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torte

⇒TORS, TORSE ou TORTE, adj. et subst. masc.
I. — Adjectif
A. — [En parlant d'une matière souple] Qui est tordu; qui a été soumis à une torsion. Soie torse. Les fils sont de tors droit ou de tors gauche (...). Dans le fil tors gauche, les spirales montent de droite à gauche (ARAUD, Ch. THOMAS, Fabric. drap, 1921, p. 86).
B. — Spécialement
1. ARCHIT., ÉBÉN. Colonne torse. Colonne en bois ou en pierre dont le fût est contourné en spirale. Les chaises n'avaient pas été changées depuis le commencement du seizième siècle et offraient cette forme carrée, ces colonnes torses, et ce petit dossier garni d'une étoffe à franges dont la mode fut si répandue que Raphaël l'a illustrée dans son tableau appelé la Vierge à la chaise (BALZAC, Rech. absolu, 1834, p. 171). Un autel de la décadence hausse ses colonnes torses de marbre rouge (A. FRANCE, P. Nozière, 1899, p. 244).
2. MENUIS. Mèche torse à couteaux rabattus. ,,Mèche à lèvres terminée par une vis conique de centrage, utilisée pour percer les bois durs`` (PEYROUX Techn. Métiers 1985).
C. — [En parlant de certaines parties du corps de l'homme ou de qq. animaux] Qui présente une ou des courbures anormales, irrégulières. Synon. arqué, difforme. Des nains aux pieds tors, au corps gibbeux et difforme, dont les grimaces avaient le privilège de dérider la majesté granitique du Pharaon (GAUTIER, Rom. momie, 1858, p. 236). Des cordons multicolores serraient étroitement ses jambes torses (FLAUB., Hérodias, 1877, p. 166).
D. — Littér. Synon. de sinueux, tortueux. Branches tortes. Une tempête d'équinoxe, bouleversant la mer, emprisonna les îliens sur leur récifet ce furent veillées et conciliabules, courants d'air glapissants dans les ruelles tortes, repas chiches coupés de phrases lentes (QUEFFÉLEC, Recteur, 1944, p. 36).
Au fig. Retors, pervers. C'est deux pays qui se sont battus: le mien et un autre. Le mien, droit et solide, l'autre tors et le cœur pourri (GIONO, Baumugnes, 1929, p. 20).
Rem. C'est dans ces deux dernières accept. que l'on trouve parfois la forme fém. torte.
II. — Subst. masc., TECHNOL.
A. — Degré de torsion donné aux brins pour former un fil, une corde. V. supra I A ex. de Araud, Ch. Thomas.
Sur le tors. Dont le fil de trame a une torsion contraire au fil de chaîne. V. détors ex.
B. — ,,Gros cordon de soie employé en tapisserie`` (PEYROUX Techn. Métiers 1985).
Prononc. et Orth.:[], fém. [], []. Homon. taure, tore, tort, formes de tordre et au fém. le subst. torse. Att. ds Ac. dep. 1694; 1694, 1718: ,,on dit quelquefois, torte, au féminin``; dep. 1740: ,,on dit populairement, torte, au féminin``. Voir Lar. Lang. fr.: ,,on trouve encore l'anc. forme du féminin torte`` et ROB. 1985: ,,torse ou (rare) torte``. Étymol. et Hist. A. Adj. 1. 1240-80 « qui est tordu » la torse (voie) (B. DE CONDÉ, Dits et Contes, 208, 113 ds T.-L., s.v. tordre); ca 1274 baston tors (Grandes Chroniques de France, éd. J. Viard, t. 3, p. 242); 1436 soye torse (Exéc. test. de Jehenne de Velle, A. Tournai ds GDF. Compl.); 2. 1559 tors boys « pièce de bois dont les fibres sont en spirale » (Journal du Sieur de Gouberville, 25, 7 ds POPPE, p. 64); 3. 1671 archit. colonne torse (POMEY); 4. 1694 sucre tors (Ac.); 5. 1778 bot. (LAMARCK Flore fr. t. 1, p. 188). B. Subst. masc. 1. [2e moit. XIIe s. [ms. moit. XIVe s.] tors plur. « torsades » ([Conte de] Floire et Blancheflor, éd. M. M. Pelau, 41)] 2. a) 1723 tors sans filé « soie ouvrée qui entre quelquefois dans la chaîne des étoffes » (SAVARY); b) 1845 « gros cordon de soie employé en tapisserie » (BESCH.); 3. 1754 « action de tordre les fils; degré de torsion qu'on fait prendre aux pièces de cordage » (Encyclop. t. 4, p. 225b); 1876 tors droit, tors gauche (Lar. 19e). Anc. part. passé adj. et subst. de tordre; conjointement existe la forme tort, torte (issue du part. passé lat. class. tortus), 1119, PHILIPPE DE THAON, Comput, éd. E. Mall, 2660. Fréq. abs. littér.:34.

1. tors, torse [tɔʀ, tɔʀs] ou (rare) torte [tɔʀt] adj.
ÉTYM. V. 1119, torte; tors, XIIIe; anc. p. p. de tordre.
1 Qui est tordu (matière souple). Tordre (I., 1.). || Fil tors. || Soie torse ( Organsin). || Frange torse. Torsade.
2 (1671). Archit. || Colonne (cit. 3) torse, à fût contourné en spirale. Fig. || « La colonne torse de la fumée d'une fonderie » (Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, VI, IV, 5).Verre à pied tors.
1 (…) des cannes torses que l'on fait à Sparte (…)
La Bruyère, les Caractères de Théophraste, Du complaisant.
3 Qui est tordu (II.); qui présente des courbes anormales (parties du corps). Contourné, difforme. || Jambes arquées (cit. 2) et torses. Tortu. || Des nains (cit. 3) aux pieds tors.REM. Dans ce sens, on rencontre le fém. torte, de l'anc. p. p. du v. tordre (→ Tort, n. m.). || Torte, boiteuse et déhanchée (cit. 2, Montaigne). || « La jambe torte et circonflexe » (cit. 2).(V. 1460). Littér. Tortueux.
2 Danton, la bouche torse, demi-homme et demi-taureau, dans sa laideur royale, troublait les cœurs de son masque tragique (…)
Michelet, Hist. de la Révolution franç., VIII, III.
2.1 Je marchais en ligne droite, en diagonale, en zigzag, en rond. J'allais les pieds croisés, les pieds tors. Je faisais des grimaces avec mes jambes. J'essayais le grand écart. Je m'évertuais à ne plus boiter.
B. Cendrars, Moravagine, in Œ. compl., t. IV, p. 98.
3 Voilà donc le point où la haine n'est plus rien qu'une racine torse entre toutes les autres : et si elle a la forme du serpent ou du ver, ce n'est point pour faire horreur (…)
André Suarès, Trois hommes, « Dostoïevski », V.
4 Mille délicieuses façades, fardées de jonquille et de rose, des toits et des pignons de toutes formes, des rues tortes, des places de guinguois (…)
Émile Henriot, la Rose de Bratislava, III.
5 Au début, Antinoüs emprunté et cherchant de quel pli du ciel allait jaillir la torte force, surveilla du coin de l'œil le faux piteux.
J. Giono, Naissance de l'Odyssée, Pl., t. I, p. 86.
CONTR. Direct, 1. droit. — Détors.
DÉR. Tors, torsade, 2. torse, torser, torseur, torsin.
HOM. Taure, tore, torr, tort. — (Du fém.) Torse.

Encyclopédie Universelle. 2012.