frère [ frɛr ] n. m.
• 1080; frade 842; lat. frater
1 ♦ Celui qui est né des mêmes parents que la personne considérée (frère germain), ou seulement (dr.) du même père (frère consanguin) ou de la même mère (frère utérin).⇒ demi-frère. « frères de la même chaumière et du même sang » (Loti). Frère aîné (fam. grand frère), cadet, puîné (fam. petit frère). ⇒fam. frangin, frérot. Frères jumeaux. Les frères de ses parents. ⇒ oncle. Le frère de son conjoint. ⇒ beau-frère. Amitié entre frères. ⇒ fraternel. Frères et sœurs. ⇒ fratrie.
♢ Par compar. Ressembler à qqn comme un frère, beaucoup. Aimer qqn comme un frère. Vivre comme des frères, en amitié étroite. Être, vivre comme frère et sœur, chastement.
♢ Allus. myth. Frères ennemis : Étéocle et Polynice; hommes du même parti qui ne s'entendent pas. — Caïn tua son frère Abel (⇒ 1. et 2. fratricide) .
2 ♦ Ami fraternel. Tu es un vrai frère pour moi. Fam. Dis donc, vieux frère ! ⇒ copain, pote. — Le frère : l'ami, le camarade. « Il y va fort, le frère ! » (Curtis).
3 ♦ Homme considéré par rapport à ses semblables, comme membre de la race, de la famille humaine. « Frères humains qui après nous vivez » (Villon).
♢ Relig. (Au plur.) Hommes considérés en tant que créatures d'un même Dieu. Aimer ses frères, son prochain. « Vous êtes tous mes frères, [...] catholiques, protestants, athées, car la parole de Dieu est pour tous » (Sartre). — Spécialt Fidèle de la même religion. Mes (bien chers) frères, termes par lesquels un prêtre s'adresse aux fidèles.
♢ Appellation des membres de certains ordres religieux. Les Frères mineurs (⇒ capucin, franciscain) , prêcheurs (⇒ dominicain) . Les frères des écoles chrétiennes. Absolt Il a été élevé chez les frères. — Religieux auxiliaire, dans certains ordres. Frère convers, frère lai.
4 ♦ Homme qui a (avec la personne considérée) une communauté d'origine, d'intérêts, d'idées, et qui a (avec elle) un lien affectif, intellectuel. ⇒ ami, camarade, compagnon, confrère, copain... « Sa mort survint, presque inaperçue des matelots, ses frères » (Loti). Frères de couleur, de race. Appos. Des peuples frères. — Loc. (1668) FAUX FRÈRE : traître à ses amis, ses associés, et par ext. fourbe, hypocrite (cf. fam. Faux cul). — FRÈRE D'ARMES : celui qui a combattu aux côtés de la personne considérée. — Les frères maçons (ou fam. frères Trois-points) :les membres de la franc-maçonnerie.
♢ Frère de sang : celui avec qui la personne considérée a fait l'échange de son sang en signe d'amitié et de fidélité.
♢ Frère de lait.
5 ♦ Fig. Chose, notion apparentée. « Les vertus devraient être sœurs, Ainsi que les vices sont frères » (La Fontaine). « Tel mythe peut être considéré comme frère d'un autre » (Baudelaire).
6 ♦ Fam. Un des éléments d'une paire; animal, objet semblable à un autre. Vous avez un joli vase, j'ai vu son frère chez mon antiquaire.
● frère nom masculin (latin frater, -tris) Personne de sexe masculin née du même père et de la même mère qu'une autre personne. Synonyme de demi-frère. Celui avec qui on est uni par des liens quasi fraternels ou avec lequel on a quelque lien d'intérêt, de sentiments, d'opinion, etc. : Tu es un frère pour moi. Celui qui appartient au même groupe que soi, groupe que l'on considère comme une famille : Ce sont mes frères de couleur. Littéraire. Chose qui a avec une autre un lien naturel ou une grande analogie : Le sommeil est frère de la mort. Familier. Objet semblable à un autre et formant avec lui une paire : Je cherche le frère de ce chandelier. L'homme considéré par rapport aux membres de la famille chrétienne : Frères en Jésus-Christ. Appellation que se donnent des hommes appartenant à certaines confréries (ordres religieux, franc-maçonnerie, etc.). Religion Nom donné à l'ensemble des religieux, même prêtres, dans quelques ordres (dominicains, franciscains…). Dans de nombreux ordres, nom donné aux religieux non prêtres, généralement chargés du temporel ou de tâches enseignantes. Dans les instituts religieux, nom donné aux membres qui ne sont pas destinés au sacerdoce et aussi aux religieux non encore prêtres. ● frère (citations) nom masculin (latin frater, -tris) Jean de La Fontaine Château-Thierry 1621-Paris 1695 Si ce n'est toi, c'est donc ton frère. Fables, le Loup et l'Agneau Gabriel Marie Legouvé Paris 1764-Paris 1812 Un frère est un ami donné par la nature. La Mort d'Abel Commentaire Généralement attribué à Legouvé, ce vers aurait été emprunté par lui à l'un de ses contemporains nommé Beaudoin. Bible Yahvé dit à Caïn : « Où est ton frère Abel ? » Il répondit : « Je ne sais pas. Suis-je le gardien de mon frère ? » Ancien Testament, Genèse IV, 9 Commentaire Citation empruntée à la « Bible de Jérusalem ». ● frère (difficultés) nom masculin (latin frater, -tris) Orthographe Frère, titre de certains religieux, s'écrit sans majuscule : frère Jean Chrysostome. Remarque L'italien Fra qui a le même sens s'écrit avec une majuscule : Fra Angelico. ● frère (expressions) nom masculin (latin frater, -tris) Faux frère, hypocrite capable de toutes les trahisons. Frère d'armes, celui qui a combattu ou combat aux côtés de quelqu'un. Frères ennemis, hommes du même parti qui ne s'accordent pas. Grand frère, frère aîné ; pays allié plus puissant qui protège et aide les pays qui lui sont associés. Familier. Vieux frère, terme d'affection. Frère trois points, nom que se donnent les francs-maçons (parfois abrégé : F. .. .). ● frère (synonymes) nom masculin (latin frater, -tris) Personne de sexe masculin née du même père et de...
Synonymes :
- frangin (populaire)
Synonymes :
- demi-frère
● frère
adjectif masculin
Se dit d'un groupe, d'un parti, d'un pays qui est inspiré par la même doctrine, qui appartient au même système politique : Les partis frères.
frère
n. m.
d1./d Celui qui est né du même père et de la même mère (frère germain) ou seulement du même père (frère consanguin) ou de la même mère (frère utérin).
|| Frères jumeaux, nés d'un même accouchement.
|| Frères de lait: l'enfant de la nourrice et celui qu'elle nourrit du même lait.
|| (Afr. subsah.) Frère même mère, utérin. Frère même père, consanguin. Frère même père même mère, germain.
d2./d (Afr. subsah.) Cousin, parent de même génération.
d3./d (Plur.) Fig. Les êtres humains, considérés comme ayant la même origine. Tous les hommes sont frères.
d4./d Personne unie à une autre par des liens étroits.
— Frères d'armes: compagnons de combat.
— Faux frère: celui qui trahit ses compagnons, ses amis.
|| Membre de certains ordres religieux.
— Frère prêcheur: dominicain.
— Spécial. Religieux non prêtre. Frère lai, frère convers.
d5./d (En appos.) Fig. Chose considérée comme naturellement unie à une autre. Des pays frères.
⇒FRÈRE, subst. masc.
A.— Celui qui est né du même père et de la même mère, ou de l'un des deux seulement, soit du même père (frère consanguin), soit de la même mère (frère utérin). Au pied d'un arbre vint s'asseoir Un jeune homme vêtu de noir, Qui me ressemblait comme un frère (MUSSET, Nuit déc., 1835, p. 92). Son frère, un peu de son sang, un autre moi (ZOLA, Nana, 1880, p. 1443). Électre, je suis Oreste... ton frère. Moi aussi je suis un Atride, et ta place est à mes côtés (SARTRE, Mouches, 1943, II, 1er tabl., 4, p. 59) :
• 1. — J'avais un ami. C'était mon frère. Nous avions étudié de compagnie. Nous habitions la même chambre à Stuttgart. Nous avions passé trois mois ensemble à Nuremberg. Nous ne faisions rien l'un sans l'autre...
VERCORS, Silence mer, 1942, p. 73.
SYNT. Frère aîné, cadet, puîné; frères jumeaux; être frère et sœur; aider, perdre, protéger son frère; traiter qqn en frère, veiller sur son frère; se ressembler comme deux frères, comme frère et sœur.
— En partic. Frère de lait. Enfant de la nourrice ou nourrisson, qu'elle a nourris tous les deux du même lait. Ma nourrice se mit à ma gauche; mon frère de lait à ma droite (CHATEAUBR., Mém., t. 1, 1848, p. 39). Frères siamois. Frères jumeaux qui naissent attachés par quelqu'endroit du corps. Enfants à deux têtes et frères siamois ont été exhibés sur nos pistes (Hist. spect., 1965, p. 1536).
— [P. allus. biblique et littér.] Un frère est un ami donné par la nature (LEGOUVÉ, Œuvres compl., t. 1, Mort d'Abel, III, 3, Paris, L. Janet, 1826 [1793], p. 77). Joseph vendu par ses frères. Abel tué par son frère Caïn. Caïn, qu'as-tu fait de ton frère? (SAND, Lélia, 1833, p. 306). Les frères ennemis. Étéocle et Polynice. Polynice est mort et il ne t'aimait pas. Il a toujours été un étranger pour nous. Un mauvais frère (ANOUILH, Antig., 1946, p. 160).
— Au fig.
♦ [En parlant de deux choses] Le pendant, la paire. Ce cadre est le frère, comme dit Froment-Meurice, de celui où est le Christ [d'ivoire] (BALZAC, Lettres Étr., t. 3, 1850, p. 207).
♦ [En parlant de deux pers. ou de créations artistiques apparentées par une indéniable ressemblance] Celui ou ce qui ressemble à une autre personne, à autre chose. Frère intellectuel; frère de croyances, d'opinions. Elle [une sonate de Schobert] le séduit [le petit Mozart] par la poésie, par un chromatisme frère du sien, et par l'emploi des tons mineurs (GHÉON, Promenades Mozart, 1932, p. 39). Dans la région où se rejoignent les plus hautes créations, le Crucifix de Giotto est le frère douloureux de l'Ange de Reims (MALRAUX, Voix sil., 1951, p. 251) :
• 2. Ces prophètes étaient frères sans se connaître; pas un d'eux ne savait (...) que quelqu'un de semblable à lui-même existât...
HUGO, Légende, t. 4, 1877, p. 599.
Expr. Le sommeil est le frère de la mort.
♦ Ce qui va ensemble. Le devoir et le droit sont frères (COUSIN, Hist. philos. mod., t. 2, 1847, p. 244). Elle [la guerre] a la cupidité pour marraine et son frère est le crime (PROUDHON, Guerre et paix, 1861, p. 326).
B.— P. anal. Celui qui est comme un frère pour quelqu'un.
1. [En parlant d'un lien de pers. à pers.]
a) Ami intime; ami de cœur, d'élection. Nous avions fait serment de ne jamais nous quitter, d'être inséparables, d'être frères (HUGO, L. Borgia, 1833, II, 2e part., 2, p. 133). J'aimais Bercot. Fils de veuve, c'était mon frère. Il était beau, frêle et doux (SARTRE, Mots, 1964, p. 187).
b) Compagnon, camarade. Vivre comme des frères. C'est promis, bien sûr. N'es-tu pas mon compagnon et mon frère? (ALAIN-FOURNIER, Meaulnes, 1913, p. 195). Oui Martinet, on se fréquente depuis l'école, d'avant le certificat. Des copains, des frères (ARNOUX, Paris, 1939, p. 212) :
• 3. ... l'ami qu'il avait perdu avait été pour lui une sorte de frère aîné, un compagnon de jeunesse, un guide qu'il idolâtrait.
ROLLAND, J.-Chr., Maison, 1909, p. 1004.
— Expr. Frères d'armes (vieilli). ,,Chevaliers qui avaient contracté une alliance d'armes, en se promettant une mutuelle assistance, et qui se donnaient réciproquement le nom de Frère`` (Ac.). Le sire de Coucy arriva aussitôt chez son vieux compagnon et frère d'armes qu'il aimait depuis si long-temps (BARANTE, Hist. ducs Bourg., t. 2, 1921-24, p. 53). P. ext. Ceux qui combattent ou ont combattu côte à côte pour une même cause (cf. Lar. Lang. fr.). Faux(-)frère. Celui qui trahit. Voltaire, dès lors, commença de voir en Jean-Jacques un « faux frère », un « Judas » (GUÉHENNO, Jean-Jacques, 1952, p. 19). Ça c'est un frère, un vrai frère (fam.). Au front, le moindre cuistot est un frère (MARTIN DU G., Thib., Épil., 1940, p. 986) Vieux frère (fam.). Adieu, vieux frère, aime-moi toujours (MALLARMÉ, Corresp., 1868, p. 269).
— Arg. Individu. Ce qu'il prend, le frère! (ESN. Poilu 1919, p. 252).
2. [En parlant d'un lien unissant une pers. à un groupe, une communauté, une confrérie, un pays, etc.] Frère de couleur, de race. Ceux-là, ce seraient ses compagnons, ses amis. D'avoir crevé la faim, il se sentait leur frère (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 496). Comme vous voyez, je suis votre frère, chez lui au milieu des siens (DE GAULLE, Mém. guerre, 1959, p. 129) :
• 4. ... le danger commun avait uni plus intimement tous les citoyens. Dans toutes les classes, on s'était rapproché davantage, on s'était reconnu frères, animés de sentiments semblables, touchés par les mêmes intérêts.
VERNE, 500 millions, 1879, p. 213.
— En partic. Frère franc-maçon. Un adepte de la franc-maçonnerie. Vous êtes franc-maçon, me dit-il [l'officier prussien] (...) je le suis aussi (...) et je n'ai pas voulu laisser sans secours un frère qui m'implorait (A. DAUDET, R. Helmont, 1874, p. 126). Frère trois-points (fam.). Même sens. Mon grand-père prétendait qu'il était frère-trois-points (SARTRE, Mots, 1964, p. 62). Frère rose-croix. Initié d'une confrérie secrète et mystique d'Allemagne au début du XVIIe s. Les frères rose-croix dans l'origine étoient alchimistes (STAËL, Allemagne, t. 5, 1810, p. 148). Frères de la côte. Les pirates et les flibustiers des Antilles aux XVIIe et XVIIIe s. Je fis une toilette de frère de la côte pour ne pas effaroucher tous les amis auxquels j'allais être présenté comme un marin du Midi (LOTI, Mon frère Yves, 1883, p. 88).
3. [En parlant d'un lien unissant une pers. à l'ensemble des hommes considérés comme les membres de la grande famille hum.] Aider ses frères; soulager les maux de ses frères. La raison m'est née. Le monde est bon. Je bénirai la vie. J'aimerai mes frères (RIMBAUD, Saison enfer, 1873, p. 218). Dire avec les Républicains que tous les hommes sont frères (MÉNARD, Rêv. païen, 1876, p. 162).
— P. ext. Lien affectif reliant une personne à l'univers (animaux, végétaux). Nos frères ailés (les oiseaux); nos frères inférieurs (les animaux). On se sent le frère de tout ce qui existe (MUSSET, Confess. enf. s., 1836, p. 27). Saint François (...) composa un cantique plein d'allégresse pour bénir le splendide frère Soleil, et notre sœur l'Eau (FRANCE, Lys rouge, 1894, p. 214).
— En partic., RELIG. L'homme considéré en tant que membre de la famille chrétienne. Frères en Jésus-Christ. Tu es le père des êtres; en toi tous les êtres sont frères (RENAN, Drames philos., Prêtre Némi, 1885, II, 2, p. 552) :
• 5. Ils ne sont forts contre vous, que parce que vous n'êtes point unis, que parce que vous ne vous aimez point comme des frères les uns les autres.
LAMENNAIS, Paroles croyant, 1834, p. 99.
♦ ,,Mes frères, mes chers frères, disent les prédicateurs en parlant à leurs auditeurs`` (Ac. 1878-1932).
♦ Les frères séparés. Les non-chrétiens ou les chrétiens qui n'appartiennent pas à l'Église romaine. Tous ces frères séparés, retranchés dans le désert, (...) que l'on appelle schismatiques, hérétiques, nationalistes et musulmans (CLAUDEL, Poète regarde Croix, 1938, p. 302).
♦ Personne appartenant à certains ordres religieux. Je ne suis plus don Juan ton fiancé (...), je suis frère Juan le trappiste (DUMAS père, Don Juan, 1836, IV, 5, p. 82).
En partic. Frère convers, frère lai, frère servant. Religieux qui n'est pas clerc et qui vaque aux besognes d'un couvent. Le frère Arsène, un convers qui cumulait les fonctions de tailleur et de concierge de l'abbaye (HUYSMANS, Oblat, t. 1, 1903, p. 90). Les frères mineurs. De l'ordre de saint-François. Les frères mineurs, à la robe grise, ceinturée de la corde à trois nœuds (FARAL, Vie temps st Louis, 1942, p. 52).
4. Emploi adj.
a) En appos. avec valeur d'adj.
— [Le subst. est un terme concr.] Les deux sapins frères saluent de la tête sans rire, raidis dans leur vêture sombre (COLETTE, Cl. ménage, 1902, p. 264).
— [Le subst. désigne une pers.] Dans cette rencontre de deux génies [Goethe et Beethoven] égaux et frères à tant d'égards (...) Beethoven conserve manifestement la supériorité morale (SAINTE-BEUVE, Caus. lundi, t. 2, 1851-62, p. 350).
b) [Suivi de la prép. de] Un entêtement frère du sien; des gémissements frères des siens. J'ai sombré dans un rêve étrange, vraiment frère de mon impression de veille (GRACQ, Beau tén., 1945, p. 77).
REM. 1. Fra, subst. masc. (ital., abrév. de frate « moine »). Fra Angelico. Attesté ds Lar. 19e, Lar. Lang. fr. 2. Fratone, subst. masc. (ital.). Moine possédant un certain crédit. Sous le gouvernement du saint-père, quand on avait un fratone dans sa manche, on faisait à peu près ce qu'on voulait (MÉRIMÉE, Lettres Panizzi, t. 1, 1870, p. 232). 3. Frelot, subst. masc., fam. Frère. Cf. LACASSAGNE, Arg. « milieu », 1928, p. 95. 4. Frérâtre, subst. masc. Mauvais frère. Laurence réclame sa part du papier, il ne faut pas être frérâtre et lui voler ses lignes (BALZAC, Corresp., 1821, p. 95).
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 842 fradre « enfant né de mêmes parents » (Serments de Strasbourg ds HENRY Chrestomathie t. 1, p. 1); ca 1100 frere (Roland, éd. J. Bédier, 1214); 2. ca 1050 « homme considéré par rapport à ses semblables » (Alexis, éd. Chr. Storey, 119); 3. 1174-76 « membre d'une communauté religieuse » (G. DE PONT-STE-MAXENCE, St Thomas, éd. E. Walberg, 2052). Du lat. class. frater « frère ». Fréq. abs. littér. :16 826. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 27 323, b) 24 045; XXe s. : a) 27 021, b) 19 106. Bbg. ARVEILLER (R.). Fr. mod. 1974, t. 42, p. 275. — CHAUTARD (É.). La Vie étrange de l'arg. Paris, 1931, p. 83. — KUZNECON (A. M.). On the typology of the semantic field of kindship terms. Linguistics. La Haye, 1974, n° 125, p. 9. — QUEM. DDL t. 11, 15.
frère [fʀɛʀ] n. m.
ÉTYM. V. 1100; fradre, 842; du lat. frater.
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A (Personnes).
1 a Celui qui est né des mêmes parents (que la personne considérée) ou seulement (dr.) du même père (frère consanguin) ou de la même mère (frère utérin). — REM. Les deux syntagmes sont du lang. didactique ou juridique; la langue courante dit demi-frère, dans ce cas. ⇒ (fam.) Frangin, frérot. || Les frères et les sœurs sont des collatéraux parents au deuxième degré (cit. 5). ⇒ Collatéral, parenté.
1 On remarquera (…) que certains collatéraux sont parents à la fois dans les deux lignes (paternelle et maternelle); ainsi les frères et sœurs issus des mêmes père et mère, qu'on appelle frères et sœurs germains. Au contraire, les frères et sœurs par le père seulement, qu'on appelle consanguins, les frères et sœurs de mère, qu'on appelle utérins, ne sont parents que dans une seule ligne.
A. Colin et H. Capitant, Cours élémentaire de droit civil, t. I, no 224.
♦ Frère aîné, frère puîné (didact.), frère cadet (cit. 2). || Frères jumeaux. || Frères siamois. — Fam. || Petit frère, grand frère, moins ou plus âgé (→ École, cit. 3; efforcer, cit. 9). || Avoir un frère, de nombreux frères et sœurs (→ Couronne, cit. 16; fécondité, cit. 2). || Perdre un frère (→ Fleur, cit. 24). || Les frères d'un prince, d'un roi (→ Assurer, cit. 53). || Monsieur, frère du roi. — Sentiments, amitié entre frères. ⇒ Fraternel (→ Agir, cit. 27). || Amours incestueux entre frère et sœur. — Meurtre d'un frère. ⇒ Fratricide. — Dr. || En matière de succession et en l'absence de descendants, les frères et sœurs (collatéraux privilégiés) sont appelés en concours avec les ascendants. || Partage d'un héritage entre frères.
2 C'est à la vérité, un beau nom et plein de dilection que le nom de frère (…) Mais ce mélange de biens, ces partages, et que la richesse de l'un soit la pauvreté de l'autre, cela détrempe merveilleusement et relâche cette soudure fraternelle.
Montaigne, Essais, I, XXVIII.
3 Le frère aidé de son frère est comme une ville forte.
Bossuet, Politique…, I, I, 6.
4 Vous aurez l'impudeur de conclure un mariage abominable, en unissant le frère avec la sœur (…)
Beaumarchais, la Mère coupable, V, 7.
5 Mais ils étaient frères, frères de la même chaumière et du même sang, et c'est là quelque chose de mystérieux, un lien qui résiste à tout.
Loti, Mon frère Yves, XL.
6 (…) les deux fils aînés, Fédor et son frère Michel, toujours ensemble, liés comme le pouce et l'index, sont voués aux mêmes études, et, jusqu'à vingt-cinq ans, ne se quittent pas.
André Suarès, Trois hommes, « Dostoïevski, » I.
7 (…) il admit que ses frères fussent exclus du patrimoine familial, selon l'usage qui attribuait à l'aîné la maison de commerce.
J. Chardonne, les Destinées sentimentales, p. 14.
8 Frères ! Non seulement le même sang, mais les mêmes racines depuis le commencement des âges, exactement le même jet de sève, le même élan ! Nous ne sommes pas seulement deux individus, Antoine et Jacques : nous sommes deux Thibault, nous sommes les Thibault.
Martin du Gard, les Thibault, t. I, p. 274.
♦ ☑ Ressembler à qqn comme un frère, lui ressembler beaucoup. Allus. littér. → Asseoir, cit. 27; étranger, cit. 40, Musset.
9 (…) l'étranger qui, à certaines secondes, vient à notre rencontre dans une glace, le frère familier et pourtant inquiétant que nous retrouvons dans nos propres photographies (…)
Camus, le Mythe de Sisyphe, p. 29.
♦ Aimer qqn comme un frère. ⇒ Fraternellement. — Traiter qqn en frère. ☑ Vivre en frère, comme des frères : en amitié étroite, en bonne intelligence. ☑ Partager en frères, également. || S'embrasser en frères.
10 — Embrassons-nous en frères.
— J'y consens de grand cœur, et me réjouis fort
Que tout soit terminé par un heureux accord.
Molière, le Dépit amoureux, III, 4.
11 (…) Promettez-moi de vivre comme frères (…)
La Fontaine, Fables, IV, 18.
12 Nous sommes loin l'un de l'autre, nous qui vécûmes comme des frères siamois.
Flaubert, Correspondance, t. II, p. 49.
13 Plus de sang ! Désormais vivez comme des frères,
Et tous, unis, fumez le Calumet de Paix !
Baudelaire, Poèmes ajoutés à l'éd. posthume, Calumet de Paix, II.
♦ ☑ Être, vivre comme frère et sœur : (en parlant d'un homme et d'une femme qui n'ont pas ces liens de parenté) vivre ensemble chastement.
13.1 Vous caresser, à présent, je ne peux plus. Et être frère et sœur, eh bien, je vous le dis franchement, impossible, je ne suis pas cet homme-là.
Montherlant, Pitié pour les femmes, p. 46.
♦ ☑ (1487). Allus. myth. Les frères ennemis : Étéocle et Polynice. || La Thébaïde, ou les Frères ennemis, tragédie de Racine. — Allus. bibl. || Joseph vendu par ses frères. — Caïn tua son frère Abel.
14 Le Seigneur dit ensuite à Caïn : Où est votre frère Abel ? Il lui répondit : Je ne sais; suis-je le gardien de mon frère ? Le Seigneur lui repartit : Qu'avez-vous fait ? la voix du sang de votre frère crie de la terre jusqu'à moi.
Bible (Sacy), Genèse, IV, 9-10.
♦ Allus. littér. || Le Frère et la Sœur, pièce de Goethe (1776); Les Frères Zemganno, roman des frères Goncourt (1879). || Les Frères Karamazov, roman de Dostoïevski (1880). — Prov. : ☑
15 Et je sais que de moi tu médis l'an passé.
— Comment l'aurais-je fait, si je n'étais pas né ?
Reprit l'agneau, je tète encor ma mère.
— Si ce n'est toi, c'est donc ton frère.
— Je n'en ai point. — C'est donc quelqu'un des tiens !
La Fontaine, Fables, I, 10. ☑
16 Un frère est un ami donné par la nature.
Legouvé, la Mort d'Abel, III, 3.
♦ Par ext. || Frère de lait : le fils d'une nourrice, par rapport à celui ou à celle qu'elle a nourri de son lait; le nourrisson d'une femme, par rapport à ses enfants. — Beau-frère (voir ce mot). — Frère par adoption, frère adoptif : fils adoptif par rapport aux autres enfants d'une personne.
b En franç. d'Afrique. Enfant né de l'un des parents (polygamie) ou des deux parents, par rapport aux autres enfants. — REM. Cet emploi est plus large qu'en français standard; pour préciser on dit : frère même père, frère même mère.
♦ Cousin (dans une même famille).
2 a Ami fraternel. || C'est un frère, un véritable frère pour lui. Fam. || Allez, prête-moi cent balles, si t'es un frère !
♦ Dis donc, vieux frère ! ⇒ Ami, copain, pote. — Le frère : l'ami, le camarade (→ Le mec). → aussi ci-dessous, 4. (avec le possessif).
16.1 Une heure sereine. Parfois, Martial poussait une exclamation sourde. Elle demandait : « Qu'est-ce qu'il y a ? — Il y va fort, le frère ! disait Martial. Écoute ceci. » Il lisait le passage qui l'avait heurté (…)
Jean-Louis Curtis, le Roseau pensant, p. 235.
b En franç. d'Afrique. Homme avec lequel la personne considérée a des liens (de pays, d'ethnie, de classe d'âge, etc.)
3 a Homme considéré par rapport à ses semblables, comme membre de la race, de la famille humaine. || Tous les hommes sont frères. || Nos frères humains. ⇒ Semblable.
17 Freres humains qui après nous vivez,
N'ayez les cœurs contre nous endurcis (…)
Se freres vous clamons (appelons), pas n'en devez
Avoir dédain, quoi que fûmes occis
Par justice.
Villon, Poésies diverses, Épitaphe de Villon (Ballade des pendus).
18 Un roi sage (…)
(…) d'injustes fardeaux n'accable point ses frères.
Racine, Athalie, IV, 2.
19 — Hypocrite lecteur, — mon semblable, — mon frère !
Baudelaire, les Fleurs du mal, Au lecteur.
b (XVIIe). Relig. (Au plur.). Les hommes considérés en tant que créatures d'un même Dieu, spécialt, fidèles d'une même religion (→ Bénir, cit. 17; eucharistie, cit. 2). || Aimer (cit. 6) ses frères. ⇒ Prochain. || Les chrétiens sont frères en Jésus-Christ, les musulmans en Mahomet. — (Appellatif). || Mes frères, mes bien chers frères, mes très chers frères, termes par lesquels les prédicateurs chrétiens s'adressent à leurs auditeurs (→ Appeler, cit. 36; attache, cit. 14).
20 Dieu seul est grand, mes frères, et dans ces derniers moments surtout où il préside à la mort des rois de la terre, plus leur gloire et leur puissance ont éclaté, plus, en s'évanouissant alors, elles rendent hommage à sa grandeur suprême.
Massillon, Oraison funèbre de Louis XIV.
21 Vous êtes tous mes frères, mes très chers frères, mes frères d'armes et mes frères en Dieu, je m'adresse à vous tous, catholiques, protestants, athées, car la parole de Dieu est pour tous.
Sartre, la Mort dans l'âme, p. 237.
c (Fin XIIIe). Spécialt. Titre que l'on donne aux membres de certains ordres religieux. ⇒ Religieux. || Frères mineurs. ⇒ Capucin, franciscain (→ Camper, cit. 1). || Un frère mineur. || Frères prêcheurs. ⇒ Dominicain. || Frères missionnaires. || Frères de Saint-Jean de Dieu. ⇒ Ignorantin. || Petits Frères de Marie. ⇒ Mariste. || Frères de la doctrine chrétienne. || Frères des écoles chrétiennes : congrégation fondée en 1680 par Jean-Baptiste de la Salle et qui se consacre à l'éducation des garçons. — Absolt (au plur.). || Il a été élevé chez les Frères.
♦ Religieux qui n'est pas clerc et qui remplit certaines fonctions subalternes dans une communauté. Frère convers, frère lai. ⇒ Convers (cit. 1 et supra), lai, servant; et aussi coupe-choux, frater, tourier. || Le frère lampier, chargé d'allumer les lampes. ⇒ Frelampier, 2.
22 (Ce que montre d'obéissance) À son supérieur le moindre petit Frère (…)
Molière, l'École des femmes, III, 2.
♦ Titre que se donnent certains religieux (→ Escrimer, cit. 3). || Frère Jean des Entommeures (Rabelais). || Frère Jacques, chanson populaire.
23 (…) il se fit capucin sous le nom de frère Ange.
Voltaire, Henri IV, note.
24 (…) ils vivaient, sans le savoir, au fond de leurs trous boueux une vie fraternelle. Non pas qu'ils fussent, entre eux, irréprochables, ni qu'ils s'appelassent frères, à la manière des moines, un mot de trois lettres, que je n'ose écrire, suffisant d'ordinaire à leur cordialité.
Bernanos, les Grands Cimetières sous la lune, p. 193.
➪ tableau Principaux noms de religieux.
4 (Le frère de…, son frère). Homme qui a (avec d'autres) une communauté d'origine, d'intérêts, de sentiments, de goûts, d'idées; qui est uni (à eux) par un lien affectif, intellectuel. ⇒ Ami (cit. 1), camarade, compagnon, confrère, copain (→ Animalité, cit. 4; fédération, cit. 5). || Se sentir le frère de ceux qui… (→ Communisme, cit. 3). || Frères de couleur, de race. || « Sois mon frère, ou je te tue » (Chamfort; → Fraternité, cit. 9). || Mon frère Yves, roman de Loti, où les protagonistes sont le narrateur et Yves Kermadec, son ami et protégé. — (En attribut). || Être frères en une croyance, en une patrie commune (→ En, cit. 18). Appos. || Des peuples frères. || Les partis frères : les autres partis d'inspiration communiste, pour l'un de ces partis, pour les membres de celui-ci.
25 Esther, que craignez-vous ? Suis-je pas votre frère ?
Racine, Esther, II, 7.
26 Ces lois qui (…)
Des humains attendris font un peuple de frères (…)
Voltaire, Zaïre, I, 1.
27 Jaurès est un instant la voix de la jeunesse armée. À ses poings brandis brillent les fusils qui, demain, ne partiront pas contre nos frères d'Allemagne.
Aragon, les Beaux Quartiers, II, XXIX.
♦ En parlant d'animaux (→ Bœuf, cit. 5) :
28 Les animaux ne connaissent que l'amour… les chats, les perruches, et cætera; ils n'ont de fraternité que de pelage. Pour trouver des frères, ils sont obligés d'aimer les hommes, de faire la retape aux hommes…
Giraudoux, Électre, I, 13.
♦ En parlant des membres d'une société, d'une association, d'un corps. || Trahir ses frères. — ☑ Loc. (1668). Faux frère : traître à ses associés, et, par ext., fourbe, hypocrite. ⇒ fam. Cul (faux cul).
28.1 J'essayai de parler à Blow : il me répondit sur un ton nouveau : j'étais un ennemi, un faux frère, un hypocrite. Je rentrai chez moi. Il grogna amèrement : « À demain matin. »
Drieu La Rochelle, la Comédie de Charleroi, p. 299.
♦ ☑ Hist. Frères d'armes : chevaliers, guerriers qui avaient contracté une alliance mutuelle. — Mod. Ceux qui se battent ou se sont battus ensemble, pour la même cause. ⇒ Compagnon (d'armes).
♦ Frère maçon (fam. frère trois-points) : membre de la franc-maçonnerie. ⇒ Franc-maçon.
29 Son père parlait incidemment des frères Trois-points comme d'individus mi-grotesques mi-tarés.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. IV, X, p. 109.
♦ ☑ Les frères de la côte : nom que se donnaient, aux XVIIe et XVIIIe siècles, les pirates et flibustiers des Antilles.
30 Il y avait grande foire à Paimpol ce jour-là, et je fis une toilette de frère de la côte pour ne pas effaroucher tous les amis auxquels j'allais être présenté comme un marin du Midi.
Loti, Mon frère Yves, XVI.
B (Choses).
1 Chose, notion abstraite considérée comme unie (par l'analogie, la ressemblance, l'origine…) à une autre. || Les anciens poètes disaient le sommeil frère de la mort (Littré). — REM. Frère ne s'applique généralement qu'à des choses « dont le nom est masculin » (Hatzfeld).
31 Les vertus devraient être sœurs,
Ainsi que les vices sont frères (…)
La Fontaine, Fables, VIII, 25.
32 Tel mythe peut être considéré comme frère d'un autre, de la même façon que le nègre est dit le frère du blanc.
Baudelaire, l'Art romantique, R. Wagner, III.
2 Fam. Un des éléments d'une paire; animal, objet semblable à un autre. || Vous avez un joli vase, j'ai vu son frère chez mon antiquaire.
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DÉR. Frérage, frérot.
COMP. Beau-frère.
Encyclopédie Universelle. 2012.