ROUSSILLON
ROUSSILL
Pays de contacts entre les Pyrénées et la Méditerranée, le Roussillon associe montagne et mer en un ensemble harmonieux par l’intermédiaire d’une magnifique plaine, qui annonce déjà les jardins du Levant ibérique. Il comprend donc, d’ouest en est, le haut plateau de Cerdagne, à plus de 1 000 mètres d’altitude, entre la frontière d’Espagne, les pays de l’Aude et la vallée de l’Ariège; les pittoresques vallées de la Têt, du Tech et de l’Agly, offrant chacune une personnalité propre qui a donné naissance aux régions du Conflent, du Vallespir et du Fenouillet; la plaine roussillonnaise bâtie avec les alluvions des Pyrénées, qui la dominent avec le beau massif du Canigou; la côte méditerranéenne, enfin, plate vers le nord, rocheuse vers le sud, là où les Albères, ultime prolongement des Pyrénées, s’enfoncent directement dans la mer. Le climat méditerranéen donne son unité à des régions aussi diverses, où les influences septentrionale, méridionale et orientale se sont souvent affrontées au cours d’une histoire très originale. Quelques grandes périodes peuvent y être distinguées.
Le Roussillon romain résulte de la conquête de la péninsule Ibérique par les Romains et de leur volonté d’assurer leurs communications jusqu’aux Pyrénées, à travers la Gaule méridionale. Le Roussillon forme alors une cité de la Gaule narbonnaise, ayant pour capitale l’ancien oppidum de Ruscino, divisée en pays (pagi ), le pagus Ruscinonensis (Roussillon), le pagus Vallis Asperi (Vallespir), le pagus Confluentis (Conflent) et le pagus Liviensis (Cerdagne avec la ville espagnole de Llivia). Deux ports, Collioure (Cocoliberis) et Port-Vendres (portus Veneris), favorisent le trafic maritime. Il semble que les Romains aient transformé le pays par une exploitation économique de type colonial, fondée sur la production et l’exportation de céréales et de minerai de fer (Canigou). Mais les invasions (Wisigoths, Arabes, Francs) ruinent en partie le Roussillon, qui rentre finalement dans l’unité de la Gaule, à la suite de la reconquête de la Septimanie par Pépin le Bref, entre 752 et 759.
Les Carolingiens, désireux de s’opposer à l’Islam ibérique (califat de Cordoue), organisent alors sur la frontière pyrénéenne un grand commandement militaire, la marche d’Espagne, qui comprend, outre la Septimanie, les comtés maritimes catalans: Roussillon, Empuries, Gérone et Barcelone. Mais la décadence carolingienne et le développement de la féodalité entraînent assez rapidement l’indépendance de la Catalogne, Roussillon compris, vis-à-vis de l’Empire. Cet effondrement des structures politiques et administratives suscite alors dans l’Église le réel désir d’un ordre nouveau, générateur de paix. On assiste à la création de monastères très puissants aux Xe et XIe siècles, comme Saint-Michel-de-Cuxa, qui, appuyés par la papauté, cherchent à s’émanciper aussi bien de la tutelle comtale que du contrôle épiscopal. Ces monastères fondent des paroisses sur leurs domaines et assurent ainsi le développement de l’art roman dans les campagnes. L’Église est d’ailleurs bientôt appuyée par les comtes de Barcelone, qui transforment progressivement la région en une véritable monarchie féodale, allant de l’Aragon à la France méridionale; les villes reçoivent des chartes de franchises, comme Perpignan en 1197. Le développement économique est réel, surtout lorsque le danger musulman s’estompe avec l’écroulement de l’empire omeyyade. La paix permet l’épanouissement d’un Roussillon roman dont on retiendra les cloîtres (Saint-Michel-de-Cuxa, Elne), la sculpture (tribune de Serrabone), les fresques (Saint-Martin-de-Fenollar).
La croisade contre les albigeois allait être fatale à ce royaume d’Aragon, dont le souverain Pierre le Catholique est défait et tué, en 1213, à la bataille de Muret. La France méridionale (sauf Montpellier) lui est arrachée et reprise en main par Paris; mais le Roussillon, par le traité de Corbeil de 1258, reste catalan. Pas pour longtemps; en effet, le roi d’Aragon, Jacques le Conquérant, en 1262, partage ses possessions entre ses deux fils, et, face à l’Aragon, à la Catalogne et à Valence qui restent unis, un nouveau royaume se constitue, avec Majorque, Ibiza, le Roussillon et Montpellier. L’avenir du Roussillon est désormais méditerranéen et le restera près d’un siècle jusqu’en 1344. Perpignan devient alors la capitale politique, économique et artistique du nouveau royaume et conserve encore aujourd’hui le palais des rois de Majorque. Elle redistribue les draps flamands vers les centres de la Catalogne; bientôt s’y créent une industrie drapière originale et une industrie du cuir. Tout le Roussillon profite de cette expansion industrielle et commerciale, et Collioure en devient le grand port. Mais le royaume de Majorque retombe au milieu du XIVe siècle entre les mains du royaume d’Aragon, sauf Montpellier qui revient à la France. Le Roussillon est de nouveau annexé à la Catalogne et le restera jusqu’au XVIIe siècle. Perpignan va souffrir de la prééminence de Barcelone et son déclin économique est manifeste; le pays sera alors l’enjeu des luttes franco-espagnoles, d’abord sous le règne de Louis XI, puis sous celui de Louis XIII. Catalan de cœur, il ne veut pas perdre sa langue et ses libertés au profit de la Castille, et c’est la France de Louis XIV qui en profitera pour l’annexer au traité des Pyrénées, en 1659.
Tout en continuant à se considérer comme catalan, le Roussillon n’a pas opposé une résistance sérieuse à l’installation du régime français. Perpignan devient la résidence d’un intendant et la francisation accomplit de rapides progrès au XVIIIe siècle, du moins dans les classes dirigeantes. La Révolution en fait le département des Pyrénées-Orientales. Au XIXe siècle, la construction des chemins de fer exerce une action décisive sur l’évolution de l’économie du Roussillon. Les cultures traditionnelles, comme le blé et l’olivier, disparaissent. En revanche, la vigne, les cultures maraîchères et fruitières fondées sur l’irrigation se développent d’une manière considérable, principalement les cultures fruitières. L’industrie du tourisme y a fait aussi de grands progrès, le Roussillon sachant de mieux en mieux tirer parti de la pureté de son ciel, de la beauté de ses sites naturels, de l’originalité de son folklore (sardanes dansées au son des coblas, procession de la Sanch à Perpignan pendant la semaine sainte). Le Roussillon semble ainsi avoir réussi à concilier sa personnalité, qui reste catalane, avec sa nationalité française.
Roussillon
ancienne province française qui forme auj. le département des Pyrénées-Orientales; cap. Perpignan. (V. Languedoc-Roussillon [Région]). Hist. - Partie de la Narbonnaise sous l'Empire romain, le Roussillon fut disputé entre le France et l'Espagne, qui le posséda presque sans interruption de 1172 au XVIIe s.: les Français l'occupèrent en 1640 et l'acquirent par la paix des Pyrénées (1659).
Encyclopédie Universelle. 2012.