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PHOBIE
PHOBIE

Le terme de phobie est fréquemment utilisé, dans la langue courante, pour évoquer la fixité de peurs électives et irrationnelles, ou le caractère insistant du dégoût et de la répulsion envers certains objets qui déclenchent de l’anxiété et des réactions de fuite. Dans une perspective psychiatrique et surtout psychanalytique, le symptôme qu’est la phobie renvoie au problème des états mentaux et des configurations psychopathologiques qui conditionnent l’émergence d’un tel phénomène.

L’isolement et la spécification de la phobie comme telle ne remontent guère au-delà de la seconde moitié du XIXe siècle: on a d’abord établi qu’une phobie en tant que crainte irrationnelle, impérative, à l’égard de laquelle le sujet se montre toutefois critique, peut être séparée des états délirants; dès lors, les études psychiatriques seront attachées à décrire les multiples formes cliniques de peurs obsédantes. On peut ici rappeler la classification de A. Pitres et E. Régis qui distinguent: les phobies d’objets (tenus pour dangereux, menaçants ou provoquant la répulsion); les phobies de certains lieux, de phénomènes de la nature, de situations, de tels ou tels aspects du corps malade; les phobies des animaux, grands ou petits.

Au début du XXe siècle, la question de la parenté ou de la différence entre phobies et obsessions amena plutôt les auteurs à rassembler qu’à distinguer; Pierre Janet proposa, en 1903, de grouper les unes et les autres en une entité, la psychasthénie, caractérisée par une baisse de tension psychologique qui perturbe l’adaptation au réel et qui favorise l’irruption dans la conscience de phénomènes de niveau plus archaïque. À la même époque, Freud, édifiant la théorie psychanalytique, étudie les phobies et les obsessions (dès 1895), mais il en définit les caractères distinctifs dans une tout autre perspective. Son mode d’appréhension et d’analyse du phénomène, qui s’étaye sur une conception révolutionnaire de l’inconscient et de l’appareil psychique, va prévaloir désormais pour la plupart des théoriciens et cliniciens. L’étude de la structure phobique renvoie donc à la découverte freudienne. L’intérêt de la question se trouve renforcé du fait que la phobie apparaît tout autant comme un moment de la maturation du devenir psycho-affectif de l’enfant que comme le symptôme pathognomonique d’un type de névrose de l’adulte. Si le surgissement d’une phobie est toujours un recours contre l’angoisse, il témoigne chez l’enfant d’une tentative de structuration de son identité et de son désir, alors que, chez l’adulte, une névrose phobique traduit le choix d’un comportement régressif, sous-tendu par un désir d’échec.

Les phobies infantiles: le petit Hans

L’observation, publiée par Freud en 1909, concernant le symptôme que présentait un jeune garçon de trois ans et demi, est une référence exemplaire et irremplaçable pour la compréhension du phénomène phobique. Hans, fils d’un disciple et ami de Freud, confie à son père qu’il a peur qu’un cheval ne le morde. Une phobie des chevaux se constitue chez lui, qui l’amène à fuir toutes les situations, les lieux et circonstances où l’objet de sa peur se manifesterait à lui. Le père, tentant de comprendre psychanalytiquement la chose (la «bêtise» comme Hans et ses parents nomment cette phobie), entreprend de se faire le psychothérapeute de son petit garçon et transmet au maître ses notations, interventions et interprétations. La reprise de cette observation princeps permet à Freud de confirmer ce qu’il a découvert de la sexualité infantile et du complexe d’Œdipe, et de saisir quelques-uns des ressorts de ce qui spécifie, à son origine, le phénomène phobique.

Selon Freud, la phobie de Hans est liée, dans son surgissement même, à ce qui, du conflit œdipien auquel est voué chaque petit d’homme, s’organise à partir du complexe de castration, lequel est lié lui-même à la différence des sexes. Hans a une petite sœur depuis quelques mois. Il aime déjà de façon masculine sa mère qui est le centre de son monde, encore qu’il interroge les rapports de puissance et d’autorité entre le mari et la femme. En fait, il interroge le monde de réalités et de significations obscures dans lequel il cherche à se situer. Il écoute et vérifie les discours qui sont prononcés autour de lui ou qui s’adressent à lui; il joue avec les mots, avec les images, avec les comportements des autres. Il joue aussi avec ses rêves et ses phantasmes (et le père interrogateur l’y incite). Mais tout cela se rassemble et se fixe en une question qui concerne le corps, et plus particulièrement le sexe. Décentré de sa position initiale du fait de la naissance d’Anna sa petite sœur, son attention se fixe sur le lieu d’où apparaît la «différence» qu’il veut d’abord méconnaître. Le «fait-pipi» (Wiwimacher ) d’Anna est tout petit, dit-il: il grandira! Maman a un grand «fait-pipi»... Le cheval aussi... Seuls les objets inanimés n’en ont pas. Telle est l’affirmation liminaire qui traduit, pour le père et pour Freud, la mise en parole de l’angoisse du petit Hans. Confronté pour la première fois au mystère de la naissance (sont-ce les cigognes qui apportent les bébés?), à l’intégrité de son corps propre, du fait de la dissemblance entre le sien et celui d’Anna, il élit le pénis qui est sien (mais qui peut manquer à d’autres) comme le symbole, l’objet garant, mais menacé, de l’ordre premier du monde. Le développement de la phobie des chevaux apparaît ainsi comme une opération qui vise tout autant la sauvegarde des avantages acquis que les ouvertures du désir. Le petit Hans est à la fois conservateur et progressiste. Il en résulte une faille en lui et devant lui: quelle est la puissance tierce, médiatrice ou terrorisante qui en surgira? Le cheval intervient ici comme substitut d’un exigible père castrateur (auquel le papa de Hans ne ressemble pas vraiment).

Freud, dès cette époque, sait que le mythe œdipien, comme dessin structural, est nécessaire pour rendre compte de l’accession de tout être humain à la réalité de l’autre et à la vérité du désir. Il sait, à partir de son postulat de la libido et de sa recherche des lois qui gèrent son économie, que le mécanisme qui rend compte de l’angoisse passe par le refoulement. Tout au long de l’observation du petit Hans (lequel, en définitive, adopte les interprétations qui lui sont données, et renonce à la «bêtise»), une concurrence se révèle entre ce qui éveille, de l’extérieur, l’enfant au désir et aux ambiguïtés du langage, inducteur d’inconscient, et ce qui le pousse, de l’intérieur, à la satisfaction de ses tendances libidinales.

L’angoisse

Jusqu’à la fin de son œuvre, Freud ne s’est pas estimé satisfait de sa théorie de l’angoisse. Selon un premier schéma, celle-ci surgit lorsque, de par un processus de refoulement qui a détaché la libido de ses «objets d’investissement», une quantité d’énergie libidinale, désormais libre, et non plus fixée, ne trouve pas à se réinvestir. Dans l’hystérie de conversion, la libido réinvestit des fonctions ou segments corporels. C’est en s’appuyant sur une telle hypothèse que Freud, dans son étude sur le petit Hans, peut proposer l’expression d’hystérie d’angoisse comme désignant la structure névrotique d’élection pour le surgissement et l’organisation des phobies. Cette organisation est secondaire par rapport à la survenue de l’angoisse, et le choix d’un objet phobogène est une mesure défensive qui limite le danger, en raison des mesures d’évitement qu’elle permet. Le recours au cheval comme objet phobogène permet à l’enfant de savoir de quoi il a peur et de donner une figuration significative à son angoisse. En bref, cette opération implique un déplacement et une projection. Si, selon le schéma œdipien, c’est le père castrateur que craint Hans, partagé entre l’amour, l’hostilité et la jalousie, le cheval devient inconsciemment le substitut chargé de représenter et ce père et les pulsions agressives du jeune garçon. Il aide ainsi au renforcement du refoulement en proposant également un compromis: la relation tendre au père réel est, de ce fait, maintenue et facilitée.

Ultérieurement ce mode d’explication ne satisfera plus Freud. Dans une œuvre tardive (Inhibition, symptôme et angoisse , 1926), on trouve un renversement partiel de la théorie initiale: l’angoisse n’est plus le fait du refoulement de la libido; elle précède celui-ci; elle est en fait un signal d’alarme du moi en danger. À la prévalence accordée d’abord au point de vue quantitatif (énergie libidinale non fixée) succède donc une conception qui remet au premier plan le rôle inducteur du sens et de la symbolique des situations qui menacent le moi.

C’est la concurrence entre ces deux types d’explication qu’on retrouvera dans les études des disciples de Freud, avec une option soit pour le point de vue économique soit pour la structure signifiante, la texture inconsciente des situations phobogènes. Il faut citer ici les travaux de Melanie Klein sur la vie phantasmatique des jeunes enfants, travaux qui mettent en lumière l’activité pulsionnelle archaïque prégénitale et la notion d’angoisse de rétorsion à partir des émergences sadico-orales et sadico-anales.

Un autre éclairage sur la question apparaît ultérieurement avec les travaux de Jacques Lacan. Pour ce dernier, le moi au sens freudien est une formation imaginaire, un lieu où se réfléchissent, pour le sujet désirant (le je ), les signes d’identification, en fait les «signifiants» qui le concernent dans son identité. Le moi est donc la somme des imagos qui, d’âge en âge, et au prix de remaniements successifs, fonde le statut narcissique de l’individu, comme miroir à la fois protecteur et aliénant. Les différentes étapes de l’itinéraire œdipien dans lequel est engagé l’enfant permettent de pointer les moments carrefours où une certaine imago du moi devient caduque. À partir d’une première relation de maternage où l’enfant se définit d’abord comme centre d’un monde placé sous la toute-puissance de la mère, l’instance tierce qui surgit du côté du père phallique, en tant que représentant du désir et de la Loi, remet en question, en lui conférant un mode triangulaire, la relation duelle initiale et originelle. La mère est relativisée dans sa toute-puissance, et l’enfant désormais excentré de sa position première et privilégiée. C’est, sommairement, lorsqu’une nouvelle brèche ouvre sur un autre inconnu, lorsque l’enfant perd ses repères narcissiques et d’identification, lorsqu’une discordance s’impose entre le développement pulsionnel et la diversification du langage du désir chez les autres, que l’angoisse peut surgir. À ce titre, on peut dire que la définition classique de l’angoisse (peur sans objet) est à remanier. Chaque fois que son moi devient indéfinissable, parce que surgit un nouveau regard inconnu qui fait de ce moi un objet encore sans nom, le sujet, innommable et chosifié, vit l’angoisse de se perdre. Par suite, il lui devient nécessaire de mobiliser toutes les réserves de significations connues, toutes les «batteries signifiantes» déjà accessibles, pour que lui-même retrouve le sens de son existence en se confirmant dans la permanence de son identité. On conçoit donc ici la logique qui préside à l’élection d’un objet phobogène.

La névrose phobique de l’adulte

La «névrose phobique de l’adulte» (expression généralement préférée, à l’heure actuelle, à celle d’hystérie d’angoisse) n’est pas forcément la simple réactualisation d’une phobie infantile. Le fait de retrouver dans l’anamnèse d’un névrosé un tel phénomène (presque constant dans l’enfance) ne donne pas encore la clé qui permet de comprendre l’organisation secondaire ou tardive d’un syndrome névrotique. La différence se comprend aisément si l’on oppose une crise de maturation chez l’enfant et un échec de maturation chez l’homme. C’est en passant par la description sommaire des manifestations les plus classiques de névrose à thème phobique qu’on pourra définir les enjeux inconscients qui se trouvent en cause.

Agoraphobie et claustrophobie

L’agoraphobe (C. Westphall, 1871) a souvenir du jour où, dans une rue trop large, ou devant quelque étendue trop vaste, il a été pris d’un malaise indéfinissable et insurmontable: angoisse, palpitations, sueurs profuses, sentiment d’impuissance et de déréalisation du monde environnant, etc. Depuis, il doit borner ses sorties à un périmètre étroitement délimité. En outre, il vit dans la dépendance puérilement exigeante d’une présence familière et protectrice (mère, conjoint). Il s’ensuit évidemment un renoncement à tout ce qui, dans une vie adulte et responsable, s’appuie sur une aptitude assumée à l’autonomie et à la liberté. Toutes les observations concourent à démontrer que l’accès premier n’est pas venu dans n’importe quelles circonstances, mais qu’il peut être relié à une situation traumatisante, à une blessure affective, à une modification imprévue, ou trop chargée de sens, dans la vie sexuelle, familiale ou sociale du patient.

On retrouvera dans l’enfance et l’adolescence les lignes de fragilisation du moi et de l’imago du corps sexué, à partir des particularités de la constellation familiale, des avatars de la puberté, des rencontres de l’immaturité avec la réalité sexuelle. Que la solitude de la rue soit pour l’agoraphobe synonyme de menace de séduction sexuelle ou que la perte d’un décor familier (qui sert de miroir) prive le malade d’une référence visuelle qui l’assure dans le «sentiment d’être soi dans son corps», il ne s’agit là que des deux versants d’un même problème.

Le claustrophobe (B. Ball, 1879) pose apparemment le problème inverse. Il lui faut toujours avoir en main la clé qui lui permettra de sortir de tout espace clos ou de toute situation contraignante, métaphoriquement verrouillée. Ainsi témoigne-t-il, dans son intuition angoissée, de ce qui pourrait le mettre à la merci d’une loi sans appel, vu la précarité de son statut subjectif. Mais l’issue de secours, dont il tient à toujours vérifier l’existence, est-elle liée à l’implacabilité des lois mauvaises qui l’incarcèrent, ou vient-elle tout autant d’un désir inconscient de retour à une passivité première? Ici, les thèmes sexuels s’inscrivent à un double niveau: échapper à la loi de l’autre et échapper à soi-même. La tentation masturbatoire chez l’enfant est un danger qui vient de l’intérieur, surtout si elle est maladroitement culpabilisée par l’entourage; mais certaines formes d’amour maternel captatif, enveloppant et sourd, enferment l’enfant dans un claustrum à la fois fascinant et étouffant. Le «passe-partout» libérateur, réclamé comme réassurance, témoigne rétrospectivement de l’impossibilité de la communication avec l’autre. Mais le portier défaillant, c’est également le tiers paternel, récusé à la fois par la mère et par l’enfant. Aussi les claustrophobes n’exigent-ils la clé de leur prétention solitaire de liberté que pour mieux annuler le tiers comme inducteur, et autre tenant du désir sexuel.

Les phobies d’impulsion

Les phobies d’impulsion constituent des formes intermédiaires entre la typique hystérie d’angoisse et la névrose obsessionnelle. Il convient d’abord de séparer, à leur sujet, ce qui, dans les craintes alléguées par le névrosé, vise à protéger l’autre et ce qui le conduit à se garantir lui-même. L’angoisse de défenestration s’exprime en général sous la forme suivante: «J’ai peur d’avoir envie de me jeter par la fenêtre... (alors que je n’ai pas conscience d’avoir envie de mourir).» L’ouverture sur le vide (fenêtre, ravin, etc.) s’impose comme une fascination de la chute, et le sujet s’interroge sur ce qui, de l’intérieur de lui-même, le pousserait à s’abîmer dans la béance qui s’offre à lui, du dehors. On se trouve, là encore, face à une impossible distinction, métaphoriquement alléguée à partir d’une induction visuelle, entre ce qui vient de soi et ce qui vient de l’altérité de l’environnement. Aussi apparaît-il nécessaire de recourir à la médiation d’un tiers, toujours appelé mais toujours défini comme manquant. La situation, le lieu, la configuration imaginaire proposés par le monde extérieur peuvent ainsi être inconsciemment élus par le phobique pour remettre en question, rétroactivement, le statut de sa personnalité, qui a été insuffisamment différenciée et mal consolidée lors des étapes de maturation de l’enfance et de l’adolescence. L’enjeu est ici la totalité de soi à travers un symptôme qui plaide la cause du «tout ou rien».

Dans d’autres cas, ce sont des objets qui deviennent phobogènes, non plus pour un S.O.S. subjectif, mais en tant que symboles d’une possibilité d’agression mortifère envers l’autre. La peur des couteaux est fort banale chez certaines jeunes mères. Elles craignent que l’envie ne leur prenne, lorsqu’elles sont seules avec l’objet de leur désir (l’enfant comme substitut symbolique du phallus paternel), de tuer cette vie nouvelle qui condense et exporte, en son fruit réellement présent, le mystère de la «scène primitive» qui leur a donné naissance à elles-mêmes. Craindre d’éventrer un enfant ou de l’étrangler convulsivement, est-ce désir de sa mort de la part d’une génitrice monstrueuse? En fait n’est-ce pas plutôt la transposition adulte d’une démarche archaïque? L’enfant tente en effet, très tôt, d’assurer sa maîtrise sur le monde et d’établir la distinction entre le subjectif et l’objectif, en cassant ses jouets, en agressant ce qu’il aime, pour différencier le réel, l’imaginaire et le symbolique; l’intérieur et l’extérieur. La mère angoissée qui n’ose plus rester seule avec son rejeton ne sait pas qu’elle réédite envers lui ce qu’on ne lui a pas donné à comprendre de la problématique de «l’être et de l’avoir», dans sa propre enfance.

Les phobies revêtent bien d’autres formes cliniques. Mais il convient de noter qu’il est peu de névroses phobiques pures. Il s’agit moins là d’un processus morbide autonome et toujours individualisable que d’un syndrome qui peut éclore sur divers terrains psychonévropathiques. On a pu ainsi décrire des formes d’associations ou d’alternances entre phobie et obsession, entre phobie et perversion, entre phobie et état délirant. En outre, dans le déroulement même d’une cure psychanalytique, le surgissement d’un état phobique peut témoigner d’un moment de restructuration au sein d’une situation névrotique ou psychotique plus complexe. En résumé, on retiendra que le phobique tente de se faire sur mesure les peurs qui le protègent de l’angoisse. Cette angoisse elle-même, signal d’alarme du moi, pose la question du statut du sujet, plus ou moins privé d’une médiation de vérité entre deux «étrangéités» menaçantes: sa propre réalité intérieure, face aux inconnues de l’altérité du monde.

phobie [ fɔbi ] n. f.
• 1880; isolé des comp. sav. en -phobie
1Psychol. Crainte excessive, maladive et irraisonnée de certains objets, actes, situations ou idées. acrophobie, agoraphobie, claustrophobie, éreuthophobie, hydrophobie, photophobie, zoophobie. Obsessions et phobies. Les phobies, manifestations des névroses.
2Cour. Peur ou aversion instinctive. dégoût, haine, horreur. Flaubert et « sa phobie des pronoms relatifs » (Thibaudet).

phobie nom féminin Crainte angoissante et injustifiée d'une situation, d'un objet ou de l'accomplissement d'une action. Aversion très vive pour quelqu'un ou peur instinctive de quelque chose : Avoir la phobie de la foule.phobie (synonymes) nom féminin Aversion très vive pour quelqu'un ou peur instinctive de quelque chose
Synonymes :
- effroi
- exécration
- haine
- horreur
- terreur

phobie
n. f.
d1./d PSYCHIAT Peur irraisonnée, angoissante et obsédante, de certains objets, de certaines situations.
d2./d Cour. Crainte ou aversion. Il a la phobie du travail.

⇒PHOBIE, subst. fém.
A.PSYCHOPATHOL. Symptôme prévalent des névroses obsessionnelles, caractérisé par une réaction d'angoisse ou une répulsion ressentie devant le même objet, la même personne ou une situation bien déterminée. Herr est un homme qui ne peut pas voir un soldat. C'est une maladie, c'est une idée fixe. C'est une phobie, une psychose (PÉGUY, Argent, 1913, p.1207). Goldvasser est trop artiste pour ne pas avoir sa névrose; la sienne, c'est la peur des maladies; sa phobie de la contamination est célèbre (MORAND, Eur. gal., 1925, p.118). Il aurait fallu entrer dans le mystère de ses timidités, de ses phobies, de ses insuffisances, de ses obsessions d'anxieux (MAURIAC, Myst. Frontenac, 1933, p.45):
1. Parmi les anomalies mentales, l'une des plus curieuses est celle qu'on nomme la phobie. Les analystes définissent, en général, la phobie comme une peur excessive qui a son origine dans une série complexe de situations et de rapports, et qui conduit à l'hostilité, à une agressivité refoulée ou à un sentiment de culpabilité très intense. Ces sentiments enfouis s'expriment plus tard sous la forme d'une peur intense et en apparence irrationnelle des lieux clos ou élevés, des chats, des orages, ou de quelque autre parmi la quasi-infinité des objets possibles de phobie, l'objet choisi ayant un rapport direct ou indirect avec l'un des événements qui est à la base du déclenchement.
G. CERMINARA, De nombreuses demeures..., 1982, p.171.
SYNT. Phobie du cancer, des contacts, de défenestration, des instruments tranchants et pointus, des moyens de transports, d'impulsion; phobie scolaire.
B.P. ext. Aversion très vive, irraisonnée ou peur instinctive. Phobie de l'automobile, du mariage, des moustiques, de la poussière, du tabac; être sujet à d'étranges phobies. Du temps où elle était en bois, New-York a conservé la phobie de l'incendie. Partout des escaliers de sûreté, des panneaux ignifugés, des dégagements, des sorties de secours (MORAND, New-York, 1930, p.214). J'ai constaté que la plus importune de mes phobies, et la plus persécutante, est celle de la mort. Elle est dans tous mes livres (GREEN, Journal, 1932, p.118):
2. Les poissons-lanternes sont parmi les plus étonnants. (...) leur phobie de la lumière est telle qu'un beau clair de lune suffit à les refouler dans les profondeurs (...) en dépit même d'un festin inespéré, les toutes premières lueurs de l'aube suffisent aussi à déclencher leur retraite précipitée vers l'abîme.
Le Figaro Magazine, 25 juin 1983, p.84.
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. 1935. Étymol. et Hist. 1897 (Th. RIBOT, Psychol. des sentiments, p.220). Empl. indépendant du second élém. de termes tels que aérophobie, agoraphobie, hydrophobie, v. aussi élém. -phobie; cf. angl. phobia 1786 v. NED Suppl.2. Fréq. abs. littér.:53. Bbg. LECLERC (G.). Il y a phobie et phobie. Néol. Marche. 1980, n° 16, pp.19-82.

phobie [fɔbi] n. f.
ÉTYM. V. 1880; isolé des comp. sav. en -phobie.
1 Didact., cour. Peur, crainte angoissante spécifiquement liée à certains objets, certains actes, certaines situations, certaines idées ( Acrophobie, aérophobie, agoraphobie, algophobie, anémophobie, claustrophobie, éreuthophobie, nosophobie, phobophobie, photophobie, zoophobie…). || Phobie d'impulsion. || Les phobies se rencontrent fréquemment dans les névroses et dans certaines psychoses (ex. : névrose obsessionnelle, hystérie d'angoisse, schizophrénie). || Obsessions et phobies. || Phobie et angoisse, et anxiété. || Personne sujette à la phobie. Phobique.
1 Sur la question des peurs morbides, actuellement désignées sous le nom de phobies, il existe un très grand nombre d'observations, notes, mémoires, qui ne font que s'accroître chaque jour (…) J. Falret et Westphal (dans un travail sur l'agoraphobie, 1872) paraissent les premiers qui soient entrés dans cette voie. À la peur des espaces de Westphal et à la crainte du contact de Falret, s'en ajoutent bientôt d'autres et l'on traverse une première période, où se produit une véritable inondation de phobies, ayant chacune son nom spécial (…) Toute manifestation morbide de la crainte est aussitôt dénommée par un vocable grec ou réputé tel et nous avons (…) jusqu'à (…) la triakaidekaphobie (peur du nombre treize !).
Th. Ribot, Psychologie des sentiments, 1896, p. 220.
2 (Déb. XXe). Cour. Peur ou aversion instinctive. Dégoût, haine, horreur. || Il a une vraie phobie de l'uniforme, la phobie de l'uniforme (→ Il est allergique à…).
2 Flaubert y est conduit d'abord (à l'emploi du participe présent) et surtout par sa phobie des pronoms relatifs, par sa timidité excessive devant les qui et les que.
A. Thibaudet, Gustave Flaubert, p. 236.
DÉR. Phobique. V. Phobophobie.

Encyclopédie Universelle. 2012.