SEFIROT
SEFIR
Terme technique de la kabbale, qui apparaît la première fois dans le texte anonyme du Sefer Yesira , où sefirot désigne les dix nombres primordiaux ou idéaux (à partir du sens littéral de la racine SFR: dénombrer). Dès les premiers écrits kabbalistiques, au XIIe siècle, il est employé avec le sens, à la fois plus large et plus précis, des dix niveaux de l’émanation à partir d’En-sof (Infini).
Ces dix degrés constituent le monde divin, ou la manifestation des attributs hypostasiés de l’essence divine, avec laquelle ils sont indissociablement liés. Selon la nomenclature la plus courante, mais nullement exclusive, les dix sefirot sont en ordre descendant: la Couronne suprême (Keter Elyon ), la Sagesse (Hokma ), le Discernement (Bina ), la Force ou Rigueur (Gebura ), la Grâce (Hesed ), la Splendeur (Tif’eret ), la Victoire (Nesah ), la Majesté (Hod ), le Fondement du Monde (Yesod ) et le Royaume (Malkut ). Cette dernière sefira, la dixième, est un principe féminin, réceptif, qui reçoit l’émanation des sefirot supérieures et la transmet au monde inférieur. À l’intérieur du monde séfirotique, les attributs sont combinés suivant divers aspects. Leur lien est souvent représenté dans un schéma graphique, appelé symboliquement l’«arbre séfirotique».
On distingue couramment: entre les trois supérieures, de nature purement intellectuelle, et les sept inférieures, appelées sefirot d’édifice, qui jouent le rôle de causes secondaires par rapport au monde extradivin; entre les sefirot du côté droit de l’arbre, dont la nature est purement bénéfique, et les sefirot de gauche, qui représentent la rigueur, le jugement; la splendeur est le principe d’équilibre qui rétablit l’harmonie entre ces deux derniers groupes.
Les principaux problèmes soulevés au sujet de la doctrine des sefirot — qui reflètent les influences gnostiques des origines — ont trait à l’introduction d’un principe féminin, Malkut, avec la Shekina, à l’intérieur du monde divin, et à celle de la présence du «Jugement», c’est-à-dire de la racine du mal, qui se trouve ainsi haussée également au niveau de la divinité.
⇒SEFIROT(H), SEEPHIROT(H), (SEFIROT, SEFIROTH, SÉFIROT, SÉFIROTH, SEEPHIROT, SEEPHIROTH, SÉEPHIROT, SÉEPHIROTH)subst. fém. plur.
JUDAÏSME
A. — [Dans le Sefer Yetsira « livre de la Création » ou « de la Formation » (Ve s.?) dont l'enseignement est attribué à Abraham] Les dix entités (souffle de Dieu, air, eau, feu et les six directions de l'espace) qui comptent parmi les trente deux voies de la Sagesse selon lesquelles Dieu a créé le monde. Par les sephiroth le Yetsira applique le principe du dénaire. Par le truchement des [22] lettres [de l'alphabet hébraïque] il appliquera les principes du ternaire, du septénaire et du duodénaire (G. CASARIL, Rabbi Siméon Bar Yochaï et la Cabbale, 1961, p. 42). Les dix sont les dix nombres primordiaux. Le terme est dérivé de la racine hébraïque signifiant compter. L'auteur a utilisé à la place de misparim [le terme habituel] pour indiquer qu'il ne s'agit pas de nombres ordinaires mais de nombres en tant que principes métaphysiques de la création (R. GOETSCHEL, La Kabbale, 1985, p. 36).
B. — [Dans la kabbale, à partir du XIIe s.] Les dix niveaux ou les dix puissances de l'émanation ou de la manifestation du divin défini comme l'En (ou Aïn) , le Sans-Fin, Dieu-Immanent (d'apr. Encyclop. univ. t. 20 1975, p. 1755 et R. GOETSCHEL, op. cit., pp. 101-102). Pour rendre Son existence perceptible et Lui-même compréhensible (...) [Dieu] a émis, depuis la lumière de son Moi infini, dix rayons de lumière successifs qui ont servi d'intermédiaires à Ses manifestations dans le fini. Ces dix « rayons de lumière » successifs sont les Sefiroth, appelés aussi « degrés », et qui (...) sont des qualités et des agents de Dieu (I. EPSTEIN, Le Judaïsme, trad. par L. Jospin, 1962 [1959], p. 222).
— Au sing. Sefirah, (h). La dixième et dernière Sefirah est appelée Malkhut (Royaume) et représente l'harmonie de toutes les Sefiroth; c'est la Présence de Dieu dans l'univers (I. EPSTEIN, Le Judaïsme, trad. par L. Jospin, 1962 [1959], p. 223). Le Bahir [livre de la Clarté rédigé en Provence entre 1185 et 1200], en établissant la série des dix Paroles, assimilées aux dix Séphiroth du Sépher Yetsira entendit-il identifier la première Séphira, Kéther [Couronne] avec Dieu lui-même, ou détachait-il cette entité de l'essence divine? (LE BAHIR, Le Livre de la Clarté, trad. par J. Gottfarstein, 1983, p. 11).
REM. , (h)ique,(Sefirotique, Séfirotique, sephirotique, sephirothique, séphirotique, séphirothique) adj., jud. Qui est relatif, qui est propre aux sephiroth. Émanation, hiérarchie, séphirot(h)ique. De même que le péché d'Adam a causé la déchéance d'En Bas, de même la piété (...) d'Israël élèvera l'En Bas au niveau de son paradigme originel: le monde sephirotique. La piété d'Israël est donc la condition du rachat cosmique (G. CASARIL, Rabbi Siméon Bar Yochaï et la Cabbale, 1961, p. 115). Tout ce qui est réel dans l'homme, dans son être, dans son esprit, dans son âme et son corps, est « préfiguré » et actualisé par les Sephiroth. Plus l'« homme d'en bas » s'approche spirituellement de l'Unité sephirothique, plus il est proche de sa propre « Figure » infinie, l'« Homme d'en haut », qui fait éternellement un avec Dieu (L. SCHAYA, L'Homme et l'absolu selon la Kabbale, 1977, p. 35). En partic. Arbre séfirotique, séphirotique. À l'intérieur du monde séfirotique, les attributs sont combinés suivant divers aspects. Leur lien est souvent représenté dans un schéma graphique, appelé symboliquement l'« arbre séfirotique » (Encyclop. univ. t. 20 1975, p. 1756). Dans la Cabbale, la première étape consiste à se familiariser avec l'Arbre séphirotique. Sans cette clé, peu de choses peuvent être comprises (Z'EV BEN SHIMON HALEVI, La Cabbale, trad. par G. Casaril, 1980, p. 50).
Prononc. et Orth.:[]. LITTRÉ: séphiroth; ROB. 1985: séphirot. Var. avec f, avec ou sans accent, v. supra. Au sens B plutôt avec majuscule. Étymol. et Hist. 1586 plur. Sephirots (B. DE VIGENÈRE, Traicté des chiffres, f ° 73 r °); 1624 sing. Sephirot plur. Sephirots (MERSENNE, Impiété des déistes, p. 145: le troisiesme Sephirot [sic] [...] ces Sephirots); 1635 plur. Sephiroths (ID., Corresp., éd. P. Tannery, t. 5, p. 435: leurs dix Sephiroths); 1706-07 sing. Sephirah plur. Sephiroth (J. BASNAGE, Hist. des Juifs, t. 2, p. 819: il y a dix Sephiroth; p. 823: Sephirah); 1721 sing. séphirah plur. séphiroth (Trév.). Empr. à l'hébr. postbiblique se, plur. de seh « nombre, numération », dér. du verbe « compter ».
Encyclopédie Universelle. 2012.