échafaud [ eʃafo ] n. m.
• v. 1170; altér., d'apr. échelle, de l'a. fr. chafaud, d'un lat. pop. °catafalicum, du gr. catasta « estrade où l'on exposait les esclaves en vente » → catafalque
1 ♦ Vx Plateforme, estrade sur une charpente de tréteaux.
♢ Vx Échafaudage.
2 ♦ (XVe) Estrade en charpente destinée à l'exécution publique des condamnés par la roue, la décapitation (hache ou guillotine). Monter à l'échafaud. Finir sur l'échafaud. « L'échafaud est une sorte de monstre fabriqué par le juge et par le charpentier » (Hugo).
♢ Par ext. Peine de mort par décapitation. Il risque l'échafaud.
● échafaud nom masculin (ancien français chafaud, avec l'influence de échelle) Estrade sur laquelle on procédait en France à une exécution capitale par décapitation : Monter à l'échafaud. Peine de mort : Risquer l'échafaud. ● échafaud (citations) nom masculin (ancien français chafaud, avec l'influence de échelle) Jean Sylvain Bailly Paris 1736-Paris 1793 Académie française, 1783. Je tremble, mais c'est de froid. Commentaire Bailly, qui avait été président de la Constituante et maire de Paris, fut guillotiné un 10 novembre. Les préparatifs du supplice ayant duré longtemps, le condamné se justifia ainsi de son tremblement. ● échafaud (difficultés) nom masculin (ancien français chafaud, avec l'influence de échelle) Orthographe Avec un seul f et finale en -d (comparer à échafaudage, échafauder).
échafaud
n. m.
d1./d Plate-forme dressée sur la place publique pour l'exécution des condamnés à mort. Monter à (ou sur) l'échafaud.
|| Par ext. Peine capitale. Risquer l'échafaud.
⇒ÉCHAFAUD, subst. masc.
A.— Domaine techn. [Sans idée de spectacle] Vieilli. Construction provisoire, fixe ou mobile, dont les planchers superposés supportent à une certaine hauteur du sol les ouvriers et les matériaux, dans l'édification, la réparation, la peinture, la décoration des bâtiments. Dresser, élever un échafaud; madriers, plancher d'un échafaud; échafaud léger, mobile. Synon. mod. échafaudage. Les maçons qui réparaient l'arcade avaient leur échafaud dessus [les armoiries de la porte] (SAND, Beaux MM. Bois-Doré, t. 1, 1858, p. 215). Il était occupé dans quelque église, sur un échafaud, à représenter le Christ mort ou le Christ dans sa gloire (FRANCE, Puits ste Claire, 1895, p. 90) :
• 1. Il m'est arrivé ce qui arrive à tout entrepreneur qui travaille sur une grande échelle : j'ai, en premier lieu, élevé les pavillons des extrémités, puis, déplaçant çà et là mes échafauds, j'ai monté la pierre et le ciment des constructions intermédiaires...
CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 2, 1848, p. 10.
♦ Échafaud volant. Sorte de pont que ,,l'on monte au fur et à mesure des besoins le long des murs extérieurs au moyen de cordes et de moufles`` (Lar. 20e). Échafaud à bascule. ,,Qui n'est tenu au mur que d'un seul côté`` (Lar. 20e).
— P. métaph. Un clair obscur mauve tout à fait demi-deuil sur un échafaud grêle qui attendait le cercueil (NIZAN, Conspir., 1938, p. 36). Le catafalque roulant arriva, un étrange échafaud rouge et or (NIZAN, Conspir., 1938 p. 41).
— P. anal. Échafaud de + subst. gén. au plur., fam. Amas d'objets superposés. Synon. échafaudage (au sens fam.) :
• 2. Quelques-uns se montaient confusément sur la tête tout un échafaud de coiffures, une perruque, une calotte, un bonnet rouge, un chapeau à plume tricolore, un chapeau à cornes, un chapeau bourgeois.
VALÉRY, Variété II, 1929, p. 110.
— MAR. ,,Plateforme suspendue le long de la coque ou le long du mât, pour permettre à des hommes qui travaillent sur la coque ou dans la mâture d'atteindre les parties lisses du navire`` (LE CLÈRE 1960). Région. (Canada). ,,Grand treillis de bois sur lequel on fait sécher la morue de Terre-Neuve`` (Canada 1930).
B.— Domaine techn. [avec une idée de spectacle donné en public]
1. Vx. Estrade.
a) Estrade sur laquelle jouent les comédiens. Marches d'un échafaud; échafaud d'un orchestre. La machinerie [théâtrale] doit donc conserver ce caractère d'échafauds analogues à ceux des ouvriers du bâtiment, montables et démontables à la demande (MOYNET, Machinerie théâtr., 1893, p. 44).
b) Estrade où prennent place des spectateurs. Cinq échafauds ou galeries contenaient les spectateurs étrangers (TAINE, Philos. art, t. 2, 1865, p. 11). Le jour du supplice de Jeanne, furent dressés les échafauds pour le cardinal de Winchester, pour Pierre Cauchon (BRASILLACH, Corneille, 1938, p. 276) :
• 3. Inutiles, des échafauds de bois pour les concours de ski, déchaussés par la fonte des neiges, écorchaient le ciel de leur squelette.
MORAND, Ouvert la nuit, 1922, p. 235.
2. Usuel
a) Plateforme en charpente, employée pour l'exposition et l'exécution des condamnés. Monter sur, à l'échafaud; mourir sur l'échafaud. L'on a vu des condamnés obtenir leur grâce au pied même de l'échafaud (DUMAS père, P. Jones, 1838, I, 5, p. 138). Qu'au moins ma tête serve à quelque chose avant de rouler sur l'échafaud (VERLAINE, Corresp., t. 3, 1889, p. 54). Pour aller à la guillotine, il fallait monter sur un échafaud (CAMUS, Étranger, 1942, p. 1202) :
• 4. Brotteaux vit sur la place de la Révolution étinceler (...) : c'était la guillotine. Une foule énorme et joyeuse de curieux se pressait autour de l'échafaud...
FRANCE, Les Dieux ont soif, 1912, p. 207.
SYNT. Marcher, aller à l'échafaud; envoyer, conduire, mener, accompagner à l'échafaud; traîner à, sur l'échafaud; porter sa tête sur l'échafaud (être décapité); finir, périr sur l'échafaud; gibet et échafaud.
b) P. méton. Peine de mort par décapitation. Le bagne, les galères ou l'échafaud; risquer, éviter l'échafaud; sauver sa tête de l'échafaud; promis à l'échafaud; mériter l'échafaud. C'est vous qui l'avez détournée, qui l'avez dévoyée, salaud, voyou, gibier d'échafaud (AYMÉ, Tête autres, 1952, p. 82) :
— Au fig. et p. métaph. :
• 5. L'Université de Zurich est un monument imposant. (...). L'on me poussa dans la salle. Je montai à l'échafaud. Il fallait parler debout devant un pupitre élevé auquel je me cramponnais, épuisé que j'étais d'anxiété et de fatigue.
VALÉRY, Entretiens [avec F. Lefèvre], 1926, p. 92.
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. Ca 1170 eschaafauz « charpente, échafaudage » (B. DE STE-MAURE, Ducs Normandie, éd. C. Fahlin, 21267); 2. ca 1170 eschalfaut « estrade (pour un prédicateur) » (G. DE SAINT-PAIR, Mont Saint-Michel, éd. P. Redlich, 1003); 1319 eschaiffaut « estrade pour jouer » (cité ds Mémoires de la Société de l'histoire de Paris et de l'Île-de-France, 1876, 350 : eschaiffaut aus trompeurs encontre la venue du roy); 1550 fig. échaufaut (RONSARD, Ode à Baïf, éd. P. Laumonier, p. 130); 3. fin XIIIe s. escaffaus « estrade pour spectateurs » (Chastelain de Coucy, éd. J.E. Matzke et M. Delbouille, 1390); 4. 1357 eschafaud (L. DOTTIN, Recherches sur Orléans, t. 1, p. 154 : eschafaud, sur lequel se retirent les criminels). Altération d'apr. échelle (Regula ds Z. rom. Philol., t. 44, p. 646) ou échasse « étai » (Brüch ds Z. fr. Spr. Lit., t. 50, p. 336) de l'a. fr. chafaud « échafaudage » (ca 1160, B. DE STE-MAURE, Troie, éd. L. Constans, 3016) encore attesté dans quelques pat. (FEW t. 2, p. 486 a), d'un lat. pop. catafalicum (v. aussi catafalque) issu du croisement du lat. class. fala « tour de défense en bois » préf. d'orig. et du gr. cata-, sur le modèle de catasta (gr. ) « estrade où l'on expose les esclaves à vendre », cf. aussi catalectus (v. châlit) (FEW t. 2, p. 487 b). Fréq. abs. littér. :857. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 2 526, b) 1 270; XXe s. : a) 735, b) 365. Bbg. DARM. Vie 1932, p. 156.
échafaud [eʃafo] n. m.
ÉTYM. V. 1170, eschaafauz; altération, d'après échelle, de l'anc. franç. chafaud, d'un lat. pop. catafalicum, du préf. grec kata « en bas », du lat. fala « tour de bois » et de catasta, « estrade où l'on exposait les esclaves en vente », mot grec; cf. ital. catafalco. → Catafalque.
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♦ Construction soutenant des gradins, etc., pour des spectateurs. ⇒ Estrade, plate-forme, tréteau, tribune. — Spécialt. Estrade où jouent des comédiens (⇒ Tréteau, plur.).
1 Les échafauds étaient déjà dressés tout autour et déjà les personnages les plus curieux commençaient à s'y placer.
A. R. Lesage, le Diable boiteux, 8.
♦ Techn. Construction en forme de plancher à l'usage des ouvriers en bâtiment (maçons, peintres…). ⇒ Échafaudage. || Échafaud volant.
2 Il l'a envoyé toute la journée sur les échafauds avec les maçons pour les servir et leur passer leurs auges et leurs pierres (…)
Claudel, l'Annonce faite à Marie, III, 1.
♦ Mar. Plate-forme suspendue le long de la coque ou d'un mât pour y effectuer des travaux.
2 (1357). Mod. Plate-forme en charpente destinée à l'exposition, à l'exécution des condamnés. ⇒ Justice (bois de); 2. butte (argot). || Monter à l'échafaud. || Périr, finir, mourir, être exécuté sur l'échafaud. || Se faire le pourvoyeur (cit. 1) de l'échafaud. || La charrette qui conduisait les condamnés à l'échafaud. || Faire la toilette des condamnés avant de les mener à l'échafaud. || Porter sa tête sur l'échafaud : être décapité.
♦ Par ext. Peine de mort par décapitation. || Criminel condamné à l'échafaud. ⇒ Guillotine. || Il risque l'échafaud, le dernier supplice, (→ Il risque sa tête). || Ascenseur pour l'échafaud, film de Louis Malle.
2.1 (…) une délicatesse déplacée t'a conduite aux pieds de l'échafaud, un crime affreux m'en sauve; regarde à quoi les bonnes actions servent dans le monde, et si c'est bien la peine de s'immoler pour elles !
Sade, Justine…, t. I, p. 35 (1791).
3 Au pied de l'échafaud j'essaye encor ma lyre.
André Chénier, lambes, XII.
4 Cet instinct de bien-être qui existe toujours chez l'homme, même dans les instants les plus cruels, même au pied de l'échafaud.
Stendhal, Armance, XVII.
5 J'écoute en frémissant chaque bûche qui tombe;
L'échafaud qu'on bâtit n'a pas d'écho plus sourd.
Mon esprit est pareil à la tour qui succombe
Sous les coups du bélier infatigable et lourd.
Baudelaire, les Fleurs du mal, « Spleen et idéal », LVI.
6 L'échafaud (…) a quelque chose qui hallucine (…) L'échafaud est vision. L'échafaud n'est pas une charpente, l'échafaud n'est pas une machine; l'échafaud n'est pas une mécanique inerte (…) L'échafaud est le complice du bourreau; il dévore, il mange de la chair, il boit du sang. L'échafaud est une sorte de monstre fabriqué par le juge et par le charpentier, un spectre qui semble vivre d'une espèce de vie épouvantable faite de toute la mort qu'il a donnée.
Hugo, les Misérables, I, I, IV.
7 Dans la rue des Blancs-Manteaux
Ils ont élevé des tréteaux
Et mis du son dans un seau
Et c'était un échafaud (…)
Sartre, Huis-clos, V, p. 134.
♦ Littér. Peine de mort exécutée en public. || « Le crime (cit. 14) fait la honte et non pas l'échafaud. »
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DÉR. Échafaudage, échafauder.
Encyclopédie Universelle. 2012.