engourdir [ ɑ̃gurdir ] v. tr. <conjug. : 2> I ♦ V. tr.
1 ♦ Priver en grande partie (un membre, le corps) de mobilité et de sensibilité. ⇒ paralyser. Froid qui engourdit les pieds. ⇒ transir. « L'anse de fer achevait d'engourdir et de geler ses petites mains mouillées » (Hugo ).
♢ Mettre dans un état général de ralentissement des fonctions vitales. ⇒ appesantir. Le « bien-être, mêlé de fatigue, qui peu à peu l'engourdissait » (Martin du Gard).
2 ♦ Fig. « Cette peine que rien ne guérit, mais que le temps seul peut engourdir » (Sainte-Beuve). ⇒ assoupir.
II ♦ V. pron.
1 ♦ Devenir engourdi. Membres qui s'engourdissent. « Quand on s'est engourdi dans une position fausse » (Loti). — Spécialt Entrer en hibernation. ⇒ s'endormir. Marmotte qui s'engourdit.
2 ♦ Fig. « les facultés qui dans le tran-tran coutumier s'engourdissent » (A. Gide). ⇒ se rouiller.
⊗ CONTR. Dégourdir, dérouiller.
● engourdir verbe transitif (de gourd) Priver plus ou moins complètement quelqu'un, ses membres de sensibilité, de mobilité ; paralyser : Le froid engourdissait les explorateurs. Mettre quelqu'un, son esprit dans un état de torpeur, de passivité : Le grand âge lui a engourdi l'esprit. ● engourdir (synonymes) verbe transitif (de gourd) Priver plus ou moins complètement quelqu'un, ses membres de sensibilité...
Synonymes :
Contraires :
- dégourdir
Mettre quelqu'un, son esprit dans un état de torpeur, de...
Synonymes :
- assoupir
- endormir
Contraires :
- éveiller
- fouetter
- réveiller
- stimuler
engourdir
v. tr.
d1./d Causer l'engourdissement de. Le froid lui engourdissait les mains.
d2./d Fig. Diminuer, ralentir l'activité, l'énergie de. L'oisiveté engourdit le caractère. Ant. dégourdir.
⇒ENGOURDIR, verbe trans.
A.— [En parlant du corps, ou d'une partie du corps] Provoquer une paralysie partielle; rendre un membre inerte ou insensible. Engourdir les doigts, les mains; engourdir par le froid. « Le seul moyen qui ait réussi à engourdir la malade, c'est la morphine sur emplâtre (à dose infinitésimale)... » (MICHELET, Journal, 1842, p. 822) :
• 1. ... tout en donnant des signatures sur une table basse en laque doré qui s'écaillait, tellement elle était près du feu, il [le duc] tendait à chaque instant ses doigts engourdis vers la flamme...
A. DAUDET, Le Nabab, 1877, p. 34.
— Emploi pronom. à sens passif. Pieds qui s'engourdissent. Le membre se refroidit, s'engourdit et quelquefois même se gangrène (NÉLATON, Pathol. chir., t. 1, 1844, p. 222).
B.— P. ext. Mettre dans un état de passivité, de sommeil. C'est de là que viendrait cette poudre blanche que soufflent les voleurs dans une chambre pour engourdir les gens et les voler en toute sécurité (GONCOURT, Journal, 1894, p. 651) :
• 2. Dans une heure, peut-être, il serait là... Elle allongea les jambes, renversa la tête et ferma les yeux. Sa lassitude fondait à l'eau comme de la poussière. Un bien-être animal l'engourdissait.
MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, p. 115.
— Emploi pronom. à valeur subjective. Il se laissa aller dans un fauteuil où, peu après, il s'engourdit (CHÂTEAUBRIANT, Lourdines, 1911, p. 107).
♦ Spéc. [En parlant de certains animaux] Entrer en hibernation. Les chauve-souris qui, comme les ours, s'engourdissent pendant l'hiver (CUVIER, Anat. comp., t. 5, 1805, p. 225).
C.— Au fig.
1. Ralentir l'activité physique ou intellectuelle de quelqu'un. Une paresse engourdissait peu à peu l'abbé Mouret (ZOLA, Faute Abbé Mouret, 1875, p. 1231). Je ne puis secouer cette torpeur qui m'engourdit l'esprit et le rend incapable d'effort (GIDE, Journal, 1943, p. 199).
— Emploi pronom. à valeur subjective. Quand tout est tranquille et calme, il semble que mes facultés s'engourdissent; il faut du mouvement, des événements extraordinaires pour les mettre en jeu (MAINE DE BIRAN, Journal, 1816, p. 242).
2. Mettre en sommeil un sentiment. Engourdir ses passions; engourdir sa moralité. Éline va et vient sans bruit (...). C'est sa façon d'engourdir son chagrin, dans une activité matérielle (A. DAUDET, Évangéliste, 1883, p. 10) :
• 3. Ses épaules [à Florentine] allaient et venaient dans un balancement ininterrompu, triste et monotone, comme si elle berçait un enfant ou une pensée ou encore une vieille rancune qu'elle aurait bien voulu engourdir.
ROY, Bonheur d'occasion, 1945, p. 319.
Rem. La docum. atteste l'adj. engourdisseur, euse. Qui engourdit. Le crépuscule engourdisseur (cf. GENEVOIX, Nuits de guerre, 1917, p. 48).
Prononc. et Orth. :[], (j')engourdis []. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. Ca 1195 (AMBROISE, Guerre Sainte, 1571 ds T.-L. : engurdi [ms. desgurdi]); ca 1260 « devenir gourd » (PH. DE NOVARE, Quatre temps, 123, ibid.). Dér. de gourd; préf. en-; dés. -er. Fréq. abs. littér. :290. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 294, b) 309; XXe s. : a) 685, b) 404.
engourdir [ɑ̃guʀdiʀ] v. tr.
ÉTYM. XIIe; de en-, gourd, et suff. verbal.
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1 Priver en grande partie (un membre, le corps) de mobilité et de sensibilité. || Le froid engourdit les extrémités. ⇒ Transir. || La torpille, poisson qui engourdit la main qui le touche. ⇒ Paralyser. || Narcotique qui engourdit le cerveau. ⇒ Stupéfiant.
1 On peut comparer les malheureuses productions de cette espèce à ces jours affligeants de l'hiver, où un brouillard épais, joint à une gelée pénétrante, semble à la fois engourdir et contrister tous les êtres vivants.
2 (V. 1555). Par ext. Mettre dans un état général de ralentissement des fonctions vitales. || L'âge engourdit le corps. ⇒ Appesantir. Absolt. || Somnolence, paresse qui engourdit (→ Amollir, cit. 6).
2 Quelle interminable soirée ! Quelque chose de stupéfiant comme une vapeur d'opium l'engourdissait.
Flaubert, Mme Bovary, III, II.
3 (…) une sorte de torpeur, bienfaisante sous les souffles du matin vierge, engourdissait son jeune corps, laissant son esprit en demi-rêve.
Loti, Ramuntcho, I, II, p. 25.
4 (…) il s'abandonna lâchement au bien-être, mêlé de fatigue, qui peu à peu l'engourdissait.
Martin du Gard, les Thibault, t. III, p. 227.
♦ Fig. (En parlant de l'activité intellectuelle). || L'oisiveté engourdit l'esprit. ⇒ Rouiller. — (En parlant d'un sentiment). || Engourdir son cœur dans l'oubli (→ 1. Pouvoir, cit. 32). || Les voyages, la fréquentation du monde finirent par engourdir son chagrin. ⇒ Endormir, étourdir.
5 (…) cette peine que rien ne guérit, mais que le temps seul peut engourdir.
Sainte-Beuve, Correspondance, t. II, p. 117.
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s'engourdir v. pron.
ÉTYM. (1671).
1 Devenir engourdi. || Membres qui s'engourdissent (→ Assoupir, cit. 13). || La nature s'engourdit. — Spécialt. Entrer en hibernation. || Les animaux hibernants s'engourdissent en hiver et vivent au ralenti. ⇒ Assoupir (s'), endormir (s').
6 La marmotte est sujette plus qu'un autre animal à s'engourdir par le froid.
Buffon, Hist. nat. des animaux, La marmotte.
7 Maintenant je m'engourdis avec la nature jusqu'à ce qu'elle renaisse, je ne vis plus.
8 Puis ses jambes et ses bras se prirent d'une inertie atroce avec un fourmillement profond comme quand on s'est engourdi dans une position fausse (…)
Loti, Matelot, LXVII, p. 183.
9 On perd l'habitude de réfléchir comme celle de marcher; et l'âme s'engourdit et s'énerve comme le corps dans une stupide indolence.
10 Car Édouard est un de ces êtres dont les facultés, qui dans le tran-tran coutumier s'engourdissent, sursautent et se bandent aussitôt devant l'imprévu.
Gide, les Faux-monnayeurs, I, XIV, p. 169.
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engourdi, ie p. p. adj.
1 Qui est dans un état d'engourdissement. || Mains engourdies; doigts engourdis. ⇒ Gourd, paralysé, raide, rigide (→ Dégourdir, cit. 1). || Animal engourdi. ⇒ Inerte (→ Dormir, cit. 6). || Mouvements engourdis (→ Démarche, cit. 1).
11 L'animal engourdi sent à peine le chaud
Que l'âme lui revient avecque la colère.
La Fontaine, Fables, VI, 13.
12 (…) il advenait que, quand la nécessité le contraignait de parler, sa langue était engourdie, maladroite, et comme une porte dont les gonds sont rouillés.
Hugo, Notre-Dame de Paris, IV, III.
13 (…) ils avaient des heures de silence où, se laissant aller au bercement des ressorts, ils demeuraient comme engourdis dans une ivresse tranquille.
Flaubert, l'Éducation sentimentale, III, I.
♦ Par ext. ⇒ Empoté, lent.
14 Elle (Fanchon Fadet) ne fut point engourdie pour aller ouvrir, et grande fut sa joie en se laissant serrer sur le cœur de son ami Landry.
G. Sand, la Petite Fadette, XXXII, p. 211.
♦ Littér. (choses). || Campagne engourdie. ⇒ Endormi.
15 (…) tout semblait engourdi par le désœuvrement du dimanche et la tristesse des jours d'été.
Flaubert, Bouvard et Pécuchet, I.
16 (…) je regarde les coteaux engourdis.
F. Mauriac, le Nœud de vipères, p. 212.
2 Esprit engourdi. ⇒ Hébété, lent, léthargique (→ Dormir, cit. 9).
17 Alors les livres les plus platement atroces, les plus stupidement impies, les plus monstrueusement obscènes, étaient avidement dévorés par une société malade, dont les goûts dépravés et les facultés engourdies eussent rejeté tout aliment savoureux ou salutaire.
Hugo, Littérature et philosophie mêlées, W. Scott.
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CONTR. Animer, dégourdir, dérouiller, réveiller. — Agile, alerte, ardent, dégourdi, fringant, vif…
DÉR. Engourdissant, engourdissement.
Encyclopédie Universelle. 2012.