INFRASTRUCTURE
INFRASTRUCTURE
Le terme d’infrastructure revêt deux significations qui sont sans rapport, sinon étymologique, l’une avec l’autre:
Dans la philosophie marxiste, ainsi que Marx l’expose notamment dans la préface et dans l’introduction qu’il donne à sa Contribution à la critique de l’économie politique , l’infrastructure désigne l’ensemble complexe des forces productives et des rapports sociaux de production. Dans leur combinaison même, ces éléments agissent de manière décisive sur les superstructures, au premier rang desquelles se trouvent les formes institutionnelles ou les idéologies; mais il ne s’agit pas d’un déterminisme mécanique, et il n’est pas exclu que les superstructures puissent, dans certains cas, soit accéder à une autonomie relative, soit même rétroagir sur l’évolution même de l’infrastructure.
Dans un langage plus technique, l’infrastructure désigne l’ensemble des installations fixes mises à la disposition collective des usagers (infrastructure routière, portuaire, sanitaire, culturelle). Désignées en anglais par l’expression social overhead costs , ces installations sont de plus en plus analysées comme des biens publics.
Si pendant longtemps la théorie économique a discuté sur l’efficacité d’un péage lié à leur utilisation, ce qui renvoyait ou non à une théorie de la répartition, l’accent est mis de plus en plus sur les critères de décision concernant leur construction. Après avoir cherché ces critères dans la voie d’une extension des critères des décisions privées (critère de la productivité marginale sociale dans les années cinquante, analyse coût-bénéfice dans les années soixante), on admet de plus en plus que «le calcul économique ne peut résoudre les questions posées par les décisions collectives» (C. Charmeil) et que l’«économie publique» forge progressivement des outils originaux.
infrastructure [ ɛ̃frastryktyr ] n. f. I ♦
1 ♦ Parties inférieures (d'une construction). ⇒ fondation. — Ensemble des terrassements et ouvrages qui concourent à l'établissement de la plateforme d'une voie de chemin de fer (remblais, souterrains, tunnels, passages à niveau, ponts, viaducs, etc.), d'une route.
2 ♦ Aviat. Ensemble des installations au sol (pistes, bâtiments, émetteurs de radio, etc.). — Milit. Ensemble des installations nécessaires à l'activité des forces militaires sur un territoire.
3 ♦ (mil. XXe) Ensemble des équipements économiques ou techniques. Infrastructure routière, ferroviaire. L'infrastructure touristique, hôtelière d'une région.
II ♦ Philos. Structure cachée ou non remarquée, qui soutient qqch. de visible. — Spécialt Organisation économique de la société, considérée comme le fondement de l'idéologie (vocab. marxiste).
⊗ CONTR. Superstructure.
● infrastructure nom féminin Ensemble des ouvrages constituant la fondation et l'implantation sur le sol d'une construction ou d'un ensemble d'installations (par exemple routes, voies ferrées, aéroports). Ensemble d'installations, d'équipements nécessaires à une collectivité : L'infrastructure commerciale d'une ville nouvelle. Partie interne, sous-jacente à une structure (mentale ou matérielle). Ensemble des parties inférieures d'un bâtiment, généralement enterrées (sous-sol ou vide sanitaire, fondations, etc.). Domaine profond d'un orogène, caractérisé par des structures du niveau inférieur où règnent des conditions de pression et température propres à permettre des déformations plastiques, des structures d'écoulement, des phénomènes de fusion. Pour les marxistes, structure économique de la société, base concrète sur laquelle s'élève une superstructure juridique et politique.
infrastructure
n. f.
d1./d Ensemble des ouvrages et des équipements au sol destinés à faciliter le trafic routier, aérien, maritime ou ferroviaire. Infrastructure routière.
d2./d Ensemble des installations nécessaires à une activité, à la vie en un lieu. Infrastructures touristiques, urbaines.
d3./d MILIT Ensemble des installations et des services nécessaires au fonctionnement d'une force armée.
d4./d SOCIOL (Vocabulaire marxiste.) Ensemble des forces productives et des rapports de production qui constituent la base matérielle de la société et sur lesquels s'élève la superstructure (idéologie et institutions).
⇒INFRASTRUCTURE, subst. fém.
Support, base indispensable à l'édification, au maintien, ou au fonctionnement d'une structure concrète ou abstraite.
A. — 1. Ensemble des travaux de terrassement, des ouvrages qui constituent les fondations d'un bâtiment, d'une route, la plate-forme d'une voie de chemin de fer. Le passage des trains (...) communique (...) à la voie et à l'infrastructure des vibrations qui causent des ébranlements dangereux pour les ouvrages mal fondés (BRICKA, Cours ch. de fer, t. 1, 1894, p. 126).
2. Ensemble des installations, des équipements permanents qui conditionnent le fonctionnement d'un organisme ou d'une entreprise, l'activité économique d'une région, d'un pays. Infrastructure culturelle, routière, sanitaire; infrastructures de communication, de transport. Infrastructure rurale (irrigation, arasement des talus ou haies, reboisement, etc.) (Colloque géogr. appl., 1962, p. 39). Il appartient à l'État de rendre plus aisée cette quête des loisirs en aménageant l'infrastructure touristique du pays (Amén. terr., 1964, p. 19). V. équipement A 3 ex. de Jocard :
• 1. Sans ces investissements, l'infrastructure économique capable de créer et d'assurer le fonctionnement d'une économie de marché ne peut s'édifier.
Univ. écon. et soc., 1960, p. 36-11.
— P. métaph. Pas un seul acte « spirituel » qui ne repose sur une infrastructure corporelle (MERLEAU-PONTY, Phénoménol. perception, 1945, p. 493).
B. — PHILOSOPHIE
1. Ensemble des faits inapparents ou obscurs qui sous-tendent une réalité perceptible. Nous chercherons à faire voir dans la perception à la fois l'infrastructure instinctive et les superstructures qui s'établissent sur elle par l'exercice de l'intelligence (MERLEAU-PONTY, Phénoménol. perception, 1945p. 65) :
• 2. ... la conscience nous présente un ensemble de phénomènes superficiels et de mobiles apparents qui sont les seuls à nous apparaître dans l'attitude naturelle. Mais le divorce entre l'implicite et l'explicite, entre l'infrastructure réelle de l'homme et la superstructure de la conscience apparaît précisément au moment où le système cohérent de la conscience se brise pour laisser surgir des actes fous, des phénomènes « manqués », des suites incohérentes d'images ou de représentations, comme en fournit abondamment le rêve.
J. VUILLEMIN, Être et trav., 1949, p. 162.
2. PHILOS. MARXISTE. Ensemble des forces productives et des rapports de production qui servent de base à l'idéologie et aux instances politiques et juridiques qui la reflètent. Infrastructure de production; infrastructure financière. Notre doctrine (...) est de découvrir (...) l'infrastructure d'intérêts économiques qui porte l'édifice social (JAURÈS, Eur. incert., 1914, p. 419). Les idéologies de classes et de groupes n'entretiennent pas avec leurs infrastructures économiques des relations de causalité mécanique, mais leur rapport est dialectique (J. VUILLEMIN, Être et trav., 1949p. 163).
Prononc. et Orth. : []. Att. ds Ac. 1935. V. infra-. Étymol. et Hist. 1. a) 1875 « travaux de terrassement d'une voie ferrée » (Journal officiel, 18 août, p. 6743, 3e col. ds LITTRÉ Suppl.); b) 1923 au fig. « fondation, fondements » (VUILLERMOZ, Mus. auj., p. 155); c) 1940 aviat. « ensemble des installations au sol » (E. BLANC, l'Aviation, p. 364 ds ROB., s.v. avion); 2. 1911 philos. marxiste (JAURÈS, Armée nouv., p. 390); 3. 1933 philos. (ALAIN, Propos, p. 1151). Composé de l'élém. formant infra- et de structure. Fréq. abs. littér. : 41.
infrastructure [ɛ̃fʀastʀyktyʀ] n. f.
ÉTYM. 1875, in Littré, Suppl.; de infra-, et structure.
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♦ Didactique et courant.
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1 Techn. Parties inférieures (d'une construction). ⇒ Fondation. — Ch. de fer. Ensemble des terrassements et ouvrages qui concourent à l'établissement de la plate-forme (remblais, souterrains, tunnels, passages à niveau, ponts, viaducs…).
♦ (1923). Fig. et vieilli. Fondation, fondement.
2 (1931). Ensemble des installations au sol, en aviation (pistes, bâtiments, émetteurs de radio, etc.). → Avion, cit. 3; aviation, cit. 3.
♦ Milit. Ensemble des installations nécessaires à l'activité des forces militaires sur un territoire.
3 (Mil. XXe). Ensemble des équipements économiques ou techniques. || « L'infrastructure pétrolière » (le Monde, 30 sept. 1969). || « Infrastructure touristique » (la Croix, 11 mars 1969). || Infrastructure routière, culturelle, sanitaire. || Infrastructure de gestion, de communication.
1 (…) sauf dans l'école russe des historiens de la culture matérielle, l'infrastructure techno-économique n'est intervenue le plus souvent (dans la sociologie des primitifs) que dans la mesure où elle marquait de manière indiscrète la superstructure des pratiques matrimoniales et des rites.
A. Leroi-Gourhan, le Geste et la Parole, t. I, p. 210.
2 Dans de nombreux pays du Tiers Monde, la quasi-totalité des devises obtenues par l'exportation de biens agricoles, de matières premières ou de biens manufacturés sert à financer les retransferts de sociétés multinationales, les services de la dette extérieure et les dépenses d'infrastructure qu'exigent les sociétés multinationales avant leur installation dans le pays (communications, installations portuaires, etc.). L'État de l'aire tricontinentale, quel que soit le gouvernement qui le gère, n'a plus les moyens matériels de créer puis d'entretenir les installations d'infrastructures sociales (hôpitaux, routes, écoles, sécurité sociale) indispensables à la survie de la population.
Jean Ziegler, Main basse sur l'Afrique, p. 48.
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II Philos. Structure cachée ou non remarquée, qui soutient qqch. de visible. — (1911, Jaurès, in T. L. F.). Spécialt. Organisation économique de la société, considérée comme le fondement de l'idéologie (vocabulaire marxiste). || Pour les marxistes, l'idéologie, la superstructure n'est que le reflet des conditions économiques de l'infrastructure. || Passer des infrastructures aux superstructures (→ Histoire, cit. 22.2).
3 Lorsque K. Marx a posé le problème de l'opposition entre des infrastructures économiques et techniques et des superstructures idéologiques, il a soulevé de ce fait un nombre considérable de questions quant à la nature et au fonctionnement des divers types possibles de productions idéologiques.
J. Piaget, Épistémologie des sciences de l'homme, p. 356.
♦ Par ext. Parties intérieures, internes d'une structure (matérielle ou mentale).
4 (…) quand nous parlons de psychogenèse ou de sociogenèse, de psychothérapie ou de sociothérapie, nous n'imaginons pas pour autant que la psyché ou le socius soient des entités indépendantes de l'ensemble de l'organisme qui en constitue le substrat. Tout se passe comme si ces suprastructures mentales étaient capables de réagir sur les infrastructures organiques dont elles dépendent et réciproquement.
Jean Delay, Introd. à la médecine psychosomatique, p. 7.
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CONTR. Superstructure.
DÉR. Infrastructurel.
Encyclopédie Universelle. 2012.