour la cavalerie. Il s’ensuivit une période de tâtonnements puis d’innovations dues aux armes nouvelles.
Archers, piquiers et arquebusiers
Le grand arc (le long-bow gallois) s’étant révélé très meurtrier, il fut créé en France dès 1448 des compagnies de francs-archers qui s’illustrèrent à Formigny et à Castillon; mais des compagnies d’arbalétriers subsistèrent encore un certain temps.
Vers 1475 apparut la première arme à feu portative, l’arquebuse qui, bien que tirant un coup en cinq minutes, remplaça peu à peu arcs et arbalètes. Ce fut l’arme des lansquenets de Maximilien, et c’est elle qui permit à Charles Quint de vaincre à Pavie. Dès lors presque toutes les armées en furent dotées. Cependant, par imitation peut-être de la phalange, les Suisses n’équipaient que des bataillons de piquiers et ils remportèrent nombre de victoires.
Ainsi, à un certain moment, il y eut deux sortes d’infanteries. Mais bientôt on s’aperçut de la valeur de l’amalgame: pique-arquebuse. D’où la création de gros bataillons, constitués en majorité de piquiers, et «frangés» sur tous les bords d’arquebusiers.
Ces «hérissons», comportant parfois plusieurs milliers d’hommes, vont régner sur les champs de bataille jusque vers le milieu du XVIIe siècle. Les seuls changements consisteront en une diminution constante du nombre de piques dont les rangs vont passer de trente ou quarante à huit ou dix et une augmentation du nombre d’armes à feu. Celles-ci se transforment d’ailleurs: l’arquebuse est remplacée par le mousquet à la fin du XVIe siècle, puis par le fusil à la fin du XVIIe . Dans toutes les grandes batailles – que les tableaux de l’époque représentent comme des forêts de piques en marche – l’infanterie respectait à peu près ce schéma.
À vrai dire, les chefs de guerre évitaient volontiers les rencontres brutales et décisives. Ils préféraient «escarmouches et embuscades», où gains et pertes étaient toujours faibles et où les plus petits chefs agissant à leur guise laissaient les fantassins s’adapter aux circonstances avec beaucoup de souplesse.
À partir du XVIIIe siècle, les fantassins fusiliers
Le tout début du XVIIIe siècle marque une étape importante. En 1703, le fusil à baïonnette est adopté dans toute l’armée française et, en 1708, piques et piquiers sont définitivement supprimés. Dès lors les fantassins, tous fusiliers, combattent sur cinq à huit rangs seulement, tirant dans les intervalles ou l’un par-dessus l’autre. Les formations deviennent plus minces. Mais les armées (comprenant toujours au moins trois quarts d’infanterie) deviennent plus nombreuses. Aussi les fronts d’une bataille s’étirent sans cesse, tandis que le jeu des réserves, faisant disposer en arrière un nombre plus grand d’unités, leur donne une plus grande profondeur.
Le combat, cependant, reste classique, l’infanterie occupe tout le centre, la cavalerie les ailes. L’action commence par une canonnade, puis les unités s’affrontent, et lorsqu’une percée se réalise, ce sont des réserves d’infanterie qui sont d’abord lancées; la cavalerie étant chargée de la poursuite, si elle est ordonnée.
Avec Frédéric II, l’infanterie devient plus manœuvrière. Grâce à une instruction très poussée, le tir est plus rapide (trois coups par minute) et plus précis. Il s’exécute même en marchant. En outre les unités deviennent beaucoup plus mobiles. Grâce à la facilité du maniement du fusil, les hommes peuvent se tenir au coude à coude (c’est l’ordre serré) et combattre sur seulement trois rangs de profondeur (c’est l’ordre mince par rapport aux six à huit rangs traditionnels de l’ordre profond). Au cours du combat, on peut donc rapidement dégarnir un point fort, mettre la troupe en colonne en vue d’un débordement et sur un simple commandement la faire pivoter d’un quart de tour, pour la replacer face à un flanc ennemi (c’est l’ordre oblique).
La fin du XVIIIe siècle va marquer une autre étape très importante en instituant le principe divisionnaire et en créant notamment des divisions d’infanterie «unités de toutes armes, capables de mener le combat pendant un certain temps». Ces grandes unités comprennent deux à six régiments d’infanterie, un à trois de cavalerie, une dizaine de canons, des trains. Désormais, aux mêmes corps d’infanterie sont attachés les mêmes corps d’artillerie et de cavalerie, et les mêmes services. Il en résulte une plus grande cohésion chez les combattants et, de plus, dans la bataille, ces divisions sont interchangeables. Néanmoins la tactique des petites unités d’infanterie varie peu, le combat oppose toujours des lignes de trois rangs de fusiliers qui, avant tout combat, doivent d’abord s’aligner.
Sous l’Empire, l’utilisation de l’infanterie a été poussée à l’extrême. Les fantassins marchent comme ils n’avaient jamais marché. En moyenne ils font 25 km par jour, ne s’arrêtant qu’une, à la rigueur deux journées par semaine, tels ces sous-officiers qui allèrent à pied de Cadix à Moscou. De plus, pour la première fois depuis longtemps, une nouvelle forme de lutte apparaît, en Espagne notamment, qui réclame des initiatives plus individuelles que collectives: la guérilla. Après la bourrasque de l’Empire les Français, en métropole, en reviennent aux formations classiques, tout en continuant en Algérie à pratiquer la contre-guérilla.
Or, pendant ce temps, les Prussiens préconisent des articulations serrées, peu profondes, mais très souples; et, portant leur effort sur l’armement, ils adoptent, dès 1840, un fusil à tir rapide, le Dreyse, se chargeant par la culasse. Aussi, en 1870, les Allemands opposent des lignes de feu meurtrières qui se moulent sur le terrain, alors que les Français en sont encore à des formations rigides, et, qui plus est, confiants dans le chassepot de création récente et réputé supérieur au fusil prussien, ils se cantonnent dans une stricte défensive. D’autre part, l’artillerie, surtout celle de la Prusse, a fait de gros progrès. Elle tire pendant toute la bataille, au besoin par-dessus la troupe, atteignant ses objectifs avec précision. D’où les pertes déjà lourdes des combats de l’époque.
Dès lors et jusqu’à 1914, le feu manifeste de plus en plus sa prépondérance tandis que la fortification de campagne ne cesse de se développer. Pourtant les tacticiens croient toujours à la vertu du mouvement. En fait le début de la «Grande Guerre» semble leur donner raison, mais très rapidement la puissance du feu, décuplée par les mitrailleuses, bloque l’infanterie dès que son adversaire s’enterre tant soit peu. Par réaction, dès 1915, elle essaye de se désenliser en adoptant des armes automatiques légères telles que le fusil mitrailleur, les grenades et les lance-grenades, les mortiers de 60 et de 81; en modifiant ses formations (la section s’articule en groupes); en améliorant son équipement, en se couvrant d’un casque, etc. Mais, bien que présentant plus de 80 p. 100 des effectifs, l’infanterie est alors détrônée par l’artillerie qui, seule, «conquiert le terrain» en faisant le vide, les fantassins se contentant de l’occuper.
C’est à ce moment que deux armes nouvelles apparaissent: le char et l’aviation, qui vont, peu à peu, prendre une part prépondérante dans les combats, mais qui ne sont, l’une et l’autre, au début, qu’une prolongation de l’artillerie. Les chars sont en effet considérés comme une «artillerie d’assaut» et les avions ne reçoivent le plus souvent qu’une mission de bombardement. Ainsi, l’artillerie semble alors être l’arme maîtresse, même si on laisse encore à l’infanterie le qualificatif de «reine des batailles».
Guérilla et infanterie modernes
Au cours de l’après-guerre, de bons esprits considérèrent assez rapidement que les rôles jusqu’ici dévolus aux chars et à l’aviation étaient secondaires, alors qu’ils pourraient être principaux s’ils étaient employés autrement. Au lieu de servir l’infanterie, ces armes pourraient agir seules, en masse, avec des objectifs lointains, et prendre la manœuvre à leur compte, rôle qui fut assigné aux Panzer et aux divisions blindées de 1940, appuyés par l’aviation.
L’infanterie passe alors tout à fait au second plan. Sans doute en a-t-on encore besoin pour protéger les chars, tenir les fronts secondaires ou effectuer des coups de main lointains et pour cela elle se motorise, mais elle n’est plus la première et elle doit se spécialiser. D’où l’apparition de l’infanterie mécanisée , équipée de véhicules blindés et combattant soit à pied, soit en voiture, à proximité des chars et les défendant, et celle de l’infanterie motorisée , plus autonome, se déplaçant en véhicules, mais combattant à pied, et enfin celle des parachutistes , se déplaçant par avion, sautant puis combattant à pied.
Ces différentes infanteries, qui virent le jour de 1940 à 1945 et contribuèrent aux succès des différentes armées, n’étaient cependant considérées que comme des accessoires de ce «fer de lance» qu’était «l’unité blindée» devenue le seul pion important du combat. Mais celle-ci portait en elle-même de très graves handicaps: son prix de revient et ses difficultés de ravitaillement. C’est pourquoi la puissance industrielle des États-Unis eut rapidement raison de la technicité et de l’entraînement des troupes allemandes.
C’est alors qu’apparut l’arme atomique qui, par sa puissance, sembla tout remettre en question. La bombe A (en 1945), bien que n’ayant été employée que deux fois et sur des objectifs civils, puis la bombe à hydrogène (1952) laissèrent supposer un moment que le rôle des armées, même blindées, était révolu. Pourtant des études plus poussées, des considérations d’ordre politique et humanitaire, et surtout le risque des retombées et des représailles, donnèrent à penser que ces bombes pourraient rester inutilisées, comme les gaz de 1940 à 1945. Aussi les grandes puissances ont-elles conservé des unités blindées assez semblables à celles de 1945, tout en les aérant et les allégeant, surtout de leur artillerie, en sorte qu’on y trouve une plus forte proportion de chars et de voitures blindées; mais il y a toujours autant d’infanterie mécanisée ou motorisée, et bien entendu on a conservé les parachutistes.
Cependant, en 1942, en Russie, une autre forme de guerre avait réapparu : la guérilla et sa réplique, la contre-guérilla où chars et avions, de même que canons et camions, avaient peu de part. Dans la vénération qu’on avait alors pour le moteur, on n’y fit pas trop attention du côté occidental, et encore moins après Hiroshima. Mais depuis plus de vingt ans que nombre de puissances sont impliquées dans des guerres dites coloniales, de libération ou simplement civiles, cette forme de combat a repris naissance, où l’infanterie, dans toute sa simplicité première, a retrouvé sa place primordiale. Sans doute, les chars, les canons, les avions peuvent aider un parti; mais, comme l’ont montré les combats du Vietnam, une infanterie seule est capable de s’opposer à une armée dotée de grands moyens modernes.
Ainsi, malgré tous les progrès techniques, l’infanterie a encore aujourd’hui un rôle considérable à jouer. Équipée de nombreuses armes à courte portée (fusils, carabines, pistolets, grenades) dont certaines à tir rapide (pistolets mitrailleurs, fusils mitrailleurs ou mitrailleuses), dotée de moyens antichars, également à courte portée (lance-roquettes notamment), elle est essentiellement l’arme du combat rapproché. Sans doute, il n’est plus question de l’opposer, en rase campagne, et en formations serrées à un adversaire combattant en chars, ou même à pied, mais de nombreux «terrains» restent son domaine d’élection: les bois, les couverts, la montagne, et surtout les agglomérations, c’est-à-dire pratiquement partout où le char voit mal et là où il ne peut s’aventurer.
Mais si en Europe occidentale, abondamment pourvue de routes dans les campagnes très cultivées, l’infanterie voit son rôle réduit à tenir des points secondaires, il n’en est pas de même dans les pays moins développés. Enfin, dans l’hypothèse d’une guerre atomique, si après quelques heures d’apocalypse nucléaire toute l’infrastructure d’un pays moderne est détruite, c’est-à-dire si la logistique indispensable aux blindés est anéantie, alors, à nouveau, seules les infanteries à pied pourront s’opposer et, dans cette guerre des résidus, décider du sort de la guerre.
infanterie [ ɛ̃fɑ̃tri ] n. f.
1 ♦ Anciennt Ensemble des gens de guerre marchant et combattant à pied (et qui étaient à l'origine les valets d'armes des chevaliers). ⇒Vx piéton.
2 ♦ Mod. L'arme qui est chargée de la conquête et de l'occupation du terrain. ⇒arg. biffe. Soldat d'infanterie. ⇒ fantassin; arg. biffin. L'infanterie est la force des armées, la « reine des batailles », a dit Napoléon. Infanterie de marine. Infanterie de l'air, aéroportée. ⇒ parachutiste. — Groupe, compagnie, bataillon, régiment, division d'infanterie. Servir dans l'infanterie.
● infanterie nom féminin (italien infanteria, de infante, fantassin) Autrefois, ensemble des troupes combattantes à pied ; aujourd'hui, arme spécialisée dans le combat de localité et en terrain difficile. ● infanterie (expressions) nom féminin (italien infanteria, de infante, fantassin) Brigade d'infanterie, grande unité où les formations d'infanterie sont en majorité. Infanterie divisionnaire, ensemble des corps d'infanterie d'une division blindée. Infanterie légère, nom donné, à la fin de l'Ancien Régime, sous la Révolution et sous l'Empire, aux bataillons de chasseurs et corps francs, par opposition aux autres formations d'infanterie, qui constituaient l'infanterie de ligne. Infanterie portée, troupe d'infanterie dotée de véhicules qui servent à ses déplacements. (Suivant qu'il s'agit de véhicules de transport ou de véhicules de combat, l'infanterie est dite, en outre, motorisée ou mécanisée.)
infanterie
n. f. Ensemble des troupes chargées de la défense, de la conquête et de l'occupation du terrain. Infanterie de marine.
⇒INFANTERIE, subst. fém.
A. — Vx. Ensemble des hommes de guerre marchant et combattant à pied. Homme d'infanterie. [Santerre] faisait marcher son armée, non pas en colonnes, non pas par divisions ni même par pelotons, mais par le flanc (...), l'artillerie devant (...), ensuite la cavalerie et puis l'infanterie en ruban, par trois, à perte de vue (ERCKM.-CHATR., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 185) :
• Le maréchal Lannes fait battre et sonner la charge sur toute la ligne, et l'on voit alors sur cet adversaire mitraillé arriver « des masses d'infanterie (...) »
FOCH, Princ. guerre, 1911, p. 301.
— P. métaph. Ils [les soldats] en voyaient une (...) qui, formidable, se préparait à les vaincre : l'infanterie blanche, les bataillons silencieux du froid (D'ESPARBÈS, Guerre dentelles, 1896, p. 61). Ils fondent ou suivent les sectes les plus extravagantes, fournissent l'infanterie des hérésies et parfois pimentent les assemblées parlementaires d'un grain de folie burlesque (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 554).
B. — Mod. Arme qui a pour mission de conquérir et d'occuper le terrain. Détachement, régiment, capitaine, officier, sergent, effectif d'infanterie. La division est dite d'infanterie ou de cavalerie suivant l'arme qui est prépondérante dans sa composition (Loi sur organ. gén. armée, 1927, p. 7269).
SYNT. Combat, mouvement d'infanterie; brigade, colonne, compagnie, formation, caserne, attaque d'infanterie; infanterie allemande, anglaise, autrichienne, espagnole; infanterie alliée, ennemie; infanterie à cheval, aéroportée, coloniale, de l'air, de marine, héliportée, lourde, portée.
— P. métaph. Le livre reste l'infanterie lourde qui nettoie et occupe le terrain. Mais la littérature dispose d'avions, de V1, V2, qui vont au loin, inquiètent et harcèlent sans emporter la décision (SARTRE, Sit. II, 1948, p. 269).
Prononc. et Orth. : []. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Av. 1502 enffanterie « troupes à pied » (O. DE SAINT-GELAIS, Eneide, Richel. 5081, f° 50a ds GDF.) seulement au XVIe s.; 2. 1553 infanterie « id. » (RONSARD, Folastrie II ds Œuvres, éd. P. Laumonier, t. 5, p. 20, 59). Empr. à l'ital. infanteria « id. » (dep. XIVe s., A. PUCCI ds BATT.), dér. de infante (enfant) qui prit au XIVe s. le sens de « jeune soldat, fantassin » (SACCHETTI, ibid.); 1 représente une adaptation du mot ital. (cf. aussi fanterie, attesté de 1547, VINTIMILLE ds HUG., à 1596, HULSIUS d'apr. FEW t. 4, p. 661b, empr. à l'ital. fanteria « infanterie », dep. av. 1363 ds BATT.; v. fantassin). Fréq. abs. littér. : 871. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 797, b) 897; XXe s. : a) 876, b) 2 016. Bbg. HOPE 1971, p. 202. - RUPP. 1915, p. 68. - WIND 1928, p. 53, 130.
infanterie [ɛ̃fɑ̃tʀi] n. f.
ÉTYM. Mil. XVIe; enffanterie, v. 1500; anc. ital. infanteria « troupes à pied », XIVe (supplanté par le doublet fanteria, par aphérèse), de infante « jeune soldat, fantassin » p.-ê. à partir d'un sens « jeune homme encore trop jeune pour combattre à cheval » ou « valet » (cf. ital. mod. fante « fantassin » et « valet »), d'abord « enfant », même orig. lat. infans que le franç. enfant (le franç. a eu enfant de pied, enfant à pied « fantassin », XVe).
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1 Anciennt ou hist. Ensemble des gens de guerre marchant et combattant à pied (et qui étaient à l'origine les valets d'armes des chevaliers). ⇒ Piéton (vx). || Les hoplites, soldats de l'infanterie lourde grecque; les légionnaires et les vélites, soldats de l'infanterie romaine. || L'infanterie au moyen âge, sous l'Ancien Régime. ⇒ Franc-archer (et archer), lansquenet; cent-suisses. || La pique et la hallebarde, armes de l'infanterie. — Emplois mod., pouvant se confondre avec le sens 2. ⇒ Fantassin. || La cavalerie et l'infanterie (→ Assaillant, cit. 1; escadron, cit. 3; face, cit. 45). || Attaquer (cit. 3) sans infanterie (→ 1. Froid, cit. 14). || Combat (cit. 1) d'infanterie. || Cinq mille hommes d'infanterie (→ Heureux, cit. 8). || Faire border (cit. 3) une route d'infanterie. || L'infanterie forma la haie (cit. 8).
1 (…) cette redoutable infanterie de l'armée d'Espagne (…)
Bossuet, Oraison funèbre de Louis de Bourbon (→ Bataillon, cit. 3).
2 Ce fut lui (le grand Condé) qui, avec de la cavalerie, attaqua cette infanterie espagnole jusque-là invincible, aussi forte, aussi serrée que la phalange ancienne (…)
Voltaire, le Siècle de Louis XIV, III.
3 (Vers le temps de Hugues Capet) Quand la France, l'Italie et l'Allemagne, furent ainsi partagées (…) les armées, dont la principale force avait été l'infanterie, sous Charlemagne ainsi que sous les Romains, ne furent plus que de la cavalerie (…) les gens de pied n'avaient pas ce nom (de gendarmes), parce que, en comparaison des hommes de cheval, ils n'étaient point armés.
Voltaire, Essai sur les mœurs, XXXVIII.
2 Mod. Dans une armée, l'arme chargée de la conquête et de l'occupation du terrain. ⇒ Armée (cit. 14); 2. biffe (argot). || Soldat d'infanterie. ⇒ Biffin, fantassin; et aussi chasseur, pionnier, tirailleur, zouave. || « L'infanterie est la force des armées, la “reine des batailles” a dit Napoléon Ier » (Pierre Larousse). || Subdivisions de l'infanterie française : infanterie métropolitaine (infanterie de ligne. ⇒ Lignard, vx); infanterie de forteresse; légion étrangère. — (1774). || Infanterie de marine (→ Appel, cit. 4; équipement, cit. 4). — (1902). Anciennt. || Infanterie coloniale. — (1948). || Infanterie dans les divisions blindées : infanterie portée. || Infanterie de l'air, aéroportée (⇒ Parachutiste). — Groupe, section, compagnie, bataillon (cit. 8), régiment, brigade, division d'infanterie. || Grades dans l'infanterie. ⇒ Caporal; sergent, sergent-chef, adjudant. || Officier d'infanterie. || Général d'infanterie. || École d'application d'infanterie. || Armes utilisées par l'infanterie : fusil, baïonnette (cit. 2), pistolet, pistolet-mitrailleur, fusil-mitrailleur, mitrailleuse, lance-roquette, antichars, grenade, missile, mortier. || Canon d'infanterie. — Service auto, transmissions; ravitaillement, munitions d'une unité d'infanterie. || Artillerie d'accompagnement d'une unité d'infanterie. || Infanterie mécanisée. || Véhicule de combat d'infanterie (V. C. I.). || Véhicules de transport de troupes (V. T. T.) utilisés par l'infanterie.
4 (…) l'offensive, dites-vous, c'est le feu qui avance; la défensive, c'est le feu qui arrête. Vous dites enfin : le canon conquiert, l'infanterie occupe.
Valéry, Variété IV, p. 63.
5 Les troupes de la division d'infanterie comprennent en principe : — des unités d'infanterie (régiments ou demi-brigades); — des unités de cavalerie légère blindée et des unités de chars (…) — des unités d'artillerie divisionnaire (…) — des unités d'artillerie antiaérienne (…) des unités du génie (…) des unités des transmissions (…) des unités du train (…) — une unité de passage (…)
Mémento des Officiers de réserve de l'infanterie, éd. Lavauzelle, 1954, p. 52.
Encyclopédie Universelle. 2012.