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apprivoiser

apprivoiser [ aprivwaze ] v. tr. <conjug. : 1>
• 1555; apriveiser fin XIIe; lat. pop. °apprivitiare, du lat. class. privatus « personnel, privé »
1Rendre moins craintif ou moins dangereux (un animal farouche, sauvage), rendre familier, domestique. Apprivoiser un oiseau de proie. dresser. Dompter n'est pas apprivoiser, mais assujettir. dompter. P. p. adj. Un animal est domestiqué quand ses petits naissent eux-mêmes apprivoisés. domestiquer. Panthère apprivoisée.
2Fig. et littér. Rendre plus docile, plus sociable. adoucir, amadouer. Apprivoiser un enfant. P. p. adj. “La Mégère apprivoisée”, comédie de Shakespeare.
Abstrait « Je tiens bon, je tâche d'apprivoiser le vertige » (A. Gide).
3 ♦ S'APPRIVOISER v. pron. (pass.) Devenir moins sauvage (animaux). Devenir moins farouche, plus sociable, plus familier (personnes). « Les trois garçons, qui se montraient très craintifs d'abord, s'apprivoisent » (A. Gide).
(Réfl.) Fig. et littér. S'apprivoiser avec (vx), à qqch., s'y accoutumer. ⇒ se familiariser. « je pris le temps de m'apprivoiser à cette idée » (Rousseau).
⊗ CONTR. Effaroucher, effrayer, éloigner, rebuter. Aigrir, durcir.

apprivoiser verbe transitif (latin populaire apprivatiare, de apprivatare, familiariser) Rendre moins farouche, plus traitable, plus docile un animal sauvage, le domestiquer. Rendre quelqu'un plus sociable, plus doux, plus affable, le séduire : Apprivoiser un enfant.apprivoiser (synonymes) verbe transitif (latin populaire apprivatiare, de apprivatare, familiariser) Rendre moins farouche, plus traitable, plus docile un animal sauvage...
Synonymes :
- affaiter
- domestiquer
- dresser
Contraires :
- assauvagir
Rendre quelqu'un plus sociable, plus doux, plus affable, le séduire
Synonymes :
- adoucir
- amadouer
- civiliser
- conquérir
- humaniser
Contraires :
- effarer
- effaroucher
- effrayer

apprivoiser
v.
rI./r v. tr.
d1./d Rendre (un animal) moins farouche, plus familier. Apprivoiser un ours.
d2./d Fig. Rendre (qqn) plus sociable, plus doux. Apprivoiser un enfant timide.
rII./r v. Pron. Devenir moins farouche (animaux), plus sociable (personnes).

⇒APPRIVOISER, verbe trans.
I.— Emploi trans.
A.— [L'obj. désigne un animal sauvage] Rendre moins sauvage, moins farouche :
1. D'ailleurs, est-on jamais seul au monde? Ne peut-on choisir des amis dans la race animale, apprivoiser un jeune chevreau, un perroquet éloquent, un singe aimable?
VERNE, Les Enfants du capitaine Grant, t. 2, 1868, p. 29.
2. J'en ai conclu, moi, que pour un homme, apprivoiser un animal, l'amener à vivre en société avec lui, c'est ne faire dans ces rapports avec cet animal que des mouvements dont cet animal puisse se rendre compte en les refaisant, c'est lui ressembler.
P. BOURGET, Le Disciple, 1889, p. 150.
P. métaph. :
3. Tandis que le christianisme brilloit au milieu des adorateurs de Fo-hi, que d'autres missionnaires l'annonçoient aux nobles Japonois, ou le portoient à la cour des sultans, on le vit se glisser, pour ainsi dire, jusques dans les nids des forêts du Paraguay, pour apprivoiser ces nations Indiennes, qui vivoient, comme des oiseaux, sur les branches des arbres.
CHATEAUBRIAND, Génie du Christianisme, t. 2, 1803, p. 426.
B.— P. ext.
1. [L'obj. désigne une pers.] Rendre plus sociable.
Apprivoiser qqn à, avec qqc. Le familiariser progressivement avec quelque chose, lui faire abandonner son hostilité ou ses réticences... :
4. Bayonne vous force à l'écouter, à l'applaudir; il vous apprivoise à quelques-unes de ses idées; ...
VOGÜÉ, Les Morts qui parlent, 1899, p. 18.
5. Après tant d'orgueil, après tant d'étrange
Oisiveté, mais pleine de pouvoir,
Je m'abandonne à ce brillant espace,
Sur les maisons des morts mon ombre passe
Qui m'apprivoise à son frêle mouvoir.
VALÉRY, Charmes, 1922, p. 148.
6. Quand la beauté n'excite plus en nous aucun besoin d'approche, de contact et d'embrassement, l'état de calme qu'on était assez fou pour souhaiter du temps que vous tourmentait un excès de désirs, cet état ne vous paraît plus qu'apathie et ne mériter qu'on le loue que parce que, peut-être, il rend moins atroce l'idée de la mort, en vous apprivoisant avec elle. (Un Henri Béraud compterait sans doute « apprivoiser avec » pour une faute; je doute que l'expression soit correcte, mais doute qu'aucune autre la vaille.)
GIDE, Journal, 1923, p. 766.
En partic. Séduire, charmer progressivement :
7. Il n'y a point, dans les rares ouvrages de Mallarmé, de ces négligences qui apprivoisent tant de lecteurs et les flattent secrètement d'être familiers avec le poète; ...
VALÉRY, Variété 2, 1929, p. 170.
8. Elle ne pense pas toujours à l'amour : elle n'a pas le temps! Elle se souvient des premiers jours de ses fiançailles. Elle sourit : Herlin découvre soudain qu'il est amoureux (sans doute l'avait-il oublié?). Il veut lui parler, l'apprivoiser, la conquérir : ...
SAINT-EXUPÉRY, Courrier Sud, 1928, p. 23.
2. [L'obj. désigne une chose, gén. abstr.]
Dominer, maîtriser progressivement :
9. Une fois le coup reçu, eh bien! voilà, ce sera fini, il pourra essayer d'apprivoiser sa douleur, de s'établir dans le désespoir; il s'arrangera pour attendre la mort...
MAURIAC, Les Mal Aimés, 1945, I, 3, p. 171.
10. ... ces remarques prendront tout leur sens par la suite quand on aura compris que l'effort s'applique principalement à un corps déjà ébranlé par l'émotion et disposé par l'habitude : si donc mouvoir mon corps c'est d'abord l'apprivoiser, le domestiquer, le posséder, cette fonction du vouloir double constamment la motivation. Une motivation volontaire est conditionnée par un vouloir maître de son corps.
RICŒUR, Philosophie de la volonté, 1949, p. 189.
Apprivoiser avec :
11. Il eut bien tort de rêver avec ses yeux quand c'était avec toute sa vie qu'il devait apprivoiser l'amour.
J. BOUSQUET, Traduit du silence, 1936, p. 208.
Rare. Apprivoiser à.
a) Familiariser, accoutumer :
12. Il n'est nullement indifférent de voir un homme comme vous, avec le prestige de votre intelligence, de votre culture et de votre talent, s'en faire l'apologiste, ou simplement apprivoiser l'imagination de ses lecteurs à des pensées dont elle doit se détourner avec horreur.
CLAUDEL, Correspondance [avec A. Gide], 1899-1926, p. 221.
b) Harmoniser, accorder :
13. À l'extrémité élargie du môle se dressait la pyramide d'un énorme tas de charbon; on y puisait si rarement que des herbes folles, et même de petits arbrisseaux, avaient fini par le coloniser, l'apprivoiser au paysage comme les collines aux formes étranges des terrils de mine abandonnés.
GRACQ, Le Rivage des Syrtes, 1951, p. 25.
II.— Emploi pronom.
A.— [En parlant d'un animal sauvage] Devenir progressivement moins sauvage, moins farouche :
14. Un lapin blanc, enfermé dans la chambre, s'effarouche d'abord puis s'apprivoise et vient manger dans la main de Moktir.
GIDE, L'Immoraliste, 1902, p. 469.
B.— P. ext. [En parlant d'une pers.] S'accoutumer, s'habituer :
15. Léonard entra en scène. Il ne vit rien, d'abord. Il parlait d'une voix contenue. Devant lui, il percevait le vide fait par la salle, et qui, reculé par l'éclat de la rampe, devenait prodigieux. Puis, il s'apprivoisa. Son émotion se calmait. Il osa regarder, et c'étaient des yeux partout, rien que des yeux fixés magnétiquement sur les siens et réflétant ses frissons.
ESTAUNIÉ, L'Empreinte, 1896, p. 110.
S'apprivoiser à, avec :
16. Je m'apprivoise au lit de fange, où je me vautre.
PONSARD, Lucrèce, 1843, II, 1, p. 31.
17. À la vérité ces vues nouvelles l'étonnent, mais il s'apprivoise peu à peu avec elles.
BREMOND, Hist. littér. du sentiment relig. en France, t. 4, 1920, p. 122.
Devenir plus sage, plus avisé :
18. — Ah! murmura la mère, quelle fille légère! quel aveuglement! quatre-vingt mille livres de rente! chère madame et ne pas savoir ce que c'est, les dédaigner! enfin, une fois mariée, elle s'apprivoisera.
DURANTY, Le Malheur d'Henriette Gérard, 1860, p. 213.
Rem. 1. Les sens figurés de apprivoiser ont pour pendant ceux de l'adj. sauvage. 2. Lorsque apprivoiser se construit avec une prép., il devient le siège d'une ell. : (s')apprivoiser [de manière à se familiariser] avec qqc., [s'accouder ou s'adapter] à qqc.; le choix de la prép. est déterminé par la nature du concept verbal implicite.
PRONONC. :[], j'apprivoise [].
ÉTYMOL. ET HIST. — 1. a) Début XIIIe s. aprivoisier « familiariser (un animal) » (De Brunain la vache au prestre ds Fabliaux, éd. A. de Montaiglon et G. Raynaud, t. 1, p. 133 : Li prestres comanda en oine C'on fasse pour aprivoisier Blerain avoec Brunain lier, La seue grant vache demaine); b) ca 1250 [date attribuée par l'éditeur] aprivoiser « rendre (des animaux) moins sauvages » (Renart, éd. Mario Roques, 3817-20); 2. 1436 « rendre qqn plus doux, plus traitable » (CHARLES D'ORLÉANS, Ballades, 68, éd. Champion ds IGLF Techn. : De ce faulx vilain aveugler, Dieu scet se j'en suis desireux; Nul ne le peut aprivoiser).
Empr. au lat. vulg. apprivatiare, issu soit directement de privatus (FEW t. 252, p. 52) soit plus prob. de apprivatare (cf. a. prov. aprivadar « familiariser », XIIIe s. ds RAYN. et voir BL.-W.5). L'hyp. d'un croisement de apprivatare avec vitiare « habituer » (FOUCHÉ, p. 479; EWFS2) est moins probable étant donné que les représentants de vitiare ne sont attestés au sens de « habituer » que dans le domaine d'oc (a. prov. vezar « habituer », XIIIe s. ds RAYN.), l'a fr. veseier n'étant attesté qu'au sens de « ruser, tromper » (Wace ds GDF.). Il reste que -eisier, -oisier s'explique à partir de apprivitiare par passage du groupe aty'- à -eyz'-, -ois'- (voir RHEINFELDER, Altfr. gram., I, p. 277).
STAT. — Fréq. abs. littér. :405. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 382, b) 396; XXe s. : a) 557, b) 845.
BBG. — Canada 1930. — GIR. t. 2 Nouv. Rem. 1834, pp. 12-13. — KRINGS 1961, p. 179. — LE ROUX 1752.

apprivoiser [apʀivwaze] v. tr.
ÉTYM. 1555; apriveiser, fin XIIe; lat. pop. apprivitiare ou apprivatare, du lat. class. privatus « personnel, privé ».
1 (V. 1225). Rendre moins craintif ou moins dangereux (un animal farouche, sauvage). || On se sert de canards privés pour apprivoiser les canards sauvages. 2. Priver (vx). || Apprivoiser un oiseau de proie. Affaiter, dresser. || Apprivoiser des serpents. Charmer. || Dompter n'est pas apprivoiser, mais assujettir.Au p. p. || Apprivoisé, ée. || Un animal est domestiqué, quand ses petits naissent eux-mêmes apprivoisés. Domestiquer. || Une pie (cit. 3.1) apprivoisée.
1 Nos bœufs, nos chevaux, nos chiens (…) sont des animaux privés : bien qu'ils remontent à des individus qui ont été apprivoisés, ils ne l'ont point été eux-mêmes, ils sont nés dans l'état de domesticité.
Lafaye, Dict. des synonymes, Privé, apprivoisé.
2 On dompte la panthère plutôt qu'on ne l'apprivoise.
Buffon, Hist. nat. des animaux, La panthère.
3 Avec une lyre il (Orphée) apprivoisait les bêtes sauvages.
Fénelon, Télémaque, VII.
2 Littér. (et compl. n. de personne). Rendre plus docile, plus doux, plus sociable, plus souple, plus traitable. Adoucir, amadouer, soumettre.Au p. p. → cit. 5. || La Mégère apprivoisée (trad. d'un titre de Shakespeare).
4 La fortune avec toute sa puissance ne pourra jamais apprivoiser un brutal et polir la rudesse des mœurs.
Guez de Balzac, in Littré, Dict., art. Brutal.
5 Ce farouche ennemi qu'on ne pouvait dompter (…)
Ce tigre, que jamais je n'abordai sans crainte,
Soumis, apprivoisé, reconnaît un vainqueur.
Racine, Phèdre, IV, 6.
6 Il y a des hommes superbes, que l'élévation de leurs rivaux humilie et apprivoise.
La Bruyère, les Caractères, IX, 17.
7 J'évite par là d'apprivoiser un suisse ou de fléchir un commis.
La Bruyère, les Caractères, IX, 51.
8 Que faire pour apprivoiser une impertinente vertu ?
Antoine Hamilton, Mémoires du comte de Gramont, 9.
9 Il parle, il adoucit la superbe Carthage,
De sa puissante reine apprivoise l'orgueil.
Delille, Énéide, I.
10 Il avait eu quelque peine à apprivoiser cet oiseau farouche.
Martin du Gard, les Thibault, III, 9.
11 (…) il parlait bas, comme s'il eût entrepris d'apprivoiser une créature très inquiète.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, IX, 1.
Fam. || Apprivoiser une femme : venir à bout de ses résistances. Séduire.
12 Tout doucement il vous l'apprivoisa (la fille);
Lui prit d'abord son joli bras d'ivoire;
Puis s'approcha, puis en vint au baiser (…)
La Fontaine, Contes, « L'Ermite ».
——————
s'apprivoiser v. pron.
Devenir moins sauvage, en parlant des animaux sauvages.
13 L'once s'apprivoise aisément.
Buffon, Hist. nat. des animaux, Once.
14 Les tigres et les lions s'apprivoisent, et viennent des déserts servir d'amusement aux peuples du Nord.
G. Sand, in Bescherelle.
Sujet n. de personne. Devenir moins farouche, plus sociable, plus familier. Familiariser (se), humaniser (s').
15 (…) votre fille n'est pas si difficile que cela, et elle s'est apprivoisée depuis qu'elle est chez moi.
Molière, George Dandin, I, 4.
16 Mais, au bout de peu de jours, je m'apprivoisai et devins diable tout comme les autres.
Georges Lecomte, Ma traversée, p. 18.
17 Été porter au fils Bertin de nouveaux haricots à écosser (…) il s'apprivoise peu à peu, semble-t-il, et prend confiance.
Gide, Journal, 24 oct. 1916.
18 (…) il me semble déjà qu'elles (les couleuvres) s'humanisent, et elles croient que je m'apprivoise.
Colette, la Paix chez les bêtes, Couleuvres.
Sujet n. de chose. Rare.
19 Le brin d'herbe, vibrant d'un éternel émoi,
S'apprivoise et devient familier avec moi.
Hugo, les Contemplations, I, 27.
Fig. et littér. || S'apprivoiser avec (vx), à qqch. Accoutumer (s'accoutumer à), habituer (s'habituer à), familiariser (se familiariser avec). || S'apprivoiser avec le danger. || S'apprivoiser à une idée, s'y accoutumer peu à peu, se familiariser avec elle.
20 Ce qui nous paraissait terrible et singulier
S'apprivoise avec notre vue.
Quand ce vient à la continue.
La Fontaine, Fables, IV, X, 7.
21 Les grandes choses étonnent, et les petites rebutent; nous nous apprivoisons avec les unes et les autres par l'habitude.
La Bruyère, les Caractères, XII, 3.
22 Je ne pris pas précisément la résolution de me faire catholique; mais voyant le terme encore éloigné, je pris le temps de m'apprivoiser à cette idée.
Rousseau, les Confessions, II.
23 Sur les maisons des morts mon ombre passe
Qui m'apprivoise à son frêle mouvoir.
Valéry, le Cimetière marin.
——————
apprivoisé, ée p. p. adj.
V. à l'article.
CONTR. Affoler, assauvagir, effarer, effaroucher, effrayer, inquiéter. — Écarter, éloigner, rebuter, repousser. — Aigrir, détacher (se détacher de), durcir.
DÉR. Apprivoisable, apprivoisement, apprivoiseur.

Encyclopédie Universelle. 2012.