delà [ dəla ] prép. et adv.
• 1175; de de- et là
I ♦ Prép.
1 ♦ Vx Plus loin que. « Porter delà les mers ses hautes destinées » (P. Corneille).
2 ♦ Loc. prép. Mod. PAR-DELÀ(et subst.). Par-delà les mers. Par delà le bien et le mal (trad. de Nietzsche). « Les familles d'esprit unies par les liens secrets et qui se retrouvent avec constance par delà les temps, par delà les lieux » (Focillon).
II ♦ Adv. de lieu (dans des loc.)
1 ♦ Littér. DEÇÀ, DELÀ : de côté et d'autre. ⇒ deçà.
2 ♦ Loc. adv. PAR-DELÀ :de l'autre côté.
3 ♦ Cour. Loc. adv. AU-DELÀ ou AU DELÀ [ od(ə)la ] :plus loin. ⇒aussi au-delà. « La courbure de la terre qui seule empêchait de voir au delà » (Loti).
♢ Loc. prép. AU-DELÀ DEouAU DELÀ DE. S'en aller au-delà des mers. Fig. Ce que je vais vous dire est au-delà de tout ce que vous pouvez imaginer, de toute imagination. Les bus « nombreux au delà de toute vraisemblance » (Romains). Au-delà de telle quantité, de telle somme : quand on a dépassé cette quantité, cette somme. « Au-delà de cette limite votre ticket n'est plus valable », roman de R. Gary.
⊗ CONTR. Deçà. Dans. Moins.
● delà adverbe (de de et là) ● delà (difficultés) adverbe (de de et là) Orthographe Au-delà (de). Toujours avec un trait d'union : cela va au-delà du simple mensonge. L'au-delà. Toujours avec un trait d'union mais sans majuscule : s'interroger sur la vie dans l'au-delà. Par-delà. Toujours avec un trait d'union : par-delà le cercle polaire. Deçà delà → deçà
delà
adv. et Prép.
rI./r adv.
d1./d adv. de lieu (joint à deçà ou deci). Rosiers plantés deçà, delà, de côté et d'autre.
— Marcher deci, delà, ici et là.
d2./d Loc. adv. Au-delà, par-delà: encore plus, encore davantage, encore plus loin. On l'a satisfait, et au-delà. Ils ont poussé jusqu'à l'équateur et même par-delà.
rII./r Loc. Prép.
d1./d Par-delà: de l'autre côté, plus loin que. Par-delà les Alpes. Se situer par-delà les polémiques.
d2./d Au-delà de: en passant par-dessus, en dépassant. Au-delà des mers.
|| Fig. (Marquant le dépassement d'une chose.) Il a réussi au-delà de nos espérances.
⇒DELÀ, prép. et adv.
I.— [Non accompagné d'une autre prép.]
A.— Prép. de lieu, vx. Plus loin que, de l'autre côté de (par rapport à un point, un lieu exprimé). Delà les mers, delà les monts. Je vous supplie, madame, de vous rappeler quelquefois qu'il y a delà les monts un Grec qui vous honore (COURIER, Lettres Fr. et It., 1810, p. 815). Delà la mer j'étais avec vous et rien ne nous séparait (CLAUDEL, Soulier, 1929, 3e journée, 13, p. 837).
B.— Adv. de lieu. [Pour marquer l'éloignement, en corrélation et p. oppos. avec un adv. de lieu marquant la proximité]
1. Deçà, delà (vx). Ici et là, ici et un peu plus loin. Synon. çà et là. Cf. çà1 B 1 b et B 2 a, b, deçà II B 2, là.
— P. ext. Deçà et delà. De côté et d'autre. Cf. deçà II B 3.
2. De(-)ci de(-)là. Cf. ci1 II B 2 et là.
II.— [Accompagné d'une ou plusieurs prép.]
A.— Loc. adv. et prép.
1. Au(-)delà (pour l'emploi subst., cf. infra B)
a) Au(-)delà, loc. adv.
♦ [Lieu] Plus loin :
• 1. ... il aperçoit une maison d'assez belle apparence, et, à travers une grille de fer attenante à la maison, des jardins magnifiques. Au delà, c'est une ligne d'horizon formée par les collines de la Bourgogne, et qui semble faite à souhait pour le plaisir des yeux.
STENDHAL, Le Rouge et le Noir, 1830, p. 4.
♦ [Temps] Et nous restions alors à causer ensemble jusqu'à minuit et au delà (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 797) :
• 2. Vous comptez pour trop le temps qui vous est donné ici-bas; voyez au delà, portez vos regards sur l'éternité, et tous vos troubles s'apaiseront.
LAMENNAIS, Lettres inédites... à la baronne Cottu, 1819, p. 61.
♦ Au fig. Plus loin, plus avant. On ne sauroit aller au-delà [du Faust de Goethe] en fait de hardiesse de pensée, et le souvenir qui reste de cet écrit tient toujours un peu du vertige (STAËL, Allemagne, t. 3, 1810, p. 71). L'amour l'avait enivrée d'abord, et elle n'avait songé à rien au delà (FLAUB., Mme Bovary, t. 2, 1857, p. 1).
♦ Plus, davantage, mieux. Nos gros vaisseaux de guerre, armés de cent canons et au-delà (BERN. DE ST-P., Harm. nat., 1814, p. 277). [Le] monsieur qui a fait l'impossible et au delà pour être agréable à tout le monde (COURTELINE, Ronds-de-cuir, 1893, 3e tabl., 3, p. 113) :
• 3. [GOBSECK.] — Vous devriez presque me donner quinze pour cent de mes cent cinquante mille francs.
BALZAC, Gobseck, 1830, p. 404.
— Par au(-)delà, loc. adv., vx, rare, pop. ou région. Synon. de au delà. Bénédiction. Depuis cette marge de sable à ce qui s'étend par au delà! (CLAUDEL, Ville, 1893, I, p. 317).
— Par au(-)delà de, loc. prép. Synon. de au(-) delà de :
• 4. Et plus haute que n'est la force et la justice,
Plus loin que l'innocence ou que le vice,
Luit la beauté.
VERHAEREN, Les Villes tentaculaires, 1895, p. 203.
b) Au (-)delà de, loc. prép. Plus loin que, de l'autre côté de, en dépassant (un point de repère, un lieu précis). Au(-)delà des mers, de la frontière. Anton. en deçà de.
— [Lieu]
♦ [En étendue] Allongeant sa lèvre inférieure au delà de la lèvre supérieure, elle fit une petite moue (HUGO, N.-D. Paris, 1832, p. 77). En face, au delà des toits, le grand ciel pur s'étendait, avec le soleil rouge se couchant (FLAUB., Mme Bovary, t. 1, 1857, p. 9) :
• 5. Vous savez que notre famille est originaire d'au-delà des monts, et ce sont les guerres civiles qui nous ont obligés à passer de ce côté-ci.
MÉRIMÉE, Colomba, 1840, p. 63.
P. métaph. Au(-)delà de la tombe. Après la mort terrestre :
• 6. On s'exerçait ainsi à aimer dès ce monde ceux qu'on devait aimer dans l'autre : on comptait retrouver au delà de la tombe les saints protecteurs du berceau, les douces amies de l'enfance, les fidèles patrons de l'existence tout entière; ...
MONTALEMBERT, Hist. de Ste Élisabeth de Hongrie, 1836, p. C.
♦ [En hauteur] Nous n'avions pas fait baisser le thermomètre au delà de 37 degrés 5 dans l'espoir qu'il n'aurait pas ainsi à remonter (PROUST, Guermantes 1, 1920, p. 299) :
• 7. Au delà des sphères célestes, où se poursuivent les révolutions des astres; au delà du neuvième ciel, qui enveloppe tous les autres dans son immense tourbillon, se trouve le ciel empyrée, pure lumière, lumière intellectuelle pleine d'amour, amour du bien véritable, source de toute joie, joie qui surpasse toute douceur.
OZANAM, Essai sur la philos. de Dante, 1838, p. 185.
— [Temps] La conversation s'était prolongée au delà de onze heures (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 927). Les maisons ne remontent guère au-delà du commencement du dix-septième siècle (GAUTIER, Tra los montes, 1843, p. 36) :
• 8. J'ai décidé ce matin de ne pas prolonger l'expérience au-delà des douze mois qui vont suivre. Au 25 novembre prochain, je mettrai ces feuilles au feu, je tâcherai de les oublier.
BERNANOS, Journal d'un curé de campagne, 1936, p. 1035.
— Au fig. Plus loin que. Cf. dépasser, surpasser, outrepasser et les préf. trans-, tré-, ultra-. Et si nous allons plus loin, si nous pénétrons au-delà des faits extérieurs, dans la nature même des choses (GUIZOT, Hist. civilisation, 1828, p. 10). L'enfant avait une intelligence si vive, qu'il allait toujours au-delà des questions des professeurs (ZOLA, E. Rougon, 1876, p. 204) :
• 9. Ils [le père et le fils] se comprenaient tous les deux très profondément, très au delà des mots. Ils travaillaient ensemble, le soir, pendant les deux heures délicieuses logées entre cinq et sept, pour eux seuls.
MALÈGUE, Augustin, t. 1, 1933, p. 58.
♦ En partic. [Pour exprimer de façon hyperbolique un superl. abs.] Au(-)delà de toute expression, de toute attente, de tout ce qu'on peut imaginer, de tout, de toute mesure, de nos désirs, de nos espérances, du possible. Synon. parfaitement, au plus haut point, par-dessus tout, très, au-dessus de.
) [Après un adj.] Le cabinet de la reine est beau dans tous les détails au-delà de tout ce qu'on peut imaginer (STAËL, Lettres jeun., 1786, p. 144). Notre situation était affreuse; nos peines au-delà de toute expression (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 39). Quoique le duc de Richemont fût (...) maladroit au-delà du possible (A. FRANCE, J. d'Arc, t. 2, 1908, p. 407).
) [Après un verbe] Le jeu réussit au delà de toute espérance (GIDE, Faux-monn., 1925, p. 1237) :
• 10. J'aime et j'admire au delà de toute expression les personnes qui, par leur esprit d'à-propos (...) ont raison de la bêtise des choses et de la méchanceté des hommes.
COURTELINE, Un Client sérieux, L'Ami des lois, 1905, p. 201.
♦ En dehors de, à l'écart de (limites). Il [M. de Charlus] était raseur comme un savant qui ne voit rien au delà de sa spécialité (PROUST, Prisonn., 1922, p. 305). Dieu est au delà de toute limitation, il est donc au delà de toute dénomination, si haute soit-elle (GILSON, Esprit philos. médiév., 1931, p. 59) :
• 11. Mais si l'homme doit jeter ainsi ses actes au delà du temps et de l'espace, hors du fini et hors de lui, ce n'est pourtant pas inconsistance de désir ni appétit de malade qui, toujours affamé, ne pourrait supporter rien de solide. Car cette inquiétude persévérante n'est bonne que dans la mesure où elle stimule l'activité présente...
BLONDEL, L'Action, 1893, p. 386.
2. De delà (vieilli). L'odeur d'aujourd'hui vient de delà les Pyrénées (VEUILLOT, Odeurs de Paris, 1866, p. 433).
3. En delà
a) En delà, loc. adv. Un peu plus loin, de l'autre côté (par rapport à un point, un lieu exprimé), à l'extérieur. Anton. en deçà :
• 12. ... Chantilly (...) repose entre des tilleuls et de l'eau, entre une forêt et une rivière, aussi les oiseaux ne font que décrire d'éternelles courbes aériennes sur ce bourg, véritable volière, allant chercher en deça la feuille jaune du tilleul et en delà la goutte d'eau pour se désaltérer.
GOZLAN, Le Notaire de Chantilly, 1836, p. 76.
b) En delà de, loc. prép. (vx). Plus loin que, et au fig., au-dessus de. Anton. en deçà de. Mon père, qui n'a pas été passionné un seul jour de sa vie, me considère absolument comme un être en delà ou peut-être en deçà de la nature humaine (STAËL, Lettres L. de Narbonne, 1792, p. 35).
4. Par(-)delà
a) Par(-)delà, loc. prép. Plus loin que, en dépassant (un obstacle, une limite). Par(-)delà les mers, par(-)delà l'horizon. Et des voix Chantèrent par delà les arbres du verger (RÉGNIER, Jeux rust., 1897, p. 118) :
• 13. Alors elle [une Chimère] me dit d'une voix gracieuse,
Plus claire que l'argent : Maître, où donc allons-nous?
Où Dieu n'arriverait qu'après l'éternité...
GAUTIER, Poésies, 1872, p. 217.
— Au fig. En passant par-dessus, en dépassant. Or, vous êtes hardi par delà la mesure (LECONTE DE LISLE, Poèmes trag., 1886, p. 92) :
• 14. Et l'angoisse qui te dévore, crois-tu qu'elle cessera jamais de me ronger? Mais que m'importe : je suis libre. Par delà l'angoisse et les souvenirs. Libre. Et d'accord avec moi.
SARTRE, Les Mouches, 1943, III, 1, p. 92.
— P. allus. littér. (à l'œuvre de Nietzsche, 1886). Par (-)delà le bien et le mal. Cf. bien3 ex. 20.
b) Par delà, loc. adv.
[Lieu] De l'autre côté, plus loin (par rapport à un lieu, un obstacle qu'il faut franchir, ou une limite qu'il faut dépasser). Je m'empressai de le chasser [l'épagneul] jusque dans les greniers, et par delà (TŒPFFER, Nouv. genev., 1839, p. 121). Au bout de la vallée et loin par delà, on aperçoit la cime des montagnes hyperboréennes (CHATEAUBR., Mém., t. 1, 1848, p. 322) :
• 15. Puis, reportant mes yeux sur les chaînes de montagnes lointaines, je rêvais de voir par delà, de courir le monde, de mener la grande vie d'aventures dans les pays du soleil, dans « les colonies », ou dans cet Orient musulman que Lamartine m'avait déjà révélé...
LOTI, Journal intime, t. 1, 1878-81, p. 106.
Rem. On rencontre ds la docum. un emploi subst. On s'ennuie de son sort, on devine autre chose, on cherche l'au-delà, le par-delà, l'inconnu (AMIEL, Journal, 1866, p. 200).
— [Temps] Quand, pour se transformer de loup en homme, il faut une lutte de quarante ou cinquante ans, il faudrait vivre cent ans par delà pour jouir de sa victoire (SAND, Mauprat, 1837, p. 8) :
• 16. Cicéron surtout lui revient [à M. Joubert] souvent, comme Voltaire; il le comprend par tous les aspects et le juge, car lui-même est un homme de par-delà, plus antique de goût...
SAINTE-BEUVE, Portraits littér., t. 2, 1844-64, p. 325.
B.— Emploi subst. Au-delà, subst. masc. (sing.)
1. L'au-delà (p. ell. du compl. déterminatif de la mort). La vie future après la mort terrestre, la fin ultime de l'homme et du monde. Le problème de l'au-delà, la foi en l'au-delà, l'homme et son au-delà :
• 17. De nouveau, mais plus intensément, plus âprement que jadis, elle se tournait vers ce problème, cette énigme de notre fin, de l'au-delà. La maladie, le détachement d'avec tout ce qui avait été son existence, favorisaient ce recueillement, cette élévation.
VAN DER MEERSCH, Invasion 14, 1935, p. 403.
2. L'au-delà + déterm. (adj. qualificatif ou compl. déterminatif). Ce qui constitue un domaine plus vaste ou plus profond.
a) Au(-)delà + adj. qualificatif. Culte sans cesse renouvelé du corps, avec l'au-delà divin de la beauté (ZOLA, Bonh. dames, 1883, p. 797) :
• 18. Rentrez en vous-même! Vous n'êtes rien. C'est lorsqu'on a compris le néant de ces rêves, quand les au delà chimériques ont disparu et qu'il ne reste plus face à face que l'homme et la nature, c'est alors seulement que l'on connaît l'âpre goût de l'humilité!
ESTAUNIÉ, L'Empreinte, 1896, p. 268.
b) Au(-)delà + compl. déterminatif. Tâtonner sans jamais arriver à une certitude, dans les brumes des au-delà de l'art! (HUYSMANS, À rebours, 1884, p. 143). Et les autres [collines] (...) prolongeaient dans l'au-delà des brumes le fil de leurs contours onduleux (CHÂTEAUBRIANT, Lourdines, 1911, p. 207) :
• 19. Des fragments de théories lui échappaient [à Crescent], qui montaient à une certaine philosophie de la peinture, allaient à l'au delà du tableau, au but moral de la conception...
GONCOURT, Manette Salomon, 1867, p. 297.
Prononc. et Orth. :[]. WARN. 1968 admet également [dla]. Écrit de-là ds Ac. 1762, mais delà ds Ac. 1694-1740, puis 1798-1932. Noter que Ac. 1878 écrit au delà sans trait d'union, ainsi que par delà; Ac. 1932 met le trait d'union, bien que de nombreux écrivains le suppriment (cf. supra). Il n'est obligatoire que dans le subst. masc. l'au-delà. Étymol. et Hist. 1. 1160-74 adv. de lieu et decha et dela (WACE, Rou, éd. A. J. Holden, II, 3045); ca 1160 loc. adv. de lieu par de la (Enéas, éd. J. Salverda de Grave, 410); 2. 1160-74 prép. (WACE, Rou, éd. A. J. Holden, Append. [anc. 1re partie] 291 : dela Mongeu); 1580-92 au dela de nos forces (MONTAIGNE, Essais, livre I, chap. 7); 1669 loc. prép. par dela (RACINE, Britannicus, I, 2 : A ma confusion, Néron veut faire voir qu'Agrippine promet par dela son pouvoir); 3. 1866 au-delà subst. (AMIEL, Journal, p. 200). Composé de de1 et de là. Fréq. abs. littér. :4 166. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 4 579, b) 6 160; XXe s. : a) 5 753, b) 7 049. Bbg. L'Homme et son Au-delà. Missi. 1976, novembre, passim.
delà [d(ə)la] prép. et adv.
ÉTYM. V. 1165; de de, et là.
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I Prép. de lieu.
1 Vx (langue class.). Plus loin que.
1 Ce qui s'appelle delà les monts la furie française, a plus d'une fois réussi (…)
Guez de Balzac, 5e disc. sur la cour.
2 Porter delà les mers ses hautes destinées (…)
Corneille, le Cid, II, 5.
♦ De delà (vieilli).
3 Un (…) charlatan arrive ici de delà les monts (…)
La Bruyère, les Caractères, XII, 21.
2 Mod. || Par delà. || Par delà les mers. || Par delà son comportement social on devine un autre aspect de sa personnalité. || Par delà le bien et le mal (trad. de Nietzsche).
4 (…) être artiste ou romancier consiste à posséder la lampe de mineur qui permet à l'homme d'aller par delà sa conscience claire chercher les trésors obscurs de sa mémoire et de ses possibilités.
A. Thibaudet, Gustave Flaubert, p. 82.
5 Où tout est amour, tout est vie ! Par delà le néant de tous les objets éphémères, c'est là-dessus enfin que notre foi ou notre espoir se fonde.
André Suarès, Trois hommes, « Dostoïevski », III, p. 272.
6 Il existe une sorte d'ethnographie spirituelle qui s'entrecroise à travers les « races » les mieux définies, les familles d'esprit unies par des liens secrets et qui se retrouvent avec constance par delà les temps, par delà les lieux.
H. Focillon, la Vie des formes, p. 29.
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II Adv. de lieu.
REM. 1. Delà ne s'emploie jamais seul, mais dans des locutions.
2. L'Académie écrit au-delà, et par-delà avec un trait d'union. La plupart des écrivains l'omettent et l'usage reste très libre. Cependant on maintient le trait d'union dans le nom : l'au-delà.
1 ☑ Littér. et vieilli. Deçà, delà : ici et plus loin. ⇒ Deçà.
7 (…) les fils vous retournent le champ,
Deçà, delà, partout (…)
La Fontaine, Fables, V, 9.
♦ De côté et d'autre. ⇒ Deçà (cit. 2 et 3). || Courir deçà et delà, de-ci, de-là. ⇒ Ci, ici, là.
8 (…) ces peuples vagabonds qui erraient deçà et delà sur des chariots sans avoir de demeure fixe.
Bossuet, Hist. universelle, II, 20.
2 ☑ Loc. adv. Par-delà ou par delà : de l'autre côté. || Contournez le champ et attendez-nous par delà.
♦ ☑ En delà : un peu plus loin, à l'extérieur. ⇒ Dehors. || Restez sur la ligne de départ et ne vous mettez pas en delà (contr. : en deçà).
9 Plaisante justice qu'une rivière borne. Vérité au deçà des Pyrénées, erreur au delà.
Pascal, Pensées, V, 294.
10 Autant le toucher concentre ses opérations autour de l'homme, autant la vue étend les siennes au delà (…)
Rousseau, Émile, II.
11 Au delà s'élève une double rangée de collines dorées (…)
E. Fromentin, Un été dans le Sahara, I, p. 5.
12 (…) on avait conscience (…) de la courbure de la terre, qui seule empêchait de voir au delà.
Loti, Mon frère Yves, XI, p. 52.
♦ Fig. Encore plus loin. || Il est médecin, mais sa compétence s'étend au delà.
13 (…) c'est (la chimie) une science qui domine au moins tout le système solaire, et qui très probablement s'étend au delà.
E. Renan, Lettre à Berthelot, août 1863.
♦ Encore plus, mieux. ⇒ Davantage, plus. || Nous pourrons vous prêter un million et au delà.
14 Il y a dans l'art un point de perfection (…) celui qui ne le sent pas, et qui aime en deçà ou au delà, a le goût défectueux.
La Bruyère, les Caractères, I, 10.
♦ L'au-delà. ⇒ Au-delà. — Littér. || L'au-delà de…
15 La pure lumière de l'au-delà des troupeaux humains et de leurs combats (…)
R. Rolland, Beethoven, p. 59.
16 L'homme s'est plus souvent lié à l'au-delà qu'il croit connaître, qu'à celui qu'il sait ignorer.
Malraux, les Voix du silence, I, III, p. 193.
♦ ☑ Loc. prép. Au delà de. L'Islande est au delà de l'Écosse. S'en aller au delà des mers. Vous n'irez pas au delà de la frontière sans papiers.
17 Se peut-il rien de plus plaisant, qu'un homme ait droit de me tuer parce qu'il demeure au delà de l'eau, et que son prince a querelle contre le mien, quoique je n'en aie aucune avec lui ?
Pascal, Pensées, V, 294 (→ Assassin, cit. 7).
18 Il va recueillir au delà du Rhin les débris d'une armée défaite (…)
Bossuet, Oraison funèbre du prince de Condé.
♦ Fig. || Être au delà, aller au delà de… ⇒ Dépasser, exagérer, excéder, outrepasser, surpasser; et aussi préf. trans-, tré-, ultra-. || C'est aller au delà de mes désirs : je ne vous en demande pas tant. || Ce que je vais vous dire est au delà de tout ce que vous pouvez imaginer, de toute imagination. || C'est au delà de ma compétence.
19 (…) sa paix, sa résignation (…) sont au delà de tout ce que l'on voit (…)
Mme de Sévigné, 1089, 17 nov. 1688.
20 L'hyperbole exprime au delà de la vérité (…)
La Bruyère, les Caractères, I, 55.
21 (…) ils apercevaient les bus et motorbus (…) nombreux au delà de toute vraisemblance (…)
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. V, XXVI, p. 252.
⇒ Dessus (au-dessus de), plus. || Ne fumez pas au delà de dix cigarettes par jour. || N'achetez pas au delà de telle somme.
♦ Au delà de telle quantité, quand on a dépassé cette quantité.
22 (…) charger son valet de fardeaux au delà de ce qu'il en peut porter (…)
La Bruyère, les Caractères de Théophraste, « De l'impudent… »
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CONTR. Deçà. — Dans (à l'intérieur), près (plus près). — Selon. — Moins.
HOM. De-là (de-ci, de-là). — De là.
Encyclopédie Universelle. 2012.