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hérisser

hérisser [ 'erise ] v. tr. <conjug. : 1>
héricier v. 1165; lat. pop. °ericiare; de ericius ( hérisson)
I V. tr.
1Dresser (ses poils, ses plumes, etc.), en parlant des animaux. Chat en colère qui hérisse ses poils. « Comme un coursier indompté hérisse ses crins » ( Rousseau).
Présenter sous forme de pointes. Cactus qui hérisse ses épines.
Par ext. Faire dresser (les poils, les plumes, etc.). Le froid, la peur hérisse les poils ( horripiler) .
2Se dresser sur (en parlant de choses pointues, saillantes). Pointes, clous qui hérissent une planche, une paroi.
Animaux au corps hérissé de piquants : hérisson, oursin, porc-épic. « Une grosse tête hérissée de cheveux roux » (Hugo). Fig. Parcours de steeple hérissé d'obstacles. « des immeubles hérissés d'antennes de télévision » (Tournier).
3Garnir, munir de choses aiguës, pointues. Hérisser une grille de pointes de fer ( hérisson) . Hérisser de mitrailleuses une ligne de défense. Hérisser un mur. hérissonner.
4(Abstrait) Garnir, remplir de choses rébarbatives, désagréables, difficiles. Hérisser son discours de mots savants, de citations. embarrasser, surcharger. Question de concours hérissée de difficultés.
5Disposer défavorablement (qqn) en inspirant de la colère, de la défiance. horripiler, indisposer, irriter. Cela me hérisse (cf. Mettre en boule).
II ♦ SE HÉRISSER v. pron.
1Se dresser (en parlant des poils, des plumes, etc.). Il « criait et grinçait des dents, ses cheveux roux se hérissaient » (Hugo).
Dresser son poil, ses plumes, ses piquants. « Dans le danger, le porc-épic se hérisse » (Hugo). Le chat se hérissa de colère.
2Se dresser, en parlant de choses aiguës, pointues. « L'aloès et le cactus se hérissaient parmi les broussailles » (Nerval). Se hérisser de : être garni, muni, entouré de. La planche se hérissait de pointes, de clous.
3(Personnes) Manifester son opposition, sa colère. se fâcher, s'irriter. À cette proposition, il se hérissa. se raidir.
⊗ CONTR. Aplatir, 1. lisser; adoucir, calmer.

hérisser
v.
rI./r v. tr.
d1./d Dresser (ses poils, ses plumes) en parlant d'un animal.
d2./d Se dresser sur (en parlant de choses saillantes). Des rochers hérissent la côte.
d3./d Garnir de choses pointues, saillantes. Hérisser de tessons de bouteilles le haut d'un mur.
d4./d Fig. Horripiler, faire réagir (qqn) vivement sous le coup de l'irritation. Ces propos le hérissaient.
rII./r v. Pron.
d1./d Se dresser (en parlant des poils ou des plumes). Ses cheveux se hérissèrent d'horreur.
|| Dresser ses poils ou ses plumes (en parlant d'un animal). Le chat s'est hérissé devant le chien.
d2./d Fig. Avoir une réaction de défiance ou de défense. Il se hérisse quand on lui parle de cela.
rIII/r Pp. adj. Cheveux, poils hérissés.

⇒HÉRISSER, verbe trans.
A. — [Sans compl. locatif]
1. [Le suj. désigne l'agent; avec un compl. introd. par de désignant le moyen]
a) Garnir quelque chose d'objets saillants ou pointus. Hérisser un mur de tessons de bouteilles. Vauban avait hérissé cette ligne [depuis Tournay jusqu'à Bâle] de forteresses (CHATEAUBR., Congrès Vérone, t. 1, 1838, pp. 368-369). Le vieux Gardinois (...) hérissait le parc de clôtures baroques contre les maraudeurs (A. DAUDET, Fromont jeune, 1874, p. 61) :
1. — Un instant j'ai eu l'idée de hérisser votre habitation d'aiguilles de marbre, comme le dôme de la cathédrale de Milan...
REYBAUD, J. Paturot, 1842, p. 243.
[En constr. factitive] M. Thiers, pour sauver son système, a réduit la France à un espace de vingt lieues qu'il a fait hérisser de forteresses (CHATEAUBR., Mém., t. 4, 1848, p. 527).
Emploi pronom. réfl., rare. Faire que sa surface soit couverte de choses dressées comme des piquants. Sous cette forme animée on la voit également [la matière] (...) se hérisser des dards du porc-épic, se couvrir de duvet, de poils, ou de plumes diversement colorées (DUPUIS, Orig. cultes, 1796, p. 74).
b) Garnir quelque chose d'éléments trop apparents et/ou choquants. Hérisser son style de pointes (Ac.). Notre magistrat aimait à hérisser sa conversation de pointes, d'équivoques et de propos gaillards (NERVAL, Nouv. et fantais., 1855, p. 184). Ce qui distingue, en certaines matières à ma portée, le soi-disant érudit de l'amateur éclairé, c'est que le premier hérisse ses pages de notes et ses notes de signes bizarres (SAINTE-BEUVE, Cahiers, 1869, p. 44).
2. [Le suj. désigne le moyen]
a) Se dresser à la surface de quelque chose à la manière de piquants. Les piquants qui hérissent la tige du rosier (Ac. 1835-1935). Les rochers qui hérissent le flanc d'une montagne (Ac. 1835-1935). Des brisants écailleux (...) hérissent la côte. (NODIER, Trilby, 1822, p. 166). Les Dolomites hérissent une grande partie de la contrée (MICHELET, Journal, 1838, p. 279). Leur barbe de plusieurs jours hérissait leurs joues (ADAM, Enfant Aust., 1902, p. 179). Les clochers noirs, les cheminées hérissaient le triste pays natal des Parisiens (NIZAN, Conspir., 1938, p. 96).
b) Remplir de façon peu heureuse et même choquante. Mes efforts réitérés pour faire disparaître quelques-uns des articles qui hérissent les derniers vers de la 12e strophe ont été aussi infructueux (HUGO, Corresp., 1819, p. 304).
c) [Avec un compl. introd. par de désignant une partie du référent du sujet] Faire qu'une partie de soi-même se dresse à la surface de quelque chose à la manière de piquants. Je la vis, Sur la pente des rocs dont les arêtes nues Hérissaient les frimas de leurs pointes aiguës (LAMART., Jocelyn, 1836, p. 655). Des ibex hérissaient le couvercle de leurs oreilles et de leurs cornes (GAUTIER, Rom. momie, 1858, p. 318). Durs palais italiens hérissant de tours les villes (FAURE, Espr. formes, 1927, p. 273).
3. Emploi pronom. Se hérisser de qqc.
a) Se couvrir de choses dressées à la manière de piquants. Les rues se hérissent de barricades. Toute la surface de l'animal se hérisse de petits tubes charnus et béans (CUVIER, Anat. comp., t. 4, 1805, p. 442). Les chantiers de l'île Louviers (...) se hérissent de combattants (HUGO, Misér., t. 2, 1862, p. 284). Notre littoral se hérissa de canons (MAURRAS, Kiel et Tanger, 1914, p. 64).
b) Se remplir de choses que l'on présente comme peu heureuses ou choquantes. L'avenir se hérisse de problèmes. La table se hérissa de rires aigus ou graves (L. DAUDET, Morticoles, 1894, p. 301). La religion se fait fanatique, se hérisse de défenses, étouffe la découverte (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 738) :
2. Cette manœuvre, par l'afflux des forces alliées en Flandre, allait prendre une nouvelle ampleur, mais aussi elle allait, par l'entrée en ligne de forces allemandes nouvelles, se hérisser de nouvelles difficultés.
JOFFRE, Mém., t. 1, 1931, p. 466.
B. — [Avec un compl. locatif]
1. [Le suj. désigne l'agent]
a) Faire se dresser quelque chose à la surface de quelque chose à la manière de piquants. De fortes bouffées de vent hérissaient tous les cheveux sur les têtes nues (AMIEL, Journal, 1866, p. 353). Le sifflement des balles hérissait le poil sur sa peau (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Avent. W. Schnaffs, 1883, p. 203).
b) [Le compl. désigne une partie du référent du suj. p. ell. du compl. locatif] Faire se dresser une partie de soi-même à la manière de piquants. Le chat hérisse ses poils. Le lion hérisse sa crinière quand il est irrité (Ac. 1835-1935). Les coursiers hérissant leur crinière à longs flots (CHÉNIER, Bucoliques, 1794, p. 71). Le corbeau, hérissant ses plumes, (...) Garda quelques instants un sinistre silence (LECONTE DE LISLE, Poèmes barb., 1878, p. 274). Chaveriat hérissa sa courte moustache blanche (COLETTE, Képi, 1943, p. 34).
Emploi pronom. réfl. Dresser ses poils, ses piquants, ses plumes. Le chat se hérisse; se hérisser de peur. Au milieu se hérissait la phalange, formée par des syntagmes ou carrés pleins, ayant seize hommes de chaque côté (FLAUB., Salammbô, t. 1, 1863, p. 166). À notre approche, il [un oiseau] (...) se hérissa et ouvrit largement ce bec qui formait tout son visage (A. FRANCE, Pt Pierre, 1918, p. 172) :
3. Il semblera sans doute singulier que j'aie envisagé alors l'éventualité de ce malheur sans que ma chair se hérissât d'épouvante. Car la seule pensée de me trouver à la Jassine en présence du cadavre de Clodius aurait dû la soulever d'horreur.
BOSCO, Mas Théot., 1945, p. 104.
2. Emploi pronom. [Le suj. désigne le moyen]
a) Se dresser quelque part à la manière de piquants. Deux ou trois fois je sentis tous les poils de mes bras se hérisser sur moi, croyant reconnaître le capitaine (STENDHAL, Souv. égotisme, 1832, p. 71). Un jardin (...) orné de quatre vases où se hérissaient des cactus (FLAUB., Éduc. sent., t. 1, 1869, p. 246) :
4. Il y a là de petites places solitaires, où se hérisse un orme dépouillé, en haut d'un vieil escalier de pierre...
COPPÉE, Bonne souffr., 1898, p. 80.
[Le suj. désigne qqc. qu'on présente comme peu heureux ou choquant] Se dresser. Ces difficultés qui se hérissent devant les jeunes filles (BARB. D'AUREV., Memor. 1, 1836, p. 15).
b) [Sans compl. locatif]
Se dresser à la manière de piquants. Cet oiseau est irrité, les plumes de son cou se hérissent (Ac. 1835-1935). Dame Pluche est pâle de terreur; ses faux cheveux tentent de se hérisser (MUSSET, On ne badine pas, 1834, III, 4, p. 63). Les moustaches noires se hérissaient comme d'étonnement et d'effort (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 151). Les entailles laissées par le pic se hérissent en écailles éblouissantes (CAMUS, Exil et Roy., 1957, p. 1581).
[Avec un compl. désignant une partie du référent du suj.] Dresser une partie de soi-même à la manière de piquants. Les chaumes hérissaient des brins de vermeil luisant (ZOLA, Terre, 1887, p. 252). De frêles graminées, hérissant leurs épis barbus, pareils à des épis d'orge (MOSELLY, Terres lorr., 1907, p. 288).
C. — 1. Provoquer une réaction de défense et/ou de rejet devant quelque chose ou quelqu'un. Cette situation me hérisse. Je lis le Nègre du Narcisse en songeant à vous. Mais cette traduction d'H. me hérisse (GIDE, Corresp. [avec Claudel], 1910, p. 128).
[Avec un compl. introd. par contre] L'instinct qui hérissait souvent le soldat contre le « journal d'académiciens et de généraux », c'était l'instinct même de la France (THIBAUDET, Réflex. litt., 1936, p. 223).
2. Emploi pronom. réfl. Avoir devant quelqu'un ou quelque chose une réaction de défense et/ou de rejet. Son amour-propre se hérisse. Il se hérisse à tout propos (Ac. 1935). Madame Grandjean haussa légèrement les épaules... Alors, je me hérissai : — Ben oui... Qu'est-ce que j'lui dirais? (GYP, Souv. pte fille, 1928, p. 295). Une extraordinaire antipathie divisait les deux normaliens (...). Chaque fois qu'ils passaient l'un près de l'autre, ils se hérissaient, prêts à cogner ou à mordre (MAGNANE, Bête à concours, 1941, p. 286). Si je t'entends bien, se hérissa le prophète bigle, je devrais tolérer le vice! (SAINT-EXUP., Citad., 1944, p. 768).
[Avec un compl. introd. par contre] Se hérisser contre un projet. On dirait que l'intelligence humaine les inquiète, et ils se hérissent contre elle (HUGO, Travaill. mer, 1866, p. 323). C'est Jésus (...) qui tombe sur le tapis de boue de nos âmes, en nous suppliant, du moins, de ne pas trop nous hérisser contre lui (BLOY, Journal, 1895, p. 188) :
5. Se croyant en possession d'un système très orthodoxe, mais nouveau, et contre lequel se hérisseraient fatalement les autres écoles catholiques, il insinue ses idées plutôt qu'il ne les expose.
BREMOND, Hist. sent. relig., t. 4, 1920, p. 424.
Prononc. et Orth. : [] init. asp., (il) hérisse []. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1140 intrans. « se hérisser » (G. GAIMAR, Hist. des anglais, éd. A. Bell, 784 : Tute la char l'en heriçot); ca 1160 pronom. « dresser ses poils (en parlant d'un animal) » (Eneas, 2590 ds T.-L.); ca 1165 trans. « dresser (les poils, les plumes, les écailles) » (B. DE SAINTE-MAURE, Troie, 1919, ibid.); 1595 pronom. « (en parlant des cheveux, des poils) se dresser » (MONTAIGNE, Essais, I, 21, éd. A. Thibaudet, p. 129); 2. p. ext. a) fin XIIe s. hericé part. passé « garni de choses aiguës, pointues » (D. PIRAMUS, Vie de Saint Edmond, 2558 ds T.-L.); 1558 pronom. « se garnir de choses aiguës, pointues » (DU BELLAY, Antiquités de Rome, XXX, 3, éd. H. Chamard, t. 2, p. 27); b) 1585 intrans. « se dresser » (GARNIER, Antigone, 534 ds IGLF); 1674 trans. « (en parlant d'objets pointus) se dresser à la surface de quelque chose » (BOILEAU, Epîtres, III, 67, éd. A. Cahen, p. 24); 1794 pronom. « se dresser » (CHÉNIER, Élégies, p. 220 : un amas [de sommets] se hérisse); c) 1752 maçonn. (Trév. Suppl.); 3. fin XIIe s. pronom. « s'opposer, se révolter » (Chevalerie Vivien, éd. A. L. Terracher, 143, var.); av. 1755 trans. « indisposer, irriter » (SAINT-SIMON, Mémoires, éd. A. de Boislisle, t. 23, p. 147); 4. 1586 part. passé fig. « pourvu de choses rébarbatives, difficiles » (LE LOYER, Livre des Spectres, 2e partie, p. 1). D'un b. lat. ericiare, dér. du rad. de (hérisson). Cf. lat. médiév. iriciatus au IXe s. ds GGL V, 542, 30 : Hirsutus iriciatus. H initial prob. d'orig. expressive. Fréq. abs. littér. : 345. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 437, b) 785; XXe s. : a) 550, b) 339.

hérisser ['eʀise] v.
ÉTYM. V. 1165, hericier; lat. pop. ericiare, du lat. class. ericius (→ Hérisson); l'h aspiré est d'orig. expressive.
———
I V. tr.
1 (Mil. XVIe). Le sujet désigne un animal. Dresser (ses poils, ses plumes, ses piquants). || Le lion hérisse sa crinière (cit. 1), l'oiseau ses plumes, le porc-épic ses piquants.
1 J'ai donc vu ce sanglier, qui par nos gens chassé,
Avait d'un air affreux tout son poil hérissé (…)
Molière, la Princesse d'Élide, I, 2.
2 Comme un coursier indompté hérisse ses crins, frappe la terre du pied et se débat impétueusement à la seule approche du mors (…)
Rousseau, De l'inégalité parmi les hommes, II.
3 (…) des oiseaux se tenaient immobiles, hérissant leurs petites plumes au vent froid du matin.
Flaubert, Mme Bovary, I, II.
Le sujet désigne un végétal, un objet. Présenter (des pointes, des éléments aigus). || Le cactus hérisse ses épines. || Monument qui hérisse son faîte (→ Carquois, cit. 1).
Sujet n. de cause abstraite. Faire dresser (les poils, les plumes [d'un animal]). || La colère hérisse les poils des chats. Le compl. désigne le poil, les cheveux humains. || Le froid hérisse les poils ( Horripiler). Fig. || La peur, l'horreur hérissait les cheveux de sa tête.
4 Le sifflement des balles hérissait le poil sur sa peau.
Maupassant, les Contes de la Bécasse, « Aventure de Walter Schnaffs ».
Passif et p. p. || Être hérissé de… || Cheveux hérissés de frayeur (→ ci-dessous, Hérissé, 1.).
5 (…) les cheveux hérissés
D'épouvante, d'horreur et de colère (…)
Leconte de Lisle, Poèmes barbares, « Le corbeau ».
2 (1673). Le sujet désigne des choses pointues, saillantes, des poils. Se dresser sur. || Les épingles qui hérissent une pelote. || Pointes, écrous (cit. 2) qui hérissent une planche, une paroi. || Des morceaux de verre, des tessons hérissent le sommet du mur.
6 Le chardon importun hérissa les guérets (…)
Boileau, Épîtres, III.
7 Des brins de chaume, des broussailles hérissent çà et là la couche neigeuse où sautillent des corbeaux qui virgulent de leur noirceur la blancheur du sol.
Th. Gautier, Feuilleton du « Moniteur universel », 25 mai 1868.
8 (…) je méprisais les petites filles et j'attendais avec impatience le moment (qui, hélas ! est venu) où une barbe piquante me hérisserait le menton.
France, le Crime de S. Bonnard, in Œ., t. II, p. 285.
9 (…) une armée de pins gisaient à terre. Leurs racines géantes hérissaient la lande dans laquelle elles laissaient d'énormes trous.
Pierre Benoit, Mlle de la Ferté, I, p. 19.
3 (1779). Sujet n. de personne. Garnir, munir (qqch.) de choses aiguës, pointues. || Hérisser de pieux un bastion (Littré). Entourer. || On a hérissé ce mur de tessons de bouteilles, cette grille de pointes de fer ( Hérisson). || Hérisser de mitrailleuses une ligne de défense. Armer.
10 En Franche-Comté, plus on bâtit de murs, plus on hérisse sa propriété de pierres rangées les unes au-dessus des autres, plus on acquiert de droits au respect de ses voisins.
Stendhal, le Rouge et le Noir, I, I.
Techn. || Hérisser un mur. Hérissonner.
Au p. p. Garni de pointes, d'aspérités, etc. || Jambes hérissées de longs poils (→ Éparvin, cit.). || Tête hérissée de cheveux blancs (→ Flageller, cit. 1).Écailles hérissées de pointes (→ Cactus, cit. 1). || Cuirasse hérissée de clous (→ Cataphracte, cit.). || Épinoche hérissée de piquants (→ Fretin, cit. 2).L'aspect hérissé d'un édifice, d'une barricade (→ Efflorescent, cit.; enchevêtrer, cit. 2). || Hérissé comme un porc-épic, comme un chardon. || Tour hérissée d'aiguilles (cit. 17). || Crête hérissée de pieux barbelés (cit. 1). || Enceinte (1. Enceinte, cit. 2) hérissée de tours, de créneaux (→ Forteresse, cit. 1). || Arbres hérissés de lichen (→ Anguleux, cit. 1). || Sentiers hérissés de buissons (→ Ficher, cit. 5). || Parcours de steeple hérissé d'obstacles.Absolt. → ci-dessous, Hérissé (adj.).
11 Un autel hérissé de dards, de javelots (…)
Racine, Iphigénie, III, 1.
12 Une grosse tête hérissée de cheveux roux (…)
Hugo, Notre-Dame de Paris, I, V.
13 (…) la plaine était verte, hérissée de palmiers nains (…)
E. Fromentin, Un été dans le Sahara, p. 257.
14 (…) sur une zone claire du couchant (…) se profile en vigueur la dentelure d'un vieux château demi-fantastique, hérissée de toits en éteignoir, d'aiguilles, de cheminées et de clochetons bulbeux (…)
Th. Gautier, Souvenirs de théâtre…, Dessins de Victor Hugo.
4 Sujet n. de personne; compl. n. de chose (notamment, productions langagières). Garnir, remplir de choses rébarbatives, choquantes, désagréables, difficiles. || Hérisser de difficultés (une question de concours, une dictée). || Hérisser sa prose d'adverbes, de mots savants et rébarbatifs, de barbarismes, de termes régionaux (→ Glossaire, cit.), de citations (cit. 7). Embarrasser, surcharger, truffer. || Hérisser sa conversation de pointes, de piques (→ 1. Gaillard, cit. 11).
15 La prose la reçut (la pointe) aussi bien que les vers;
L'avocat au palais en hérissa son style.
Boileau, l'Art poétique, II.
Au p. p. Parsemé de difficultés, de choses déplaisantes. || Une dictée hérissée de pièges.
16 Je dus, le cœur plein, soutenir une conversation hérissée de difficultés, où mes sincères réponses sur la politique alors suivie par le roi heurtèrent les idées du comte (…)
Balzac, le Lys dans la vallée, Pl., t. VIII, p. 917.
17 Le français, au contraire, appuyé sur les consonnes sans en être hérissé, adouci par les voyelles sans en être affadi, est composé de telle sorte que toutes les langues humaines peuvent l'admettre.
Hugo, Post-Scriptum de ma vie, Tas de pierres, III.
18 (…) ces dissertations d'érudits, hérissées de passages chaldéens, syriaques, hébreux ou chinois (…)
Th. Gautier, Souvenirs de théâtre…, Hist. de la marine, I.
Vx. (Personnes). Qui affiche de manière abrupte et méprisante son érudition en matière de. || Un pédant hérissé de grec, de latin (→ 1. Barbe, cit. 22).
19 Tout hérissé de grec, tout bouffi d'arrogance (…)
Boileau, Satires, IV.
20 Son précepteur, qui était un homme hérissé de latin, citait des passages de Virgile et d'Horace.
A. R. Lesage, le Bachelier de Salamanque, 46, in Littré.
5 (XIXe). Sujet n. de chose; compl. n. de personne. Disposer défavorablement (qqn) en lui inspirant de la colère, de l'irritation, de la défiance, de l'aversion. Horripiler, indisposer, irriter; → Mettre en boule. || Cela me hérisse (→ Flatter, cit. 41).
21 Quelque méchanceté, dame ! il faut qu'on l'avoue,
Te hérisse à son tour — et certes je t'en loue (…)
Verlaine, Élégies, I.
———
II V. intr. (V. 1140).
1 Devenir hérissé (→ ci-dessous, Se hérisser). || La peur fit hérisser ses poils, son épiderme (cit. 2).
22 Je sens venir l'hiver, de qui la froide haleine
D'une tremblante horreur fait hérisser ma peau.
du Bellay, Regrets, IX.
Vx. || Les cheveux lui hérissent de peur (Académie).
2 (1585, Garnier). Vx. Se garnir de choses pointues.
——————
se hérisser v. pron.
ÉTYM. (V. 1160).
1 Le sujet désigne les poils, les plumes… Se dresser. || Crins (cit. 1) qui se hérissent. || Ses cheveux se hérissaient (→ Grincer, cit. 2). || Tous ses poils se hérissent d'effroi (→ Abominable, cit. 1).
23 Ses cheveux se hérissaient au seul nom de Port-Royal.
Racine, Port-Royal.
Par ext. Dresser son poil, ses plumes. || Ce coq est furieux, il se hérisse (Littré). || Animal qui se hérisse de colère.
24 Dans le danger, le porc-épic se hérisse, le scarabée fait le mort (…)
Hugo, les Misérables, V, IX, IV.
2 (Fin XIIe, « se révolter »). Fig. Sujet n. de personne. Se mettre sur la défensive, manifester son opposition, sa colère. Fâcher (se), irriter (s'); → Se mettre en boule. || À cette proposition, il se hérissa. Raidir (se).
25 (…) Chamillart en parla (du mariage de son fils) à Mme de Maintenon, qui d'abord se hérissa, et qui en éloigna le Roi.
Saint-Simon, Mémoires, II, LVII.
26 Ils sont si prodigieusement excessifs que je ne puis m'empêcher de me hérisser un peu et de réclamer en faveur de l'humanité, dont je ne suis cependant pas éperdument épris.
Th. Gautier, Souvenirs de théâtre…, Hist. de la marine, I.
27 Lamartine se hérissait devant La Fontaine, découvrant dans ses Fables les plus pernicieux conseils.
Gide, Attendu que…, I.
28 Mais les vieux bourgeois de Paris se hérissaient devant cette invasion de mœurs espagnoles et italiennes.
Louis Bertrand, Louis XIV, II, II.
Vieilli. || Se hérisser de… → Armer, cit. 16.
3 Le sujet désigne une chose aiguë, pointue. Se dresser. || Crêtes (cit. 6), pics qui se hérissent à l'horizon. || Flèches, tours, clochers qui se hérissent (→ Forêt, cit. 5).
29 (…) des chardons de six à sept pieds de haut se hérissaient sur les bords de la route comme des hallebardes de soldats invisibles.
Th. Gautier, Voyage en Espagne, p. 141.
30 (…) l'aloès et le cactus se hérissaient parmi les broussailles (…)
Nerval, Fragments de la Bohème galante.
31 Au sommet de la colline, à droite, au-dessus d'un fourmillement de pins, se hérissait un ensemble de murs blancs, vaguement oriental, faisant penser à une pièce de pâtisserie.
Edmond Jaloux, les Visiteurs, I.
(1558). || Se hérisser de… : être garni, muni, entouré de (pointes…). || Surface qui se hérisse de saillies, de pointes, de clous, d'aspérités (→ Coquille, cit. 4). || Champs qui se hérissent de plantes épineuses.
32 (…) les baïonnettes, dont le premier rang se hérissait, faisaient, d'un coup de parade, sauter les sabres des assaillants (…)
Louis Madelin, Hist. du Consulat et de l'Empire, Ascension de Bonaparte, XVI.
——————
hérissé, ée adj. et n.
(Pour le p. p., → ci-dessus [supra cit. 5] Hérissé de…, et cit. 5, 10 à 13, et 16 à 20).
1 En parlant des poils, des cheveux, des plumes. Dressé. Ébouriffé, échevelé, hirsute, raide. || Poils, cheveux hérissés. || Plumes hérissées. || Barbe, moustache hérissée (→ Fâcher, cit. 13). || Chevelure hérissée, hérissée en brosse.
33 (Calchas) L'œil farouche, l'air sombre, et le poil hérissé (…)
Racine, Iphigénie, V, 6.
34 De son visage (…) on n'apercevait que le haut des joues d'une pâleur ardente, deux pointes de moustaches hérissées et des yeux couleur de charbon en feu.
E. Fromentin, Une année dans le Sahel, p. 284.
2 (Fin XIIe). || Cactus hérissé. Épineux. Bot. || Tige hérissée. Hispide. || Épi hérissé. Barbu.Perche hérissée (→ Avaler, cit. 7).
35 À partir de Carmona, les plantes grasses, les cactus et les aloès (…) reparurent plus hérissés et plus féroces que jamais.
Th. Gautier, Voyage en Espagne, p. 243.
3 Fig. Dont l'aspect est rude. Hargneux, rébarbatif. || Homme, visage hérissé.
36 (…) maintes fois il est rude, hérissé et presque sauvage (…)
Sainte-Beuve, Correspondance, t. II, p. 144.
37 (…) il montre d'abord un visage hérissé et sévère, les yeux froids sous les lunettes d'or (…)
André Suarès, Trois hommes, « Ibsen », VII.
Amour-propre hérissé. Susceptible.
38 Un amour-propre hérissé. Un rien le froissait et il avait peur d'être froissé, et surtout de le montrer; car c'est une faiblesse et il faut se garder de donner prise à l'ennemi.
R. Rolland, l'Âme enchantée, p. 244.
Style hérissé. Déplaisant, raboteux, rude.
39 Vous savez avec quelle fureur on affectait de louer (…) l'Électre de Crébillon (…) ces vers durs et hérissés (…)
Voltaire, Lettre à La Harpe, 2478, 25 mai 1764.
4 N. a N. m. || Hérissé, nom donné à divers poissons.
b N. f. || Hérissée : chenille de la noctuelle.
CONTR. Aplatir, lisser. — Dégarnir. — Adoucir, calmer. — (Du p. p. et de l'adj., sens 1 et 2) Arrondi, lisse, plat. — (De l'adj., sens 3) Aimable, avenant, doux; facile.
DÉR. Hérissement.

Encyclopédie Universelle. 2012.