embarras [ ɑ̃bara ] n. m.
• 1552; de embarrasser
I ♦
1 ♦ Vx Obstacle au passage, à la circulation, causé par la rencontre ou l'accumulation de plusieurs objets ou véhicules. « Mon cocher me fit passer devant l'Opéra, et je me trouvai dans l'embarras de la sortie » (Laclos). ⇒ encombrement. Un embarras de voitures. ⇒ embouteillage. « Les Embarras de Paris », satire de Boileau.
♢ Par ext. Mod. Embarras gastrique : troubles gastro-intestinaux provoqués par des infections ou intoxications diverses. ⇒ indigestion.
2 ♦ Obstacle qui s'oppose à l'action, difficulté qui arrête, qui gêne la réalisation de qqch. ⇒ anicroche, complication, difficulté, embêtement, ennui, inconvénient. Susciter des embarras à qqn.
♢ Ce qui cause du désagrément à qqn. ⇒ charge, dérangement, ennui, gêne, incommodité, 1. souci, tracas. Je ne voudrais pas être un embarras pour vous. « Il emportait je ne sais quel embarras dans sa tête » (Valéry).
II ♦
1 ♦ Vx ou littér. Confusion résultant d'affaires nombreuses et difficiles à débrouiller. « Des embarras du trône effet inévitable ! » (Racine).
2 ♦ Position gênante, situation difficile et ennuyeuse. Mettre qqn dans l'embarras, le gêner, le mettre mal à l'aise. Votre question me met dans l'embarras. Se tirer d'embarras. ⇒ difficulté. — Spécialt, vieilli Embarras d'argent, et absolt embarras. ⇒ 2. manque, pénurie (d'argent). Embarras financiers, pécuniaires. « Le désastre financier de son imprimerie, origine de tous les embarras qui suivirent » (Henriot). Mod. Aider un ami dans l'embarras. — L'embarras du choix, la difficulté de choisir. N'avoir que l'embarras du choix. « La Catherine a de quoi attirer les épouseurs, et elle n'aura que l'embarras du choix » (Sand).
3 ♦ État d'une personne qui éprouve une sorte de malaise pour agir ou parler. ⇒ confusion, gêne, malaise, 2. trouble. « Elle baissa vite, avec embarras, son bras nu » (Colette). Ne pouvoir dissimuler son embarras. « Ma gaucherie, ma timidité, mon embarras, ma défiance de moi-même » (France). — Loc. vieilli Faire des embarras : chercher à se faire remarquer, faire des manières, manquer de naturel. ⇒ façon, histoire. Ne faites pas tant d'embarras.
⊗ CONTR. Commodité; aisance.
● embarras nom masculin (de embarrasser) Incertitude, perplexité de quelqu'un qui ne sait quelle voie choisir : Cet incident imprévu le mit dans l'embarras. Gêne, malaise en présence d'une situation délicate ; confusion : Répondre sans aucun embarras à une question perfide. Situation difficile causée par le manque d'argent : Je suis momentanément dans l'embarras. Difficulté, problème (surtout pluriel) : Des embarras financiers. Personne ou chose qui est source de désagrément, qui constitue une charge, une gêne : Je ne voudrais pas être un embarras pour vous. ● embarras (citations) nom masculin (de embarrasser) Jules Supervielle Montevideo, Uruguay, 1884-Paris 1960 « Ah ! songeait-il, vivre c'est être de plus en plus embarrassé. » L'Arche de Noé Gallimard ● embarras (expressions) nom masculin (de embarrasser) Avoir l'embarras du choix, avoir un choix très large. Embarras de la circulation, encombrement de la circulation ; embouteillage. Embarras gastrique, syndrome caractérisé par des troubles gastro-intestinaux de durée variable. Embarras de la langue, difficulté à articuler. Embarras de la voie publique, trouble dans la circulation publique provoqué par un objet ou un dispositif sur une voie ouverte à la circulation ou à ses abords immédiats. Faire de l'embarras, des embarras, affecter de grands airs, faire l'important, faire des histoires. ● embarras (synonymes) nom masculin (de embarrasser) Incertitude, perplexité de quelqu'un qui ne sait quelle voie choisir
Synonymes :
- difficulté
- ennui
- pétrin
Gêne, malaise en présence d'une situation délicate ; confusion
Synonymes :
- honte
- trouble
Situation difficile causée par le manque d'argent
Synonymes :
- hésitation
- indécision
- indétermination
- perplexité
Personne ou chose qui est source de désagrément, qui constitue...
Synonymes :
- embêtement (familier)
- entrave
Faire de l'embarras, des embarras
Synonymes :
- cérémonies
- chichi (familier)
- épate (populaire)
- façons
- mines
- simagrées
embarras
n. m.
d1./d Gêne, difficulté rencontrée dans la réalisation de qqch. Causer de l'embarras, créer des embarras à qqn.
d2./d Embarras gastrique, digestif: trouble gastro-intestinal, avec ou sans fièvre, d'origine toxique ou infectieuse.
d3./d Position difficile, gênante. être dans l'embarras. Tirer qqn d'embarras.
|| Spécial. Pénurie d'argent. Aider qqn dans l'embarras.
d4./d Perplexité, doute. éprouver, manifester de l'embarras devant un problème difficile.
d5./d Trouble, malaise, gêne (de qqn qui ne sait que dire, que faire). Ma question l'avait mis dans l'embarras.
|| Loc. Faire des embarras: se donner de grands airs, faire des manières.
|| Avoir l'embarras du choix: avoir un large choix.
⇒EMBARRAS, subst. masc.
A.— Obstacle au passage résultant d'une accumulation. Quelques gouttes de pluie tombèrent. L'embarras des voitures augmenta (FLAUB., Éduc. sent., t. 2, 1869, p. 8).
— [Sans compl.] Vx. Il semblait que le fleuve des fiacres et des piétons augmentât, dans un enchevêtrement inextricable; tandis que le bureau des omnibus aggravait les embarras (ZOLA, Argent, 1891, p. 29).
— P. anal., MÉD. Il me reste une dernière remarque à faire : c'est que quelquefois les fièvres intermittentes sont accompagnées d'embarras et d'obstructions dans les viscères (GEOFFROY, Méd. pratique, 1800, p. 11). Embarras des voies respiratoires. Je me lève avec un tel embarras dans les bronches (GONCOURT, Journal, 1888, p. 766). Embarras gastrique. Qui empêche les aliments d'être digérés facilement. Un léger purgatif sera utile s'il existe de la constipation ou un état d'embarras gastrique (NÉLATON, Pathol. chir., t. 1, 1844, p. 5). Embarras intestinal (BLOY, Journal, 1907, p. 305).
♦ Spéc., vx. État de grossesse. Madame Cornouiller pressa Gudule de nommer l'homme qui, ayant abusé d'elle, la laissait ensuite dans l'embarras (FRANCE, Crainquebille, Putois, 1904, p. 72).
B.— Au fig.
1. Gén. au plur. Obstacle qui arrête, qui gêne la réalisation de quelque chose. S'il connaissait mieux le Matelot, ce faiseur d'embarras!... (POURRAT, Gaspard, 1925, p. 58) :
• 1. ... « plus nous avons rencontré d'embarras dans la voie où nous nous étions engagé, dit M. Hauréau, plus l'entreprise nous a souri... »
LANGLOIS, SEIGNOBOS, Introd. ét. hist., 1898, p. 99.
— En partic. Difficultés financières :
• 2. Si l'État, à la suite de la guerre, est tombé dans de nouveaux embarras financiers, ces embarras n'ont rien de tragique et la France en a vu de pires.
BAINVILLE, Histoire de France, t. 1, 1924, p. 289.
2. Au sing. (dans diverses loc.).
a) Gêne résultant d'une situation difficile. Éprouver de l'embarras; mettre dans l'embarras; sortir, se tirer d'embarras. En prenant un ton de légèreté qui eût fait deviner son embarras, si Maurice avait eu quelque raison pour le pénétrer (GOLZAN, Notaire, 1836, p. 72) :
• 3. Si son extrême indulgence veut bien avoir pitié de l'embarras où je me trouve et pardonner ce qu'il peut y avoir de léger dans l'expression en faveur de ce qu'il y a de sincère dans le sentiment...
J.-J. AMPÈRE, Corresp., 1827, p. 456.
b) P. ext. État d'esprit qui résulte d'une situation difficile; incertitude intellectuelle. Avoir l'embarras du choix. Les missionnaires ont été dans le plus grand embarras pour trouver un terme chinois signifiant Dieu (RENAN, Avenir sc., 1890, p. 178) :
• 4. ... afin de cacher l'embarras que me donne une situation toute nouvelle.
Mme DE KRÜDENER, Valérie, 1893, p. 32.
Prononc. et Orth. :[]. PASSY 1914 et BARBEAU-RODHE 1930 disent []. Hésitation confirmée par ROUSS.-LACL. 1927, p. 135. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1552 fr. de la Flandre esp. embarras plur. « obstacles qui entravent la circulation » (Coutumes de Renaix, IX, 1 ds Nouv. Coutumier Général, t. I, p. 1144); 1561 embaras « situation difficile » (Corresp. de Catherine de Médicis, I, 243 ds BARB. Misc. 7, n° 8); 1660 « état de celui qui ne sait que faire, que penser » (CORNEILLE, Examen de Rodogune ds Œuvres, éd. Ch. Marty-Laveaux, t. IV, p. 426). Déverbal de embarrasser. Fréq. abs. littér. : 2 500. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 5 177, b) 4 167; XXe s. : a) 3 032, b) 2 156. Bbg. SAIN. Arg. 1972 [1907], p. 23, 102. — SPITZER (L.). Z. fr. Spr. Lit. 1917, t. 44, p. 221.
embarras [ɑ̃baʀa] n. m.
ÉTYM. 1552; déverbal de embarrasser.
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♦ Ce qui embarrasse; état de ce qui est embarrassé.
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1 Vx. Obstacle causé par la rencontre, l'amas (de plusieurs choses) et qui barre le passage, gêne la circulation. ⇒ Obstacle, obstruction. || Un embarras de voitures. ⇒ Embouteillage, encombre, encombrement. || Un embarras de colis, de malles. — Absolt. || Un embarras (dans la circulation). || Les Embarras de Paris, satire de Boileau.
1 Six chevaux attelés à ce fardeau pesant
Ont peine à l'émouvoir sur le pavé glissant.
D'un carrosse en tournant il accroche une roue :
Et du choc le renverse en un grand tas de boue :
Quand un autre à l'instant, s'efforçant de passer,
Dans le même embarras se vient embarrasser.
Boileau, Satires, VI, « Les embarras de Paris ».
2 Je finis ma toilette, et montai en voiture. Malheureusement mon cocher me fit passer devant l'Opéra, et je me trouvai dans l'embarras de la sortie (…) la seule idée qui m'occupait était le désir que ma voiture avançât.
Laclos, les Liaisons dangereuses, Lettre CXXXV.
2 Encombrement des voies digestives, troubles gastro-intestinaux provoqués par des infections, des intoxications diverses. ⇒ Crise, dérangement, engorgement, indigestion, indisposition, infection, obstruction. || Embarras gastrique, intestinal. || Souffrir d'un embarras.
➪ tableau Principales maladies et affections.
3 Obstacle qui s'oppose à l'action, difficulté qui arrête, qui gêne la réalisation de qqch. ⇒ Accroc, achoppement, anicroche, bouillon, cactus, caillou, casse-bras (vx), chiendent, complication, difficulté, embêtement, emmerde, emmerdement (fam.), empêchement, ennui, entrave, inconvénient, malencontre (vx), malheur. || Embarras qui résultent d'une situation, de circonstances (→ Détail, cit. 1). || Susciter des embarras à qqn (→ Tailler des croupières à). || Un nouvel embarras ! (→ C'est encore une autre chanson).
3 Rien que pour recevoir vos lettres, c'est un embarras (…) et pour vous écrire, c'est plus difficile encore.
Laclos, les Liaisons dangereuses, Lettre LXXXII.
4 Mais cette fois, le voilà (Balzac) qui bute, et donnant du nez sur l'obstacle, semble rudement sortir de son rêve pour apercevoir devant lui la réalité. Il est seul, il se tue de travail, sa santé l'inquiète, il n'a que des difficultés, des embarras et des ennuis (…)
Émile Henriot, les Romantiques, p. 350.
4 Ce qui cause du désagrément à qqn. ⇒ Charge, contrariété, dérangement, désagrément, ennui, gêne, incommodité, poids, souci, tintouin, tracas. || Je ne voudrais pas être un embarras pour vous. — L'embarras, de l'embarras.
5 Votre mère (…) craint de vous donner de l'embarras.
Racine, Lettres, 243.
6 Il emportait je ne sais quel embarras dans sa tête, causé par ce qu'il venait d'entendre : quelque chose qu'il ne pouvait arriver ni à penser, ni à oublier.
Valéry, Autres rhumbs, p. 211.
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II
1 Vx ou littér. Confusion résultant d'affaires nombreuses et difficiles à débrouiller. ⇒ Complication, confusion, difficulté, embrouillement, enchevêtrement, involution. || Un, des embarras. || Un embarras inextricable.
7 Des embarras du trône effet inévitable !
De soins tumultueux un prince environné
Vers de nouveaux objets est sans cesse entraîné (…)
Racine, Esther, II, 3.
2 (1561). || L'embarras, position gênante, situation difficile et ennuyeuse (surtout sous la forme dans l'embarras, avec quelques verbes, mettre, être…). || Être, mettre qqn dans l'embarras. || Le voilà dans l'embarras. → Être dans de beaux draps, dans le pétrin, aux abois, aux cent coups, sur les charbons (vx), dans les choux; tenir le loup par les oreilles. || Nous voilà dans un bel embarras ! (→ Nous voilà bien !). || Se tirer d'embarras (→ Défaire, cit. 9).
8 (…) l'embarras où il est d'accommoder les conduites de l'Église dans les premiers siècles avec celles d'aujourd'hui.
Mme de Sévigné, 836, 28 juil. 1680.
3 Embarras d'argent, et, absolt, embarras. ⇒ Manque, pénurie (d'argent); pauvreté. || Embarras financiers. — Être, se trouver dans l'embarras. ⇒ Pétrin. || Tirer d'embarras un ami momentanément gêné. ⇒ Aider.
9 (…) ce fut le commencement des embarras pécuniaires où j'ai été plongé le reste de ma vie. La fortune et moi nous nous sommes pris en grippe aussitôt que nous nous sommes vus.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. I, p. 338.
10 Toute sa vie, il (Balzac) a lutté contre la meute acharnée de ses créanciers, à ses trousses depuis sa jeunesse, et le désastre financier de son imprimerie, origine de tous les embarras qui suivirent.
Émile Henriot, les Romantiques, p. 287.
11 « Ce sont des embarras financiers qui vous ont contraint à vous déplacer ? » Il avait en posant ces questions l'air d'assurance du riche à qui l'argent donne le droit d'interroger le pauvre.
J. Green, Léviathan, p. 52.
4 (1660). Dans quelques expr. Incertitude de l'esprit devant une décision à prendre. ⇒ Embarrassant. ☑ Avoir l'embarras, n'avoir que l'embarras du choix (cit. 9). || Cette nouvelle proposition me met dans l'embarras. ⇒ Hésitation, incertitude, indécision, irrésolution, perplexité.
12 (Il) m'a mis dans l'embarras
De ne savoir lequel garder de mes deux as.
Molière, les Fâcheux, II, 2.
13 La Catherine a de quoi attirer les épouseurs, et elle n'aura que l'embarras du choix.
G. Sand, la Mare au diable, XII, p. 103.
14 (…) il faisait effort pour résoudre l'embarras où venait de le mettre une question de Marie (…)
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. V, XXIII, p. 208.
5 État d'une personne qui éprouve une sorte de malaise pour agir ou parler; gaucherie dans le maintien. ⇒ Confusion, émotion, gaucherie, gêne, honte, malaise, timidité, trouble. || Ne pouvoir dissimuler son embarras. || Tout le monde vit son embarras, s'aperçut de son embarras. || Sa contenance trahit son embarras. || Baisser les yeux avec embarras. || L'embarras d'une personne devant une autre (→ Déclin, cit. 3).
15 La timidité tient au caractère; l'embarras aux circonstances.
d'Alembert, Œuvres, t. III, p. 330.
16 Quelquefois à la vue de Paul, elle allait vers lui en folâtrant; puis tout à coup, près de l'aborder, un embarras subit la saisissait; un rouge vif colorait ses joues pâles, et ses yeux n'osaient plus s'arrêter sur les siens.
Bernardin de Saint-Pierre, Paul et Virginie, p. 61.
16.1 La seconde avait quinze ans : même embarras dans la contenance, l'air de la pudeur avilie, mais une figure enchanteresse, beaucoup d'intérêt dans l'ensemble.
Sade, Justine…, t. I, p. 144-145.
17 Je ne lui déplus pas et je n'ai point à m'en cacher, car cette inclination pour moi ne peut que donner une idée avantageuse de cette dame, tant ma gaucherie, ma timidité, mon embarras, ma défiance de moi-même me communiquaient les apparences de la vertu et les dehors de l'innocence.
France, la Vie en fleur, XXV, p. 280.
♦ ☑ Loc. Faire de l'embarras; faire des embarras : chercher à se faire remarquer, affecter des airs prétentieux, faire des manières, manquer de naturel. ⇒ Affectation, façon, histoire, manière. || Ne faites pas tant d'embarras. || Un faiseur, une faiseuse d'embarras.
❖
CONTR. Débarras. — Aisance, aise, aplomb, assurance, commodité, désinvolture, facilité, simplicité.
Encyclopédie Universelle. 2012.