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affamé

affamé, ée [ afame ] adj.
• fin XIIIe; de affamer
1Qui souffre de la faim. Populations affamées ( famine) . Loc. prov. Ventre affamé n'a pas d'oreilles : la personne qui a faim n'écoute plus rien. Subst. « L'effroyable misère des campagnes avait rabattu [...] des troupeaux d'affamés sur Paris » (Michelet).
2(1579) Fig. Avide, passionné (de). altéré, assoiffé. Affamé de gloire. « continuellement affamé d'un idéal qu'il n'atteint jamais » (Flaubert).
⊗ CONTR. Rassasié, repu.

affamé, affamée nom Personne qui a très faim.

affamé, ée
adj. et n.
d1./d Qui a une très grande faim. Lion affamé.
|| Subst. Nourrir les affamés.
d2./d Fig. Affamé de: avide de. être affamé de gloire, d'argent.

⇒AFFAMÉ, ÉE, part passé, adj. et subst.
A.— Part. passé de affamer.
B.— Emploi adj.
1. Qui souffre de la faim, par absence ou privation de nourriture (cf. affamer A 1) :
1. ... « La France est couverte de soldats et même d'étrangers; Paris est bloqué et affamé, les campagnes pillées et épuisées, les églises même saccagées; ... »
P. DE BARANTE, Hist. des ducs de Bourgogne, t. 3, 1824, p. 181.
2. S'il n'avait pas fumé depuis longtemps, il me parut vraisemblable qu'il n'avait pas mangé depuis quarante-huit heures au moins. Il dévorait comme un loup affamé.
P. MÉRIMÉE, Carmen, 1847, p. 8.
3. La grue est un oiseau constamment affamé, d'intelligence courte et de pied allongé.
F. JAMMES, Les Géorgiques chrétiennes, 1912, p. 46.
Proverbe. Ventre affamé n'a pas d'oreilles. Celui qui a faim n'écoute guère ce qu'on lui dit :
4. Vous êtes aises comme des rats en paille; vous avez le dos au feu et le ventre à table; on vous prêche et vous n'écoutez pas; je le crois bien, ventre affamé n'a point d'oreilles; mais aussi rira bien qui rira le dernier.
R. DE GOURMONT, Esthétique de la langue française, 1899, p. 281.
Var. Ventre affamé n'a point de morale (P.-J. PROUDHON, Qu'est-ce que la propriété?, 1840, p. 188).
2. P. ext.
a) Vx. Écriture affamée (« déliée »), habit affamé (« où l'on a trop économisé l'étoffe ») : cf. affamer A 2.
b) Emplois techn.
CONSTR. ,,Se dit d'un bloc de pierre, de marbre ou de bois, qui, après l'ébauchage, n'a plus assez de matière pour qu'on puisse donner au travail fini les dimensions prévues.`` (CHABAT t. 1 1875).
GÉOL., AGRONOMIE
Sol affamé. Qui ne retient pas l'eau, peu productif.
Terre affamée. ,,Qui a perdu ses substances fertilisantes, en particulier qui a été épuisée par des plantes adventices.`` (PLAIS.-CAILL. 1958) :
5. Le terrain maigre est « ganit », ce qui signifie affamé, tandis que le gras se contente de peu.
J. DE PESQUIDOUX, Le Livre de raison, t. 2, 1928, p. 4.
3. Au fig. et littér.
a) Affamé de + subst. ou verbe à l'inf. Passionnément avide de, animé du vif désir de.
[Suivi d'un subst., inanimé abstr.] Affamé d'amour, de justice, de vérité :
6. Pourquoi mon âme n'est-elle pas affamée de justice et de vérité comme mon corps de nourriture et mes sens divers des excitations accoutumées?
MAINE DE BIRAN, Journal, 1820, p. 277.
7. ... je lui ouvris mon cœur, gros d'affection; j'essayai de la toucher par l'éloquence d'une plaidoirie affamée d'amour, et dont les accents eussent remué les entrailles d'une marâtre.
H. DE BALZAC, Le Lys dans la vallée, 1836, p. 20.
Rem. Syntagmes littér. : affamé d'argent (A. THIBAUDET, Réflexions sur la littérature, 1936, p. 74); affamé de douleur (J. MICHELET, Introduction à l'histoire universelle, 1831, p. 419); affamé de vengeance (A. DUMAS Père, Le Comte de Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 712).
[Suivi d'un subst. désignant une pers., ou d'un pron. (pers., indéf.)] Affamé de soi, l'un de l'autre, etc. :
8. Dès la première rencontre, il [Prada] voulut Benedetta. Celle-ci, il ne pouvait l'avoir comme maîtresse, elle n'était qu'à épouser; et il n'hésita pas un instant... brusquement affamé de cette pure virginité...
É. ZOLA, Rome, 1896, p. 39.
9. Délivrez-le et délivrez-moi pour la vie éternelle que vous avez promise à tous ceux qui seraient affamés de vous.
L. BLOY, Journal, 1905, p. 273.
[Suivi d'un verbe inf.] Passionnément désireux d'accomplir ou de voir s'accomplir une action :
10. ... j'écrirai cette histoire-là quelque jour, car je suis affamé de me conter à moi-même — tout ce que je fais c'est pour me faire plaisir —.
G. FLAUBERT, Souvenirs, notes et pensées intimes, 1841, p. 103.
11. Au premier regard, elle comprit que je revenais à elle épuisé, affamé de la voir et le cœur intact.
E. FROMENTIN, Dominique, 1863, p. 203.
Rem. Syntagme littér. : affamé de mourir (E. ABOUT, Le Roi des montagnes, 1857, p. 246).
b) Absol., gén. péj. Avide, cupide, insatiable.
[Appliqué à une pers.] :
12. À force de s'aimer cependant, de se le dire, de toujours fouiller d'une main prodigue dans les trésors de leur nature, ils étaient devenus d'une cupidité insatiable, et comme la vie humaine n'a pas de boissons pour toutes les soifs ni de mets rassasiants pour tous les appétits, altérés, affamés, ils se contemplaient avec douleur.
G. FLAUBERT, La Première éducation sentimentale, 1845, pp. 166-167.
13. J'avais frappé à toutes les bourses royalistes; aucune ne s'ouvrit : on me conseilla de m'adresser à M. Laffitte et M. Laffitte m'avança dix mille francs que je jetai dans la gueule des créanciers les plus affamés.
F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 4, 1848, pp. 102-103.
[Appliqué à un inanimé abstr.] Amour affamé, passion affamée :
14. Maintenant la vie était là, tout près de moi, et le temps n'était plus; et ce temps disparu mangeait ma vie. La passion affamée engloutissait mes heures, mes jours. J'aimais.
O.-V. MILOSZ, L'Amoureuse initiation, 1910, pp. 63-64.
C.— Emploi subst., fam. ou littér.
1. Celui, celle qui souffre de la faim :
15. Ils sont de force à dire à un affamé :mangez donc! et n'oublient que de lui donner du pain.
H.-F. AMIEL, Journal intime, 17 avr. 1866, p. 249.
16. ... et voici que je n'en puis plus et que je suis comme un affamé qui ne peut retenir ses larmes à la vue de la nourriture!
P. CLAUDEL, Partage de midi, 1re version, 1906, II, p. 1026.
2. Au fig.
a) Affamé de :
17. ... il faut de la pâture aux affamés de temps; quand on a dévoré cinquante ou soixante ans, on se couche en pleine fringale.
J. ROMAINS, La Vie unanime, 1908, p. 244.
Rem. Syntagmes : affamés de vertu (E. PSICHARI, Le Voyage du centurion, 1914, p. 187); affamé d'infini (M. BARRÈS, Mes cahiers, t. 6, 1907-1908, p. 64).
b) Absol. Celui, celle qui éprouve des désirs ardents. Péj. Personne que la cupidité rend avide :
18. ... je ne vois pas pourquoi les prophètes seraient dispensés de donner leur chair pour nourriture à l'affamée immense et sombre, la nature.
V. HUGO, La Légende des siècles, t. 6, 1883, p. 185.
19. ... je la saisis dans mes deux bras et je me mis à l'embrasser, mais à l'embrasser, comme un affamé, comme un homme qui attend ça depuis longtemps.
G. DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, t. 1, La Patronne, 1884, p. 699.
20. Il éprouvait, à devoir se jeter dans cette mêlée, à être confondu avec la bande d'affamés, de cupides et d'ambitieux qui se ruaient à l'assaut des honneurs, une espèce d'écœurement et de honte, comme s'il avait souillé sa soutane.
A. VAN DER MEERSCH, Invasion 14, 1935, p. 493.
3. Arg. des voleurs. L'affamée. La bouche :
21. Affamée (l') : La bouche. Allusion à la faim ou à la femme hystérique affamée de baisers (Argot des voleurs) N[ouveau].
Ch. VIRMAITRE, Dict. d'argot fin du siècle, 1894, p. 4.
STAT. — Fréq. abs. litt. :818. Fréq. rel. litt. :XIXe s. : a) 877, b) 1 476; XXe s. : a) 1 759, b) 880.

affamé, ée [afame] adj.
ÉTYM. XIIe; p. p. de affamer.
1 Qui a faim, est pressé par la faim. || Un mendiant, un naufragé affamé.Un loup, un chien affamé.Par ext. || Estomac, ventre affamé. — ☑ Loc. prov. Ventre affamé n'a pas (point) d'oreilles : celui qui a faim (ou qui est dans le besoin) n'écoute pas (→ Ventre, I., 4.).
1 Ventre affamé n'a point d'oreilles.
La Fontaine, Fables, IX, 18.
Par exagér. Qui éprouve de la faim, de l'appétit. || Les enfants sont affamés. || La multitude affamée (→ Nature, cit. 42).
2 Nous arrivâmes à son auberge affamés et fourbus.
Gide, Si le grain ne meurt, II, 1.
Par ext. Famélique. || Un air affamé.
3 (…) le corps sec et la mine affamée.
Boileau, Satires, I.
N. || Un affamé, une affamée. || Se jeter sur la nourriture comme un affamé. Vorace.
4 L'effroyable misère des campagnes avait rabattu de toutes parts des troupeaux d'affamés sur Paris, la famine le peuplait.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., p. 140.
Par comparaison :
5 Comme tes lettres sont gentilles ! Je les ai dévorées comme un affamé.
Flaubert, Correspondance, t. I, p. 298.
2 Techn. || Un sol affamé, qui ne retient pas l'eau. || Terre affamée, qui a perdu ses substances fertilisantes. Épuisé.Bloc (de pierre, de bois) affamé, de dimension insuffisante.
3 Fig. et littér. Avide. Altéré, assoiffé. || Un homme affamé d'argent, de vengeance.
6 Tigre affamé de sang (…)
Corneille, Horace, IV, 5.
REM. Corneille a remplacé le mot par altéré.
7 (…) des vautours affamés de carnage (…)
Molière, le Misanthrope, I, 1.
8 Ce cœur nourri de sang, et de guerre affamé (…)
Racine, Mithridate, II, 3.
9 Vous imaginez-vous, monsieur Oronte, qu'un homme comme moi soit si affamé de femme ? — Vous imaginez-vous, monsieur de Pourceaugnac, qu'une fille comme la mienne soit si affamée de mari ?
Molière, Monsieur de Pourceaugnac, II, 5.
Passionné (de), qui désire ardemment. Ardent, insatiable. || Être affamé d'amour, de justice.Être affamé de (et inf.).(Sans compl.). Vx. || Une passion affamée.
10 Je suis (…) affamé de bien faire et travailler comme quatre bœufs.
Rabelais, Quart Livre, 24.
11 (…) un amour affamé ne se nourrit point de sermons.
Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, I, 45.
12 (Un homme) continuellement affamé d'un idéal qu'il n'atteint jamais.
Flaubert, Correspondance, t. I, p. 355.
N. || Un affamé, une affamée d'amour.Absolt. Personne avide.
CONTR. Assouvi, comblé, rassasié, repu, satisfait.

Encyclopédie Universelle. 2012.