déluge [ delyʒ ] n. m.
• 1175; lat. diluvium « inondation »
1 ♦ Relig., myth. Cataclysme consistant en des précipitations continues submergeant la Terre. Mythe mésopotamien du déluge. Absolt Le Déluge (dans la Bible). L'arche de Noé échappa au Déluge. — Loc. fig. Remonter au déluge, être d'avant le déluge : être très ancien, et fam. démodé. ⇒ désuet, suranné; antédiluvien. Après moi (nous) le déluge ! se dit d'une catastrophe postérieure à sa propre mort, dont on se moque; par ext. se dit lorsqu'on profite du présent, sans souci du lendemain.
2 ♦ Pluie très abondante, torrentielle. ⇒ averse, 1. cataracte, trombe; diluvien. « Au bout de six jours de déluge, la pluie diminua d'intensité » (Bosco). — Par anal. Un déluge de larmes. ⇒ flot, torrent. Un déluge de feu, de flèches (⇒ pluie) . Déluge de paroles, de louanges, de compliments. ⇒ avalanche, déferlement, flux. Il cachait « sous un déluge de lieux communs son incapacité » (Balzac).
● déluge nom masculin (latin diluvium) Inondation universelle, d'après la Bible et les diverses traditions du Proche-Orient ancien. (Prend une majuscule en ce sens.) Pluie torrentielle : Il est tombé un véritable déluge sur la région. Grande abondance, grande quantité de quelque chose : Un déluge de paroles. ● déluge (citations) nom masculin (latin diluvium) Sébastien Roch Nicolas, dit Nicolas de Chamfort près de Clermont-Ferrand 1740-Paris 1794 Académie française, 1781 Il n'y a que l'inutilité du premier déluge qui empêche Dieu d'en envoyer un second. Caractères et anecdotes Jean Racine La Ferté-Milon 1639-Paris 1699 Avocat, ah ! passons au déluge. Les Plaideurs, III, 3, Dandin Louis XV, roi de France Versailles 1710-Versailles 1774 Après nous le déluge. Commentaire Louis XV n'a sans doute jamais dit ces mots, forgés pour stigmatiser l'égoïsme et l'indifférence qu'on se plaisait à lui prêter. À cette époque, Maupertuis avait annoncé pour bientôt le retour de la comète de 1680, qui provoquerait, croyait-il, un déluge. C'est là sans doute qu'il faut rechercher l'origine de cette expression, devenue alors proverbiale et qu'on a attribuée aussi, et pour les mêmes raisons, à Mme de Pompadour. ● déluge (difficultés) nom masculin (latin diluvium) Orthographe Avec ou sans majuscule selon l'emploi. Le Déluge : le débordement universel des eaux, d'après la Bible. Avec une majuscule. Mais l'on écrit généralement remonter au déluge et avant le déluge, sans majuscule, la référence à l'épisode biblique proprement dit s'effaçant en locution. ● déluge (expressions) nom masculin (latin diluvium) Après moi le déluge !, se dit lorsqu'on profite du moment présent sans se soucier de l'avenir, en particulier des générations qui suivent. Familier. Remonter au déluge, dater d'une époque très reculée ; reprendre de très loin le récit d'un événement. ● déluge (synonymes) nom masculin (latin diluvium) Pluie torrentielle
Synonymes :
- orage
- trombe
Grande abondance, grande quantité de quelque chose
Synonymes :
- flot
- pluie
déluge
n. m.
d1./d (Souvent avec une majuscule.) Inondation universelle, d'après la Bible. Lors du Déluge, Noé se réfugia dans son arche.
|| Loc. fig. Remonter au déluge, fort loin dans le passé.
d2./d Par exag. Pluie torrentielle. V. diluvien.
|| Fig. Un déluge de paroles, de larmes.
⇒DÉLUGE, subst. masc.
A.— Inondation cataclysmique de toute la surface de la terre telle qu'elle est rapportée dans la Genèse (cf. Genèse 7, 11 à 8, 14). Le déluge universel; les eaux; le temps du déluge; l'arche, la colombe du déluge.
— Locutions
♦ [P. réf. à l'ancienneté du déluge] Que signifie cette chanson et ce refrain d'avant le déluge? (VILLIERS DE L'I.-A., Corresp., 1860, p. 45). Beaucoup de ces étudiants sont nés en 1940. Pour eux, tout ce qui précède cette année fatidique est d'avant le déluge (MAURIAC, Nouv. Bloc-notes, 1961, p. 22).
♦ [P. réf. à l'idée de catastrophe connotée par le terme] Après moi le déluge. Peu m'importe la catastrophe qui surviendra après ma mort. Je ne sais si tu comprends ce qu'il y a d'égoïste dans l'expression « faire son salut ». Ça sent le « chacun pour soi », le « sauve qui peut », l'« après moi le déluge » (DUHAMEL, Cécile, 1938, p. 16).
B.— P. ext.
1. Pluie très abondante, torrentielle. Il soulève le rideau, un déluge ruisselle sur les zincs et déborde des chéneaux (COLETTE, Cl. ménage, 1902, p. 152) :
• 1. Le parlement vient de s'ouvrir à Versailles sous un déluge de novembre qui rejoint les bassins du parc au ciel bas, étouffé de brume...
A. DAUDET, Numa Roumestan, 1881, p. 86.
2. Larmes. Leverdier (...) l'avait trouvée [Véronique] noire et agitée, ayant sur son beau visage (...) les stigmates d'un récent déluge (BLOY, Désesp., 1886, p. 165).
C.— P. anal. Surabondance (de quelque chose qui coule). Déluge de larmes. Voilà l'orage! qu'on se figure un déluge de feu sans vent et sans eau (CHATEAUBR., Voy. Amér., 1827, p. 116) :
• 2. « Les hommes creusent et se mettent à l'abri. Le déluge de fer a recommencé et dure toute la nuit : c'est le vacarme assourdissant des explosions ininterrompues. »
BORDEAUX, Les Derniers jours du fort de Vaux, 1916, p. 203.
— Au fig. Déluge d'éloquence, de paroles, de chiffres.
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1re moitié XIIe s. diluvie « inondation du monde (dans la Bible) » (Psautier Oxford, XXVIII, 9 ds T.-L.); début XIIIe s. [date ms.] deluge (CHR. DE TROYES, Cligès, éd. A. Micha, 4357); 2. 1640 « grande quantité » déluge de feux (CORNEILLE, Horace, IV, 5). Adaptation du lat. class. diluvium « inondation, débordement » désignant notamment en lat. chrét. le déluge de l'histoire biblique. Fréq. abs. littér. :628. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 1 091, b) 944; XXe s. : a) 1 067, b) 591. Bbg. GOTTSCH. Redens. 1930, p. 352, 354. — MAT. Louis-Philippe 1951, p. 201.
déluge [delyʒ] n. m.
ÉTYM. 1175; du lat. diluvium « inondation », dér. de diluere (→ Diluer), de dis-, et luere « baigner ».
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1 Cataclysme consistant en une précipitation continue de pluies submergeant tout ou partie de la surface d'une planète. || La Terre a connu plusieurs déluges. || Du déluge. ⇒ Diluvien.
1 Des êtres vivants sans nombre ont été victimes de ces catastrophes; les uns, habitants de la terre sèche, se sont vus engloutis par des déluges, les autres, qui peuplaient le sein des eaux, ont été mis à sec avec le fond des mers subitement relevé.
♦ Spécialt. || Déluges historiques, ceux qui, suivant la Genèse ou certaines mythologies, auraient dévasté la Terre après l'apparition de l'homme. || Le déluge de Deucalion, d'Ogygès…
♦ Absolt. || Le déluge, celui qui est rapporté par la Bible (→ ci-dessous, cit. 2). || Le déluge de Noé (⇒ Arche, cit. 1). || La colombe, l'arc-en-ciel du déluge. || Le Déluge, poème de Vigny. || Avant le déluge (⇒ Antédiluvien).
2 Le déluge fut quarante jours sur la terre; les eaux grossirent et soulevèrent l'arche, et elle s'éleva au-dessus de la terre. Les eaux crûrent et devinrent extrêmement grosses sur la terre, et l'arche flotta sur les eaux. Les eaux, ayant grossi de plus en plus, couvrirent toutes les hautes montagnes qui sont sous le ciel tout entier. Les eaux s'élevèrent de quinze coudées au-dessus des montagnes qu'elles recouvraient.
Bible (Crampon), Genèse, VII, 17 à 20.
3 Jupiter (…) fit tomber sur la Grèce un effroyable déluge d'eau. Un seul homme échappa au cataclysme, Deucalion, sage roi de Thessalie (…)
H. Aubert, Légendes mythologiques, p. 151.
4 C'est au cours de ces trois périodes, d'Obeid, d'Ourouk et de Jemdet-Nasr, qu'on a situé le « Déluge » dont les religions et les légendes ont propagé le souvenir chez bien des peuples (…) les Mésopotamiens ont, eux aussi, gardé la mémoire d'un pareil cataclysme qui aurait dévasté toute la contrée; un seul couple aurait échappé, à qui les dieux, par la suite, accordèrent l'immortalité (… J. de Morgan) voyait dans les récits multiples du déluge le souvenir des pluies torrentielles et des inondations qui, à la fin des temps quaternaires, suivirent la période glaciaire et détruisirent la vie sur des espaces considérables (…)
Contenau, Hist. de l'Orient ancien, L'Asie occidentale ancienne, p. 168-169.
5 Le déluge n'a pas réussi : il est resté un homme.
Henry Becque cité par Louis Jouvet, Réflexions du comédien, p. 88.
♦ ☑ Loc. fig. Remonter au déluge : être d'avant le déluge, être très ancien. ⇒ Désuet, suranné (être); antédiluvien.
♦ ☑ Passer au déluge : abréger (allusion au mot de Dandin à l'Intimé, dans les Plaideurs, de Racine).
6 Je finis. — Ah ! — Avant la naissance du monde…
Avocat, ah ! passons au déluge.
Racine, les Plaideurs, III, 3.
♦ ☑ Après moi (nous) le déluge ! (parole attribuée par les uns à Mme de Pompadour, par d'autres à Mme du Barry devant les troubles politiques qui devaient aboutir à la Révolution), se dit d'une catastrophe postérieure à sa propre mort, dont on se moque; par ext., se dit lorsqu'on profite du présent, sans souci du lendemain.
2 Pluie très abondante, torrentielle. ⇒ Averse, cataracte, trombe; diluvien. || C'est un déluge, un vrai déluge.
7 Ils filaient très vite dans une espèce de nuage d'eau dont les grosses gouttes salées leur fouettaient la figure. Ils se tenaient tête baissée sous ce déluge, serrés les uns contre les autres, comme font les moutons sous l'orage.
Loti, Mon frère Yves, III, p. 17.
8 Au bout de six jours de déluge, la pluie diminua d'intensité et le ciel lentement souleva ses nuages au-dessus du plat pays.
H. Bosco, Malicroix, p. 51.
♦ Par anal. Littér. || Un déluge de larmes, de sang… ⇒ Flot, pluie, torrent. || Déluge de fleurs, de feux, de flèches, d'envahisseurs, en parlant de personnes, de choses qui semblent tomber de tous les côtés à la fois. ⇒ Avalanche (cit. 8). || Déluge de paroles, de louanges, de compliments. ⇒ Abondance, averse, déferlement, flux. || Un déluge de maux, d'iniquités. || Un déluge d'injures. ⇒ Bordée, débordement. || Noyer quelqu'un sous, dans un déluge de… || Faire pleuvoir sur quelqu'un un déluge de…
9 Que le courroux du ciel allumé par mes vœux
Fasse pleuvoir sur elle un déluge de feux !
Corneille, Horace, IV, 6.
10 (…) ce déluge de barbares qui ravageait la Grèce (…)
Molière, les Amants magnifiques, I, 1.
11 (…) puisque j'ai eu la faiblesse de publier ces Caractères, quelle digue élèverai-je contre ce déluge d'explications qui inonde la ville (…)
La Bruyère, Disc. à l'Académie, Préface.
12 Un déluge de sang français qu'elle avait fait verser.
13 (…) il y a depuis longtemps un déluge de pareils livres.
Voltaire, Lettre à Mme du Deffand, 26 déc. 1768.
Encyclopédie Universelle. 2012.